lundi 7 novembre 2022

Médecine, comptabilité et groupe de pairs. Histoire de santé publique sans consultation. 11

Oskar Kokoshka (1886-1980) Autoportrait 1937

1.

Je reçois un mail d'un de mes anciens patients, inquiet, après qu'il a reçu le compte-rendu de la coloscopie qu'il a passée pour des douleurs abdominales persistantes, il a cinquante cinq ans, et pour lequel le gastro-entérologue lui a dit qu'il n'y avait rien de grave mais qu'il fallait qu'il consulte un chirurgien.

Je lui renvoie un mail rassurant lui demandant de m'appeler ce soir (et après que j'ai lu le compte rendu de ladite coloscopie).

J'appelle le gastro-entérologue qui me rassure lui-aussi mais je n'ose pas lui dire que le patient s'est fait un sang d'encre (pas de sang dans les selles cependant) entre le moment où il a lu le compte-rendu, le moment où le gastro-entérologue lui a conseillé d'aller consulter un chirurgien et le moment où je lui ai envoyé un mail plutôt rassurant.

Le patient m'appelle.

Nous réglons entre guillemets le problème médical : tout est bénin a priori.

Un seul souci : le chirurgien à qui le gastro-entérologue l'a adressé n'est pas celui à qui je l'aurais adressé (mais je ferme ma goule). 

Je ne m'étends pas sur ce point précis.

Qui pourrait faire l'objet de développements multiples.

Bref.

2.

Personne ne m' jamais demandé ce qui a le plus contribué à améliorer ma pratique de médecin généraliste.

Il est difficile de répondre à cette question car les facteurs d'amélioration ont été multiples (je partais de bas) et ils se sont succédé dans le temps.

Un associé sympa et bon médecin. L'appropriation de médecins spécialistes rehaussant mon niveau de connaissances avec pédagogie et sans mépris. La curiosité. La revue Prescrire. La lecture des livres fondamentaux de la médecine. La Formation médicale continue. La pratique du groupe de pairs. La conversation libre avec des amis médecins partageant les mêmes valeurs médico-sociales. Le twitter médical. La HAS.

3.

Si je vous parle de cela c'est parce que le patient qui m'a adressé un mail, appelons-le Monsieur A, est comptable. Et qu'à une époque où il se posait des questions existentielles sur son métier, sur ses compétences, sur son avenir, sur des possibilités de progression, je lui ai parlé de la pratique des groupes de pairs en médecine (dont par ailleurs j'entends de moins ne moins parler).

Il avait été intéressé, il avait réfléchi et il avait mis au point un système presque identique avec des collègues travaillant à La Défense. Je lui avais conseillé, entre autres, de ne pas en parler à sa hiérarchie.

Il m'avait tenu au courant de ses aventures en groupe et, selon lui, cela avait très bien marché : il avait entendu des propos différents, des idées managériales diverses, des façons de procéder dont il n'avait jamais eu connaissance, et cela lui avait permis de nouer des amitiés solides.

Jusqu'au jour où la hiérarchie en avait eu vent et avait demandé d'y mettre fin. La circulation horizontale des informations ne plaît pas aux chefs (surtout les mauvais).

4.

Pour ma part et il faudra que j'en reparle un jour, l'expérience des groupes de pairs, malgré quelques accrochages, crises d'ego et d'incompréhensions, a été sans doute la chose la plus positive qui me soit arrivée pendant ma pratique de médecin généraliste. Et la plus décisive pour changer des pratiques erronées, non fondées, voire dangereuses ou pour simplement faire de petits pas vers le changement. Mais une des choses les plus étonnantes fut que ces réunions presque informelles m'ont permis de faire des progrès décisifs dans ma relation avec les patients (grâce à la libre expression de mes pairs). C'est que j'ai appris de plus fort pendant ces réunions où les patients étaient absents mais omniprésents.

5. 

Le patient m'a adressé un mail il y a deux jours pour m'informer que tout s'était bien passé.

Il a ajouté ceci, avec malice : "Dans votre groupe de pairs, auriez-vous conseillé ce gastro-entérologue et ce chirurgien ?"

dimanche 6 novembre 2022

Bilan médical du lundi 31 octobre au dimanche 6 novembre 2022 : Oncologie pratique, EBM piétinée, Vallancien, douleur, mortalité covid, covid long, consultation, sismothérapie, bronchiolite...

La médecine à l'estomac

Nous avons cent fois ici dénoncé les médecins qui confondaient l'exercice de la médecine et la pédagogie de la santé publique avec des photoreportages dans Gala, Ici-Paris ou Closer, ces médecins qui se faisaient photographier avant la mort de leurs malades, pendant la mort de leurs malades, après la mort de leurs malades. Avec l'accord de la famille, bien entendu.

1. Un oncologue qui fait envie : Bishal Gyawali




Il publie un article dans HealthyDebate que vous pouvez lire (LA) en anglais. Il rappelle que le comportement du patient atteint de cancer qui disait "Docteur, faites tout ce que vous pensez être bon pour moi" est en train de disparaître lentement. Les patients ont à se battre entre la myriade de choix, allant des possibilités thérapeutiques, des effets indésirables, de la qualité de vie et du pronostic, afin de pouvoir choisir un parcours de soins qui leur convient.

