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mardi 4 janvier 2011

DESESPERONS LA MEDECINE GENERALE


Mon éditorialiste favori du British Medical Journal, Des Spence, tient une chronique qui s'appelle Bad Medicine.
C'est un médecin généraliste écossais qui exerce à Glasgow.
Sa dernière chronique s'appelle Bad medicine: general practice. Elle est décoiffante. Je vous mets le lien mais vous ne lirez rien : il faut être abonné.

En 2004 un plan en mille points (QOF ) - dont je vous ai parlé ici- a été introduit en fanfare chez les médecins généralistes d'Angleterre, du Pays de Galles et d'Ecosse. Cette initiative a été mise en place pour remplacer la pauvre qualité et la pauvre coordination des soins qui était perçue par la Médecine par les Preuves (Evidence Based Medicine) - ici- faisant passer la recherche de la théorie à la pratique. C'était coûteux (un milliard de livres) mais l'amélioration de la santé serait rapide et bénéfique. Est-ce que cela a marché ? demande Des Spence.
Si nous nous sommes félicités du fait que les critères de substitution comme l'HbA1C, la Pression artérielle et le cholestérol aient baissé dans les dossiers en revanche les véritables critères de morbi-mortalité ne se sont pas modifiés pour autant : nombre d'AVC, nombre d'événements cardiovasculaires, nombre d'arrêts du tabac. Durant cette période le nombre d'admissions aux urgences est devenu ingérable... La seule conclusion : l'hypothèse de départ était fausse. Mais, surtout, insiste Spence, le gaspillage d'argent n'a pas profité à d'autres secteurs de la santé. Il dit ainsi : la relation médecin malade a été corrompue car la qualité des soins n'est pas liée à l'algèbre mais à l'attitude.
Il ajoute : les domaines qui ont été choisis comme les maladies cardiovasculaires, le diabète, la santé mentale et les affections respiratoires sont dominées par les médicaments. Depuis le début du contrat les prescriptions ont globalement augmenté : 40 % de plus dans le diabète (240 millions d'euro en plus) ; + 90 % pour les inhibiteurs de l'angiotensine 2 (+ 68 millions de livres) ; tiotropium : + 100 % (+ 30 M livres) ; ezetimibe (+ 400 %, + 15 M livres). La prescription des statines a doublé bien que l'on sache leur inefficacité en prévention primaire.
Et enfin : les MG sont payés pour suivre l'insuffisance rénale chronique qui est un facteur de risque cardiovasculaire non modifiable. Ils reçoivent six fois plus d'argent pour cette activité que pour les soins palliatifs. Il en conclut : les médecins devraient-ils seulement intervenir parce qu'on les paie ?

Il est clair que la situation en Ecosse est différente de celle de la France.
Que les partisans du CAPI peuvent prétendre que les objectifs retenus sont, en théorie, plutôt déflationnistes (prescrire des produits génériqués par exemple dans l'HTA ou dans les dyslipidémies) qu'inflationnistes sur le plan des coûts. Mais les adversaires du CAPI pourraient tout autant souligner que prescrire des statines génériquées à des patients qui n'ont pas besoin de statines est quand même qualitativement douteux. Les adversaires du CAPI pourraient dire que mettre l'accent sur la mesure de l'HbA1C (3 à 4 fois par an et sans preuves d'efficacité) revient à privilégier l'intensification du traitement médicamenteux et à l'aide de nouvelles molécules non éprouvées, beaucoup plus chères, potentiellement plus dangereuses (cf. les glitazones) et sans garantie sur la morbi-mortalité.
Cela dit, cet éditorial souligne à mon avis qu'il est toujours sentimentalement facile d'engager des plans pour améliorer la santé mais qu'il faut juger cela à l'aune des résultats obtenus. Et qu'il faut se donner les moyens de pouvoir les juger. Plus important encore, avant de juger des résultats, il est nécessaire de faire des études d'impact afin de savoir à partir de quel niveau d'effort, à partir de quel niveau financier (et à quel prix car il ne sera pas possible de tout faire en d'autres domaines), les lignes sont susceptibles de bouger.
Dans le diabète, par exemple, les campagnes de Santé Publique sont manifestement des échecs : la junk food pour enfants ne cesse de se développer et les industriels sont soutenus par des lobbies politiques puissants.
Quand j'étais jeune, en 1968, les gauchistes disaient que les médecins étaient là pour faire marcher le capitalisme en réparant les ouvriers pour qu'ils puissent retourner travailler plus rapidement.
Aujourd'hui je dirais que le rôle dévolu au médecin généraliste, l'éducation diététique de ses patients et le reste de la prévention dans le diabète par exemple, est celui de montrer son incompétence vis à vis du capitalisme McDo et de prescrire beaucoup de médicaments à ses victimes en faisant plaisir à Big Pharma.

dimanche 25 avril 2010

CAPI EN GB (QOF) : 8 CRITERES ENLEVES DONT 5 APPARTENANT AU CAPI !

