Quand je pense au Canada, je
pense aux paysages paradisiaques des grandes étendues sauvages, quasi
désertiques, s’étendant à perte de vue. Je pense aussi au froid. Et je pense à
la démocratie.
Au plan de la démocratie, le
Canada est, dans mon esprit et celui de beaucoup de Français, à mettre sur le
même plan que les pays scandinaves ou la Suisse.
Petit pays par le nombre
d’habitants, 33 millions, le Canada est un grand pays par son étendue, quinze
fois celle de la France. Il est formé de dix provinces fédérées jouissant
chacune d’une large
souveraineté, car élisant leur
propre parlement et possédant chacune son propre gouvernement. Les compétences
du pouvoir souverain des provinces s’exercent dans des domaines comme la santé,
l’éducation, la justice, les programmes sociaux… Le reste du Canada est composé de trois territoires placés
sous l’autorité du gouvernement fédéral.
La plus occidentale des provinces
canadiennes, bordant le Pacifique, est la Colombie Britannique (British
Columbia ou BC, en anglais), une province de 4,6 millions d’habitants, ayant
pour langue officielle l’anglais, dont la capitale est Victoria et la plus
grande métropole Vancouver, qui regroupe à elle seule la moitié de la
population de la province.
A l’époque des faits que je vais
relater, pendant les premiers mois de 2012, c’était Mike de Jong qui était Ministre
de la santé. Celui-ci appartient au parti
libéral de Colombie Britannique qualifié de « conservateur » et
décrit comme soutenant des politiques néo-libérales. Ce parti est aux manettes
de la Colombie Britannique depuis 2001 et son action a été marquée par les
dérégulations, la réduction des aides sociales, les réductions d’impôts et la privatisation à prix soldé de
certaines entreprises publiques.
Depuis septembre 2012 Margaret
MacDiarmid, du même parti, lui a succédé à ce poste.
C’est dans cette province que
s’est produite une attaque sévère et sournoise aux politiques de régulation du
marché du médicament, mettant potentiellement en danger la santé et la sécurité
des citoyens.
Mes sources
Pour une fois je ne vais pas
multiplier les recoupements car, d’une part, il n’y a pas pléthore de
commentaires dans la presse canadiennes sur cette affaire, et c’est un des
faits inquiétants : le silence relatif de la presse.
D’autre part, deux enquêteurs
« au-dessus de tout soupçon », se sont chargés du travail.
Il s’agit , pour le premier, d’Alan Cassels, chercheur canadien en
politiques du médicament de l’Université de Victoria BC, auteur de « Selling sickness » en 2005 (qu’on
peut traduire par « vendre des maladies » ou « façonnage de
maladies »)en collaboration avec Ray Moynihan, journaliste d’investigation
australien. Voici une présentation en français de son livre par Med’ocean , l’association de
médecins réunionnaise (http://www.medocean.re/wp-content/uploads/Reunion-FRENCH-1-June-2013-no-photos-AB_05-30.pdf)
. Alan Cassels a écrit, en mars 2013, un article rendant compte de cette
affaire, intitulé « The best place on earth (for pharmaceutical
companies) » (« Le meilleur endroit du monde (pour les compagnies
pharmaceutiques) »), où il faut peut-être voir une référence ironique au
«Meilleur des Mondes » de Aldous Huxley. Son article a été publié dans le
magazine Focus online ( http://focusonline.ca/?q=node/516)
.
Le deuxième investigateur est Paul Christopher Webster, journaliste indépendant natif de
Colombie Britannique, auteur de documentaires et récompensé à plusieurs
reprises par sa profession pour son travail de journaliste d’investigation (http://www.paulcwebster.com/) , et notamment pour l’article que je résume ici, daté d’avril
2013. Cet article a été publié
dans le magazine de Vancouver, Vanmag, et est intitulé « Is
the government gagging BC’s drugs
safety scientists ? » (« le gouvernement veut-il bâillonner
les chercheurs qui évaluent la sécurité des médicaments ? ») (http://www.vanmag.com/News_and_Features/The_Back_Peddling_of_BCs_Drug_Safety_Programs).
Le contexte international du marché du médicament : la bulle pharmaceutique.
Pour une meilleure compréhension des enjeux de cette succession d’évènements extrêmement troublants pour une démocratie, il est intéressant d’avoir une idée du contexte qui est celui du marché mondial du médicament tel qu’il s’est transformé pendant ces quinze dernières années. Je vais tenter de résumer ces transformations de manière synthétique.
A la fin des années
quatre-vingt-dix, début des années
deux-mille, la concentration du marché du médicament avait atteint son
apogée puisque 98,7% du chiffre d’affaires de l’industrie pharmaceutique était
réalisé dans les pays les plus riches, tandis que les dix premiers laboratoires
pharmaceutiques représentaient à eux seuls 45,7% du chiffre d’affaires mondial
du médicament (http://apps.who.int/medicinedocs/pdf/s6160e/s6160e.pdf).
Néanmoins, au même moment, et pour la première fois, toutes les
conditions étaient réunies pour que ce marché connaisse des mutations majeures,
avec pour conséquence une fin de la suprématie des plus grosses multinationales
pharmaceutiques, aussi appelées, par un raccourci, Big Pharma, simultanément à
une diminution vertigineuse des dépenses de santé des pays riches, et à une
diffusion massive des médicaments essentiels dans les pays pauvres.
En effet, à une panne durable de
l’innovation, reconnue par les analystes sérieux du domaine, depuis les années
quatre-vingt, s’ajoutait la fin prévisible des brevets de nombreux médicaments
parmi les plus innovants ou les plus vendus dans le monde, source de rentes
pour les grosses firmes qui en possédaient les brevets, tandis que certains
pays émergents, notamment l’Inde, le Brésil et la Chine, étaient en train
d’acquérir de véritables capacités industrielles de production de médicaments,
annonçant une rude concurrence pour Big Pharma, et la possibilité, pour les
pays les plus pauvres, d’avoir accès aux médicaments à des prix abordables.
Les brevets des médicaments les
plus vendus tombant dans le domaine public les uns derrière les autres, la
diffusion mondiale des génériques, aurait donc dû se traduire, à la fois par un
meilleur accès aux médicaments pour les pays pauvres, et par un effondrement du
marché mondial du médicament en valeur, avec des économies substantielles pour
les pays riches. En effet, d’après IMS Health, multinationale privée
spécialisée dans l’analyse prospective du marché de la santé et, désormais, principal fournisseur
mondial de ce type de données, pour un dollar investi dans les génériques, trois dollars
sont économisés, en moyenne sur les médicaments sous brevet.
Rien de tout cela ne s’est passé,
et le marché mondial du médicament a continué à croître en valeur de manière
exponentielle, en particulier dans les pays riches, où les dépenses ont atteint
des sommes difficilement soutenables pour des économies supposées en crise. Tandis
que, d’un autre côté, malgré une diminution modeste de la concentration en
pourcentage du chiffre d’affaires sur les dix premières firmes mondiales, la
valeur du chiffre d’affaires détenu par ces très grosses firmes a explosé.
En termes globaux, le chiffre d’affaires mondial de
l’industrie pharmaceutique est passé de 82 Mds (milliards) en dollars courants
en 1985 à 327 Mds en 1999 puis à
856 Mds en 2012 . De ces 856
Mds 77%, soit 660 Mds de chiffre d’affaires, est réalisé dans les pays riches
(d’après le rapport de l’OMS, the World medecine situation en 2004 et les
chiffre d’IMS Health pour 2012).
Si la révolution du marché
mondial du médicament n’a pas eu lieu, c’est que Big Pharma a su forger une
stratégie, trouver des alliés et
multiplier les tactiques pour éviter la concurrence des pays émergents et la
baisse des prix des médicaments dans les pays riches . Elle a ainsi déjoué
toutes les prévisions et largement conforté une position oligopolistique sur le
marché du médicament.
Parmi les tactiques mises en oeuvre,
nous pouvons citer en premier lieu
les négociations menées au sein de l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce)
lors des cycles de négociations internationales d’Uruguay et de Doha de 1986 à
nos jours. L’un des principaux objectifs de ces négociations dans le volet
concernant le marché du médicament, était d’amener les pays émergents à adopter
une législation les obligeant à respecter les brevets des grosses firmes ayant
leur siège dans les pays riches. Pour mener ces négociations au sein de l’OMC,
les pays du G8 disposaient de moyens sans commune mesure avec ceux des pays en
développement, aussi bien financiers qu’ en fonctionnaires et négociateurs.
Tandis que les multinationales disposaient de régiments d’avocats-conseil et de
lobbyistes.
Les négociations ont été longues,
mais les pays émergents ont fini par céder. L’Inde a été, en 2005, parmi les
derniers pays à avoir adopté une législation protégeant les brevets. Cela a eu
pour conséquence de freiner durablement la concurrence faite par ces pays à Big
Pharma mais a aussi limité, dans une large mesure, l’accès des pays les plus
pauvres aux médicaments.
Ainsi, contre vents et marées et
malgré la concurrence de gros producteurs dans les pays émergents, la
concentration en valeur du marché du médicament sur quelques multinationales ayant
leur siège dans les pays riches s’est maintenue pendant le début du
vingt-et-unième siècle.
En 2012, les dix
premières firmes pharmaceutiques par le chiffre d’affaires avaient leur
siège dans cinq pays (Etats Unis,
Suisse, Royaume Uni, France, Israël) et représentaient à elles seules 354,5 Mds de
dollars de chiffre d’affaires, soit 41,4%
du marché mondial du médicament.
Une deuxième tactique mise en place par Big Pharma pour s’opposer à la
diffusion des génériques s’est concrétisée par l’explosion des demandes
d’autorisation de mise sur le marché pour des me-too.
On peut définir les me-too comme
des médicaments de marque brevetés proches de médicaments de référence déjà
existants, n’apportant pas d’amélioration significative au plan thérapeutique.
Mais les me-too présentent un grand intérêt pour les firmes pharmaceutiques.
Car en les introduisant sur le marché au bon moment, avant que le brevet du
médicament de référence ne soit caduc, et en utilisant toute la puissance de
feu de leur service marketing, les me-too leur permettent de concurrencer
efficacement les génériques du médicament de référence et de récupérer les
parts de marché détenues par celui-ci au bénéfice du me-too, qu’elles se
chargent de faire passer pour des innovations majeures auprès des patients et
des médecins.