Je résume les 10 points que toute patiente devrait savoir. Je pense que c'est applicable à toutes les procédures de soin.

  1. Est-ce que l'objectif du traitement vous convient ?
  2. Mourir avec un cancer n'est pas la même chose que mourir d'un cancer
  3. Les différents patients ont des valeurs différentes
  4. Il y a toujours des incertitudes en médecine
  5. Plusieurs anecdotes ne sont pas des données
  6. Y a-t-il une ou d'autres options ?
  7. Il est difficile d'établir une causalité sans études randomisées
  8. Une significativité statistique n'est pas toujours cliniquement signifiante
  9. Faire attention aux risques absolus et relatifs
  10. Les décisions individuelles et populationnelles ne sont pas toujours identiques
A afficher partout.


2. Qui a envie de travailler avec lui ?




3. L'EBM piétinée

Nous avons cent fois ici répété combien l'EBM avait été un progrès par rapport à ce qui existait avant où les études cliniques étaient considérées comme inutiles, où les avis d'experts résumaient les données scientifiques et où adopter une pratique non validée c'était l'apprécier.

Il y avait deux camps. 

Celui des partisans inconditionnels de l'EBM qui ne négligeaient pas les faiblesses de la méthode mais qui affirmaient qu'il n'y avait pas d'autre choix à suivre.

Celui des opposants inconditionnels à l'EBM pour des raisons pratiques.


Que reste-t-il de nos espoirs ?

Un exemple sur les bonnes pratiques dans le diabète de type 2 : ICI.


4. Guy Vallancien, charniériste



5. Les composantes de la douleur (entre autres)




6. Les derniers chiffres de la mortalité Covid dans le monde

Voir LA


7. Elon Musk et twitter : déjà un paysage cauchemardesque ?


From The New-Yorker


Honnêtement, cela n'a pas beaucoup de valeur.

Surtout en lisant un article très documenté sur l'excès de mortalité dans les pays scandinaves qui insiste beaucoup sur les méthodes de comptage.

Voir ICI.



8. Covid Long : le club des CovidsLongs fait feu de tout bois.

On résume le point de vue du club des LongsCovids (qui est décalque de l'ex-club des ZéroCovids) :
  1. Il y a de plus en plus de patients présentant des Covid longs (le club des FearMongers est mobilisé pour l'occasion)
  2. Il y a de plus en plus de publications (non françaises, on rappelle ici pour les ignorants que la France  se place au 48° rang mondial pour le nombre de publications biomédicales mais c'est dû au manque d'argent alors que la majorité des études biomédicales sont financées par l'industrie pharmaceutique qui doit trouver que c'est parce que les médecins français n'ont pas d'argent qu'ils n'ont pas de cerveau...) ce qui montre que la maladie existe (le fameux saut qualitatif que les marxiens de l'extrême-gauche ne manqueront pas de rappeler)
  3. La France est, comme toujours, à la traîne. 
  4. Il y a une perte de chance puisque les patients ne sont pas pris en charge ou considérés comme psychosomatiques...
Réponses :
  1. On attend autre chose que des études au doigt mouillé ou sur un coin de table mais plus les études annoncent des covid longs, plus les LongsCovids trépignent
  2. Le nombre de publications ne signifie pas a) que l'on avance, b) que les données scientifiques sont de qualité, c) que la non-découverte d'un mécanisme physiopathologique commun soit la preuve qu'il y en a un
  3. C'est la haine de soi bien classique
  4. Il n'y a pas de traitement mais une prise en charge empathique serait effectivement la bienvenue.
  5. Un pré print (ICI) du premier novembre 2022 annonce que la prescription pendant 5 jours de Nirmatrelvir (une des composantes du paxlovid) vs rien (étude épidémiologique cas-témoin non randomisée) chez des patients covid présentant au moins un facteur de risque pouvant entraîner une maladie sévère réduisait les syndromes post SARS-CoV-2 à 90 jours quel que soit le statut vaccinal (non,vacciné, vacciné, boosté) en cas de primo infection ou de réinfection.
  6. A suivre.

9. La durée moyenne de consultation (soins primaires)

Attention :
  1. La source (statista) n'est pas sûre
  2. Les systèmes de santé sont très différents (IDE ou non, IPA ou pas, et cetera)
  3. C'est théoriquement le BMJ
  4. Pourquoi montrer un tel diagramme ? Pour désinformer en précisant que c'est probablement d cela désinformation.

10. Sismothérapie : retour vers le futur.


11. Bronchiolite : un communiqué de l'ordre des kinésithérapeutes : tout va bien jusqu'à l'avant-dernier paragraphe

ICI pour le communique rempli de bons conseils...

Là : l'avant-dernier paragraphe non sourcé.


12. Gustave Roussy en majesté : sans masques.

L'IGR, le meilleur centre anticancéreux de toutes les terres émergées, célèbre la fin du mois octobre rose.

Sans masques, dans une enceinte fermée, avec des soignants qui sont continuellement en contact avec des patients qui sont potentiellement traités pour un cancer, immuno-déprimès, fragiles.









mardi 1 novembre 2022

Hypertension, confraternité, secret professionnel. Histoire de santé publique sans consultation. 10



Je rencontre une ex patiente dans les rues de Mantes.

