vendredi 3 janvier 2020

Pas Jean Echenoz, pas lui.




Les derniers propos de Jean Echenoz sur l'affaire Matzneff m'ont étonné (ICI). Déçu. Désappointé. Irrité. Surpris.

Il est en pleine promotion de son dernier bouquin.

Hier, j'ai distraitement lu un entretien avec lui dans le journal Le Monde sur son nouvel opus (LA). J'ai trouvé Echenoz casse-pieds et peu intéressant. Je me suis dit : il vaut mieux lire ses livres que l'écouter parler de lui-même et de son roman.

Le Monde a mis le paquet : LA et ICI.

Je ne l'avais pas encore écouté sur France-Inter.

Je ne suis pas critique littéraire mais je place Echenoz dans la catégorie Grand Ecrivain. Pas en première division, non, on en est loin. Mais dans la série Ecrivain français de division 2.

La lecture des livres d'Echenoz, pas tous, il y en a un ou deux qui m'ont paru fonctionner à vide, respirent l'intelligence, la patte de l'écrivain, celui qui sait pourquoi il a utilisé ce mot-là ou cette virgule-là ou cet adjectif-ci. Il a réfléchi à tout.

La qualité des livres d'Echenoz, outre qu'ils sont courts, on les finit vite, on les admire vite, c'est qu'ils sont achevés. On n'a pas besoin de changer un mot. Ils respirent l'intelligence du style, l'intelligence de la réflexion, la limpidité des propos, une simplicité apparente qui cache élégamment les interrogations de l'auteur, ses réflexions, ses hésitations, ses remords. C'est un romancier qui sait où il va : il ne demande pas au lecteur de choisir pour lui. Il a un style.

Donc, j'aurais pu acheter le dernier livre d'Echenoz. Je ne les ai jamais achetés neufs, une seule exception, son Ravel que j'avais eu envie de lire toute de suite et qui s'est avéré être un bijou.


Mais l'entretien dans Le Monde ne m'a pas donné envie. Et les propos sur France-Inter m'ont définitivement convaincu que le livre n'allais pas m'intéresser. Ou plutôt que le fouillis des idées d'Echenoz sur l'affaire Matzneff et, plus généralement, sur la pédocriminalité rendait compte d'un malaise profond.

Je me suis dit ceci : je lis Voltaire qui fut un négrier antisémite, je lis Céline qui fut un antisémite paranoïaque, je lis Bukowski qui fut un féminicide, j'écoute Gesualdo qui fut un féminicide, je regarde Gauguin qui fut un pédophile...

Et pourquoi m'arrêterais-je de lire Echenoz qui, finalement, n'a fait que des commentaires confus sur une affaire de pédocriminalité ? Parce qu'il est mon contemporain. Parce que je peux penser en même temps que lui, parce que je suis dans le même espace-temps, il n'a que 5 ans de plus que moi, il a donc vécu, au sens debordien, les mêmes choses que moi.

Ce n'est pas très grave d'être à côté de la plaque mais je vais attendre un peu avant de relire Echenoz. Après tout, mon temps est compté : il y a d'autres écrivains bien plus importants que lui que je n'ai pas encore lus ou d'autres écrivains encore plus importants dont je n'ai eu le temps de lire qu'un seul roman... Ou des écrivains bien plus importants que lui qu'il serait utile que je relise pour mieux les comprendre.

4 commentaires:

  1. JEAN-FRANÇOIS MASSÉ4 janvier 2020 à 18:41

    Excellent.
    Notamment la conversion des représentations anciennes du monde (Voltaire par exemple) en représentations contemporaines (Echinoz par exemple), comme on le ferait de louis ou de francs en euros.
    C'est une "gymnastique" méconnue et fondamentale pour relire l'histoire ancienne ou vivre l'histoire contemporaine.
    jf massé la Rochelle

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  2. Echenoz....Déception totale ..

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  3. Bonjour,
    Je serais curieux de connaitre le nom des écrivains que vous placez en première division. La morgue avec laquelle vous disposez des écrivains m'interpelle et m'amuse.
    Bien cordialement,
    Matthieu.

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  4. J'ai déjà écrit cela ailleurs. De mémoire : Proust, Conrad, Musil, Marai, Kafka, Roth, pour les morts (sans compter les classiques anciens comme Dostoievski). Kundera, Coetzee, Rushdie, par exemple, pour les vivants.

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