Les me-too permettent donc de
déposer des nouveaux brevets avec très peu d’efforts de recherche, et, grâce à
la complaisance des agences de contrôle et d’évaluation et aux carences de la
régulation, ont permis à certaines firmes de toucher le jackpot à peu de frais.
On peut citer, à titre d’exemple parmi tant d’autres, l’Inexium®, ou ésoméprazole, des laboratoires Astra Zeneca,
laboratoire britannique né de la fusion entre Astra laboratoire suédois et
Zeneca, et septième laboratoire mondial par le chiffre d’affaires en 2012. L’Inexium
a avantageusement pris la suite du Mopral
®, oméprazole, dont il est un isomère (une molécule ayant la même formule
chimique brute mais une disposition spatiale différente). L’ésoméprazole ou
Inexium®, commercialisé en France en 2002, était, en 2006, au deuxième rang
mondial pour le chiffre d’affaires généré, rapportant 6,7 Mds de dollars à
Astra Zeneca, c'est-à-dire jusqu’à 20% du chiffre d’affaires de la firme (http://pharmacoclin.hug-ge.ch/_library/pdf/cappinfo51.pdf
). Pourtant, la spécialité avait été classée comme ayant une ASMR (Amélioration
du Service Médical Rendu) de niveau IV, c'est-à-dire mineure, par la HAS (Haute
Autorité de Santé). Son rapport coût/bénéfice a été notamment critiqué par la
revue Prescrire (http://www.prescrire.org/aLaUne/dossierEsomeprazole.php)
. En France, c’est notamment par
le biais des prescriptions hospitalières que l’Inexium avait conquis des parts
de marché (http://boree.eu/?tag=inexium
).
Pour éviter la générication de ses médicaments, Big Pharma
brouille aussi les pistes, en multipliant les brevets (par exemple, en déposant
des brevets qui concernent la forme galénique) pour les médicaments sous brevet
existants, afin de rendre ceux qui peuvent être génériqués plus difficilement
identifiables.
Pour contrer le développement
d’un marché des génériques
indépendant de leur sphère d’influence, les plus grosses multinationales
pharmaceutiques peuvent créer aussi leur propre division génériques, comme Zentiva pour Sanofi. Ou bien peuvent racheter
les droits sur des génériques a d’autres laboratoires, comme l’a fait Pfizer en
2009 (http://www.20minutes.fr/article/554383/Economie-Pfizer-se-renforce-dans-les-generiques.php)
.
La lutte des multinationales
pharmaceutiques n’est pas tant contre les génériques que contre la baisse de
leur chiffre d’affaires que ceux-ci pourraient provoquer. La stratégie de Big
Pharma s’est avérée, à cet égard, tout à fait efficace, puisque aux Etats Unis,
où, en 2010, les génériques représentaient 71,2% des médicaments prescrits, les
dépenses médicamenteuses ont continué à progresser à grande vitesse (http://www.uspharmacist.com/content/s/253/c/41309/ ).
Une troisième tactique consiste à s’attaquer à la cible des ventes,
c’est à dire aux patients, en élargissant cette cible, et donc le marché. C’est
le sujet du livre d’Alan Cassels , « façonnage de maladies », évoqué
plus haut. Grâce, bien souvent, à la complicité des sociétés savantes,
notamment aux Etats Unis, dont les recommandations concernant les maladies
servent habituellement de référence aux pays européens, nous avons assisté à
une extension
accélérée du champ de la pathologie , tout particulièrement dans les
pays riches.
Un exemple parlant est fourni par
le DSM, Diagnostic and statistical
manual, conçu comme un guide diagnostique
qui classe les pathologies
psychiatriques par catégories en fonction de leurs symptômes. La
conception de ce manuel veut qu’un
ensemble de symptômes soit nécessaire et suffisant pour définir un trouble
psychiatrique. Un traitement médicamenteux est généralement associé aux
pathologies ainsi définies. Les DSM est mis à jour par la Société américaine de psychiatrie. Plusieurs versions de ce manuel
sont parues ces dernières décennies, la dernière étant le DSM-5, en 2013. Ce que
les critiques reprochent à ce
manuel est le fait que pour
certains items, les critères diagnostiques sont si larges et vagues, qu’ils ne
permettent absolument pas de distinguer le physiologique du pathologique. On
peut aussi lui reprocher de postuler, par un raccourci qui n’a rien de bien
scientifique mais qui reflète plutôt les conflits d’intérêts des auteurs, qu’un
ensemble de symptômes est en lien avec un désordre neurobiologique. Le risque,
sous la pression constante du marketing de Big Pharma, est celui d’un
glissement perpétuel vers un élargissement de la population diagnostiquée comme
souffrant de troubles psychiatriques. Ce qui revient à une augmentation du
chiffre d’affaires généré par la vente de psychotropes pour les firmes mais entraîne un
accroissement des risques pris par une population dont les symptômes plus ou
moins rigoureusement identifiés par les médecins, ne correspondent en réalité à
aucune maladie psychiatrique.
Un exemple paradigmatique de dévoiement de la médecine induit
par cette approche est donné par le TDAH
(Trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité), trouble décrit par le
DSM, supposé être d’origine neurobiologique, et pouvant être suspecté devant
tout enfant plus ou moins agité. La pression de Big Pharma sur les médecins et
les parents et les pressions sociales de recherche de performance se
conjuguant, on en est arrivés aux Etats Unis à une situation où 3,5 millions
d’enfants et adolescents sont traités
et où 15% des lycées ont été diagnostiqués comme atteints de ce trouble.
Les personnalités du monde médical et de la recherche sont de plus en plus
nombreuses à dénoncer cet abus (http://www.nytimes.com/2013/12/15/health/the-selling-of-attention-deficit-disorder.html?_r=0
). Le marché des enfants commençant à s'épuiser on commence à investir le marché des adultes...
Une autre tactique pour élargir la
population cible des traitements, est la modification
des seuils des critères intermédiaires qui servent de repère pour la
prescription de traitements au long cours, comme dans le diabète,
l’hypercholestérolémie ou l’hypertension. Depuis les années quatre-vingt-dix,
les seuils de traitement pour ces pathologies ont été constamment revus à la
baisse (http://dartmed.dartmouth.edu/winter10/html/changing_the_rules.php).
A ce sujet, je me contenterai de citer le dernier épisode en
date, où la Société américaine de
cardiologie a été prise en flagrant délit de partialité pro-pharma. Non
seulement les critères de prescription des statines,
médicaments contestés mais très profitables prescrits pour faire baisser le
cholestérol, ont été modifiés par cette société savante hors de tout fondement
scientifique en 2013, mais l’outil proposé aux médecins pour calculer le risque
et évaluer l’intérêt de la prescription de statines s’est avéré biaisé. D’après
des épidémiologistes renommés tels Nancy
Cook aux Etats Unis, le calculateur fourni aux médecins par la Société
américaine de cardiologie surévalue la population supposée relever du
traitement d’après les critères définis arbitrairement par cette même société
de 75 à 150%. (http://www.nytimes.com/2013/11/18/health/risk-calculator-for-cholesterol-appears-flawed.html?pagewanted=1&_r=1&
). On comprend mieux quel est l’intérêt pour Big Pharma de ces subterfuges, dès
lors qu’on sait que les anticholestérolémiants représentaient en 2012, la
deuxième classe thérapeutique en valeur du marché mondial du médicament, soit
3,6% de ce marché ou 30 Mds de dollars.
Il faut aussi mentionner, au
titre de la recherche d’une extension du marché du médicament, la multiplication des recommandations de
dépistage systématique des cancers, souvent fondées sur des avis et des études
biaisés, qui augmentent artificiellement la fréquence de certains cancers comme
celui du sein, sans que les bénéfices desdits dépistage ne soient démontrés (http://docteurdu16.blogspot.fr/search/label/CANCER%20DU%20SEIN
).
Enfin, quatrième tactique et non la moindre, le développement de marchés de niche, domaine qu’on pourrait aussi appeler » le marché de l’espoir » ou « le
marché des médicaments de la dernière chance ».
Les médicaments de niche
s’adressent à des maladies graves pour lesquelles on ne dispose pas de
traitement efficace.
Ces médicaments de niche sont
souvent des biomédicaments définis comme des médicaments faisant appel à une
source biologique pour la fabrication de leur principe actif, et issus des biotechnologies. Un exemple de biomédicament est l’Avastin ® ou bévacizumab, du laboratoire suisse Roche, qui a
obtenu l’AMM européenne en 2005. Mais
les médicaments de niche peuvent aussi être des médicaments de synthèse, créés
par synthèse chimique, comme le tamoxifène. Cette dernière molécule est sur le
marché depuis 1976 et est donc commercialisée en tant que générique. On lui attribue une part importante de
la réduction de mortalité par cancer du sein dans les pays développés observée
dans les années 90.
Le problème des biomédicaments
destinés aux maladies graves c’est que, au nom de l’urgence qu’ils sont censés
traiter et de leur caractère supposé innovant, ils bénéficient de procédures
accélérées de mise sur le marché et tendent donc à banaliser ce type de
procédures. D’après Donald Light et Joel Lexchin , des chercheurs
s’intéressant au marché du médicament, 44%
des médicaments postulant pour une AMM auprès de la FDA (Food and Drug Adminsitration) entre 2000 et 2010, ont bénéficié
de procédures prioritaires.
Les biomédicaments bénéficient aussi d’un regard
particulièrement bienveillant des autorités de contrôle, qui aboutit à ce que des bénéfices totalement marginaux
et contestables, comme une augmentation de la survie de quelques semaines dans
le traitement du cancer, sont considérés comme significatifs, et surtout
suffisants pour que les autorités leur accordent une AMM ainsi que des prix de
vente tout à fait exorbitants. Prix qui sont généralement remboursés par les
assurances publiques ou privées, selon les cas et les pays.
Néanmoins, on doit constater qu’à des effets thérapeutiques
qui peuvent être parfois assez spectaculaires, comme en rhumatologie, sont
associés des effets indésirables non moins spectaculaires, ce qui limite
beaucoup l’intérêt de ces médicaments.
Mais ces effets indésirables ne seront
mis en évidence, bien difficilement à vrai dire, qu’après la mise sur le marché
de ces médicaments, ce qui peut provoquer, au nom de l’espoir, des véritables
hécatombes. La FDA a considéré que c’était le cas pour l’Avastin, qui ne
bénéfice plus de l’indication de traitement du cancer du sein métastasé depuis
2011 aux Etats Unis, en raison de ses effets indésirables provoquant une
surmortalité des femmes traitées sans bénéfice observable (http://www.fda.gov/newsevents/newsroom/pressannouncements/ucm280536.htm).