On parle une heure.

Elle a 56 ans et après qu'on a évoqué sa famille, ses amis, les gens qu'on connaît en commun, ce qu'elle devient, ce que deviennent son mari (dont elle a divorcé), ses enfants (que j'ai suivis), ma retraite, et cetera.

Elle finit par me me dire : "Je suis embêtée parce que j'ai une hypertension...

- Ah, moi aussi.

- Vous ? 

- Oui, pourquoi ?

- Vous n'êtes pas gros..."

("Mon" ex patiente ne me semble pas présenter un sur poids manifeste)

"Il n'y a pas que des gens gros qui sont hypertendus, il y a des maigres, des petits, des idiots, enfin, tout le monde...

- Mon médecin...

(Je ne lui demande pas qui est son nouveau médecin. Et comme cela vous ne le saurez pas.)

"... mon médecin m'a surtout dit que c'était un traitement à vie. C'est vrai ?"

Je lui raconte que le traitement de l'hypertension est souvent définitif à moins que l'on ne retrouve un facteur déclenchant traitable... Ce qui est rare.

Elle est déçue.

"C'est vrai que j'ai un cousin à qui on propose tout le temps de manger tant il est maigre et pourtant il a de la tension...

- Vous voyez...

- Et d'ailleurs, je vais vous dire ce qu'il m'a donné comme traitement..."

Elle a du mal à se rappeler (nous sommes dans la rue tout près de la Caisse d'Epargne, mais elle finit par retrouver, "... du propanolol pour les maux de tête et du lercan..."

Faut-il dire que mon non-verbal en a pris un certain coup ?

"Et vous prenez cela depuis combien de temps ?

- Un an.

- La tension ?

- Parfaite."

J'ai pensé à l'un de mes cardiologues favoris sur twitter sans compter à deux autres de mes cardiologues  IRL valeureux et je me suis posé la question suivante : est-il possible en 2022 d'instaurer (c'est bien une instauration, j'ai vérifié) une bithérapie antihypertensive à base de propranolol (aucun intérêt de prescrire un bêta bloquant en première intention -- et encore moins celui-là-- dans l'hypertension) et de lercan (inhibiteur calcique qui n'a jamais fait la preuve de son utilité sur des critères de morbimortalité et qui devrait être réservé à une deuxième intention en cas d'oedème des membres inférieurs survenus sous amlodipine... mais ça, c'est mon avis personnel)

L'affaire Perronne en cours pose le problème de la confraternité qui est, semble-t-il, la valeur essentielle du Conseil de l'ordre des médecins. Il m'étonnerait pourtant que le fait de suggérer que le traitement de mon ex-confrère n'est pas tout à fait approprié (qu'en de termes choisis ces choses-là sont dites) puisse faire l'objet d'une plainte pour non confraternité après que mon ex-patiente sera allé raconter à son nouveau médecin les propos que j'aurais pu tenir.

Il est vrai que si je racontais en privé à l'un de mes collègues comment le docteur X traite les hypertensions (pardon pour la généralisation) en première intention, je pourrais utiliser un vocabulaire plus fleuri.

Que devais-je faire (sans connaître le contexte, bien entendu) ? Dire à la personne de changer de médecin au risque de lui faire douter encore plus de notre beau métier et l'inquiéter encore plus ? Lui demander le nom de mon confrère pour que je l'appelle ?

Je n'ai rien fait.

J'ai renoncé.

S'agit-il de l'esquisse de l'esquisse d'un processus de non-assistance à personne en danger ?

Mais.

Mais, et comme il ne s'agit pas d'un roman où les personnages ne peuvent lire le livre après qu'il est paru, je vais devoir renoncer à publier ce billet car la personne pourrait se reconnaître, je ne lui ai pas demandé l'autorisation de publier, et pourrait comprendre que son médecin est bon à changer et que son ex-médecin a violé le secret professionnel.

Enfin.

Enfin : Les recommandations médicales sont souvent discutables (conflits d'intérêts, compétence), et c'est un euphémisme, le fait de les suivre ce serait mieux que le contraire pour la santé publique.

dimanche 30 octobre 2022

Bilan médical du lundi 24 au dimanche 30 octobre 2022. Tout le monde déconnnne : Vinay Prasad, les antibiotiques, les négociations conventionnelles, l'Académie de médecine, Raoult, Buzyn, cancer du sein, exercice physique vigoureux, Perronne, Ameli.

Charles Bukowski (1920-1994)

La semaine de la grande déconne.

Charles Bukowski, l'ennemi intime de tous les hygiénistes.



Vinay Prasad déconne.


