jeudi 19 juillet 2018

La médecine m'inquiète : microf(r)ictions (87)

Jérôme Cahuzac fait des TIG comme médecin généraliste


Trois billets de blogs (écrits pas des médecins généralistes) sont parus récemment et leur pertinence illustre de façon saisissante l'état de la médecine en ce moment.

Le lien d'intérêt est évident : je suis médecin généraliste.


Ces billets de blog sont courts. Percutants.



Commençons par le cas clinique rapporté par Hippocrate et Pindare (H et P) (LA) : un patient diabétique est suivi par un endocrinologue qui est également son médecin traitant. Quand il commence à souffrir de (fortes) douleurs articulaires, le médecin traitant endocrinologue l'adresse à un rhumatologue et, semble-t-il, sans tenter de soulager ses douleurs afin de ne pas perturber le diagnostic (qui aura lieu dans quelques semaines en raison des difficultés pour obtenir un rendez-vous).


H et P tente de trouver des raisons à cet état de fait : mépris du médecin généraliste, mépris de la médecine générale, incompétence médicale de l'endocrinologue pour soulager un patient en dehors de sa spécialité, mais aussi incompétence du patient par rapport au parcours de soins.

Mon interprétation est la suivante : les spécialistes d'organes exerçant en ville sont des refoulés de l'hôpital dans deux acceptions : refoulés physiquement par manque de postes et refoulés psychologiquement par regret de ne plus faire partie de l'alma mater.

Cette interprétation est tendancieuse : en réalité, l'enseignement académique de la médecine et l'organisation hospitalière de la médecine, ne reconnaissent pas la médecine générale qui arrive comme une verrue en fin d'études sur le visage lisse et élégant de l'académisme hospitalier.

Quand un patient hospitalisé en CHU dans un service d'endocrinologie ou de médecine interne/endocrinologie fait un pet de travers, on appelle le gastro-entérologue. Sans doute pour qu'il n'y ait pas de perte de chance (on rit !). Il arrive même qu'un patient endocrinien guéri reste quelques jours de plus hospitalisé dans l'attente de l'avis spécialisé sur ce pet de travers.

Ce modèle est reproduit en ville (Note 1).

Dans le cas clinique rapporté par H et P l'erreur (administrative et théorique) fondamentale tient au fait qu'un spécialiste d'organe puisse être médecin traitant (on me dit qu'il s'agissait à l'origine d'une demande syndicale). La deuxième erreur tient au fait qu'un spécialiste d'organe puisse penser qu'il peut être médecin traitant, c'est à dire répondre à des demandes de soins qui sortent de sa spécialité. La troisième erreur tient au fait qu'un patient puise penser qu'il peut se passer d'un médecin traitant.

Mais surtout : la transposition de l'organisation hospitalière vers la ville passe par le culte du diagnostic.

Et encore : ce n'est absolument pas une critique à l'égard des spécialistes d'organe, non non non (un médecin généraliste sait combien l'avis des spécialistes est fondamental dans sa pratique) (Note 2).

Note 1 : Et je ne parle pas de l'hospitalisation non publique où le cabotage (i.e. le "à toi à moi" entre spécialistes d'organes n'est pas un problème diagnostique mais un souci économique)

Note 2 : On m'a maintes fois reproché de ne pas "aimer" les spécialistes d'organes ou de toujours les critiquer. Précisons ceci : il est normal qu'un cardiologue en sache plus en cardiologie qu'un médecin généraliste (les médecins généralistes universitaires sont en train de me traiter de traître) et itou pour les autres spécialités. En revanche il est anormal que le médecin généraliste se rende compte que le spécialiste ne fasse pas tout à fait le job, soit pour des raisons pécuniaires, soit pour des raisons idéologiques, soit pour les deux à la fois. 

Ce qui nous amène au billet de Bruit des sabots (BdS) (ICI).


Ce billet devrait être lu dans toutes les écoles de médecine avant toute explication théorique. Et relu. Il est parfait.

C'est la part invisible du travail des médecins généralistes qui est rapportée. Grosso modo BdS nous dit ceci : les médecins généralistes gèrent l'incertitude, les soins non programmés, c'est eux ; quand un patient arrive aux urgences, soit de son propre chef, soit adressé par son médecin traitant, c'est la partie émergée de l'iceberg, l'écume de l'activité, celle que l'on met en exergue pour parfois la critiquer.