L’Avastin est toujours indiqué en Europe et en France dans le cancer du sein
métastasé.
A la faveur de l’apparition des biomédicaments
et de leur coût, les médicaments contre le cancer sont devenus la première
famille thérapeutique par le chiffre d’affaires dans le monde et représentent 4,3% du total du marché
du médicament, soit 36,8 Mds de
dollars, avec d’excellentes
perspectives de croissance dans les toutes prochaines années, d’après
IMS Health.
Une des clés de compréhension du
succès des stratégies imaginées par Big Pharma, est que le terme innovation, qui est un terme vague et
n’est défini nulle part, est devenu un véritable sésame, un mot magique qui
permet de traverser toutes les barrières du contrôle sans encombre et d’obtenir
des prix de vente exorbitants à l’origine de dépenses insoutenables pour les
finances publiques et pour les patients.
Le résultat de la combinaison de
toutes les tactiques mises en œuvre par Big Pharma, est que le marché est
inondé de nouvelles spécialités, apportant peu de bénéfices mais dont les
effets indésirables ne sont pas correctement évalués par les essais cliniques
menés par les laboratoires et visés superficiellement par les agences lors de
procédures d’autorisation accélérées.
Des médicaments de plus en plus
nombreux touchant des populations de plus en plus importantes dans un temps de
plus en plus court, voilà qui justifierait une régulation et des contrôles accrus.
C’est exactement le contraire qui
se passe, comme nous allons le constater.
Voici donc notre histoire canadienne, telle que
racontée par Paul C. Webster et Alan Cassels.
Au sein du Ministère, une division du médicament efficace, indépendante et… très dérangeante.
Malcom Maclure
Au début de l’année 2012, dans le Ministère de la Santé de British Columbia, cette province canadienne autonome, il y avait une petite équipe, d’à peine sept personnes, impliquée dans l’évaluation des médicaments. Cette équipe était composée, notamment, d’un chercheur de renommée internationale Malcolm Maclure, formé à Harvard et Oxford, détenteur d’une chaire prestigieuse de pharmacovigilance à l’Université de British Columbia (UBC), qualifié par un autre chercheur renommé David Henry, de l’Institut pour les sciences evaluatives cliniques de Toronto, de personne totalement intègre, et de chercheur de tout premier plan. Il y avait aussi dans cette division Ron Mattson, un manager de projets de recherche, ou encore des économistes comme Bill Warburton et sa femme, Rebecca Warburton. Cette petite équipe menait de front, et en collaboration avec des chercheurs indépendants de l’université de Columbia appartenant à la Thepateutic initiative (TI), des recherches sur de nombreux médicaments dont l’efficacité ou la sécurité pouvait être mise en doute.
Le pouvoir de cette division
était grand, puisque le résultat de ses recherches se traduisait
directement par des décisions de
prise en charge ou non de médicaments par le système d’assurances public, appelé
Pharmacare, système d’assurance
public prenant en charge les prescriptions pour les personnes éligibles, ou par
des retraits d’indication d’un traitement dans des pathologies où la recherche
démontrait un mauvais rapport bénéfice/risque.
Pour mener ces recherches,
l’équipe s’appuyait aussi sur un réseau fédéral d’évaluation des médicaments
bénéficiant de financements publics, le Drug
Safety and Effectiveness Network (DSEN). Elle comptait aussi sur un outil
particulièrement performant, un outil de recueil et de traitement des données
concernant les médicaments appelé Pharmanet.
Cet outil, créé en 1996 dans la province de Colombie Britannique grâce à un
financement public, était qualifié d’unique, car il permettait de centraliser
toutes les informations concernant la consommation de médicaments par chaque
citoyen de Colombie Britannique. Il constituait ainsi la base de données la
plus complète et fiable de la consommation de médicaments au Canada. Parmi les
acteurs ayant accès à ces informations, outre les pharmaciens et les médecins,
le personnel de la division d’évaluation des médicaments du Ministère de la
Santé, qui pouvait les utiliser, une fois anonymisées, pour des études d’évaluation de sécurité ou
d’efficacité réelle des médicaments.
Entre 1996 et 2003, les dépenses
de médicaments par personne avaient doublé en Colombie Britannique, d’après un
chercheur en politiques sanitaires de l’UBC, Steve Morgan. Et cette augmentation était avant tout due à la
prescription de médicaments me-too, dont le prix était en moyenne quatre fois plus élevé que leurs équivalents
généricables.
A partir de 2008, le travail de
la division d’évaluation du médicament du Ministère de la santé, s’était
traduit par une diminution des dépenses de 500
millions de dollars chaque année. Néanmoins les dépenses, en 2012,
atteignaient 575 dollars par
personne et par an, soit 398 euros (à titre de comparaison, les dépenses par
personne en France étaient de 531 euros en 2010, et ont depuis continué à
augmenter) dont environ 274 dollars pris en charge par Pharmacare. Cela faisait
tout de même de la Colombie Britannique la province la moins dépensière en
matière de médicaments.
En 2008, alors que les tensions
entre la division chargée d’évaluer les médicaments et le gouvernement libéral
ne cessaient de croître, le gouvernement décida de la création de la Pharmaceutical
Task Force ou groupe de travail sur les médicaments, décrit comme contrôlé
par l’industrie pharmaceutique, pour enquêter sur le travail de la Therapeutics Initiative (http://www.ti.ubc.ca/about ), le groupe
de chercheurs indépendants évaluant les médicaments à l’Université de Colombie
Britannique. Cette équipe de chercheurs est plutôt renommée mondialement, et
est connue, notamment, pour avoir été l’une des premières à alerter au sujet du
Vioxx, cet anti-inflammatoire du
laboratoire Merck, qui aurait provoqué des dizaines de milliers de décès prématurés
aux Etats Unis, du fait de ses effets indésirables, notamment cardiaques,
occultés par le laboratoire fabricant.
L’un des membres du groupe de
travail mandaté par le gouvernement canadien pour mener l’enquête, Russell Williams, un lobbyiste connu oeuvrant
pour Big Pharma, a exprimé publiquement son opinion selon laquelle le groupe de
recherche universitaire indépendant devait être restructuré ou remplacé.
Le démantèlement du système d'évaluation du médicament en Colombie Britannique.
Il faut croire que quatre années
de travail ardu n’ont pas suffi au groupe de travail contrôlé par l’industrie
pharmaceutique, sans doute aidé par des armées d’enquêteurs privés, pour trouver la faille qui lui aurait
permis d’en finir avec l’indépendance des chercheurs chargés de l’évaluation du
médicament d’une manière qui présente un semblant de légitimité démocratique.
A l’été 2012, Ron Mattson, 59 ans
, manager de projet à la division d’évaluation du médicament et travaillant
depuis 27 ans au ministère, est convoqué dans le bureau de son chef qui lui
annonce qu’il est renvoyé. A la même période, Malcolm Maclure, le chercheur de
renommée internationale âgé de 60 ans, en voyage à l’étranger, reçoit un coup
de fil lui annonçant son licenciement.
Au total, ce sont sept employés
de la division qui seront licenciés, dont Roderick McIsaac, un doctorant qui
faisait des recherches sur les médicaments pris en charge par Pharmacare pour
l’arrêt du tabac, comme le Champix. Celui-ci se suicidera en janvier 2013.
Le ministère et les enquêteurs se
montrent très avares d’informations sur les raisons de ces licenciements qui
sont officiellement annoncés par la ministre de la santé, successeur de Mike de
Jong, Margaret McDiarmid en septembre 2012. D’après elle l’enquête aurait
commencé en avril, et les charges porteraient sur la gestion des données anonymisées
des patients inclus dans la base de données Pharmanet. L’utilisation de ces
données auraient fait l’objet d’une conduite répréhensible de la part des
employés de la division d’évaluation des médicaments lors des études menées
avec l’équipe de recherche universitairede la Therapeutics Initiative. En un
mot il y aurait eu une violation indue de l’anonymat.
Mais d’après le Sergent Duncan, de la Police Royale
Montée Canadienne, au moment où la ministre annonçait les licenciements, le
gouvernement avait encore à « complètement préparer l’affaire ». Ce
qui signifie, en d’autres termes, que le gouvernement ne disposait d’aucun
élément tangible pour étayer ses accusations.
Le licenciement des employés
donna un coup d’arrêt aux recherches de la division en coopération avec les
chercheurs de l’université de Colombie Britannique. Parmi celles-ci les
recherches sur les médicaments remboursés pour l’arrêt du tabac menées par Roderick
McIsaac, mais aussi des recherches de grande envergure sur les médicaments indiqués dans la
maladie d’Alzheimer, dirigées par Ron Mattson, et également des recherches sur
les médicaments prescrits à 63% des femmes enceinte, pour certains desquels,
parmi les plus prescrits, des données sur la sécurité faisaient défaut.
En même temps, et sans le
justifier clairement, le gouvernement de Colombie Britannique bloqua l’accès à
la base de données PharmaNet pour l’ensemble des chercheurs du Canada. Plus
exactement la gestion de l’accès à ces données fut confiée à un certain Bruce Carleton, un professeur de pharmacologie
de l’université de Columbia. Celui-ci se montra si parcimonieux et arbitraire
dans la gestion des autorisations d’accès aux données qu’il contribua à bloquer
une bonne partie des recherches canadiennes d’évaluation des médicaments, pour
lesquelles PharmaNet était un outil essentiel. Notamment les recherches du
réseau fédéral d’évaluation des médicaments, le DSEN.
Un des chercheurs de premier plan de la Therapeutics
Initiative de l’université de Colombie Britannique, Colin Dormuth, qui a, lors de ses précédentes recherches, apporté
un éclairage sur des aspects essentiels concernant la sécurité des médicaments
utilisés, par exemple, dans le TDAH, dans l’acné, ou sur les opioïdes, s’est
plaint, pour sa part, d’avoir dû débloquer 100 000 dollars pour acheter
aux Etats Unis des données qui n’étaient plus accessibles au Canada et sans
lesquelles le travail de son équipe n’aurait pu se poursuivre.
