lundi 31 janvier 2011

LECONS DE H1N1 : ET SI UNE IMMUNISATION PARTIELLE POUVAIT ETRE CONTRE PRODUCTIVE...


(Je reprends et traduis les commentaires faits dans La revue Inside Vaccines à propos d'un article que j'ai pu lire dans la revue Nature )
L'article : Monsalvo, A.C., et al, Severe pandemic 2009 H1N1 influenza disease due to pathogenic immune complexes. Nature Medicine (2010)
Voici les commentaires :

L'essai : a) comprenait des malades hospitalisés en 2009 en Argentine pour grippe H1N1, des malades témoins hospitalisés sans grippe H1N1, et étudiait des tissus pulmonaires de patients décédés de la grippe en 1957 ; b) tentait de comprendre pourquoi la grippe H1N1 de 2009 avait touché une faible partie d'adultes d'âge moyen et pas les plus jeunes et les plus âgés, contrairement aux modèles typiques de la grippe et étudiait une série de marqueurs immunitaires parmi des patients ayant présenté différentes sévérités de grippes.

Les résultats fondamentaux :
  1. La charge virale du H1N1 2009 était plus faible que celle constatée dans les épidémies saisonnières antérieures. Ce résultat était cohérent parmi tous les patients atteints même dans les formes les plus sévères. La pandémie H1N1 2009 fut effectivement moins sévère et moins dangereuse que que les épidémies saisonnières antérieures.
  2. Les personnes âgées avaient un haut niveau d'anticorps protecteurs contre H1N1 2009 qu'ils avaient acquis lors d'expositions à des virus identiques dans le passé.
  3. Dans les cas les plus sévères (adultes d'âge moyen) il existait de forts taux d'anticorps non protecteurs contre H1 (une faible avidité antigénique incapable de neutraliser les antigènes). En revanche les patients d'âge moyen avaient des anticorps à forte avidité pour H1 1999. Une exposition antérieure à une maladie identique (ou à un vaccin) a entraîné la formation d'anticorps se fixant sur les antigènes mais incapables de les neutraliser.
  4. Les cas les plus sévères avaient de hautes concentrations de marqueurs de la maladie des complexes immuns : le système immunitaire s'attaque aux complexes immuns (AC/Ag) dus à la maladie initiale. Dans le cas de H1N1 cette maladie des complexes immuns a conduit aux formes respiratoires les plus sévères, voire à la mort alors que les cas sévères non H1N1 ne présentaient pas ces marqueurs. Les anticorps anti H1N1 non protecteurs ont entraîné la maladie des complexes immuns qui a causé les cas les plus sévères.
  5. Les études sur les tissus pulmonaires de la pandémie H2 1957 ont aussi retrouvé des marqueurs de la maladie des complexes immuns.
CONCLUSION : la maladie des complexes immuns est un candidat sérieux à la survenue de pandémies grippales où, globalement, le virus est léger mais peut entraîner des maladies sévères dans une population atypique comme celle des adultes d'âge moyen.

(Il est à noter que la maladie des complexes immuns avait été à l'origine de l'arrêt des essais du vaccin contre le VRS (virus respiratoire syncitial) dans les années soixante.)

Cette étude n'est pas une preuve définitive.
Il s'agit d'une piste. Sérieuse.
Mais elle invite à se rappeler les opinions toutes faites débitées par les experts pendant la pandémie grippale, experts qui devaient connaître de tels faits mais qui ne pouvaient se permettre de mettre des bâtons dans les roues de la grande machine OMS / Big Pharma lancée à grand frais sur l'autoroute de la connaissance et du bien-être des populations.

