Une association américaine de médecins, la NPA (National Physicians Alliance), dont vous trouverez ICI le site, fait des propositions pour réduire 5 activités médicales. La NPA refuse toute contribution émanant d'industriels du médicament ou de fabricants de matériel. Mais il serait utile d'en savoir plus sur ses tenants "idéologiques" et / ou "politiques".
Quoi qu'il en soit, la NPA fait 5 propositions :
- Ne pas proposer d'imagerie dans les 6 premières semaines suivant la survenue de lombalgies à moins que des critères de gravité ne soient présents.
- Ne pas prescrire de façon systématique des antibiotiques pour une sinusite d'intensité légère à modérée, à moins que les symptômes -- qui doivent inclure des sécrétions nasales purulentes et des douleurs maxillaires, ou une sensibilité faciale ou dentaire à la percussion -- ne durent depuis 7 jours ou que les symptômes s'aggravent après une amélioration clinique initiale.
- Ne pas prescrire chaque année un ECG ou examen cardiovasculaire de dépistage chez des patients asymptomatiques à faible risque.
- Ne pas prescrire de frottis vaginal chez des femmes de moins de 21 ans ou chez des femmes ayant subi une hystérectomie liés à une affection bénigne.
- Ne pas prescrire d'ostéodensitométrie chez des femmes de moins de 65 ans ou des hommes de moins de 70 ans sans facteurs de risque.
On le voit, la NPA n'est pas une organisation révolutionnaire.
Elle avance à petits pas.
Elle ne menace pas l'équilibre des revenus des médecins généralistes mais elle peut entrevoir des résistances de la part des cardiologues et / ou des gynécologues et / ou des rhumatologues.
Pourquoi les associations de médecins généralistes français ne font-elles pas de telles propositions ?
"Pourquoi les associations de médecins généralistes français ne font-elles pas de telles propositions ?"
RépondreSupprimerPeut-être parce que les français sont des latins, et qu'ils ont tendance à réagir de façon un tout petit peu émotive face à un problème donné. Qui avec son cœur, qui avec ses tripes, etc (je ne descendrai pas plus bas, mais suivez mon regard...).
Je suis assez admiratif du pragmatisme anglo-saxon, et partisan de son application au domaine médical.
Il me plait d'imaginer une médecine basée sur ce trésor, qui devrait depuis longtemps avoir été classé au patrimoine immatériel de l'humanité :
le Bon Sens.
Frédéric
A pr mangemanche :
RépondreSupprimerJe pense qu’il y a un malentendu. Je parlais du nombre, un petit nombre de personnes soutenant des idées qui vont dans le sens de l’histoire peuvent les faire triompher. Je ne parlais pas de l’aspect religieux et encore moins sectaire. Je ne suis d’ailleurs pas très religieuse et je ne suis même pas très catholique.
Et si je peux comprendre le SENTIMENT de découragement, je constate que celui-ci ne repose pas sur une vision rationnelle de la situation. Car rationnellement on ne saurait s’étonner (et donc être découragé) par le fait que les groupes d’intérêt qui contrôlent 99% de la formation des médecins et 99% de la presse et des médias lus par les médecins soient en capacité de forger le fameux NOYAU DUR DES CROYANCES des médecins, des croyances simplistes de type scientiste, autour duquel gravitent mollement la majorité de nos confrères.
Si la plupart s’accrochent à ces croyances par simple révérence envers l’autorité d’autres, une minorité, ont sauté la barrière, pour aller voir de l’autre côté, là où l’herbe est plus verte. Ceux là ne se préoccupent même plus de médecine.
Deux exemples vrais. Un gynécologue, dans une clinique privée, débordé par ses 60 consultations par jour(une tous les cinq minutes)-je romance, je suis un peu du sud- ne trouve pas le temps de voir sa patiente pour lui renouveler son traitement et lui fait remettre une ordonnance par sa secrétaire. La patiente est très étonnée de recevoir quelques jours plus tard la facture de 90 euros pour la consultation qu’elle n’a pas eu. Autre exemple : un ophtalmologue, spécialiste des paupières-cela existe- toujours dans une clinique privée (je n’y peux rien) voit son patient pour un chalazion supposé suspect, le palpe, et conclut qu’il est bénin. En revanche, il aperçoit un innocent petit bouton au dessous de l’œil et annonce qu’il peut être cancéreux et conseille de revenir rapidement pour le faire enlever. Le prix de la consultation est de 80 euros. Le coût annoncé de l’intervention est de 190 euros, avant les mauvaises surprises, toujours à craindre en clinique privée. Le bouton disparaîtra tout seul en quelques jours.