Le comportement de Bruce Carleton, le nouveau gestionnaire de
PharmaNet, finit par provoquer des
protestations de la FIPA (association
pour la défense de la liberté d’information et pour la protection de la vie privée) et de l’l’Association des médecins canadiens (http://www.cmaj.ca/content/185/9/E377
) et déclencha une commission d’enquête dirigée par la commissaire Elizabeth Denham, du bureau
d’Information et de protection de la vie privée. Celle-ci rendit des
conclusions en juin 2013. Elle
qualifiait les procédures de gestion des données mises ne place par Bruce
Carleton de « lourdes et bureaucratiques » et disait que cet état de fait était probablement
dû à un souci excessif de protection de la vie privée, aux dépens de l’intérêt
scientifique et pour la santé publique des données. Elle émettait également des
recommandations pour faciliter l’accès aux données.
Une fois les premiers moments de sidération et d’incompréhension
passés, une fois que les employés de la division d’évaluation des médicaments
eurent compris qu’il ne s’agissait ni d’un malentendu, ni d’une maladresse, ils
portèrent plainte contre le gouvernement de Colombie Britannique pour
licenciement abusif et pour diffamation, dans le cas de Malcolm Maclure.
Le gouvernement de Colombie Britannique reste
silencieux et l’affaire suit son cours…
The business must go on
Alan Cassels nous apprend, que dans le même temps où se déroulait cette déplorable affaire, le 19 juin 2012, le Ministre de la Santé, Mike de Jong, était à Boston au Congrès Mondial pour la Biotechnologie Globale, fréquenté par des chefs d’Etat, et annonçait en grande pompe la création d’un Centre pour la Recherche et le Développement des Médicaments (CDRD), sis dans un immeuble flambant neuf de 35000 mètres carrés, et bénéficiant de financements publics à hauteur de 54 millions de dollars. Le site internet du tout nouveau centre explique aux visiteurs : « notre mission est de minimiser les risques [pour les investisseurs] des molécules issues de la recherche financée par des fonds publics et de les transformer en investissements viables pour le secteur privé ».
Dans une interview Mike de Jong avait confié que son
gouvernement avait le souci de fournir « le bon environnement » pour
le développement du marché du médicament en Colombie Britannique.
Le bon environnement, en effet.
Conclusion en forme de satire
Nous, Français et Européens,
devrions méditer sur les enseignements à tirer de cette affaire. A l’évidence la
Colombie Britannique, avait pris beaucoup de retard en matière de politique du
médicament. Une petite équipe soudée de chercheurs et économistes indépendants,
une collaboration fructueuse avec des chercheurs universitaires indépendants,
des crédits publics, des outils performants comme PharmaNet, un réel pouvoir de
décision… bref, rien de tel pour
vous fiche en l’air un profitable marché pharmaceutique. Indubitablement la
Colombie Britannique donnait un très mauvais exemple aux administrations, aux
chercheurs, et aux citoyens du monde entier.
En Europe et en France, cela fait
longtemps que nous avons résolu ces problèmes. En organisant le transfert de la
gestion de la pharmacovigilance à l’industrie pharmaceutique, grâce à Eudravigilance,
en confiant l’essentiel des décisions d’autorisation de mise sur le marché à la
commission européenne, bien connue pour ses positions pharma friendly, en
morcelant les différents aspects de l’évaluation des médicaments et en diluant
les responsabilités, en rendant totalement opaques les mécanismes de fixation
des prix, en coupant les crédits aux services publics et chercheurs
indépendants pour les verser aux partenariats public-privé oeuvrant dans la
recherche de médicaments « innovants »… En vertu de quoi :
observez le résultat ! Le marché européen et français du médicament se
porte bien. Excellemment bien ! Dommage qu’on ne puisse pas en dire autant
des malades et des finances publiques.
Je suis vraiment désolée pour nos
amis canadiens. Et je tiens à leur dire que, en France, nous avons à leur
disposition, s’ils le désirent, tout un échantillonnage de professeurs et
d’experts aux compétences aussi discutables que leurs conflits d’intérêts sont certains.
Tellement nombreux, d’ailleurs, ces conflits d’intérêts, qu’ils en arrivent à
se neutraliser mutuellement.
Ils se tiennent à leur
disposition selon les besoins. Plus exactement selon les besoins du plus
offrant. Amis canadiens, il ne
faudra pas hésiter à faire appel à eux pour rattraper votre retard.
Rarement lu un article aussi complet et documenté sur le sujet. Les stratégies de Big Pharma sont disséquées les unes après les autres. C'est minutieux tout en étant passionnant comme un roman (Y en a-t-il qui s'embêtent encore à lire des fictions quand la réalité les dépasse largement?).
RépondreSupprimerCet article fera date et sera cité et recité en référence.
Bravo, merci
RépondreSupprimerje vais relire de ce pas
Très bel article qui se lit comme on mangerait un pain au chocolat, accessible à tout public.
RépondreSupprimerMerci de faire partager ce colossal travail.
Vraiment excellent .
RépondreSupprimerMagnifique analyse .
Un grand merci
Merci pour ce coup de projecteur sur ce qui se passe en Colombie Britannique. J'espère que votre billet trouvera des prolongements ailleurs sur le net ou dans des media français. Le domaine de la santé stricto-sensu n'est pas le seul affecté ; ce qui relève de l'écologie fait également l'objet, semble-t-il de menées bien alarmantes. Tout cela intervient dans un contexte politique local qu'il est difficile d'apprécier d'ici !
RépondreSupprimerMerci beaucoup pour ces appréciations, en particulier sur la facilité de lecture.
RépondreSupprimerMerci à Jean-Claude, mon éditeur (je n’en veux pas d’autre) qui a fait une relecture attentive et qui m’a permis de revoir le travail initial afin de le rendre plus clair et plus précis.
Je dois avouer que j’ai un faible pour le très bon journalisme d’investigation anglo-saxon, avec son approche précise, factuelle, quasi chirurgicale et que Paul C Webster a fait un excellent article pour lequel il a été récompensé. Et, pour le style, dans cette ambiance anglo-saxonne de type fiction livresque (la réalité dépasse ici la fiction comme le disait Rachel) me sont revenues quelques réminiscences de mes lectures d’auteurs classiques du roman noire américain comme Raymond Chandler, Dashiell Hammett ou Ed McBain.
Sur l’analyse de fond, elle est basée sur un travail de longue haleine, le décorticage de rapports français et internationaux, et la lecture de beaucoup, beaucoup d’articles lors de la préparation de plusieurs articles que je n’ai jamais eu le courage d’achever.
J’ai dû me restreindre pour que ce ne soit pas trop lourd.
Mais je vais compléter un peu dans les commentaires.
J’ai demandé à Jean-Claude, in extrémis, de rajouter cette phrase (et il l’a fait, merci) « Le marché des enfants commençant à s'épuiser on commence à investir le marché des adultes... ». Et Jean-Claude m’a transmis un excellent article (qu’il tient lui-même d’un inconnu, on nage en plein mystère) publié dans le New York Post ce 4 janvier , et intitulé sobrement, « le TDAH n’existe pas » http://nypost.com/2014/01/04/adhd-does-not-exist/ . En fait, le journaliste a lu, avant sa parution, le livre d’un neurologue Richard Saul, qu’on pourrait ici appeler « l’homme qui a osé dire que le roi était nu », et qui explique, à partir de sa propre pratique clinique, que la plupart des personnes, il parle d’adultes, qui viennent le voir avec la conviction de présenter un Trouble Déficitaire de l’Attention avec Hyperactivité, ont, en fait, d’autres difficultés relevant des problèmes normaux que tout un chacun rencontre dans sa vie, ou d’autres pathologies. C’est très intéressant parce qu’il nous montre que les patients se créent leur propre fiction, sur eux-mêmes, sur leur pathologie supposée, à travers les informations dont ils sont bombardés et les effets de mode. Je fais le lien avec le livre de Lionel Naccache, lui aussi neurologue, intitulé « Perdons nous connaissance » où il explique que nous métabolisons l’information que nous recevons pour nous construire des histoires qui ont du sens pour nous-mêmes. Ce qu’il appelle le système de « fiction-interprétation-croyance » http://www.dailymotion.com/video/xbzcpd_lionel-naccache-perdons-nous-connai_tech (minute 4’30’’). La force du marketing pharmaceutique c’est qu’il maîtrise, il a une parfaite connaissance de ces mécanismes de métabolisation subjective de l’information, et les utilise pour modifier notre représentation de nous-mêmes, de notre normalité ou non, dans le sens qui lui convient. Comme le dit Richard Saul, il est bien plus valorisant de se dire qu’on est atteint d’une pathologie qui fait de nous quelqu’un de peu conventionnel, et donc de particulièrement intéressant, que de se dire qu’on est simplement distrait, qu’on ne s’accorde pas assez de sommeil, qu’on manque de moments de détente ou de sport, ou qu’on a un déficit intellectuel dû à une maladie génétique, comme c’était le cas des patients qu’il cite en exemple.
Je dois ici avouer que, quand j’étais médecin scolaire, j’utilisais à l’excès les avantages des diagnostics de troubles des apprentissages, à la fois pour rendre les profs un peu plus compatissants et pour déculpabiliser les élèves. Il est bien plus valorisant d’être atteint de « dys » quelque chose, que de se dire qu’on est nul. L’objectif étant, pour moi, non pas tant la réussite scolaire, mais d’éviter que l’école ne démolisse ces enfants et ne leur fasse perdre toute confiance en eux-mêmes.
RépondreSupprimerMais la pression de Big Pharma aboutit à faire de mauvais diagnostiques, à prescrire des traitements dangereux et inutiles et à pérenniser les problèmes.
Cela met aussi en lumière un aspect important de la médecine : la représentation qu’un patient se fait de sa maladie est souvent au moins aussi importante que sa maladie elle-même.
Je voulais aussi mettre le focus sur le post de Borée, qui date d’il y a trois ans, où il analysait avec lucidité l’influence, en France, de l’hôpital sur les prescriptions de ville. Un hôpital lui-même totalement livré à l’influence de Big Pharma http://boree.eu/?tag=inexium . Cette influence va croissant et est également déterminante pour les médicaments de niche, surtout ceux issu des biotechnologies.
A anonyme,
RépondreSupprimeril est sans doute difficile d'apprécier les conditions politiques locales. Mais ce qui n'est pas très difficile, c'est de savoir, qu'en démocratie, quelqu'un qui est licencié doit l'être pour des motifs légitimes, dont il doit être pleinement informé.