Voici les questions, cependant, que l'on doit se poser à la lumière de ces faits :
  1. Est-ce que les études faites sur les vaccins antigrippaux vérifient que les anticorps produits ont une forte avidité ?
  2. Est-ce que les anticorps à faible avidité retrouvés chez les adultes présentant une maladie sévère sont dus au vaccin ou à des expositions précédentes à la grippe ?
  3. Est-il réellement avisé de proposer la vaccination de toute la population au risque de rendre toute la population vulnérable si un virus identique survient et que les anticorps ont une faible avidité ?
Cette étude a le mérite de poser de vraies questions.
Cette étude renforce l'idée que le raisonnement scientifique se doit d'être en première ligne et non les solutions militaires : on vaccine tout le monde et personne ne bouge.
Trouver des solutions sanitaires efficaces fondées sur des approches pragmatiques et ciblées en ciblant les populations à risque est probablement le meilleur moyen de sauver des vies et d'éviter les dégâts collatéraux des initiatives médicales de masse volontiers non nécessaires et pobablement contre productives.

jeudi 27 janvier 2011

INDOLENCE ET ANHEDONISME : UNE SOCIETE IDEALE ?

Francis Bacon (1909 - 1992)

La conscience moderne a décidé ceci : Tu ne souffriras plus.
Cette injonction est moralement inattaquable, éthiquement indispensable et bonsensément évidente.
Il est donc nécessaire que le corps médical et ses associés paramédicaux se mobilisent pour atteindre cet idéal : la Société a une conscience universelle qui s'applique à tous les membres du corps social sans exception, c'est cela la démocratie que tout le monde nous envie.
Cet idéal est bien entendu incontestable : qui oserait s'avancer sur la voie étroite et semée de mauvais sentiments que serait l'ébauche de l'esquisse d'une acceptation de la souffrance physique et morale ?
J'essaierai de m'y risquer.
Par où commencer ?
Il n'est pas contestable que la douleur doit être "traitée" quand il est possible de le faire, c'est à dire la faire disparaître ou l'atténuer.
Il est probable que la France a mis un certain temps à comprendre que les enfants souffraient, que les personnes en fin de vie souffraient et qu'il était possible, sinon souhaitable, de leur prescrire des antalgiques adaptés, dont des opiacés et des morphiniques, malgré le risque théorique et réel de dépendance, ce qui, pour une personne très âgée semble à la fois dérisoire et sans objet. Mais maintenant que le corps médical a compris, ou a fait semblant de comprendre, l'intérêt de la prise en charge de la douleur, il n'est plus possible d'entrer dans un service hospitalier sans qu'un soignant ne vous tende une réglette EVA (échelle visuelle analogique) qui transforme en un clin d'oeil un malade souffrant de douleurs en un chiffre compris entre 0 et 10.
L'indolence physique a un prix. Les antalgiques sont susceptibles d'entraîner des effets indésirables qui peuvent avoir des conséquences néfastes quand ils perturbent la vigilance, des conducteurs ou des personnes âgées (fractures du col du fémur), et aussi quand ils conduisent à l'addiction. Mais ils sont aussi potentiellement responsables de lésions hépatiques ou de dépendance et d'accidents de coprescriptions.
Les antalgiques, pain killers en anglais, sont donc de plus en plus prescrits, sont de plus en plus vendus au dessus du comptoir (c'est à dire sans ordonnance), car personne ne supporte plus de souffrir. Cette attirance pour l'indolence est même devenue un droit : la vie humaine ne doit plus souffrir de souffrances. On en arrive à parler de la disparition de l'autonomie quand le chiffre de l'EVA devient préoccupant.
Il y a donc un marché. Et un marché quasiment infini à l'échelle de la mondialisation. De nouvelles classes de médicaments apparaissent car la douleur prend des masques complexes. Les douleurs neuropathiques sont à la mode, par exemple. Mais les "nouvelles" maladies qu'il faut traiter avec de "nouveaux" médicaments naissent aussi de la baisse des coûts des antalgiques traditionnels, produits anciens tombés dans le domaine public. Traiter une douleur avec de la prégabaline est plus rentable que de la traiter avec du paracétamol. Je ne dis pas que les douleurs neuropathiques... Je dis que la possibilité de traiter toutes les douleurs avec la prégabaline est ouverte.
Un monde sans douleur, voilà le but à atteindre. La douleur, cette ennemie, a permis, outre le développement des centres anti douleurs qui sont, après avoir été la propriété des anesthésistes, devenus celle des psychologues et, désormais, sans vergogne, celle de la pregabaline déjà citée et des stimulateurs externes. Point n'est besoin d'adresser des patients dans ces centres, sinon pour se débarrasser de patients qui ne savent pas ne pas souffrir, car ils en ressortent avec une ordonnance identique.