Dans un article récent (ICI) Vinay Prasad se réjouit de la prise de pouvoir de Elon Musk sur twitter !
  • Il admire Elon, écrit-il.
  • Il dit : twitter est un lieu d'accès facile pour faire connaître ses idées mais c'est aussi le pire réseau social.
  • Les seuls utilisateurs de twitter qui valent le coup sont ceux qui proposent un contenu intéressant et original mais leur part est microscopique sur le réseau
  • Ironiquement ce sont ceux qui en bénéficient le plus mais ceux qui veulent en partir le plus vite en raison des attaques dont ils sont l'objet.
  • Il poursuit en disant que twitter censure plus la droite que la gauche (NdA : aux US ?) et que la tonalité est volontiers pour le masquage des enfants, pour les confinements, pour les fermetures, pour les vaccins itératifs.
  • Prasad dit que les libéraux (NdA : à la mode états-unienne) était pour la libre parole et qu'ils sont maintenant contre.
  • Enfin il croit aux déclarations d'Elon sur la liberté totale d'expression sur twitter.
Il déconne.




La déconne sur les antibiotiques : la médecine n'est pas une science.

Notre ami Ali Abbas (@DocteurAbbas) rédige un fil sur la consommation des antibiotiques en ORL à partir d'une conférence où il s'est rendu (Congrès européen d'ORL et de chirurgie de la tête et du cou : LA).

Renversant (on le savait déjà) :


Si la médecine était une science ou si les médecins s'informaient et suivaient les recommandations sur la prescription de l'amoxicillin : indications, posologie, durée... Chaque pays ne ferait pas différemment et nul doute qu'à l'intérieur de chaque pays il n'y aurait pas autant de différences.

Vieil adage toujours répétable quelles que soient les circonstances : Les recommandations, c'est souvent de la merde, mais si les médecins les suivaient, ce serait un peu moins de la merde.




La déconne sur les négociations conventionnelles.

Richard Talbot, syndicaliste FMF bien connu sur les réseaux sociaux pour sa compétence législative et son inlassable persévérance à répondre à de sottes et intelligentes questions de ses confrères, donne son avis sur la lettre de cadrage que le Ministère de la santé a envoyé à l'UNCAM.

Le voici : ICI

Je n'ai pas eu les versions des autres syndicats.

Evaluation du nombre de MG en activité régulière entre 2010 et 2021
https://www.conseil-national.medecin.fr/sites/default/files/external-package/analyse_etude/1riyb2q/atlas_demographie_medicale_-_cnom_-_2021.pdf
Attention à l'échelle qui ne part pas de zéro.


La déconne de l'Académie de médecine.




L'Académie de médecine générale réclame "un service citoyen médical d'un an pour tout nouvel académicien élu." 


2007 : réception des nouveaux membres de l'Académie de médecine


La déconne de Raoult et consorts (Macron, Delfraissy, chloroquine -sic).

Des bonnes feuilles du livre d'Ariane Chemin et Marie-France Etchegouin sont parues dans le journal Le Monde (LA, sur abonnement). Une ironie mordante sur l'ego démesuré de Raoult, sur la candeur de Macron et l'impuissance de Delfraissy.

Un twitto sous pseudomymat en raconte un peu plus sur le livre (LA) et la façon dont Agnès Buzyn a annulé un essai qui devait être mené par Raoult et comment le DGS aurait autorisé une 'exemption administrative ' sans base légale connue pour enfin cosigner (Jérôme Salomon) l'article.






Agnès Buzyn défouraille et déconne.

Agnès Buzyn prépare sa défense et, avec la bienveillance de tous les médias, elle fait l'objet d'articles et d'invitations à la radio et à la télévision pour vendre sa version de la pandémie. On résume  :

  • J'avais tout prévu
  • Avant les experts
  • Personne ne m'a écoutée
  • Edouard Philippe est un gros macho
  • J'avais demandé le report des élections
  • On ne m'a pas écoutée
  • J'ai été obligée de me présenter à Paris
  • J'ai perdu à cause des méchants.
  • Macron ? Aucun souvenir.


Créateur : Stephane Lemouton /Pool/SIPA Crédits : Stephane Lemouton /Pool/SIPA
Droits d'auteur : Stephane Lemouton / Bestimage


Est-ce déconner que de ne pas participer au dépistage organisé du cancer du sein ?

Une belle réponse de Cécile Bour pour le collectif Cancer Rose.

C'est ICI.

La réponse est NON.


Liberté d'information



Faut pas déconner : 15-20 minutes d'exercice physique vigoureux par semaine... 

diminuent la mortalité de 16 à 40 % chez 71893 personnes âgées (britanniques) en moyenne de 62,5 ans au bout de 6 ans. 


Dans le détail l'exercice physique vigoureux diminuerait la mortalité toute cause, la mortalité cardiovasculaire et la mortalité par cancer.

Et il y aurait un effet-dose. 

La dose optimale serait de 58 minutes par semaine. 

La dose minimale efficace erait de 15 minutes par semaine pour la mortalité toute cause et la mortalité par cancer et de 19 minutes pour la mortalité cardiovasculaire.

C'est LA.

La lecture détaillée de l'article montre que les chiffres ont été triturés dans tous les sens, segmentés, sous-groupés et il est assez difficile de savoir comment le protocole était dessiné à l'origine. 

A nous les exercices physiques vigoureux ! Quinze minute par semaine, c'est donc 2,14 minutes par jour. 

Comme dirait ce bon Winston Churchill "No 2,15 minutes de sport par jour !"


Perronne déconne.