De nombreux médecins généralistes français bavent devant le système de santé britannique.
Les médecins de gauche parce que le système du paiement à l'acte n'existe plus.
Mais personne ne voudrait être britannique...
Ainsi, l'introduction du CAPI, système de prime à la performance, a-t-elle séduit des médecins dits de gauche car elle semblait introduire une part de forfait dans la rémunération et a-t-elle séduit les médecins de droite parce qu'elle permettait une augmentation des honoraires.
On me dit que ma segmentation des médecins de gauche et des médecins de droite est une connerie. D'abord parce qu'il y a aussi des médecins du centre, des médecins d'extrême-droite et des médecins d'extrême-gauche.
Dont acte.
Et surtout parce que l'argent c'est quand même important, que l'on soit de gauche ou de droite.
Mais on sait ici combien j'apprécie peu le CAPI pour des raisons qui ne tiennent ni à la forfaitisation de l'activité, ni à la prime qui pourrait venir au bout. Ni d'ailleurs au principe lui-même de l'excellence ou de l'amélioration.
Si je suis contre le CAPI, c'est en raison des critères choisis et de la façon de les apprécier. J'ai déjà dit ici et tout le mal que j'en pensais.
Les promoteurs de l'opération se sont, sans nul doute, inspirés du modèle britannique : Quality and Outcomes framework. Pour les curieux nous vous donnons le lien avec le site du NHS sur le système mis en place afin de pouvoir vous faire une idée (en anglais) : ICI.
En anglais parce que les Anglais écrivent dans leur langue. Mais le CAPI n'est pas une bonne traduction en français !

Ainsi, nos amis britanniques, ont-ils enlevé des critères pour la future grille d'évaluation des médecins.

Rappelons auparavant que le QOF comprend quatre domaines (% de participation à l'évaluation) :
  1. Un domaine clinique avec 80 indicateurs recouvrant 19 champs cliniques (65 %) : pathologie coronarienne (10 indicateurs), insuffisance cardiaque (3), AVC et AIT (8), HTA (3)... et vous pourrez vous reporter à la page 8 du document du NHS Information Centre
  2. Un domaine organisationnel avec 36 indicateurs sur cinq aires organisationnelles (16.75 %) : dossiers et informations (12), information des patients (2), éducation et formation (7), organisation pratique (7) et contrôle des médicaments (8)
  3. Un domaine patients comprenant 5 indicateurs (14.65 %) : longueur des consultations, gestion des rendez-vous et surveillance des patients.
  4. Un domaine de services additionnels (3.6 %) : frottis cervical, surveillance de la santé de l'enfant, maternité, contraception.
Et donc, pour l'an prochain, un certain nombre de critères vont être enlevés comme le décrit un article du BMJ car ils paraissent peu discriminants et peu contributifs : mesures de la pression artérielle (insuffisance coronarienne, diabète, AVC ou AIT), prises de sang pour mesurer l'HbA1C (diabète), cholestérolémie totale (diabète) ou créatininémie (diabète, patients traités par lithium), fonction thyroïdienne (patients traités par lithium, hypothyroïdisme). Et lisez ceci : c'est parce que la récompense concernait plus l'action de pratiquer tel ou tel geste plutôt que de proposer une réponse clinique à des résultats ou à des indicateurs intermédiaires comme la pression artérielle ou le taux de cholestérol... Cela ne vous rappelle pas quelque chose ?
Néanmoins des facteurs intermédiaires seront maintenus en ces domaines comme par exemple la proportion de patients dont la pression artérielle sera inférieure à 145 / 85 dans les quinze mois précédents chez les diabétiques...

On voit donc le retard de notre CAPI et le fait que les décideurs restent de marbre en constatant les "erreurs" étrangères qu'ils nous proposent de copier.

Le meilleur système de santé du monde est à la traîne...