Madame A, 55 ans, revient de Bordeaux où sa mère vient de mourir à l'hôpital. Elle est choquée. Elle tente de ne pas le montrer, du moins au début, elle consulte pour vérifier que son hypertension est contrôlée par le traitement qui lui est prescrit, mais, qui ne serait pas choqué par la mort de sa mère à l'hôpital ?
Je la laisse parler.
Je ne connaissais pas l'histoire et elle commence par me raconter les faits médicaux. C'est un cancer du poumon opéré. Qui a métastasé. Au cerveau, notamment, mais pas seulement.
Ce qui la choque (la consultation, la dernière des rendez-vous, aura pris du temps car elle a du mal à savoir ce qui est ou non important, en raison bien entendu de son implication) c'est que les médecins ont été à la fois terriblement optimistes, c'est à dire terriblement interventionnistes, voire jusqu'au boutistes, puis incroyablement défaitistes. Elle s'est sentie exclue de ces deux attitudes. Ou en décalage.
Je crois, en l'écoutant, qu'elle s'est sentie déphasée.
Il y a d'abord eu les premiers médecins qui ont laissé entendre qu'il n'y avait plus rien à faire (c'était dans un hôpital général). Puis la recherche d'un hôpital plus spécialisé (un CHU de Bordeaux) où les médecins ont dit qu'il y avait quelque chose à faire. Grâce à la pose d'un stent la maman de la patiente a gagné trois mois en très bonne santé. Puis le stent s'est bouché, retour d'abord à l'hôpital général où les médecins qui avaient annoncé que tout était fichu ont laissé entendre "qu'ils lui avaient bien dit que c'était fichu" et la dame de penser "avec trois mois en très bonne santé", puis il y a eu un nouveau transfert au CHU où les médecins ont dit qu'il fallait changer le stent, ce qui a été fait, mais avec de moins bons résultats. La maman a finalement vécu cinq jours après l'intervention mais dans de mauvaises conditions.
Mais le plus choquant arrive : la malade, la veille du décès, entre dans la chambre de sa mère et une infirmière lui apprend qu'on lui a donné un peu de morphine pour qu'elle ne souffre pas. Puis, en douce, une autre infirmière lui dit que, malgré la faiblesse des doses, il sera difficile de lui parler à nouveau. Et la patiente meurt le lendemain au petit matin. La fille demande à l'infirmière : "Mais elle souffrait tant que cela ?" Et elle : "Ce matin elle nous a dit qu'elle en avait assez."
Stupeur.
"Ce matin" me dit ma patiente "j'ai dit à mon mari que j'en avais assez de ces allers et retours à l'hôpital, je ne me suis pas méfiée, et il m'a planté un couteau dans le ventre pour me soulager."
Je la regarde. J'essaie de ne rien dire. Je pense qu'elle a raison d'être choquée.
"J'avais encore des choses à dire à ma mère. Ils ne m'ont pas demandé mon avis. Ils ont pris une décision hâtive. Ce n'est pas bien. Jamais elle ne m'avait dit qu'elle en avait assez. Je ne sais si elle voulait combattre ou non, si elle y croyait encore, si elle avait seulement envie de se laisser glisser, elle avait de grosses difficultés respiratoires, de l'eau dans la poumons, il lui arrivait de suffoquer, mais jamais, au grand jamais, elle ne m'a parlé d'abandonner, jamais elle ne m'a dit, ma petite fille je n'en peux plus, j'en ai marre de la vie, je ne veux plus lutter, mes derniers instants sont arrivés, je voulais vous dire que je vous aime, et cetera... et là, des inconnus, des personnes qui ne la connaissaient pas, qui ne connaissaient pas sa vie, qui ne connaissaient pas ses rapports avec ses enfants, avec moi, avec la vie, qui ne connaissaient ni ses croyances philosophiques, qui en aurait parlé avec elle ?, ni sa conception de l'existence, des inconnus, donc, ont décidé pour elle, ont décidé pour moi et je n'ai jamais pu lui reparler, je n'ai jamais pu l'entendre répondre à mes questions ou exprimer une demande... Je suis terrifiée. Je ne dors plus, je me réveille la nuit en sueurs, je fais des cauchemars, je vois la seringue qui s'enfonce dans le bras de ma mère qui lui dit c'est fini, qui lui dit 'puisque vous en avez marre, il faut en terminer avec la vie...', c'est quand même incroyable, mais pour qui se sont-ils pris ?, pour qui se prennent-ils ?, pour le bon Dieu... est-ce que le bon Dieu serait même capable de cela ?... "
Je ne suis pas un spécialiste des questions de fin de vie. Avant que de commencer à écrire cette histoire de consultation j'aurais dû m'informer plus avant sur les termes exacts de la loi Leonetti (ICI), sur les propositions de ceux qui veulent légiférer sur l'euthanasie, sur ceux qui sont déçus qu'on ne le fasse pas, sur les avis et futurs avis du Comité Consultatif National d'Ethique (LA) mais mon expérience interne, cet exemple comme deux autres que je vais vous détailler brièvement, me font dire que l'euthanasie active est courante dans les établissements de soins et à l'insu du plein gré de tout le monde.