Le site factandfurious.com nous présente un Perronne déconnant (attention, n'en parlez pas au Conseil de l'Ordre je pourrais être condamné).

C'est LA et c'est signé Antoine Daoust.

Et cela vaut son pesant de cacahouètes. 


Améli déconne en préconisant des techniques non validées dans la bronchiolite du nourrisson.


Belles discussions sur twitter après que j'ai écrit que la kinésithérapie respiratoire comme traitement de la bronchiolite de nourrissons suivis en ambulatoire n'avait pas fait la preuve de son efficacité.

Je résume :
  • L'absence de preuves (et j'ai tellement souligné depuis cent ans que les études contrôlées en ambulatoire sont d'une complexité inouïe et n'intéressent pas les financeurs) ne signifie pas preuve de l'absence
  • Qu'il s'agisse du drainage postural par vibration ou percussion ou de l'augmentation du flux respiratoire
  • Oui mais, m'ont dit les kinésithérapeutes on ne fait pas que cela, on rassure, on conseille, on revoit, ce que ne font pas toujours les MG débordés
  • Je ne disconviens pas que certains MG débordés ne prescrivent aucun conseil, aucune réassurance, et ne revoient pas les enfants... Ça existe.
  • Je ne disconviens pas non plus que certains MG prescrivent aussi des médicaments non adaptés (antibiothérapie, corticothérapie, que sais-je encore ?)
  • Le problème de la bronchiolite du nourrisson en ville est de séparer le bon grain de l'ivraie, c'est dire les enfants qu'il faut surveiller (et les conseils, les signes d'alarme, sont à bien préciser, à écrire même), qu'il faut revoir, qu'il est possible d'adresser à des kinésithérapeutes compétents quand cela peut rassurer les parents, et, surtout, ceux qu'il faut adresser aux urgences, soit d'emblée, soit après une période d'observation, en tenant compte de la surveillance des parents qui "connaissent" le comportement normal de leurs enfants.
  • Faut-il encore polémiquer ?

Jean-Marie Vailloud tire sa révérence mais ne déconne pas.

Bye.

Merci.

j'ai appris énormément de choses en te lisant, cardiologie, médecine, humanité, respect des patients, empathie.

Son blog est encore ICI.


jeudi 27 octobre 2022

"Combien coûtent nos vies ?" Un livre de Pauline Londeix et Jérôme Martin (PLJM).



Le livre se lit avec plaisir.

C'est un livre pour profanes.

Le fait de le publier directement dans une collection de poche, 10/18, le rend accessible (6 euros).

Il aurait dû être intitulé "Combien coûtent nos médicaments ? Enquête sur la fixation des prix."

En effet, la politique du médicament est un point majeur mais ne rend compte ni du coût de la santé, ni des progrès thérapeutiques, ni de l'espérance de vie.

PLJM soulignent combien la financiarisation de la recherche a fait du marché du médicament un marché comme un autre avec l'aval des autorités gouvernementales de nombreux pays riches (dont la France) qui n'osent pas s'opposer à l'industrie pharmaceutique par idéologie de marché et, aussi, parce que les 10 plus grandes multinationales sont implantées en Europe et aux Etats-Unis.

La recherche et développement (R&D) est très souvent, en fonction des molécules, des circonstances, des ouvertures et des opportunités un mix public/privé avant, pendant et même après la mise au point des médicaments.

Le manque de transparence (c'est un euphémisme) ne permet pas de se faire une idée réelle du coût de la R&D pas plus d'ailleurs que celui du prix de revient de la fabrication. Comprenez que les pertes sont compensées par le public et les bénéfices engrangés par le privé. 

PLJM rapportent les analyses de Andrew Hill sur le sofosbuvir qui montrent les super profits de Gilead et comment l'Egypte a sorti un générique...

La financiarisation oriente la R&D vers les secteurs les plus rentables (et les auteurs ne nous parlent pas du poids de plus en plus important de l'oncologie) et les plus profitables à court terme sans tenir compte des besoins en santé publique et a fortiori dans les pays à faibles et bas revenus (qui ne pourront pas acheter les médicament en raison des prix demandés).

Les pays rebelles sont les pays moins riches comme le Brésil et l'Inde qui osent braver l'industrie pharmaceutique et les licences d'offices et d'obligation.

PLJM appuient sur les carences françaises en notant que notre beau pays est le 48° en terme de publications scientifiques et que le CEPS (Comité économique des produits de santé) prend des décisions d'une grande opacité.

PLJM proposent des solutions. Contrôle des matières premières, relocalisation des productions, changement des procédures de fixation des prix... Lutte contre les brevets "de mauvaise qualité", problème des licences, et cetera.

Mais surtout, à propos de la France : "Les politiques du médicament doivent désormais être conduites par des agents publics expérimentés formés aux questions de santé et de production pharmaceutique, sans conflits ou liens d'intérêts. Leur travail doit se faire en lien avec la société civile experte et les associations de patients indépendantes." 

Ce résumé succinct devrait vous inviter à lire ce livre.



Resources supplémentaires :

Sur les essais cliniques le livre "Bad Pharma" de Ben Goldacre (ICI) disait déjà l'essentiel en 2013. Il insistait sur le côté immoral de certains essais effectués dans des pays pauvres sur des patients qui ne pourraient ensuite acheter les médicaments.