Je pense que le travail de régulation du médicament mené par la division d'évaluation du médicament du ministère, était une sorte d'anomalie dans un monde où on glisse vers une dérégulation croissante des politiques du médicament, et qu'elle protégeait efficacement les citoyens des effets indésirables et de l'avidité sans bornes de l'industrie pharmaceutique.
Les conflits d'intérêts en ont eu raison, comme cela s'est passé sous nos latitudes, mais à la différence que chez nous cela s'est passé de manière beaucoup moins brutale, par des glissements successifs enveloppés dans un discours rassurant et technocratique digne de la novlangue orwellienne.
J’ai eu peur, ayant dû m’absenter quelques jours pour me faire opérer à l’Hôpital Bichat (toujours très ..très intéressant et instructif de passer de l’autre côté du miroir), j’ai cru qu’il y avait eu au moins trois posts que j’avais raté, déjà que j’avais pas eu le temps de donner mon avis sur Gaudi !!...mais non !!...un seul finalement! …mais toujours aussi documenté quand c’est Claudina qui parle et en plus palpitant comme un roman noir américain …j’espère que Chandler et Hammet se remuent dans leurs tombes. Merci pour cette belle ouvrage.
RépondreSupprimerDans les multiples façons de Big-Pharma de nous b…raconter des histoires comme le dit le super livre « Perdons-nous connaissance » que je recommande moi aussi chaudement, il en est une qui s’apparente à la Nov-langue, que nous a très bien décrit le Docteur r Monique DEBAUCHE Psychiatre à la Free Clinic de Bruxelles lors de son intervention aux rencontres de Pharmacologie sociale à Toulouse le 27 novembre 2013 .
Il s’agit, faute de créer de nouvelles maladies grâce au DSM, de changer le nom de maladies trop peu « vendeuses », ainsi par un tour de passe-passe la Psychose maniaco-dépressive est devenue trouble bipolaire. Comme par le plus grand des hasards, cet adoucissement de « désignation » (long commentaire sur le choix du terme !!…) , tant pour le médecin que le patient est arrivé non pas pour refourguer du « vieux » lithium ou antiépileptique, mais de supers nouveaux antipsychotiques comme par miracle déjà dans les tuyaux.
Comme le changement de « maux », permet, là aussi, de bouger les lignes entre normal et pathologique ( je relis Canguilhem ..), les prescriptions ont (et devraient encore plus) explosé(r). Je pense que la prochaine étape sera : « humeur changeante », ça en fait des patients en per(pro)spective…
Merci.
RépondreSupprimerJ’ai fini par comprendre, après tout ce temps et toutes ces recherches, que le problème est le suivant : lorsqu’un médecin et un patient sont dans un cabinet, ils se croient seuls, mais en réalité il y a un troisième acteur dans la pièce et ce acteur c’ est Big Pharma. Le patient est persuadé de formuler une demande qui lui est directement inspirée par son état, ses soucis de santé. En fait il formule ce que lui dicte la mode et le marketing de Big Pharma. Et, bien souvent, il recherche les solutions qu’on lui a diligemment suggéré de rechercher, à savoir tel médicament.
De son côté, le médecin est persuadé de fournir au patient le meilleur de ce qui se fait en matière de traitement. En réalité, il lui fournit ce que le VM, le quotidien du médecin, la formation continue organisée par Big Pharma et tel leader d’opinion lui ont instamment suggéré de fournir. Autrement dit, médecin et patient jouent une pièce dont le scénario a été écrit par un troisième larron, qui joue les hommes invisibles.
Parmi les personnages intéressants du combat contre la mauvaise influence de Big Pharma sur la médecine il y a Ben Goldacre. Il s’agit d’un médecin, psychiatre et épidémiologiste britannique de 39 ans, qui travaille aussi comme journaliste et tient une rubrique appelée Bad science dans le vénérable quotidien britannique, the Guardian. Il est très critique de tout ce qui brouille la science et, dans son premier livre ‘Bad science » en 2008, il soutenait la thèse qu’il n’y a guère de différence dans les procédés de Big Pharma et ceux utilisés par les marchands de médecines douces. Il a notamment sévèrement critiqué Andrew Wakefield, l’idole du mouvement prônant les médecines alternatives, qui avait supposément démontré que le vaccin contre la rougeole provoquait l’autisme.
Il fut l’un des initiateurs, début 2013, de la campagne « all trials regsitered, all results published », où participent, notamment, le BMJ, l’institut de politiques de santé de Dartmouth, PLOS et la collaboration Cochrane.
Je mets en lien une vidéo d’une conférence qu’il a donné en 2012 sous-titrée en français (elle dure 13’ ) http://www.alltrials.net/home/french-translation/ .
L’essentiel de l’argumentation peut-être résumée simplement. Si on jette une pièce ayant un côté pile et un côté face, mais qu’on ne présente au public que les fois où la pièce est tombée côté face, on pourra avoir l’impression que la pièce a deux côtés face. C’est ce qui se passe avec les essais cliniques. Seuls ceux qui ont des résultats positifs sont publiés. Un médecin, qui se trouve dans la situation de croire qu’un médicament est efficace sur la foi des essais publiés, n’est pas en mesure de prendre des décisions pondérées concernant ce médicament.
Face aux protestations de certains médecins et scientifiques des déclarations ont été faites et des règles adoptées pour enregistrer les essais avant qu’ils soient menés. Ceci, afin d’ avoir la garantie que tous seraient publiés. Ces tentatives se sont soldées par des échecs. Les revues médicales ont-elles-mêmes d’importants conflits d’intérêts avec les laboratoires.
Et Ben Goldacre fournit plusieurs exemples des effets désastreux de cette pratique. Les antiarythmiques prescrits après un accident cardiaque, par exemple, qui auraient provoqué une centaine de milliers de morts aux Etats Unis, parce que les chercheurs qui ont fait l’étude sur la molécule initiale en 1980 ont présumé que la mortalité supérieure dans le groupe traité était due au hasard et que celle-ci n’a jamais été publiée. Il évoque aussi le Tamiflu, dont il a été impossible, pour la collaboration Cochrane, d’obtenir la totalité des essais.
L’approche est intéressante. C’est le point de vue d’un épidémiologiste. Il est complémentaire de l’article ci-dessus.
Je plussois.
RépondreSupprimerJe ne peux pas m'empêcher de penser , malgré tout , qu'à chaque fois que l'on évoque ces manipulations de Big Pharma avec un médecin convaincu que Big Pharma n'est en réalité que Good Pharma, il nous renvoie la théorie du complot .
CMT, vous écrivez que " l’Inde, le Brésil et la Chine, étaient en train d’acquérir de véritables capacités industrielles de production de médicaments, annonçant une rude concurrence pour Big Pharma".
RépondreSupprimerQu'en est-il de la Russie ? Ce grand et puissant pays, visiblement très désireux d'accroître sa puissance, a-t-il une industrie pharmaceutique puissante ? Sinon pour quelles raisons il semblerait ne pas vraiment s'intéresser à cette énorme compétition mondiale ?
Avez-vous des infos sur la Russie ?
A BG
RépondreSupprimerautant que j'ai pu voir, la Russie fait partie des MARCHES émergents. Son industrie pharmaceutique propre a plutôt décliné. Elle attire les investisseurs (construction d'usines par les grosses pharmas) mais produit très peu, et son profil est plutôt proche de celui des pays en développement, c'est à dire qu'elle produit surtout des génériques.
CMT, vous écrivez « Andrew Wakefield, l’idole du mouvement prônant les médecines alternatives ».
RépondreSupprimerFranchement, je ne vois pas le lien entre l'affaire Wakefield et les médecines alternatives qui existaient bien avant cette affaire. Les médecins homéopathes par exemple soignent leurs malades sans s'occuper de Wakefield qu'ils ne connaissent peut-être que de nom. Entre autres exemples, les ostéopathes, médecin ou pas, pratiquent de même leur discipline ; de même pour l'acupuncture, la médecine énergétique chinoise et j'en passe.
Non, vous amalgamez sans doute 2 choses pourtant bien différentes : certains sites, blogs, associations dites "antivaccinales" se sont effectivement emparé de l'affaire Wakefield pour en faire leur cheval de bataille. De plus, la plupart du temps, sinon toujours, les militants de ces actions utilisent pour eux-mêmes des médecines alternatives. Les associations que j'ai connues dans le passé s'interdisaient de faire la promotion de médecines alternatives. Cela pouvait même être mentionné dans leurs statuts.
Aussi, je trouve très étrange, pour ne pas dire malsain sur le plan de l'éthique intellectuelle, que l'on puisse chercher à lier l'affaire Wakefield avec les médecines alternatives. Il est tout à fait possible et même très probable qu'il existe des sites soutenant Wakefield et faisant l'éloge de médecines alternatives. Mais les auteurs font sans doute cela à titre personnel ou, en tout cas, n'expriment que leur opinion et celle de leurs militants. Par contre je doute fort que ces sites soient des représentants accrédités de ces médecines douces ou même exprimeraient le point de vue de leurs praticiens. Ne confondez pas, SVP, militants et praticiens.
Pour ma part, je n'ai jamais parlé de l'affaire Wakefield sur mon blog sur les vaccins et dont l'objectif est seulement de montrer les limites de l'expertise vaccinale. Je n'y parle pas non plus de médecines alternatives même si j'essaie d'y avoir recours, si besoin. Il ne me viendrait pas à l'idée de lier les défauts de l'expertise vaccinale avec les mérites de l'acupuncture. Cela me paraitrait saugrenu. Et ça le serait tout autant si quelqu'un voulait dénigrer mon argumentation sur l'expertise vaccinale en avançant que je serai, à l'occasion, utilisateur de l'acupuncture... Saugrenu ou sectaire ?
Dont acte. Je peux ici témoigner que vous n'avez jamais pris la défense de Wakefield.
RépondreSupprimerL'amalgame, est, toutefois, facile à faire parce que les défenseurs des médecine alternatives sont souvent anti-vaccinalistes et que les anti-vaccinalistes sont, comme vous le dites, des utilisateurs des médecines alternatives.
Pour ma part, j'ai simplement constaté les réactions fanatiques auxquelles toute évocation du manque de crédibilité scientifique de Wakefield provoque chez les anti-vaccinalistes.
Et c'est le lien, justement. Parce que ce que Ben Goldacre reproche à Big Pharma comme aux défenseurs des médecines alternatives c'est de promouvoir leurs produits sur des bases non scientifiques et de mauvaise foi.