Un monde sans douleur dans lequel est née la fibromyalgie. J'en ai déjà parlé ici. La fibromyalgie est un cas d'école de la lutte anti douleur car tous les ingrédients de la maladie à la mode sont réunis ; gageons même que telle l'hystérie de Charcot, la fibromyalgie des fibromyalgologues disparaîtra un jour de sa même mort. Les ingrédients : la fabrication de la maladie, les hypothèses étiopathogéniques les plus farfelues comme les plus sérieuses, des débats titanesques et, au bout du compte, des ordonnances à rallonge, "symptomatiques", et des malades qui continuent de souffrir.
Un monde sans douleur et un monde, presque, sans mort. La mort dans la dignité signifie, aussi, mourir sans douleur. Les services de soins palliatifs arrivent ! Les médecins curés, imams ou rabbins sont aux manettes mais pour exercer une sorte de sainteté laïque qui consiste à rendre la fin de vie indolore et acceptable.
Et quand la médecine échoue, c'est ce que disent les partisans de la fin de vie définitive, il faut transformer les médecins en prescripteurs passifs de l'euthanasie. Et les médecins qui émettent des doutes, pas les médecins non laïques, ceux qui refusent d'abréger la vie humaine au nom de la religion, ceux-là sont des anti modernes avérés, non, les médecins qui se demandent pourquoi on fait appel à eux, en fin de vie, pour donner l'extrême-onction scientifique, alors qu'il devrait s'agir d'une affaire privée...
Car la perte d'autonomie, nouvelle notion moderne et non critiquable, la modernité est une notion per se, une notion naturelle qui n'a besoin d'aucune justification morale, conduit elle-aussi à l'euthanasie. A partir du moment où l'individu perd son autonomie il n'est plus "vivable", il ne correspond plus à l'idéal de la vie complète de l'homme (ou de la femme) moderne.
Mais la douleur morale est aussi à combattre. Qu'il s'agisse de la banale anxiété qui peut aller jusqu'à l'anxiété pathologique, qu'il s'agisse des phobies qui empêchent de vivre, qu'il s'agisse de la dépression réactionnelle ou de la bipolarité. L'humanité souffrante n'a plus le droit de souffrir moralement. Chaque "maladie" psychique est étudiée, testée, et pour chacune identifiée un ou des médicaments sont utilisables.
Vous perdez vos clés ? Une cellule psychologique est convoquée. Un enfant tombe d'un toboggan dans une école maternelle le samu psychique est exigé par le parents d'élèves. Votre petite amie vous plaque, il faut un IRS pour vous soulager. Vous avez la phobie des pots de fleurs ? Un autre IRS est à votre disposition. Vous êtes fibromyalgique ? Un antidépresseur qui agit sur le seuil de la douleur peut aussi vous être prescrit. Car le fibromyalgique, s'il souffre, ne veut pas qu'on dise qu'il souffre de sa tête, sa maladie est ORGANIQUE, alors, il prend quand même des antidépresseurs, non pour traiter sa dépression mais pour traiter sa douleur...
Combien de malades sous Prozac sont anhédoniques, c'est à dire incapables de ne plus rien éprouver, ni en bien ni en mal, combien de malades sous antidépresseurs se sentent ailleurs dans cette bulle de bien-être, une bulle de bien-être qu'à cause du Prozac ils ne peuvent même plus apprécier... Ils regrettent la "vraie" vie quand ils pleuraient lors d'un décès de l'un de leur proche, ils regrettent la "vraie" vie quand un sourire les faisait sourire.
Et il n'est pas de jours où des médecins, des associations de malades, ne s'insurgent contre le sous-diagnostic des dépressions, pas un jour où l'on n'entend de braves gens s'insurger contre la souffrance des dépressifs, des anxieux, des phobiques, ne parlons pas des schizophrènes et autres psychotiques : la maladie mentale est négligée en France.
Un monde sans douleurs, un monde où les gens ne souffrent pas, ne souffrent plus, ne souffriront pas, un monde dans lequel l'humanité non souffrante ne s'acceptera plus en tant qu'humanité mais en tant qu'humanoïdes froids et aneuronaux.
Et ainsi, dans ce monde si bien décrit par Illich (voir ici), les gens qui oseront dire le contraire seront, encore, traités de réactionnaires, de partisans du vieux monde, de vieillards lubriques répétant à l'envi "Tu accoucheras dans la douleur."
Souffrons donc de ne pas participer à l'enthousiasme général, au combat contre l'algie, sorte de divinité maléfique, cessons de nous rappeler notre spleen, cessons de le vivre notre spleen, arrêtons de chanter le blues, d'écouter le blues, de nous complaire dans la mélancolie, soyons positifs, beaux, forts et compétents, voire compétitifs, soyons malheureux de devoir être heureux, des hommes sans douleurs et sans passions.