BdS nous parle donc de la partie immergée invisible, celle que le médecin généraliste gère dans une zone non institutionnalisée, avec les moyens du bord, avec les correspondants amis ou non disponibles. Dans l'urgence ou la semi-urgence, au milieu d'un planning serré.

Quand les médecins généralistes auront disparu, c'est que l'iceberg aura fondu, il n'y aura plus de partie émergée et de partie immergée, le niveau des eaux aura monté et les malades couleront(Note 3).

Note 3 : BdS est le digne continuateur de la pensée de Desmond Spence, généraliste écossais. Qui dit aussi, ce qui peut être paradoxal : "La valeur de la médecine générale ne tient pas à ce qu'elle fait mais à ce qu'elle ne fait pas." Il signifie par là gérer l'incertitude, ne pas demander trop d'examens complémentaires, d'avis spécialisés. Voir LA.



Luc Perino nous dit ICI que la iatrogénicité est l'éléphant dans le couloir des soins. Que nombre de pathologies et/ou de symptômes sont liés à la prescription et que la déprescription est l'avenir de la médecine. C'est le triomphe de la médecine symptomatique qu'il faut remettre en question. C'est le triomphe de la médecine (et de l'industrie pharmaceutique) qu'il faut remettre en question. Il faut donc créer le médecin expert de demain en iatropathogénicité dit-il avec ironie. Créer un expert c'est comme créer une commission, c'est pour enterrer le projet.

Le cadre et l'horizon de la médecine, c'est la société de consommation. Les marketers ont une loi fondamentale : une tâche (ou une tache) un produit. Pour l'industrie pharmaceutique : une maladie, un produit, un symptôme, un produit. Et tout comme les alcooliers tentent de sensibiliser les jeunes enfants au goût de l'alcool ou les junkfooders à celui du sucre, on incite les consommateurs malades (ou non) au zéro douleurs.

On en revient au rôle du médecin généraliste : être fédérateur, informer les spécialistes d'organes, faire des choix, pondérer, arbitrer, disposer de toutes les ordonnances émanant des spécialistes ou non pour en faire une prescription unique.


jeudi 28 juin 2018

La médecine m'inquiète : microf(r)ictions (88)

Lecteur de La Revue Prescrire producteur de pertes de chances pour ses patients.


Je lis ici ou là sur twitter des propos anti La revue Prescrire (ICI).

Ce n'est pas nouveau.

Les lecteurs on eu droit à tout : ayatollahs, intransigeants, sectaires, gauchistes, anti capitalistes et cetera. 

Les tenants de Big Pharma ont toujours considéré que Prescrire était contre l'innovation, la nouveauté, le progrès...

Certains d'entre nous n'ont pas ménagé leurs critiques. Et dans ce blog en particulier (LA), mais aussi chez Dupagne (ICI), Girard (LA) ou Lehmann (ICI).

Mais, sous l'influence de certains activistes payés par Big Pharma et par des naïfs qui veulent ressembler aux précédents, apparaît une nouvelle tendance : lire Prescrire serait une perte de chance pour les patients !

Ces suppôts de la modernité ont oublié de nombreuses affaires dans lesquelles Prescrire avait eu raison avant les autres. 

Les rappellerons-nous ?

Pour ces "progressistes" il ne sert à rien d'avoir raison avant les autres, il suffit d'avoir raison avec tout le monde et d'oublier quand le même Toulemonde avait tort.

La Big Pharma attitude décomplexée est en vogue (voir LA).
Tout comme la Big Matériel attitude (voir ICI).

Je ne vais donc pas rappeler ce que l'on peut reprocher à La Revue Prescrire, non pas que je ne veuille pas désespérer Billancourt (les anciens comprendront), mais parce que je veux rester positif et souligner ce que nous devons à La Revue Prescrire.

Mais oser écrire que lire Prescrire (certains ont modéré leurs propos en disant ne lire que Prescrire, les mêmes qui sont abonnés au Journal de Suzette et qui ne lisent que les bulletins paroissiaux de Big Pharma et de Big Matériel, soit, dans le désordre, Le Quotidien du Médecin et le New England Journal of Medicine) entraîne une perte de chance pour les malades...