Alors là, ben là vraiment, j'en suis pantoise d'admiration. Ne me dites pas que vous n'avez présenté cet article qu'à Docdu16. Ne me dites pas que vous l'avez soumis à d'autres médias et que personne n'a voulu le publier pour que son audience soit démultipliée. Ne me dites pas que vous ne compter pas le faire si ce n'est déjà fait...
RépondreSupprimerLe Canada accusé de détruire son patrimoine scientifique. http://abonnes.lemonde.fr/planete/article/2014/01/08/le-canada-s-attaque-a-son-patrimoine-scientifique_4344475_3244.html
RépondreSupprimer(je n'ai pas vu de cd de garou... dommage).
Merci Pernelle. Ces compliments me font vraiment plaisir.
RépondreSupprimerJe vais finir par me dire que je manque vraiment d'ambition éditoriale. Et c'est certainement le cas.
Mais publier n'est pas un but en soi pour moi. Tout le monde publie en ce moment.Et tout le monde veut publier quelque chose.
A tel point que je me demande si la véritable ambition ne serait pas de ne pas publier.
Au-delà de mes plaisanteries douteuses, l'article est publié sous creative commons. Qui veut peut le diffuser.
A JCG,
On avait évoqué ça dans les commentaires du précédent billet (qui avaient un peu dévié du sujet initial). Un lecteur nous avait fait remarquer cette destruction massive de documents scientifiques faite au nom des économies. Je lui avais dit que ça m'inquiétait parce que cela ressemblait terriblement à un autodafé.
A JCG Ca me fait penser qu'en Argentine, sous la junte militaire, on brulait des livres de Prévert considéré comme un poète subversif.
RépondreSupprimerLe professeur de l'université de Columbia parle de dérive canadienne vers une pétrodictature néolibérale.
Je pense, qu'en effet, tous les régimes totalitaires ont très peur de la connaissance, de la culture et de la science. Il n'y a pas de dicatature éclairée. Tous les régimes totalitaires sont obscurantistes.
Il y a aussi des documents qui disparaissent quand on refait un site. Ce fut le cas quand le ministère de la santé avait refait son site en 2011.
RépondreSupprimerPar exemple il y avait tout un dossier rassemblant plusieurs documents très intéressants sur la vaccination hépatite B et datant de 1998. Ce dossier avait été publié de par la volonté de Kouchner secrétaire d'état à la santé et sa ministre de tutelle Martine Aubry. Il contenait en particulier le compte-rendu de la réunion internationale de 47 experts sur cette vaccination dans les locaux de l'Afssaps dont les recommandations faites à Kouchner ("il ne faut rien modifier à la politique vaccinale pour éviter de mettre en péril la campagne de vaccination universelle" dixit le responsable de cette vaccination à l'OMS).
Quand je m'en suis rendu compte j'ai pu contacter ceux qui s'occupaient de cette refonte alors encore en cours. J'avais donné les anciens liens et j'ai eu plusieurs réponses mais le dossier était devenu introuvable selon ce qui m'a été répondu ... J'avais pris copie papier de tout le dossier.
D'autres documents fort intéressants ont aussi disparu : les exposés faits au cours de la réunion de consensus sur la vaccination hépatite B le 11 septembre 2003. Ils contenaient en particulier l'exposé de Dominique Costagliola, considérée comme une de nos meilleures épidémiologistes qui expliquait:
"« Le résultat d'une étude d'association s'exprime par un risque relatif ou un odds ratio assorti d'un intervalle de confiance. Ces éléments sont plus importants à considérer que la simple interprétation du test d'association en significatif/non significatif...un risque de 3 avec un intervalle (de confiance) [1,1; 600] nous dit que l'étude manque grossièrement de puissance puisque le risque peut être à peu près n'importe quoi »
Je doute que vous ayez souvent vu des intervalles de confiance de cet acabit. En effet, OR² est égal au produit des bornes de l'intervalle. Aussi, il faudrait que 9 soit égal à 600x1,1=660 !!!
En fait, fixant OR=3 et la borne inférieure 1,1 la borne supérieure vaut 8,18. Comme annoncé, c'est bien n'importe quoi !!! J'avais gardé copie de ce passage particulièrement croustillant mais je n'ai pas de copie de la totalité du texte.
Vous voyez CMT, pas besoin d'aller en Argentine !!!
Bonjour,
RépondreSupprimerMerci pour le billet intéressant.
À l'heure où la majorité des officines sont reliées au Dossier Pharmaceutique savez-vous si cela permettrait d'obtenir des données pertinents semble le fournir pharmanet ??
Ou bien du fait que cela ne reste limité qu'au seul médicament, sans lien avec les données cliniques, cette base de données n'est que limitée?
A anonyme ci-dessus,
RépondreSupprimerJ'avais cru, initialement, que Pharmanet était un système proche du système de suivi qui existe dans certains pays scandinaves, où chaque citoyen, danois par exemple, se voit attribuer un numéro unique et est enregistré sous ce numéro par différents acteurs de santé dans différents registres, par exemple le registre des hospitalisations, qu'on peut ensuite croiser avec des données d'autres registres, par exemple celui des vaccinations faites par les médecins de ville.
En fait Pharmanet se contente d'enregistrer la totalité des médicaments délivrés à la totalité des citoyens de Colombie Britannique (tout citoyen doit être inscrit à Pharmanet).
L'essentiel de l'intérêt de Pharmanet, est donc de fournir des données sur les prescriptions particulièrement exhaustives.Ce qui est déjà un énorme intérêt, parce que la plus grande difficulté des études en population, les seules études qui peuvent permettre le suivi des effets indésirables post AMM, estde constituer des échantillons représentatifs, parce que les risques de biais sont multiples.
Le type d'étude utilisée sont des études de cohorte,comme dans cette étude, où participait Colin Dormuth, un des chercheurs de la therapeutics initiative cité dans l'article, sur les antidépresseurs chez l'adolescent, qui montre que tous les antidépresseurs augmenteraient de la même manière le risque suicidaire chez les adolescents. Cela vient étayer la décision de la FDA de tous les inclure dans le cadre de la black box (système d'alerte sur les risques de médicaments prescrits)alors que seule la paroxétine avait été suspectée initialement de provoquer ce risque http://pediatrics.aappublications.org/content/125/5/876 .
Et je ne sais pas comment fonctionne le dossier pharmaceutique en France, et si cela permet de recueillir les données sur tous les médicaments prescrits à tous les patients
CMT, merci pour cet article qui ne peut que nous rendre d'une grande tristesse.
RépondreSupprimerLes techniques de type "me too" existent toujours. Celui qui m'avait frappé le plus était le cas de la Viramune° 200mg : 280€ le mois de traitement (2cp par jour). Juste avant la sortie du générique (aujourd'hui, à 135€ le mois), est commercialisée la Viramune° 400mg, au même prix, car finalement, les effets indésirables cutanés ne seraient pas majorés après un certain temps d'utilisation...
Les ARV commencent à être génériqués et je ne serais pas étonné si demain, de nouvelles combinaisons apparaissent pour maintenir un coût très élevé pour les traitements...
En France, Celtipharm souhaitait accéder aux dossiers de la CNAM : http://www.ouest-france.fr/celtipharm-veut-lacces-aux-feuilles-de-soins-700667
Pour le Dossier Pharmaceutique, c'est plutôt compliqué... Actuellement, les données concernent environ la moitié des français (dont beaucoup de création sauvage, mais passons) et surtout : il n'y a que 4 mois d'historique accessible :http://www.ordre.pharmacien.fr/Le-Dossier-Pharmaceutique/Vos-droits-respect-de-la-vie-privee-et-confidentialite-de-vos-donnees
A vrai dire, on peut améliorer beaucoup de points là-dessus :
- La durée
- L'accès pour d'autres professionnels de la santé, et surtout les médecins.
- Continuer la création d'autres DP...
(Bon, je suis hors sujet là, je m'arrête.)
A BG : Il ne faut tout de même pas confondre les ratés de la démocratie, les injustices ordinaires, avec le totalitarisme. Je pourrais aussi vous parler des éléments compromettants qui disparaissent des tribunaux lorsque ce sont des notables qui sont impliqués dans des affaires de pédophilie. Ca ne fait pas de la France un Etat totalitaire. Il faut faire attention à ça parce qu’à force de tout mélanger, on banalise ce qui est vraiment grave.
RépondreSupprimerMême si je reconnais que la distinction n’est pas toujours facile. Surtout quand les changements s’opèrent par glissement et non de manière brutale.
Mais je crois que lorsque, comme au Canada, des véritables POLITIQUES sont mises en place pour détruire des bibliothèques, pour bloquer des recherches sur les médicaments, lorsque l’arbitraire n’a plus lieu à petite échelle et en catimini mais ouvertement et à grande échelle, là on a franchi un point de non retour et on est en train de basculer dans le totalitarisme. Une nouvelle forme de totalitarisme, dans le cas du Canada, un totalitarisme néo-libéral dont la religion est le refus de la régulation et la primauté de la recherche du profit sur toute autre finalité.
Ceci dit, je me demande si c’est vraiment nouveau. Dans la mesure où les gros groupes industriels et les multinationales ont souvent été les grands bénéficiaires des régimes totalitaires. C’était le cas dans l’Allemagne nazie. C’était le cas dans de multiples dictatures qui ont eu cours au vingtième siècle en Amérique du Sud. C’est le cas aujourd’hui en Afrique.
Ce qui est peut-être nouveau, c’est que, faute d’adversaire tout désigné, le communisme étant tombé en désuétude, les nouvelles formes de totalitarisme ont plus de mal à asseoir leur légitimité sur un discours politique opposant deux idéologies, dont l’une, prônant la défense du capitalisme comme seul système économique viable, serait la garante de la démocratie.
On ne va pas en débattre ici, mais il y a deux formes de totalitarismes qui sont en train d’émerger je pense. Une forme issue des élites, qui veulent renforcer leur pouvoir, et qui ont les moyens de le faire et une forme issue de la base, du « peuple » qui provient d’une vraie frustration. La frustration ressentie parce que la promesse implicite qui fondait le fragile consensus démocratique de la société de consommation n’a pas été tenue. Cette promesse implicite, comme l’évoque Alain Accardo dans « le bourgeois gentilhomme » ou, « les prétentions hégémoniques des classes moyennes » était que tout un chacun allait pouvoir accéder au paradis sur terre. Un paradis qui n’a rien de spirituel, qui est mis en vitrine à longueur de journée par les chaînes de TV en recherche d’audience : celui des plus riches qui se vautrent dans le luxe et sont traités comme des Pachas dans des palaces avec des « suites » à 5000 euros la nuit.