mardi 25 janvier 2011

OCNI : OBJETS CUTANES NON IDENTIFIES

Saint-Louis guérissant les écrouelles

La médecine générale est bonne et mauvaise fille. Bonne fille car elle nous permet de nous confronter à des situations nouvelles qui devraient rendre notre ennui et notre lassitude inopérants, mauvaise fille car elle nous renvoie à une ignorance liée à l'immensité du champ des connaissances qui peut conduire à la culpabilité d'avoir été ignorant.
Les lésions cutanées sont un cas fréquent de doute en médecine générale.
Le premier médecin que j'avais remplacé (en 1979) m'avait dit : La dermatologie, c'est facile, les lésions sont soit traitables par la cortisone, soit traitables par les anti mycosiques, soit par la biopsie.
Il exagérait, bien entendu. Mais, avec un peu d'expérience, quelques échecs cuisants et quelques succès faciles, je peux affirmer qu'il avait raison.
Cela dit, les OCNI sont générateurs de prises de tête embarrassantes en consultation de médecine générale.
Les dermatologues, qui exercent une spécialité qu'ils disent compliquée, ont tendance à penser que la peau est le miroir du corps mais c'est un miroir qui se nourrit d'examens de laboratoire dont nous manquons cruellement, pour la plupart, durant la consultation de médecine générale.
Je vous propose, et même à ceux qui ne croient pas aux soucoupes volantes, cet exercice de dermatologie qui a le mérite, lui aussi, comme tous les albums d'images, de nous renvoyer à notre quotidien, c'est à dire à notre innocence (corticoïdes versus anti mycosiques) et à notre ignorance supposée (tous moyens d'investigation égaux par ailleurs).
Je pense, mais j'imagine que je serai critiqué par nos amis dermatologues, que la dermatologie, malgré la présence des OCNI, n'a rien à faire en ville et qu'elle devrait se replier vers l'hôpital où elle rendrait des services significatifs.
Pour tester vos connaissances, c'est ICI.

samedi 22 janvier 2011

UNE AFFECTION VIRALE - HISTOIRE DE CONSULTATION 63

Paul Klee - Tête d'homme (sur le point de devenir sénile) - 1922

Les medias n'en ont pas fini avec la grippe. N'ayant rien appris de la calamiteuse campagne pandémique de l'année dernière ils continuent de diffuser des nouvelles alarmistes et à prôner l'épidémie. On apprend même que la période de vaccination remboursée est étendue jusqu'au mois de février : Big Pharma n'aurait pas fait son chiffre ?