La Revue Prescrire a été une formidable opportunité pour les médecins, et surtout les médecins généralistes, pour se sortir de la gangue académico-industrielle, c'est à dire le paternalisme, l'avis d'experts, les études bidonnées, l'argent, et la possibilité de se tourner vers l'Evidence-based-Medicine.

Mais attention : La Revue Prescrire n'est pas une revue d'EBM. Elle y contribue fortement.

Les spécialistes hospitaliers et libéraux sont très critiques, ne s'abonnent pas, ou peu, à la revue et trouvant ici ou là des erreurs, des imprécisions, notamment sur le plan clinique, se gaussent, mais, surtout, ils ne retrouvent pas l'idéologie du progrès qui rend fous les meilleurs d'entre eux.
Mais il est aussi vrai que nombre de spécialistes hospitaliers sont des chercheurs. Que les chercheurs ne trouvent pas toujours et qu'ils sont aussi là pour expérimenter des traitements qui ne sont pas encore validés.

Crédit photographique : Alalam News Network


dimanche 24 juin 2018

La médecine m'inquiète : microf(r)ictions (89).



Sur twitter nous avons l'insigne honneur de pouvoir lire les propos d'un oncologue anonyme et nous sommes contents de pouvoir lui faire de la publicité car il s'agit d'un médecin hors pair, d'un pédagogue accompli, d'un empathique exceptionnel, en bref, d'une pépite que le monde entier nous envie. 

Nous reviendrons plus loin sur les raisons de cet anonymat.


Toujours est-il que cet oncologue distingué, et en remontant son fil twitter anonyme vous comprendrez qu'il est un grrrrrand oncologue, qu'il a une haute idée de lui-même, qu'il est le seul compétent sur la question de l'oncologie et comme il n'a pas de concurrence française sur twitter il ne risque pas grand chose à affirmer des choses que lui seul connaît..

Ce garçon, sans doute PUPH, cumule les qualités inestimables, inestimées et sous-évaluées de l'hospitalo-académisme français traditionnel et de l'expertise à la Française, celle qui fit de la médecine française et dans une période sans doute très courte, entre le deux février 1967 à 7 heures 42 et le trois mars 1968 à 20 heures 13, la meilleure du monde. 

Nous pensions, tels de naïfs citoyens bercés par l'immanence du néo libéralisme économique et culturel, que l'ère de l'expertise absolue, l'ère du paternalisme béat, l'ère de la corruption assumée, s'était dissoute dans la crise de la pseudo pandémie grippale de 2009 (et vous pourrez lire Christian Lehmann ICI ou LA, Marc Girard LA, mais dont le blog comporte au moins une vingtaine de papiers consacrés à ce sujet) ou dans l'affaire Mediator pour laquelle on nous avait promis "Plus jamais cela".

Eh bien non.

La nouvelle génération des experts (mais après tout il n'est peut-être pas aussi jeune que cela) n'a rien appris du passé.

Pour en revenir à notre héros médical qui est aussi un héraut anti FakeMed (voir LA) et un héraut pro Big Pharma (et plus précisément pro Big Onco), la lecture de ses gazouillis est instructive.

Sa doctrine générale est la suivante :