La haine qui résulte de cette frustration, frustration d’avoir été trahie dans ses esporits et ses illusions, suit, comme le reste, la loi de la plus grande pente. Sachant qu’il est toujours plus facile de s’attaquer à plus faible que soi, à plus démuni, à minoritaire.
Mais les motivations de cette haine sont aussi déplorables que ses manifestations : l’origine de la frustration c’est de s’être rendu compte qu’on n’aurait pas accès au paradis des riches comme on nous l’avait promis ou laissé espérer.
Après, les populismes de tous ordres viennent se greffer là-dessus, cherchant à attiser les haines à leur propre profit, en semant la confusion sur les valeurs et les origines de la haine.
Mais, à ma connaissance, les régimes totalitaires n’ont jamais eu besoin de faire consensus pour s’installer. Ils s’appuient sur une violence ciblée, une haine élective, où les psychopathes de toutes sortes trouvent leur plein épanouissement. Mais ils s’appuient surtout sur l’indifférence du plus grand nombre.
RépondreSupprimerEt je citerai le poème attribué à un pasteur protestant allemand, Martin Niemöller, interné dans un camp de concentration pendant la seconde guerre mondiale pour s’être opposé aux mesures antisémites du gouvernement nazi.
« Lorsque les nazis sont venus chercher les communistes,
je n’ai rien dit,
je n’étais pas communiste.
Lorsqu’ils ont enfermé les sociaux-démocrates,
je n’ai rien dit,
je n’étais pas social-démocrate.
Lorsqu'ils sont venus chercher les syndicalistes,
je n’ai rien dit,
je n’étais pas syndicaliste.
Lorsqu’ils sont venus me chercher,
il ne restait plus personne
pour protester. »
A ami 89 ;
RépondreSupprimerC’est triste, oui. Et je comprends qu’on puisse ressentir de l’accablement à la lecture de mon article. Sauf à être des guerrières comme le sont Rachel Campergue, Martine Brönner ou Pernelle, qui en ont bavé et ont payé le prix pour regarder la réalité en face.
Mais Pharmanet est un outil. Et n’est qu’un outil. Un outil comme un marteau peut-être utilisé pur construire de beaux meubles, ou alors il peut-être détourné de sa fonction première et être utilisé pour tuer quelqu’un à coups de marteau.
Il n’ya pas la moindre ébauche de signal d’une volonté politique pour renforcer l’efficacité de la pharmacovigilance en France . La raison est sur le tableau qui est dans l’article. On la trouve aussi facilement sur internet et dans cet article de Pharmacritique http://pharmacritique.20minutes-blogs.fr/archive/2009/03/05/alzheimer-nouvelle-fondation-de-cooperation-scientifique-mai.html . La raison est: conflits d’intérêts à tous les étages. D’où une grande difficulté à faire des choix clairs entre « l’outil industriel du rayonnement économique de la France » et l’intérêt des citoyens et la protection de leur santé.
Dans une économie néo-libérael et mondialisée le facteur temps est primordial. Il s’agit d’engranger des profits le plus vite possible pour ne pas être mangé par plus gros.
Mais la qualité et la pertinence des traitements sont ils incompatible avec les besoins de l’économie néo-libérale ? C’est une question. La réponse, au vu des faits, semble être oui, elle est incompatible.
Je crois que l’information, le comportement et la responsabilité des médecins et des patients, sans oublier les pharmaciens, prescripteurs , distributeurs ou consommateurs finaux sont une clé à ce dilemme. Si les mauvais médicaments ne trouvent plus de débouchés Big Pharma devra changer son fusil d’épaule.
Mais cela passe par un travail de désillusionnement.
Pas nécessairement par la haine, comme je l’évoquais plus haut. Juste par plus de lucidité.
Même si, probablement, la meilleure solution pour éviter les dérives et réduire les risques pour la population, serait de nationaliser la production pharmaceutique, comme cela est prôné dans le livre Big Pharma. Et de se limiter à la production des 300 spécialités indispensables, en majorité déjà anciennes. Ou, en tous cas, réduire fortement le nombre de spécialités (11 000 en 2012 France, selon l’ANSM, pour 2800 substances actives).
Cela permettrait de mettre le paquet sur une véritable recherche fondamentale séparée du marketing Big Pharmacien.
Mais on sait tous que cela n’aura pas lieu.
@CMT
RépondreSupprimerL'objectif de mon propos était seulement d'illustrer qu'aujourd'hui, quand des documents et données sont publiés uniquement sur internet, quelle que soit leur nature, il n'était plus nécessaire de brûler des bibliothèques pour les faire disparaitre. Quelques clics suffisent. C'est un changement très important dont on ne mesure sans doute pas encore toutes les conséquences.
D'une part on peut avoir aisément accès à de multiples documents hier encore confidentiels et d'autre part ils peuvent soudain s'évanouir comme par enchantement. Et même quand il s'agit d'un simple changement du lien ça complique quand même. Par exemple, l'Afssaps a d'abord refait son site pour ensuite changer de nom, d'où au moins 2 changements des liens en quelques mois...
Une intéressante émission sur les lobbies sur France Inter http://www.franceinter.fr/emission-service-public-lobbies-a-tous-les-etages
RépondreSupprimerA BG,
RépondreSupprimerdeux aspects,
-lorsqu'on détruit le contenue d'immenses bibliothèques à coups de pelleteuse, cela témoigne d'une forte volonté politique de censure. Il est plus difficile d'argumenter, comme on pourrait le faire quand des documents disparaissent sur internet, en disant ; "je ne voulais pas faire ça, c'est une erreur, mon doigt à ripé"
- quand des documents scientifiques imprimés mais non numérisés sont détruits, ils disparaissent pour de bon. Dans le cas de documents mis sur internet c'est plus compliqué. Lors de la pseudo-pandémie de 2009, l'OMS avait été prise en flagrant délit de mensonge (elle avait changé la définition de la pandémie pour permettre de déclarer une situation d'urgence malgré l'absence de gravité de la pandémie et pousser à la vaccination de masse) grâce à un logiciel, le WayBack Machine. Comme cela est expliqué sur le site du Sénat, dans le rapport d' enquête sur la pandémie:"Cependant, lors de son audition par la commission d'enquête48(*), M. Tom Jefferson a observé que « la grippe pandémique est ce que l'OMS décide qu'elle est », en s'appuyant sur les travaux d'un étudiant doctorant à Harvard, M. Peter Doshi, à qui l'utilisation d'un logiciel Internet, Wayback Machine, a permis de retrouver les anciennes définitions : de 2003 à 2009, une pandémie a été définie par l'apparition de « plusieurs épidémies simultanées à travers le monde avec un grand nombre de décès et de maladies » ; un changement a été opéré entre le 1er et le 9 mai 2009, faisant disparaître le critère de gravité. Toujours selon ces travaux, le contenu des pages Internet de l'OMS a été modifié, sans changer la date affichée."
Je me souviens qu'il y a eu, bien entendu, une controverse au sujet de ce changement de définition de la pandémie et de sa date.
RépondreSupprimerOn peut comprendre que les officiels de l'OMS aient tenté d'argumenter, puisque c'est toute la crédibilité de l'OMS en tant qu'organisme gouvernemental défenseur de l'intérêt général qui était en jeu.
Peu importe la date, d'ailleurs, puisqu'il reste ceci: à un moment donné, en modifiant la définition d'une pandémie, l'OMS a considéré qu'une pandémie provoquée par l'équivalent d'un simple rhume pouvait justifier un état d'urgence mondial, avec les contraintes et les dépenses colossales que cela représente, et la vaccination de masse de centaines de millions de personnes.
Est-il avéré que le vaccin contre la rougeole soit efficace en post-exposition ?
RépondreSupprimerSi ça été établi comme pour le vaccin contre la variole on peut avoir des doutes !!!
RépondreSupprimerPour la variole, dans l'impossibilité de savoir si un contact avait ou non été contaminé, on diluait les vrais contacts avec des faux dans des proportions aussi inconnues que variables. Vous ajoutez 10 volumes d'eau dans le whisky et quelques gouttes dans la bière pour en déduire que la bière est plus chargée en alcool que le whisky !
C'était ça ! Plus précisément, Rao (1968) observe 18 cas de variole parmi 61 vaccinés en post-exposition ainsi que 20 cas parmi 42 contacts jamais vaccinés, soit 22 faux contacts parmi eux (52,4%).
Avec une vaccination inefficace en post-exposition il y aurait eu 43 faux contacts (70,5%), soit des proportions beaucoup trop différentes pour pouvoir valider une telle étude.
Plusieurs auteurs-expérimentateurs qualifient ce genre d'études "d'anecdotiques" et certains s'opposent explicitement aux affirmations d'Henderson sur la question (il dirigeait le programme d'éradication).
Pour plus de détails je me permets de renvoyer à mon poster (que lisait le président du CTV) [1] et à mon article récapitulatif [2] sur cette question pas urgente si appliquée à la variole mais très instructives. La variole c'est un cas d'école (ça pourrait être ...)
[1] http://p0.storage.canalblog.com/02/21/310209/90757466.pdf
[2] http://questionvaccins.canalblog.com/archives/2013/10/16/28149160.html
A anonyme du 14 janvier 10h33
RépondreSupprimerJe suppose que votre questions concerne la diminution du risque individuel.Il est entendu que si vous avez un taux d'anticorps protecteur le vaccin est inutile. Sauf que, bien sûr, en pratique on ne sait pas si les gens sont protégés à l'instant t, le taux d'anticorps diminuant avec le temps, le seuil des anticorps non protecteurs étant atteint plus rapidement après une vaccination qu'après une rougeole cliniquement apparente.
Si vous regardez les recommandations en France, ce qui est diffusé aux professionnels par le biais de l'INPES, ils sont très affirmatifs: la vaccination dans les 72hs du contact avec un malade diminue de 90% le risque de contracter une rougeole cliniquement apparente (je suppose que c'est cliniquement apparente)http://www.inpes.sante.fr/CFESBases/catalogue/pdf/1173.pdf. Donc l'INPES (se fasaint l'écho du Haut Conseil de Santé publique) préconise la vaccination au titre de prévention individuelle de la rougeole chez des sujets contacts.Aucune référence n'est citée à l'appui de cette affirmation.Aucune référence n'est citée non plus dans l'avis concernant la vaccination autour d'un cas du HCSP de 2009 http://www.hcsp.fr/Explore.cgi/Telecharger?NomFichier=hcspa20090626_rougeole.pdf.Le HCSP renvoie seulement à l'application stricte des mesures retenues dans le plan d'élimination de la rougeole.