C'est dans cette ambiance que la petite A, trois ans, 16 kilos, est amenée en ce lundi soir par sa maman pour une fièvre persistante (38° le matin et volontiers 39°5 le soir) après qu'elle a vu vendredi son pédiââtre qui a conclu à une grippe. Le pédiatre a prescrit une désinfection rhinopharyngée et une association paracetamol / ibuprofène.
J'examine la petite, floride, et ne retrouve rien de particulier. Voici ce que j'écris dans le carnet de santé et dans le dossier électronique :"Syndrome grippal like sans signes de localisation. Pharyngite a minima, tympans rosés en périphérie, nuque et ventre souples, auscultation pulmonaire sans particularité, pas d'éruption. Traitement non modifié. Prévoir un ecbu et une radio pulmonaire en cas de fièvre prolongée." Je demande à la maman de m'appeler le lendemain.
Appel de la maman le mercredi après-midi : Plus de fièvre le matin mais 38°9 le soir. Je conseille au téléphone de faire l'ecbu et les radiographies pulmonaires que j'avais déjà prescrits.
Rendez-vous est pris le lendemain avec mon associée (je suis absent le jeudi) pour rapporter les radios car "Il y a quelque chose...". Résultat de consultation : "Syndrome grippal confirmé." Les radiographies montraient selon le compte rendu : "Majoration de la trame broncho-interstitielle en faveur d'une broncho-pneumopathie..." Par oral la maman de la petite A a appris que le culot urinaire était normal.
Vendredi. La maman m'appelle vers 17 heures. Sa fille a toujours 38°5. Le laboratoire lui a téléphoné pour lui dire qu'il y avait quelque chose. Je m'étonne : "Je croyais que le culot était normal. - Il y a dû avoir une erreur." Le fax prévu n'arrive pas, je téléphone au labo. Escherichia coli sensible à tout."
Je vous passe les détails du reste.
Je vous laisse faire les commentaires.
La pratique de la médecine générale est étonnante.

mercredi 19 janvier 2011

MAXIME GREMETZ PORTE PLAINTE CONTRE SERVIER

Maxime Gremetz, que l'on appelait jadis Minime au PCF, en raison de sa grande intelligence, mais c'est une époque révolue que celle où, ne connaissant d'autre langue étrangère que le français et croyant que le Mur de Berlin avait été construit par les forces du grand Capital pour empêcher les Allemands de l'Ouestde passer à l'Est, a pris du Mediator pendant au minimum quinze ans selon une dépêche de l'AFP (ici) certainement parce qu' il représentait le Parti dans tous les pays "frères" et notamment en Corée du Nord, les grands démocrates amis de nos communistes nationaux !

On se perd en conjectures.