Un grand spécialiste des questions de brevet, de saucissonnages des indications et autres est Marc-André Gagnon de l'université Carleton à Ottawa. Un podcast LA et ses titres et travaux ICI





dimanche 23 octobre 2022

Bilan médical du lundi 17 au dimanche 23 octobre 2022 : vaccination covid itérative et onéreuse, bronchiolite, Topiramate et Essure, Perronne, génétique vs médico-social.


1. Vaccination itérative contre le Covid et manque de données

Nous avions pronostiqué ici qu'il était possible que la vaccination anti covid ARNm devienne, comme le renouvellement des médicaments anti-hypertenseurs ou des anti diabétiques ou des anti psychotiques, une gestuelle trimestrielle ou semestrielle. Nous y sommes presque.

La directrice des CDC états-uniens, Rochelle Walenski, vient d'annoncer qu'elle était positive au Covid 19.  Elle a reçu le booster bivalent Pfizer il y a exactement un mois !

Il ne s'agit pas de dire que les boosters ne servent à rien car, contrairement à une idée répandue, on ne demande pas aux médicaments efficaces de l'être à 100 %



 

Il s'agit d'exiger, et nous avions souligné le manque de données CLINIQUES concernant le booster, des essais contrôlés.

Ainsi, concernant le booster bivalent, Rochelle Walenski est incapable de répondre à des questions simples  (nous sommes en 2022) : quelle est l'efficacité sur les formes symptomatiques ? Quelle est l'efficacité sur les formes sévères ? 

Voir le point 2.




2. Pfizer et le prix des vaccins.

Selon une information de @APMinfos via Chritophe Trivalle : 


Pourquoi pas ?

Mais qui exigera de Pfizer (ou de Moderna) et sans doute cela ne sera ni le gouvernement états-unien, ni la FDA, ni l'agence européenne (EMA), ni la Commission européenne, ni les gouvernements européens, qui exigera des essais cliniques contrôlés pour le dernier booster bivalent ?

Qui ? 

Est-il possible d'exiger de Pfizer qu'un essai contrôlé soit effectué dans des résidences pour personnes âgées médicalisées ou non avec comme critère principal la mortalité totale ? C'est à dire dans la population la plus exposée. Est-ce possible ?



Proposons un nom d'allégorie.


22 octobre 1895 : Gare Montparnasse
Photographie colorisée : Marina Amaral.


4. La bronchiolite sature les hôpitaux

Résumons l'affaire : 

Des chiffres :


  1. Les chiffres de 2020-2021 sont peu représentatifs (en raison du covid)
  2. Plus les soins primaires seront saturés et moins les bronchiolites seront maintenues en ambulatoire
  3. Moins de MG, plus de passages aux urgences
  4. Les prélèvements nasopharyngés pratiqués en ville comme à l'hôpital montrent environ 3 % de VRS
  5. La validation d'un vaccin contre le VRS se heurte à de nombreux obstacles. Voir LA un très bon article.
  6. En revanche des anticorps monoclonaux pointent le bout de leur nez (les prix ? Faramineux à n'en pas douter)
  7. Les mesures-barrières (qui ne sont pas exactement les mêmes que celles du covid), les mesures-barrières, les mesures-barrières.

5.1 L'Agence du médicament toujours aussi réactive : topiramate (Epitomax) : il est urgent de ne rien faire.


La présidente de l'association d'aide aux parents d'enfants souffrant du syndrome de l'anticonvulsivant (APESAC) alerte sur topiramate/Epitomax dans une tribune publiée dans le Journal du Dimanche (ICI).

On pouvait penser que l'Agence, après sa condamnation pour la gestion des événements indésirables du valproate de sodium/Dépakine et du manque d'informations fournies aux femmes (absence d'envoi d'un courrier personnalisé), aurait changé.

Vous connaissez le slogan : "Plus jamais ça !"

Eh bien non. Récidive.

La chronologie des faits est accablante. Une étude du 2 mai 2022 parue dans JAMA Neurology souligne les dangers du topiramate pour le foetus.

Voici ce que fait l'Agence : "« Il n’est pas prévu de mettre en place une procédure particulière même si nous pouvons, grâce à ­l’Assurance maladie, identifier l’ensemble des femmes concernées en France. »"

L'Agence du médicament est un nid de débiles corrompus.

Les pharmacovigilants de l'Agence devraient tous démissionner

5.2 L'agence met 5 ans à publier un rapport incriminant l'implant contraceptif Essure

Selon une enquête menée par le site splann ! (voir ICI) il a été montré dans un rapport datant de avril 2017 et demandé par l'agence elle-même que l'implant contraceptif Essure montrait des défectuosités (corrosion) pouvant entraîner des événements indésirables importants chez les femmes. Un rapport du Comité d'experts réunis par l'agence pour statuer sur le dispositif ne mentionnait pas les événements indésirables possibles.

Plus de 200 000 dispositifs ont été implantés en France.

La firme Bayer qui possédait le produit l'a retiré du marché français en 2017. Ainsi, encore une fois l'Agence a été moins réactive que la firme (qui était au courant depuis longtemps et qui craignait les procès).