Pour le CDC (Centers for disease control and prevention) américain c'est beaucoup moins clair:http://www.cdc.gov/vaccines/pubs/surv-manual/chpt07-measles.pdf p 15 "The MMR vaccine, if administered within 72 hours of initial measles exposure, and IG, if
administered within six days of exposure, may provide some protection or modify the clinical
course of disease." Donc le CDC est beaucoup moins affirmatif que l'INPES "pourrait procurer quelque protection".
Ce que je retiens c'est que l'intérêt INDIVIDUEL de la vaccination après contact direct avec un malade pour réduire le risque de contracter une rougeole clinique n'est pas démontré.
La vaccination de l'ensemble d'une communauté garde un intérêt pour limiter l'extension de l'épidémie.
J'ai tendance à penser, comme CMT, que l'efficacité de la vaccination contre la rougeole dans les 72 heures qui suivent le contage n'a jamais été démontrée pour la bonne raison qu'elle n'est sans doute pas démontrable étant donné qu'on ne saura pas si la personne était un vrai ou un faux contact.
RépondreSupprimerSi on veut en donner une "démonstration" immunologique (c'est sans doute de cela qu'il s'agit), il suffit de rappeler celle donnée pour la vaccination antivariolique déclarée efficace dans les 4 jours (72 heures) qui suivent le contage :
- Henderson (Directeur du programme d'éradication à l'OMS) avançait toujours (en 1999) une argumentation de nature immunologique : la vaccination étant pratiquée dans les 3-4 jours après le contact, la réponse immunitaire à la vaccination se développant alors 4 à 8 jours plus tôt qu'après l'infection naturelle , elle atténue ou même évite la maladie.
Il s'agirait donc d'une course d'anticorps.
Mais Earl et al. qui avaient conduit des expérimentations sur des singes, lui répondront en 2008 :
« En raison d'une période d'incubation de 2 semaines précédant la variole systémique, il est compréhensible qu'administré seulement 4 jours AVANT une épreuve virale le vaccin ne sera pas protecteur.»
Effectivement, des singes vaccinés 4 jours AVANT (et non pas 4 jours après) une dose épreuve mortelle à 50% ne résistent pas mieux que les témoins non vaccinés. AUCUN résultat publié au delà (2 jours avant, à zéro jour ou à +2 jours …). Mais tout indique qu'ils seraient catastrophiques.
L'expérimentation a ainsi fait basculer les évidences : «il est évident que cela est vrai» devenant «il est évident que cela ne peut être vrai ». C'est sans doute cela qui est à l'origine de l'avis du HCSP sur la révision du plan variole. On pouvait le savoir depuis très longtemps (au moins 1870) car les faits en avaient très clairement démontré, pour le moins, l'absence d'efficacité.
Cette vaccination des contacts, après avoir été appliquée de façon très brutale pendant la campagne d'éradication, déclarée obligatoire sans retenir aucune contre indication dans notre plan variole non encore modifié, on commence discrètement à envisager de la retirer quand les antiviraux seront disponibles. Cette affaire permet au moins de mesurer le côté pour le moins cavalier des raisonnements des experts (et leurs conséquences gravissimes).
La réponse de Earl [1] à Henderson se trouve p. 10893 col. 1.
[1] http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2495015/pdf/zpq10889.pdf
Les laboratoires n’ont rien à gagner dans l’obligation vaccinale ? Vraiment ?
RépondreSupprimerLise Barneoud, journaliste « scientifique » et auteur d’un livre sur les vaccins, nous livre à nouveau ses réflexions, supposées critiques sur l’obligation vaccinale pour les nourrissons . Comme dans son livre, tout en se présentant comme critique, elle reprend à l’identique plusieurs arguments bâteau qui circulent dns les médias : commentaire chez @docdu16.
Comme dans son livre, Lise Barneoud aboutit invariablement à la conclusion qu’il faut faire de la pédagogie pour convaincre chacun de se faire vacciner et souhaite, par exemple, qu’on vaccine les garçons contre le papillomavirus. Elle affirme aussi : « De mon point de vue, le passage de trois à onze vaccins ne s’est pas fait sous la pression des lobbies. » Cela parce que cela ne rapporterait pas grand-chose aux laboratoires https://www.alternatives-economiques.fr/lise-barneoud-faudrait-plus-de-transparence-vaccin/00082293
Pour persuader le lecteur que les laboratoires pharmaceutiques n’ont joué aucun rôle dans l’instauration d’une obligation vaccinale en France, elle reprend un argument entendu et reentendu dans la bouche de leaders d’opinions connus pour leurs conflits d’intérêts avec Big Vaccine et nous explique que le marché des vaccins ne représente après tout que 3% du marché mondial des médicaments, marché qui était tout de même en 2016 de 941 Mds, ce qui fait que ces modestes 3% représentaient tout de même 40 Mds $ , une paille.
Ce qu’elle oublie opportunément de dire, c’est que ce marché est très concentré, concentré chez Big Vaccine, autrement dit les 4 mêmes très grosses multinationales pharmaceutiques qui contrôlent le marché des vaccins en France et qui représentent près de 90% du marché mondial des vaccins, à savoir : Pfizer, 2ème multinationale pharmaceutique au chiffre d’affaires de 52 Mds $en 2016 , Merck 5ème entreprise pharmaceutique, au CA de 40 Mds$, Sanofi 6ème, avec un CA de 35 mds$ et GSK, 7ème avec 27mds$. http://www.thevaccinereaction.org/2016/12/pfizer-merck-sanofi-gsk-will-continue-to-dominate-the-vaccine-market/.
Parmi les vaccins, le Prevenar, avec 6 Mds$ de CA annuels représente le plus gros marché, suivi par le Gardasil, avec 2,5 Mds$ pour Merck, puis le Pentacel, vaccin pentavalent et le Fluzone, vaccin contre la grippe de Sanofi vendus en Amérique du Nord qui représentent chacun 1,6 Mds$ https://www.statista.com/statistics/314566/leading-global-vaccine-products-by-revenue/ . Donc, 3 vaccins, destinés aux pays riches principalement, qui représentent à eux seuls 30% du marché
La part des vaccins dans le CA de ces entreprises varie de 9,5% pour Merck à 16% pour GSK, et est en constante augmentation du fait de politiques très actives de la part de ces entreprises pour le développer. Par exemple Merck a racheté récemment plusieurs vaccins, en particulier contre le méningocoque, à différents laboratoires. Sanofi Pasteur, qui s’occupe de la partie vaccins au sein du groupe Sanofi, et qui représente un CA de 4,5 Mds$ et détient 25% du marché mondial des vaccins, a tenté l’aventure Dengvaxia, dont elle espérait un CA de 2 Mds$ annuels pour des investissements de 1,5 Mds. Soit une augmentation de 50% du CA des vaccins pour cette société.suite
suite La campagne pour imposer l’obligation a eu lieu simultanément dans plusieurs pays européens : à ma connaissance la Grande Bretagne, la Suède, l’Allemagne, l’Italie, au moins, et ce sont souvent des individus qui en sont à l’initiative, avec toujours le même argumentaire sur les dangers d’une épidémie de rougeole avec 13 000 cas en un an et 30 décès dont 20 en Roumanie, qui justifieraient ce brusque engouement pour l’obligation.
RépondreSupprimerCes 4 laboratoires paniquent à l’idée de perdre des parts dans ce marché juteux et prometteur que sont les vaccins, pour lequel on annonce une augmentation du CA de 33% dans les 3 ans car ils doivent faire face à la concurrence des fabricants des vaccins des pays émergents. Comme, par exemple des fabricants de vaccins en Inde http://www.cdsco.nic.in/writereaddata/List%20of%20Licensed%20Vaccine%20Manufacturers%20in%20India17.pdf qui vendent des vaccins beaucoup moins chers que les multinationales occidentales.
Lise Banéoud se trompe ou est de mauvaise foi, donc, quand elle dit que le marché des vaccins est un marché sans importance pour les 4 multinationales pharmaceutiques qui contrôlent ce marché. Le marché des vaccins est, au contraire, avec celui des biomédicaments, le marché le plus porteur d’avenir financier pour ces multinationales, à condition de continuer à contrôler le marché mondial
Quel est donc l’intérêt de ces multinationales à imposer l’obligation vaccinale dans les marchés riches et matures ? Ce n’est pas seulement d’augmenter les couvertures vaccinales de 10 ou 20%.
C’est aussi de ne plus avoir à assumer le risque d’un changement de politique vaccinale ni la nécessité d’indemniser les victimes d’effets indésirables, dont l’Etat, en cas d’obligation, doit assurer totalement la charge.
Mais c’est surtout l’intérêt de voir diminuer les dépenses qui découlent de la nécessité d’adapter la production aux politiques vaccinales de différents pays et de pouvoir utiliser ces sommes pour augmenter les profits et rémunérer des actionnaires toujours plus exigents, ainsi que pour concurrencer les laboratoires des pays émergents.
Catherine Weil-Olivier, qui se fait, pour l’occasion, la porte-parole et défenseur des intérêts des laboratoires avec lesquels elle a de nombreux liens d’intérêts, en particulier financiers, explique cela très bien dans ce cours de vaccinologie fait aux officiers médecins des armées en 2011 https://www.canal-u.tv/video/canal_u_medecine/cif_vaccinologie_2011_les_combinaisons_vaccinales_interet_et_limites.7109 . « Ce qui coûte cher, ce sont les contrôles qualité » nous dit-elle. Or les contrôles qualités se font par lots. Quand la demande concerne quelques dizaines de milliers de vaccins, pour s’adapter aux besoins ou aux demandes particulières d’un pays, cela « coûte cher « à des multinationales qui doivent y consacrer des chaînes de production, alors qu’elles préféreraient fabriquer des lots identiques de plusieurs millions de vaccins. Catherine Weil Olivier va jusqu'à dire que les Etats devraient rémunérer Big Vaccine pour ces demandes spécifiques.
Le rêve de Big Vaccine est donc de vendre les mêmes vaccins partout dans le monde, indépendamment de l’épidémiologie ou des besoins de chaque pays. C’est une production mieux calibrée pour la taille de ces entreprises, devenue gigantesque, et leurs exigences en matière de profits. L’obligation y contribue