jeudi 11 février 2010

PNEUMO 23 : OUI OU NON ?

Lisant d'un postérieur distrait le courrier d'un pneumologue que venait de me tendre un patient porteur de bronchite chronique obstructive, je me mis à rêvasser.


Ce courrier hygiéniste et, comme on l'a vu, hygiénique, me rappelait en des termes peu courtois qu'il fallait vacciner le patient avec le vaccin Pneumo 23, que j'avais oublié, que c'était mal, et qu'il fallait le faire tous les trois ans.


Ce pneumologue, et ne voulant pas être poursuivi par la HALDE pour discrimination, j'hésite à vous dire qu'il s'agissait d'une pneumologue, je ne l'avais pas choisie. C'était mon patient, dont le père de la soeur du réparateur de télé qui était passé chez sa voisine lui avait parlé, qui me l'avait conseillé. A vrai dire, et sur ce point particulier, je peux très bien prescrire, dans mon coin, un pneumologue en dci (dénomination commune internationale), car ils pensent tous la même chose dans leurs lettres (le ton n'est pas toujours le même) et c'est donc, comme ils sont des spécialistes en pneumologie, qu'ils doivent avoir raison. La seule différence entre ces spécialistes tient à la couleur de leur moquette, au délai pour obtenir un rendez-vous et à leur possible amabilité / mal amabilité. Ils pensent tous de la même façon, est-ce donc un consensus ? Qu'est-ce qu'un consensus ? J'ai tendance à penser, mais vous excuserez mes chemins de traverse, que la science n'est pas la démocratie : ce n'est pas parce que tous les experts pensent (cf. la grippe mais antérieurement, pour faire le malin, la rotondité de la terre et, pour obtenir en un centième de seconde un point Godwin, la supériorité des camps communistes sur les camps nazis) la même chose qu'ils ne se trompent pas.


Où en étais-je ?


"Mon" malade, vous savez, celui dont je suis le médecin traitant, venait donc, fier de son courrier, me donner la leçon par spécialiste interposé.


Que faire ?


J'avais lu, il y a peu, un article écossais ,dont vous ne pourrez lire que l'abstract car les droits sont payants, disant grosso modo ceci (il s'agit d'une étude de cohorte rétrospective sur des patients âgés de plus de 65 ans) : pas d'effets du vaccin sur la diminution de la mortalité ; diminution du nombre d'infections pneumococciques invasives d'environ 30 % et signification statistique chez les patients de tous sexes âgés de plus de 75 ans et seulement chez les femmes entre 65 et 74 ans (j'espère que la HALDE ne va pas me poursuivre encore une fois...). Mais surtout qu'il était nécessaire de vacciner plus de 5000 personnes, vous m'entendez, cinq mille personnes, pour éviter une infection invasive par le pneumocoque !


"Mon" patient a soixante-douze ans.

La pneumologue a-t-elle raison ?

Il est vrai que les recommandations internationales convergent toutes dans le même sens : vacciner les plus de 65 ans porteurs de facteurs de risque et le faire tous les cinq ans.


Tout le monde le dit (enfin, les Recommandations) : les Etatsuniens, les Français et les autres dont le Canada, ou l'Australie...


Mais il existe quand même des voix discordantes...

Prescrire, notamment (n° 186).

Et quand Prescrire doute de l'efficacité d'un vaccin, il faut vraiment qu'il y ait des doutes ! Je ne peux malheureusement rien mettre en ligne en raison de la confidentialité prescririenne et de la complexité du moteur de recherche Prescrire.
Mais même Infovac, la lettre d'information sponsorisée par Big Pharma, dit qu'il faut réserver le vaccin aux patients à plus hauts risques d'infections pneumococciques systémiques (et vous pouvez consulter le lien qui informe sur les sujets à risques : ici) et, je cite, "même en situation de pandémie il n'y a pas lieu d'élargir les indications de ce vaccin a) en créant une pénurie pour ceux qui en ont besoin, b) en suscitant chez des patients qui ne relèvent pas de ce vaccin des phénomènes d'hyporéactivité, c) alors que [et ici on est en plein marketing pharmaceutique : Coluche aurait dit Pneumo machin chose vaccine plus blanc que pneumo 23] le vaccin pneumococcique conjugué 13 valent vient d'obtenir un avis favorable de l'EMEA et devrait être disponible en 2010 !
Quoi qu'il en soit, une autre étude contrôlée et je demande l'indulgence, je n'ai pas réussi à la retrouver dans mon fatras bibliographique, montrait que dans les centres pour personnes âgées la mortalité n'était pas diminuée et le nombre d'infections par pneumocoque invasif était diminué non significativement de dix pour cent chez les patients à haut risque !
Que faire ?
Vacciner les patients à risque élevé ne résidant pas en institution en les prévenant que l'efficacité de la vaccination n'est pas assurée ? Ne vacciner que les patients à risque élevé vivant en foyers-logements non ou médicalisés ou en EHPAD plus généralement ?
J'avoue ne pas savoir que répondre.
J'ai bien envie (avis personnel) de vacciner les patients à hauts risques vivant en institution et les autres ne vivant pas en institution mais qui me le demandent mais à condition qu'ils soient à haut risque.
Et pas tous les trois ans.
A la question : Pneumo 23 oui ou non ? Je suis donc indécis.

2 commentaires:

  1. une étude canadienne, enfin parue dans le CMAJ disait que le pneumo 23 ne protège pas ceux qui en ont le plus besoin; Prescrire s'était fait l'écho de cette étude il me semble(2009?)

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  2. Rappelons :
    - que l'HAS recommande de vacciner tous les diébétiques de type 2 par PNEUMO 23

    -que vaccin n'est remboursable, chez l'adulte que dans certaines indications :
    asplénie fonctionnelle ou splénectomie ;
    drépanocytose homozygote ;
    syndrome néphrotique ;
    insuffisance respiratoire ;
    insuffisance cardiaque ;
    patients alcooliques avec hépatopathie chronique ;
    personnes ayant des antécédents d'infection pulmonaire ou invasive à pneumocoque

    Nombre de nos patients âgée en EHPAD ne seront donc pas remboursés de leur vaccin (13,87 €)

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