6. Le Conseil de l'ordre des médecins toujours aussi réactif : Perronne congratulé

La chambre disciplinaire de première instance d'Ile-de-France, à la suite de deux plaintes émanant du Conseil national de l'ordre et du docteur Nathan Peiffer-Smadja, a absous le professeur Christian Perronne. 

En revanche, le docteur Nathan Peiffer-Smadja, dans la cadre d'une plainte déposé par le-dit professeur avait l'objet d'un avertissement.

L'affaire n'est pas terminée mais le Conseil de l'ordre devrait s'autodissoudre dans la soude caustique et une réflexion nationale devrait s'engager pour savoir par quoi le remplacer (ou pas).


La crise des valeurs en cancérologie.





  1. Critères de jugements douteux
  2. Petits effectifs
  3. Protocoles d'essais biaisés
  4. Prix faramineux

7. La génétique vient au secours des inégalités socio-économiques

La négation du caractère inégalitaire des maladies et de leur prise en charge, c'est à dire la négation des études épidémiologiques-sociologiques, la négation du fait que plus t'es pauvre, moins t'es éduqué, plus tes conditions de logement sont précaires, plus tu es né hors de France, la négation de la prévention primaire (métiers difficiles, manutentions, efforts musculo-squelettiques, horaires décalés, position debout, et cetera), c'est à dire la négation que la médecine n'est ni neutre ni hors-sol, conduisent des chercheurs à trouver des raisons génétiques au fait que certaines personnes n'attrapent pas le covid autant que les autres.

Si vous avez du temps à gâcher, c'est LA.

Mais aussi (ce n'est pas du temps gâché) :



Source: Office for National Statistics - Obesity and mortality during the coronavirus
 (COVID-19) pandemic, England: 24 January 2020 to 30 August 2022 

Un beau Pitch pour une série policière



8. Les inégalités de santé (mille repetita placent)




9. Pour information : le nouveau calendrier vaccinal états-unien





Bientôt dans vos cabinets


10. Bruno Retailleau : le Khon de la semaine


11. Dépistage du K du colon par colonoscopie.

On en a parlé la semaine dernière.

Encore de la réflexion : LA.

12. Le monde merveilleux du zérocovid


Via Le Monde
Chine : XI Jinping s'assure les pleins pouvoirs...

mercredi 19 octobre 2022

Liens et conflits d'intérêts.

Les médecins ne devraient-ils pas porter des uniformeses qui identifient leurs sponsors et de qui ils reçoivent des pots-de-vin ?

Qu'est-ce qu'un lien d'intérêts ?

"Un concours de circonstances qui crée le risque qu'un jugement professionnel ou des actions relatifs à un intérêt primaire soient injustement influencés par un intérêt se condaire.

"Les intérêts primaires sont : promouvoir et protéger l'intégrité de la recherche, le bien-être des patients et la qualité de la formation médicale.

"Les intérêts secondaires peuvent inclure non seulement un gain financier mais aussi le désir d'avancement professionnel, la reconnaissance d'une réussite personnelle et des faveurs pour des amis et de la famille ou des étudiants et des collègues.

"L'IOM ajoute que les intérêts financiers sont souvent mis en avant notamment auprès de l'opinion publique mais qu'ils ne sont nécessairement pas plus graves que les autres intérêts secondaires ; ils sont en revanche plus objectivables, plus opposables, plus quantifiables et plus réglementés en pratique de façon équitable"

(Selon l'IOM (Institute Of Medicine), l'équivalent états-unien de l'Académie de médecine)).

Article L4113-13 du Code de la santé publique

Les membres des professions médicales qui ont des liens avec des entreprises et des établissements produisant ou exploitant des produits de santé ou avec des organismes de conseil intervenant sur ces produits sont tenus de faire connaître ces liens au public lorsqu'ils s'expriment sur lesdits produits lors d'une manifestation publique, d'un enseignement universitaire ou d'une action de formation continue ou d'éducation thérapeutique, dans la presse écrite ou audiovisuelle ou par toute publication écrite ou en ligne. Les conditions d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat.


Les manquements aux règles mentionnées à l'alinéa ci-dessus sont punis de sanctions prononcées par l'ordre professionnel compétent.


Les intervenants médecins ou autres doivent le ou les déclarer.

  1. Quand un médecin parle en public (en France) à l'attention de professionnels de santé en général et de médecins en particulier ou devant un public profane, il est tenu de déclarer ses liens d'intérêts. 
  2. Selon le Code de la santé publique, article L4113-13.
  3. Des liens d'intérêts signifient qu'il pourrait s'exprimer en tenant compte des relations qu'il entretient avec des personnes, des institutions, des industriels dont il dépend pour sa carrière (un employeur public ou privé) et/ou dont il profite d'un point de vue financier.
  4. Les liens financiers sont les plus faciles à déterminer, ils sont déclarés d'un point de vue fiscal par les firmes qui paient et ils sont consultables sur le site Transparence Santé et sur le site Eurosfordocs.
  5. Les liens non financiers sont parfois moins évidents à mettre en évidence : liens avec une institution, un supérieur hiérarchique, une agence gouvernementale, un groupe de travail, un parti politique, un syndicat, ou liens de camaraderie, d'amitié ou d'amour.
  6. L'orateur ne déclare parfois pas des liens d'intérêts car il argue que le sujet qu'il va traiter ou pour lequel il est interrogé n'a pas de rapport avec ces liens. Nous y reviendrons car c'est discutable.
  7. Ainsi, un intervenant ne déclare pas ses conflits d'intérêts car les conflits d'intérêts sont un jugement que porte l'auditeur à l'énoncé des liens d'intérêts déclarés.