  1. L'oncologie est une science exacte.
  2. L'innovation est le maître mot de la médecine : les produits innovants sont innovants.
  3. L'industrie pharmaceutique est propre, philanthrope mais il est normal qu'elle gagne de l'argent.
  4. Pour être un bon médecin il faut travailler avec l'industrie pharmaceutique (Big Pharma) ou, plutôt, il faut avoir été élu par elle (ce qui, par raisonnement tautologique, rend le médecin excellent)
  5. Le fait de recevoir de l'argent, des compensations, des pots de vin, des invitations à dîner, à voyager, à dormir, n'est pas condamnable à condition a) de les déclarer selon les lois en vigueur, b) que plusieurs laboratoires soient les promoteurs. Cette doctrine que nous avons identifiée à partir des déclarations de foi du virologue Bruno Lina peut être résumée à celle-ci : "Trop de corruption tue la corruption." Je vous renvoie, et je le renvoie, à Célimène dans Le Misanthrope de Molière quand Alceste lui reproche d'avoir trop de soupirants et qu'elle lui répond en substance que le fait d'en avoir beaucoup signifie qu'elle n'en a pas un en particulier, ce qui devrait le rassurer (ICI). Cela ne nous rassure pas.
  6. L'immunothérapie est l'avenir de l'humanité.
  7. Les critères de survie globale (OS in English) et de Qualité de Vie (QoL) sont dépassés en oncologie et doivent être remplacés par le substitut magique qu'est la PFS (Progression free Survival). Rajout : article comparant OS et PFS pour les traitements des cancers par PD-1inhibiteurs (ICI).
  8. Les essais randomisés contrôlés en oncologie sont de vieilles lunes non innovantes et ne méritent qu'un haussement d'épaules (sauf cas particuliers bien entendu) et de citer la métaphore du parachute : on n'a jamais fait d'essais contrôlés parachute vs placebo (voir ICI pour une analyse critique).
  9. Les réunions de concertation pluridisciplinaires (les fameuses RCP) sont un lieu dont doivent être exclues la partie la plus importante (le patient) et la partie négligeable (le médecin traitant). Ce qui renvoie à la conception patriarcale de la décision partagée : le praticien explique au patient après qu'il a pris la décision.
  10. Les Boards pharmaceutiques (cf. Agnès Buzyn) sont des aréopages d'hyper spécialistes où les stratégies médico-pharmaceutiques sont décidées, ainsi que la méthodologie des essais et sont l'Olympe de la recherche (voir aussi les steering committees pour les essais cliniques).
  11. Etre Key Opinion Leader (KOL) est une ambition estimable pour diffuser la bonne parole de l'innovation (un de ses hashtags favori). Nous savons comment on devient KOL par l'intermédiaire de l'expert mongering : voir LA.
  12. Bla bla.

Mais ce qui nous choque le plus chez lui est ceci : 
  1. L'anonymat. L'anonymat est un comportement de voyou (voire plus) mais on peut arguer ceci : certains lanceurs d'alerte ou activistes ne peuvent s'exprimer à visage découvert pour des raisons de sécurité professionnelle ; pour notre héraut il est possible que la perte de son anonymat lui barre une nomination universitaire ou permette qu'on le juge sur ses titres et travaux à l'aune de ses publications (ses non pairs et ses pairs pourraient-ils s'en donner à coeur joie ?) ; mais aussi : insulter sans se montrer est quand même plus facile et un peu couard.
  2. L'arrogance, son arrogance à l'ancienne à l'égard de ceux et celles (et a priori les "celles" sont sa cible favorite pour des raisons que je vous laisse deviner) qui n'ont pas ses titres universitaires, qui n'ont pas travaillé en tant qu'experts sur les questions, qui donc ne peuvent juger de l'activité des spécialistes auto recrutés (il n'est que d'écouter les chroniques santé de DK, oncologue chef de service et, semble-t-il peu apprécié par notre héros, sur Radio Classique).
  3. La fierté de toucher de l'argent (et autres) de Big Pharma (Big Onco) qui va même jusqu'à, il l'écrit avec tant d'innocence, faire des cours aux visiteurs médicaux des firmes qu'il conseille.
  4. La haine qu'il voue à l'oncologie anglo-saxonne et non française en réalité qui ose critiquer les protocoles, les agences gouvernementales (FDA), faire preuve de scepticisme, s'interroger sur elle-même à visage découvert (pas d'anonymat) et... faire des propositions. Vinay Prasad est l'archétype de ce qu'il déteste le plus (ICI) (ma propre naïveté ne va pas jusqu'à penser que Vinay Prasad est un saint, que tout ce qu'il dit est vrai, non critiquable, qu'il n'a pas d'ambitions académiques et/ou financières, bla bla mais nous aimerions tant que cette liberté de ton soit contagieuse et que les débats indispensables sur l'oncologie en France ne se résument pas à des propos de couloir et fassent l'objet d'articles circonstanciés)

On peut cependant le remercier de s'exprimer sur twitter, peu le font, et cela nous permet de connaître la vraie nature de Bernadette.
Qu'il en soit remercié.

PS : On peut donc être un médecin anti FakeMed et ne pas être gêné par les liens/conflits d'intérêts, voire même les revendiquer.


jeudi 21 juin 2018

La médecine m'inquiète : microf(r)ictions (90)



Voici donc ce que prétendent les 124 (ou l'un d'entre eux) à propos de leur mouvement. 