Pensons un peu aux patients. Aidons les à distinguer les vrais médecins des faux. Parce que malheureusement ces types n’ont pas « je suis un escroc » marqué sur leur front. Pour l’instant, la seule référence des patients est la version officielle et la société de consommation : « the more the better ».
Il est dommage que les médecins consciencieux se soient rangés sous une bannière qui n’est pas la leur, celle du CAPI. Le CAPI, dont le principe fondateur est étranger à la médecine, car il s’agit de faire des économies, dont la logique mène à un contrôle croissant des patients et des citoyens, qui met les médecins les plus vertueux en conflits d’intérêts avec la sécurité sociale, dont les fondements scientifiques sont gangrénés par les conflits d’intérêts et dont le principal « avantage » est aussi le plus gros inconvénient puisqu’il s’agit surtout d’éviter d’avoir à penser par soi-même.
Il y a un bon article dans la revue Pratiques en ligne qui traite du CAPI et en explique les vrais enjeux :
http://www.pratiques.fr/Le-CAPI-cheval-de-Troie-de-la.html
Je suis d’accord avec JCG il faudrait vraiment LABELLISER les médecins qui se donnent la peine d’avoir une démarche qualité rationnelle, scientifique et fondée sur l’intérêt des patients. Les fédérer autour de thèmes qui comportent un corpus d’études assez solide pour faire consensus comme le dépistage du cancer de la prostate ou du sein avec des slogans comme « touche pas à ma prostate » ou « touche pas à mon sein » (bon, peut-être pas celui-là, même si c’est d’actualité) afin que les patients puissent les reconnaître. Et cela en dehors des syndicats qui prennent aussi en charge les intérêts corporatistes et qui sont donc sujets aux conflits d’intérêts. Pour moi, exemple à suivre.
CMT
Bonjour,
RépondreSupprimerJe suis intéressé et en même temps surpris de tous ces commentaires sur votre profession. Cela ne m'empêche pas néanmoins de me demander pourquoi tant de médecins publient sur internet leurs états d'âme.
A mes yeux,il y a pourtant un certain corporatisme et une représentation par des syndicats qui organisent la profession etc.
Il semble que cela ne suffise pas et je ressens souvent que vous êtes désabusés; pour tout dire, on dirait presque que chacun excercice la médecine "à sa façon" et dans son coin. Les groupes de paires ont du mal à fonctionner, pour ceux qui voudraient bien faire et de l'autre coté, CMT nous donne des exemple de pratiques "tiroir-caisse".
Le bon sens et la simplicité ne sont pas bien enseignés et ne sont pas toujours une évidence une fois sur le terrain, au contact de la demande de première intention.
RépondreSupprimerPour la spécialité qui me concerne, combien de collyres antibiotiques ou anti-allergiques sur des yeux rouges et sans diagnostic établi au lieu de sérum phy pendant 24 à 48h ? Combien d'angiographies fluorescéiniques sur des DMLA sèches et peu symptomatiques ou des rétinopathies diabétiques débutantes, qui n'auront aucune conséquence thérapeutique ? Et celà en dehors même de toute préoccupation mercantile, par ignorance, par manque de réflexion, par imprégnation hospitalière.
Il me semble que les choses changent quand même, lentement, et plus comme une conséquence de la démographie médicale déclinante, simplicité obligée, que par l'effet d'une meilleure éducation des soignants.
NP
PS: il s'agit du double d'un commentaire laissé sur le blog de Philippe Ha Vin qui relevait cette initiative étasunienne. Je précise que les soignants que j'évoque sont autant les OPH (moi-même inclus)que les MG, diabétologues, allergologues et autres pharmaciens qui peuvent être concernés.
RépondreSupprimerNP
A Didier
RépondreSupprimerBonjour,
Il me semble que c’est une question à laquelle un homme ne voudrait pas répondre et qui est pourtant très pertinente. Alors je vais essayer d’y répondre. D’autres me corrigeront si je me trompe
Un certain nombre de médecins ont choisi ce métier par vocation de service, ils veulent être utiles à leurs patients, c’est le sens qu’ils donnent à leur métier.
Ils observent que l’évolution actuelle de la médecine, bien représentée par l’évolution des recommandations officielles, n’est plus fondée sur des données scientifiques, mais motivée par des facteurs extérieurs à la médecine et aux médecins. S’ils les appliquaient telles quelles ces recommandations ne leur permettraient plus de remplir la mission d’utilité qu’ils se sont donnés et qui leur permet de donner du sens à leur travail. Il est même très probable qu’ils nuiraient aux patients plus qu’ils ne les serviraient.