On se demande d'abord comment un homme aussi calme et connu pour sa parfaite retenue a pu résister au poids des effets indésirables des amphétamines et on s'étonne ensuite qu'une addiction de quinze ans n'ait pas plus entamé sa pondération légendaire et son sens inaltérable des nuances.
On se demande aussi comment un homme aussi au courant de l'influence délétère de Big Pharma sur la Santé Publique française a pu manger du Servier et croire qu'il pourrait en maigrir ou faire baisser son hémoglobine glyquée (nous ne savons pas en l'état actuel de l'enquête, nos sources politico-judiciaires n'ont pas encore décidé de se manifester, s'il s'agissait de prescriptions inutiles in AMM ou de prescriptions antisociales hors AMM) .
On se demande comment un médecin, à moins qu'il n'ait été un anticommuniste primaire de la pire espèce ou un trotskiste de la première mouture (quand les amis de Maxime Gremetz les appelaient de façon charmante les hitléro-trotskistes), a pu lui prescrire un médicament susceptible de détruire d'aussi solides valves cardiaques prolétariennes anticapitalistes capables à n'en pas douter de venir à bout des flots sanguins les plus réactionnaires et ici servieristes.
On se demande comment Maxime Gremetz a pu se faire prescrire du Mediator par un médecin qui ne connaissait même pas l'existence de la revue Prescrire.
On se demande aussi pourquoi le député de la Somme n'a pas ajouté sa plainte à celle des autres victimes : ses valves auraient-elles des pouvoirs spéciaux ?
Le mediator de Monsieur Servier, contrairement à Monsieur Servier, ne fait pas de politique : il est aussi adoubé par les responsables communistes. La lutte des classes n'est plus ce qu'elle était.
Tout comme Madame Bachelot avait été adoptée par Jean-Luc Mélenchon mais pas par le Parti de Gauche tout entier (on pense au sénateur Autain) au moment de la grande campagne prolétarienne de vaccination contre la pandémie de grippe A/H1N1v initiée par Margaret Chan, camarade citoyenne de la grande République Populaire de Chine, et mise en oeuvre dans les fameux vaccinodromes dont l'importance de l'enveloppe budgétaire a permis de supprimer de nombreux emplois intérimaires en 2010 dans nombre d'administrations.
Décidément, l'AFSSAPS était non seulement aux mains du Grand Capital mais elle avait aussi pour mission de rendre malades les opposants au Grand Capital. John Le Carré en aurait fait ses choux blancs : Margaret Chan dans le rôle de Karla et le professeur Gentilini dans celui de Smiley...
On espère que le médecin traitant de Monsieur Gremetz n'a écouté que son coeur tout en l'auscultant ou a prescrit une échocardiographie qu'il ira faire dans un dispensaire de proximité (de l'Assemblée Nationale) afin d'éliminer toute atteinte valvulaire susceptible de l'empêcher de se faire amnistier par Jacques Chirac dans une sombre affaire d'accident de voiture (dû à une rupture de cordage ?).

Longue vie au camarade Gremetz et honte au ci-devant Servier qui n'a mis au point (si l'on ose dire) le Mediator que pour nuire au Parti Communiste Français.

(J'apprends en dernière minute que le grand philogyne et misophile Michel Charasse a également pris du Mediator pendant des années : la patrie est en danger !).

lundi 17 janvier 2011

MEDIATOR : COMPLEMENT D'ENQUETE (SUITE ET PAS FIN)


L'affaire Mediator dont je vous ai déjà parlé ici le 14 octobre dernier est pleine de rebondissements.
La parution du rapport de l'IGAS que vous pourrez lire ici, et avec ses annexes si le coeur vous en dit, éclaire une partie du problème : celui de l'AFSSAPS et celui des laboratoires Servier.

Les politiques ne peuvent laisser tomber l'affaire, notamment Xavier Bertrand dans la majorité, à la fois juge (maintenant) et partie (quand il était Ministre de la Santé) et le cardiologue Gérard Bapt dans l'opposition qui va mener une enquête parlementaire.

Un certain nombre de médias ont analysé l'affaire et j'en retiens deux : Mediapart et Marianne dont je vous livre deux commentaires très documentés, le premier et le second, qui montrent que les journalistes peuvent faire du bon travail... quand ils enquêtent...

Mais le résumé (très long) de l'affaire par Marc Girard est un modèle du genre. Il retrace les arcanes de l'affaire avec une précision exemplaire. Il répond à nombre de questions que personne n'a encore évoquées, il lève l'équivoque sur le rôle de Lucien Abenhaim, et cetera, et cetera.
Voici le résumé des questions que pose Marc Girard et auxquelles il répond :

Pour l’essentiel, ces mensonges et contre-vérités sont les suivants :