Personne ou presque ne les déclare.

  1. Lors d'interventions à la radio, à la télévision ou sur les réseaux sociaux, il est exceptionnel que l'intervenant, le commentateur, le blogueur se conforme au Code de la santé publique.
  2. Les médias concernés ne s'en préoccupent pratiquement jamais lorsqu'ils invitent une personne à parler.
  3. Il n'est pas d'exemples à ma connaissance où le défaut de déclaration ait conduit à des poursuites (mon oreillette me dit que oui, le Conseil de l'ordre est exceptionnellement intervenu).
  4. Lors de congrès ou de réunions de formation médicale continue les orateurs doivent préciser au début de leur intervention quels sont leurs liens d'intérêts. Ils le font de plus en plus (mais je n'ai pas de statistiques sur la question). Et je ne parle pas des orateurs qui ne déclarent pas de liens d'intérêts en utilisant des écrans où apparaissent en bas à droite le logo d'un laboratoire !
  5. Le livre "La santé en bande organisée" de Jouan et Riché a confirmé combien les liens non financiers et/ou affectifs (i.e. sexuels) sont importants dans les prises de décision : épouse de, mari de, maîtresse de, amant de. Il est clair qu'il est difficile, je veux dire impossible, que le directeur de l'agence du médicament, avant de parler sur CNews, commence son intervention par "Je déclare être l'amant de Madame X, directrice de la communication du laboratoire Y dont je vais parler de l'une des molécules"
  6. Le fait de ne pas déclarer un lien d'intérêts parce qu'il n'a pas de rapport avec le sujet abordé pose plusieurs questions : a) parce que si vous parlez de la molécule M1 commercialisé par le laboratoire L1 et que vous recevez de l'argent du laboratoire L1 pour la molécule M2 qui appartient à une autre classe thérapeutique, on peut imaginer quand même que vous allez préserver votre source de revenus ; b) parce que dire du bien de la molécule M3 du laboratoire L3 dans un domaine thérapeutique ou pour une classe pharmacologique, c'est signifier que vous êtes ouvert pour recevoir de l'argent du laboratoire L4 qui commercialise une molécule M4 dans le même périmètre (imaginez l'inverse) ; c) le milieu pharmaceutique étant étroit, il vaut mieux pour un laboratoire lambda embaucher un chercheur/orateur favorable a priori à l'industrie pharmaceutique et qui ne dérapera pas dans les congrès.

Peut-on échapper aux liens d'intérêts ?

  1. Monsieur Bruno Lina et Madame Agnès Buzyn ont indiqué que le fait d'avoir des liens financiers avec les industriels est un gage que les médecins font partie de l'excellence.
  2. C'est faux et c'est vrai.
  3. C'est faux dans de nombreux cas : l'industrie préfère compter sur des médecins compliants, qu'elle  a parfois fabriqués elle-même (expert mongering), qui sont aussi bons orateurs, bons rédacteurs, ou qui occupent des postes décisionnaires importants et qu'ils savent se coucher quand il faut rajouter une phrase dans un article ou changer de test statistique pour obtenir le graal, c'est à dire la significativité statistique, plutôt que des experts en recherche clinique qui pourraient être trop regardants ou qui ne renverraient pas l'ascenseur. Elle préfère des médecins à l'échine souple.
  4. C'est vrai aussi car pour faire de la recherche clinique en France, sauf exceptions, il est nécessaire de travailler avec les industriels du médicament. Des personnes intègres, si elles veulent travailler, si elles veulent publier, si elles veulent faire carrière, doivent accepter l'argent de l'industrie. Jusqu'à quel point ? Jusqu'à quel poste ?
  5. Enfin, dans les contributions financières des laboratoires il existe aussi un poste qui s'appelle "Frais de congrès", c'est à dire qu'un orateur est invité à Chicago (ASCO) pour faire une communication, participer à un board, et on lui paie les frais d'inscription, le gîte et le couvert. Convenons qu'il est assez difficile de faire autrement tant les prix sont exorbitants, même pour un PU-PH. En revanche, l'invitation du professeur lambda (qui vient avec son épouse, sa maîtresse...) à Chicago, et qui n'a rien à y faire de scientifique sinon s'informer (quand il parle anglais), c'est du pur marketing, c'est du relationnel dans le but d'obtenir un retour d'ascenseur... Accessoirement on peut s'interroger sur l'intérêt scientifique d'un congrès international en présentiel à l'heure des facilités du distanciel. L'intérêt est surtout promotionnel.

En conclusion :

  1. Faire appliquer la loi ne semble pas encore à l'ordre du jour.
  2. La corruption a encore de beaux jours devant elle.