D’un autre côté, une majorité de médecins et de patients restent sous l’influence de la version de la médecine qui est présentée officiellement et qui est elle-même sous l’influence des intérêts propres et financiers de l’industrie pharmaceutique : une médecine technique, une médecine magique, capable de résoudre tous les problèmes par des moyens techniques, produits miracle ou autres.
Dans le même temps les pouvoirs publics profitent de ce moment de faiblesse, de crise identitaire des médecins, pour introduire des réformes, sous forme contractuelle, qui renforcent la division entre médecins, et qui visent à mettre les médecins généralistes libéraux, jusqu’ici fiers de leur indépendance, sous contrôle (cf CAPI).
Certains médecins continuent, contre vents et marées, à vouloir faire de la médecine qui ait du sens, dans l’intérêt réel des patients, et non de la médecine Coca Cola. Alors ils se trouvent en position de dissidence. Ils sont marginalisés par les autorités, ne sont pas reconnus par leurs patients qui sont dans une optique consumériste et qui leur reprochent de ne pas en faire assez, sans comprendre que pour faire au mieux il est parfois très important d’en faire moins.
D’autres, en particulier des spécialistes mais pas seulement, ont tendance à résoudre ces conflits par la facilité, la fuite en avant vers la médecine-fric, comme en témoigne l’explosion des dépassements d’honoraires.
Donc nous sommes à une sorte de carrefour, où les médecins, ceux qui veulent conserver du sens à leur travail et continuer à être utiles à leurs patients, doivent se résoudre à faire le deuil d’une certaine médecine, qui pouvait s’appuyer avec confiance sur les avis officiels et qui laissait entrevoir une progression infinie vers des progrès techniques toujours plus importants.
Et qui dit deuil dit déprime.
Pour l’instant chacun déprime dans son coin alors c’est vrai que ce serait une bonne idée de se regrouper, non pour déprimer ensemble mais pour ouvrir de nouvelles perspectives hors du champ de la médecine Coca Cola.
CMT
@ Didier
RépondreSupprimerVous avez écrit : "Il semble que cela ne suffise pas et je ressens souvent que vous êtes désabusés; pour tout dire, on dirait presque que chacun excercice la médecine "à sa façon" et dans son coin. Les groupes de paires ont du mal à fonctionner, pour ceux qui voudraient bien faire"
Il n'y a pas tant de médecins que cela qui écrivent sur des blogs.
Quand je me suis installé il y a 32 ans, je ne me posais aucune question sur le fait de recevoir ou non des visiteurs médicaux ; je lisais assidûment le Quotidien du Médecin ; je croyais à la prééminence de la médecine de spécialité ; il n'y avait pas de HAS, ni de recommandations françaises mais seulement des avis d'experts ; les généralistes n'avaient pas de syndicat représentatif ; Prescrire n'existait pas ; et les médecins prescrivaient ce qu'ils voulaient sans qu'on leur demande la moindre justification.
Le paradoxe actuel vient de ce que la normatisation est combattue à la fois par les partisans de Big Pharma et par les intellectuels critiques ; les recommandations sont vécues par moi à la fois comme un progrès et comme une contrainte insupportable : un progrès par rapport au bordel ambiant, une contrainte en raison des conflits d'intérêts sous-jacents (et, je ne le répèterai jamais assez, ces conflits ne sont pas que financiers).
Les médecins généralistes vivent une époque charnière où ils pourraient avoir beaucoup d'armes pour exercer une médecine de qualité (à ceci près que le corpus théorique et empirique de la médecine générale est étique) mais où ils sont en train de disparaître.
L'avant-garde des médecins généralistes est très au dessus sur le plan de la connaissance et de l'opérationnalité que la moyenne des spécialistes...
A bientôt.
je ne suis pas sûre que le CAPI gêne bp Big Pharma, pour mes raispns suivantes:
RépondreSupprimer- cela ne remet pas en cause l'idée selon laquelle les médicaments sont le principal moyen de prévention
-des critères intermédiaires,qui n'ont pas prouvé leur pertinence restent le principal moyen d'évaluation
-cela va augmenter le nombre glpbal de patients traités pour maladies chroniques sur ces critères
-cela habitue les médecins à la corruption:toucher de l'argent pour orienter ses prescriptions , impensable pour un médecin salarié
-cela habitue les médecins à ne pas penser
CMT
Bonjour,
RépondreSupprimerMerci à tous, je n'en attendais pas tant. C'est très agréable de constater des réactions et de mieux comprendre ensuite. C'est ce que j'aime. On peut avoir la parole même si on n'est pas professionnel de la santé et avoir un retour.
"Pourquoi les associations de médecins généralistes français ne font-elles pas de telles propositions ?"
RépondreSupprimerparce qu'en notre pays, ces quelques éventuels gaulois n'auraient même pas l'occasion de poser devant le photographe ....
tony