  1. les effets cardio-pulmonaires des fenfluramines relèveraient d’une toxicité de classe désormais bien connue qui toucherait les anorexigènes amphétaminiques ;
  2. grâce à l’étude IPPHS dirigée par L. Abenhaim, ces effets toxiques auraient été reconnus "sans ambiguïté" ;
  3. cette étude aurait permis aux autorités françaises de prendre "immédiatement" les mesures de santé publique qui s’imposaient ;
  4. l’impeccable réactivité des autorités françaises s’opposerait à l’incurie des Américains qui auraient autorisé la dexfenfluramine malgré les résultats défavorables de l’étude IPPHS ;
  5. la base de données de la CNAM d’où sont sorties les récentes "études" ayant permis de confirmer et de quantifier la toxicité de Médiator correspondrait à une innovation remarquable qui bouleverserait les méthodes de travail habituelles en pharmaco-épidémiologie ;
  6. la courageuse obstination d’un pneumologue brestois à permis de contrer les intérêts de Servier et de faire retirer Médiator du marché français.

Puis, si vous souhaitez, une fois n'est pas coutume, voir de l'information grand public de qualité satisfaisante, mais située dans un champ particulier de l'affaire, voir la vidéo de TF1 qui est d'une grande clarté (merci à Alain Braillon de me l'avoir transmise) : ICI.

Tout cela ne serait rien sans la responsabilité des prescripteurs qui, sans vouloir rendre leur culpabilité moins importante, et il y a eu des prescripteurs "honnêtes" et d'autres, obésologues et autres "spécialistes" du surpoids plutôt filous (on espère, non, je ne ris pas, que notre Roselyne Glaxo nationale n'ait pas pris et mediator et isoméride à s'en faire péter les valves...), prescripteurs donc qui ont été bombardés d'informations contradictoires et d'alertes plus ou moins cachées, plus ou moins fondées et, surtout, en bons médecins non spécialistes de la pharmacologie clinique et encore moins de la pharmacovigilance, se sont fiés aux Agences et aux Autorités qui ne retiraient pas le médicament du marché. Car, il faut le dire, au delà des polémiques, l'AFSSAPS a détruit pour longtemps la parole publique en termes de médicaments, elle a taché pour longtemps le rôle de service public auquel elle aurait dû se cantonner en ne prenant pas la défense des patients (les obèses ne sont pas encore malades, me semble-t-il) et en se réfugiant derrière l'intérêt des firmes françaises (pour sauver des emplois dans les circonscriptions sensibles).

J'espère que les lecteurs de ce blog se rappelleront ce que nous disions au moment de la "pandémie grippale" de l'an passé et combien les rapports rassurants de l'AFSSAPS et de l'INVS et les propos lénifiants de la DGS paraissent maintenant inquiétants eu égard ce qui n'a pas été fait pour le Mediator.