Je rappelle que le régime du concordat existe toujours en Alsace-Moselle.

Faut-il être assez ignorant pour penser que la médecine serait une sorte d'entité hors sol, non construite, bien entendu, pure comme un théorème, sans croyances ?

Nous demandons la séparation de la Médecine et de l'Eglise de Dépistologie.

Expulsion du grand séminaire des idolâtres du dépistage organisé du cancer du sein par mammographie

Légende réelle : Expulsion du grand séminaire de Quimper en 1906 (à la suite de la loi de 1905)


dimanche 17 juin 2018

La médecine m'inquiète : microf(r)ictions (91)

Monsieur Agnès Buzyn et Madame Yves Lévy.

Nos "amis" anglais, nous ne pouvons que nous en méfier.

L'éditorial du Lancet en anglais (ICI) et en français s'il vous plaît (LA), dénonce la propension de la haute administration française à gérer l'entre-soi dans l'opacité. 

La future nomination du successeur d'Yves Lévy à la direction de l'INSERM en est un exemple. Madame Buzyn, et pourquoi ne pas la croire, hein ?, ne sait pas si son mari se représentera car elle dit affirmer ne pas connaître la liste des candidats.

On rêve.

Voici le début du court éditorial.

Le mandat du président directeur général (PDG) de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) prend fin le 12 juin. La présidence de l’actuel PDG, Yves Lévy, a reçu de vives critiques après la nomination de la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, en mai 2017. Lévy est le conjoint de Buzyn, ce qui d’évidence constitue un potentiel conflit d’intérêts pour le directeur d’un institut placé sous la tutelle conjointe des Ministères de la Santé et de la Recherche. Cette situation a été apparemment rectifiée par un décret daté du 29 mai, 2017, déclarant que les actes relatifs à l’INSERM seraient gérés par le Premier ministre français, et non par Buzyn.

Le libéralisme à la française ne s'embarrasse pas de petits arrangements.
La France est de retour vers le futur : celui de la République bananière.


Un article du journal Le Monde : ICI.

Dernière nouvelle : le 31 juillet 2018. Yves Levy retire sa candidature à la tête de l'INSERM. Voir un article du journal Le Monde : LA.

La France ne serait plus une République bananière mais une République de peaux de bananes.

La suite, le 10 octobre 2018 :

Yves Lévy, l'ancien patron de l’ et mari d’Agnès , nommé conseiller d’Etat en service extraordinaire (Conseil des ministres)




Crédit photographique : La ministre de la santé, Agnès Buzyn et son mari, Yves Lévy, le 25 janvier 2018, au 16e dîner de la mode du Sidaction. / Frédéric Dugit/photoPQR/Le Parisien/MaxPPP

dimanche 10 juin 2018

La médecine m'inquiète : microf(r)ictions (92)


L'affaire du Nutriscore refusé par la représentation nationale est emblématique du peu de cas que l'on fait de la santé publique non médicale en France et du peu de cas que les médecins font de ce qui n'est pas strictement médical en santé publique ou, plus précisément, de leur ignorance corporatiste.
La santé publique est bafouée.
Les industriels de la bouffe savent qu'ils vendent de la merdre et, donc, ne veulent pas que l'innocent Nutriscore soit apposé sur leurs produits.
Bien pire : les chaînes de télévision sont montées au créneau en arguant que la baisse de la publicité sur ces produits serait catastrophique pour l'équilibre des comptes.
Quant aux concepteurs de programmes pour enfants ils ont aussi affirmé que la suppression de la publicité pour la nourriture de merdre mettrait en péril leurs activités.
Un courrier de Braillon, Julia et Hercberg dans le BMJ (ICI), concernant l'obésité des enfants, résume bien ce qui se passe en France. La dernière phrase : "French MPs appear more sensitive to the health of media groups than of their citizens. Pity..." Les députés français apparaissent plus sensibles à la santé des groupes de médias qu'à celle de leurs citoyens.

Aurait-on entendu protester notre ministre Agnès Buzyn ? Ou des sociétés savantes médicales ? Ou des syndicats médicaux ?