samedi 15 janvier 2011

UNE CONSULTATION DUBITATIVE - HISTOIRES DE CONSULTATIONS 62

L'IGAS indique que le Benalor n'aurait jamais dû obtenir d'AMM

Madame A, 63 ans, d'origine tunisienne, a de violentes douleurs abdominales. Elle est allée aux urgences hier matin sur mes conseils (je lui avais remis une lettre tapuscrite) et elle a pris rendez-vous ce matin car cela ne va pas mieux. Je ne sais pas ce qu'elle a. Elle a une mine qui me fait peur. Je l'examine et, pas plus que moi hier matin ou que les urgences hier après-midi, je n'arrive à trouver ce qui pourrait expliquer ce qui cloche. Je suis très ennuyé car, un samedi matin, c'est le début du week-end. Elle n'a pas l'air de faire une occlusion, pas de colite, pas d'appendicite, pas de perforation, pas de gastro-entérite mais des douleurs abdominales aiguës et des vomissements. Je l'ai palpé sous toutes les coutures, j'ai repris sa température, j'ai recherché quelque chose qui pourrait me mettre sur la voie. Rien !
Pour gagner du temps et pour me permettre de réfléchir, et alors qu'elle est allongée sur la table d'examen, je lui demande des nouvelles de son mari qui est actuellement en Tunisie (Ben Ali a quitté le pays hier et le premier ministre a pris l'intérim de la présidence). "C'est une catastrophe. Je l'ai eu au téléphone hier soir, il m'a dit que les voisins, des gens que nous connaissons depuis longtemps, sont entrés chez nous avec des couteaux. Ils l'ont menacé et ils ont tout pris dans la maison." Je la regarde, étonné. Je n'avais pas entendu cela à la radio. "La police n'est plus nulle part. Il y a des voleurs partout. Mon mari est allé dormir ailleurs. Il a peur qu'ils reviennent... La situation est terrible."
Il faut que je me concentre sur son ventre. Je me récite son dossier et me rappelle son histoire de déficit en protéine S. House en aurait fait ses choux blancs mais cela me laisse sec. Il faut que je sache si je dois ou non la renvoyer aux urgences...
Je me souviens que son mari n'aimait pas beaucoup Ben Ali. Il en parlait avec moi au cabinet. Que pouvais-je dire de plus ? Les Tunisiens, depuis trois ou quatre ans, se "lâchaient" sur le régime alors qu'avant ils ne disaient rien ou ne voulaient pas dire du mal de leur pays devant des étrangers, fût-ce leur médecin traitant. Serait-ce l'anarchie de la période de transition ? les soubresauts de la révolution ? Ou un laisser faire voulu pour rendre l'ancien régime moins dictatorial ? En d'autres occasions, je me serais intéressé au sujet. Aujourd'hui, ce n'est pas le moment.
Pourquoi suis-je si mauvais aujourd'hui ? Je n'arrive pas à me décider. Regardons les choses en face : cette femme a-t-elle besoin de retourner aux urgences ? Je me récite tout ce que je sais sur les douleurs abdominales aiguës, j'ai posé toutes les questions possibles et imaginables. Et je me sens sec. J'ai le compte rendu de l'hôpital devant les yeux, enfin, j'ai le double des examens complémentaires qui ont été demandés et j'ai beau me prendre pour le professeur Even devant le mystère du sida, je suis sans réaction.
Ce n'est pas la première fois que cela m'arrive. Une grande détresse devant les mystères de la médecine. Je me dis, ce n'est pas la première fois, qu'il s'agit d'un métier de chien. Que je m'en veux d'être aussi mauvais. Que je m'en veux d'être aussi peu diagnosticien. Ou hésitant. L'échographie d'hier était non contributive. La prise de sang itou.
Cette femme ne va pas bien. Je la connais depuis longtemps et je ne lui ai jamais vu une tête pareille.
Sa fille débarque pendant la consultation.
"Alors, docteur. Qu'est-ce que vous en pensez ?
- Je ne sais pas ce qu'elle a.
- Elle a encore passé une nuit atroce. J'étais à côté d'elle. Nous n'avons pas dormi.
- Je vois."
Je ne vois rien. je pose encore deux ou trois questions et je ressens l'angoisse de ces deux femmes. Une angoisse qui peut très bien n'être que le reflet de la mienne. Je dois agir.
Je me décide, par lassitude probablement, par la renvoyer aux urgences. Je me fends d'un courrier qui commence ainsi "Je vous réadresse Madame A, 63 ans, que vous avez vue hier. Je n'ai rien de très neuf mais je sens qu'elle ne va pas bien et je ne voudrais pas passer à côté d'une ischémie..."
"Je suis obligé", je dis comme pour m'excuser, "de la renvoyer à l'hôpital..." Je regarde la fille qui pousse un soupir de soulagement. "Nous l'espérions toutes les deux... Nous sommes déjà tellement inquiètes pour mon père. Cela va mal en Tunisie. C'est allé trop vite..."
Je les raccompagne et je vais chercher mon rendez-vous suivant. Avec soulagement. En espérant qu'il s'agira d'une grippe ou du suivi d'une hypertension artérielle...
Un métier de chien, je vous dis.