On attend.

mardi 5 juin 2018

La médecine m'inquiète : microf(r)ictions (93)


Le déremboursement retardé des médicaments prétendument anti Alzheimer illustre à merveille les problèmes soulevés par Cifu et Prasad in : Ending Medical Reverse. Voir ICI et LA.
  1. Sur quelles bases scientifiques les AMM sont-elles accordées.
  2. Pourquoi le suivi des effets indésirables par des essais cliniques post commercialisation n'est jamais fait.
  3. Lorsqu'un essai montre qu'une molécule (ou une procédure) n'est pas efficace : combien de temps faut-il pour revenir en arrière (on savait tout depuis 2008 : ICI) ?
  4. Pourquoi les médecins continuent-ils de prescrire des molécules ou de pratiquer des procédures  dont il a été clairement montré qu'elles étaient inefficaces, dangereuses et/ou d'un mauvais rapport bénéfices/risques ?
  5. Comment faire pour que cela ne se reproduise pas.


L'affaire des anti Alzheimer est exemplaire à de nombreux titres.

  1. Comment des médicaments inefficaces et dangereux ont obtenu une AMM (corruption des instances ou ignorance des experts ?) ?
  2. Comment se fait-ce que la Pharmacovigilance française (celle que tout le monde entier nous envie) n'a rien signalé ou n'a pas été visible ? 
  3. Comment est-il possible que le seul qui ait fait bouger les lignes était un médecin généraliste travaillant presque bénévolement à la HAS (Philippe Nicot) (voir tous les autres MG un peu plus bas) ?
  4. Comment des experts (neurologues, gériatres) ont-ils pu (ICI) (et continuent-ils) (de) défendre l'indéfendable, à savoir l'efficacité et l'innocuité de ces médicaments ?
  5. Comment, à partir d'une maladie (ou plutôt de maladies) a-t-on pu structurer la prise en charge de malades autour de médicaments inefficaces et dangereux ?
  6. Comment une filière a-t-elle été créée de novo à partir de mensonges thérapeutiques ?
  7. Comment les consultations mémoire sont devenues de simples officines de prescription de médicaments. 
  8. Comment une association de patients (France-Alzheimer, voir LA) est-elle devenue officiellement un lobbyiste majeur des laboratoires pharmaceutiques (quasiment une personne morale visiteuse médicale) et a-t-elle pris un tel poids politique ?
  9. Comment illustrer au mieux la stratégie de Knock et/ou le disease mongering : (LA).

Voici ce qu'entre autres je rappelais en 2016 (voir LA) : 

Reprenons les choses dès le début : les médicaments dits anti Alzheimer sont inefficaces (et dangereux). Tout le reste n'est que littérature.

Et il y a longtemps qu'on le sait !

Rappelons d'abord les actions du Formindep qui s'est d'abord attaqué aux liens/conflits d'intérêts des experts de l'HAS dès décembre 2008 (ICI) avec succès puisque les recommandations professionnelles sur la maladie d'Alzheimer datant de 2008 (LA) ont été ensuite retirées. 

Philippe Nicot produit une expertise externe (20 juillet 2011) (LA) qui conduit à revoir à la baisse le remboursement des médicaments anti Alzheimer.
Philippe Nicot écrit en octobre 2010 un article excellent, Anticholinestérasiques : le généraliste peut-il dire non ?,  qui fait la genèse des éléments de preuve indiquant l'inefficacité et la dangerosité des anti Alzheimer en général (ICI).

La Haute Autorité de Santé le disait en 2011, les anti Alzheimer ont peu d'intérêt. Je signale que le lien a disparu.

Louis-Adrien Delarue l'écrivait en 2011 dans sa thèse de médecine : LA et avec mes commentaires (élogieux : ICI) ainsi que ceux de Dominique Dupagne le 18 novembre 2011 (LA).

Marc Girard, le 13 novembre 2011, dénonçait les faux semblants de la réévaluation des anti Alzheimer (LA) et écrivait de façon prophétique : "quand le ministre avait d’emblée annoncé que la réévaluation ne changerait rien au remboursement des médicaments en question [9] ?"

Dominique Dupagne a lui aussi apporté sa contribution sur les conflits d'intérêts des experts à la suite du Formindep le 8 décembre 2009 (ICI) et le 21 septembre 2011 (ICI).

Sans oublier Christian Lehmann que nous avons déjà cité et qui publiait le 21 septembre 2011 un billet définitif : ICI.

Et j'en oublie.


Source du diagramme (par l'intermédiaire de François Pesty) : ICI