Il y a donc une profonde hypocrisie sociétale : dans les faits "on", c'est à dire l'institution médico-hospitalière constituée en norme (locale ?, locorégionale ?, nationale ?, politique ?, confessionnelle ?, idéologique ?, bobooïque ?), décide de ce qui doit être fait et non fait sur de simples constatations, sur de vagues impressions, sur des propos de fin de nuit en établissement hospitalier, entre le bassin et la distribution des médicaments, entre la toilette et le bruit des sabots dans les couloirs, sans demander l'avis ni du malade (dans le cas que j'ai décrit) et encore moins (si c'est possible) de la famille du malade, des personnels hospitaliers constitués en démocratie d'opinion, en web 1.0 de l'hôpital, qui décident (dans la salle de soins l'interne ou le senior ou le chef de clinique ou le chef de service, allez savoir, il passe parfois, qui jette à la cantonade un 'Madame A, elle est fichue' et tout le monde de prendre des mines et de préparer le geste qui tue pour soulager des souffrances terrestres une malade condamnée... qui a dit l'autre matin qu'elle en avait assez de mal dormir), des personnels hospitaliers qui ne reverront jamais la famille, avec qui ils ne discuteront plus, dont ils ne connaîtront pas le destin ou la "vraie" vie à l'extérieur de l'hôpital...
Je parle avec Madame A et nous reprenons un à un les éléments de cette discussion et j'essaie de distinguer ce qui touche à l'information elle-même sur le pronostic de la maladie dont sa mère souffrait, le déphasage entre ce qu'elle a perçu et ce que voulaient dire les "soignants", de son désarroi, du fait qu'elle se raccrochait au moindre sourire de la moindre agent hospitalière, au moindre rictus de la moindre aide-soignante, au moindre clignement des yeux du moindre médecin pour se faire une opinion, j'essaie de distinguer le reste, c'est à dire le pronostic lui-même et la désinvolture de l'équipe soignante quand il s'est agi de prendre la décision activiste de l'euthanasie sans le dire...
Une euthanasie médiatisée avec des débats sans fin et des décisions privées et minables prises dans le dos des patients et des familles. Du bla bla pour amuser la galerie.
(Deux autres exemples : la famille s'aperçoit qu'un patch a été collé sur la peau du patient sans que personne n'ait été informé ; une autre famille s'entend dire que de l'hypnovel a été administré et aucun dialogue, aucune discussion n'a précédé ce geste. La politique du fait accompli, comme si la morale hospitalière se substituait à la morale privée des familles, une sorte de prise de pouvoir sauvage. Au nom de quoi ? Ainsi, des familles demandent et en sont pas écoutées et d'autres ne demandent rien et sont privées de leur réflexion.)
L'arrogance de l'Institution qui dit la morale pour les autres.
(Précisions importantes : il ne s'agit pas d'un hôpital de Bordeaux ; il ne s'agit pas d'un service de pneumologie ; il s'agit d'une famille)
PS du 19 mai 2013 : une famille porte plainte : LA
Mais le plus choquant arrive : la malade, la veille du décès, entre dans la chambre de sa mère et une infirmière lui apprend qu'on lui a donné un peu de morphine pour qu'elle ne souffre pas. Puis, en douce, une autre infirmière lui dit que, malgré la faiblesse des doses, il sera difficile de lui parler à nouveau. Et la patiente meurt le lendemain au petit matin. La fille demande à l'infirmière : "Mais elle souffrait tant que cela ?" Et elle : "Ce matin elle nous a dit qu'elle en avait assez."
Stupeur.
"Ce matin" me dit ma patiente "j'ai dit à mon mari que j'en avais assez de ces allers et retours à l'hôpital, je ne me suis pas méfiée, et il m'a planté un couteau dans le ventre pour me soulager."
Je la regarde. J'essaie de ne rien dire. Je pense qu'elle a raison d'être choquée.
"J'avais encore des choses à dire à ma mère. Ils ne m'ont pas demandé mon avis. Ils ont pris une décision hâtive. Ce n'est pas bien. Jamais elle ne m'avait dit qu'elle en avait assez. Je ne sais si elle voulait combattre ou non, si elle y croyait encore, si elle avait seulement envie de se laisser glisser, elle avait de grosses difficultés respiratoires, de l'eau dans la poumons, il lui arrivait de suffoquer, mais jamais, au grand jamais, elle ne m'a parlé d'abandonner, jamais elle ne m'a dit, ma petite fille je n'en peux plus, j'en ai marre de la vie, je ne veux plus lutter, mes derniers instants sont arrivés, je voulais vous dire que je vous aime, et cetera... et là, des inconnus, des personnes qui ne la connaissaient pas, qui ne connaissaient pas sa vie, qui ne connaissaient pas ses rapports avec ses enfants, avec moi, avec la vie, qui ne connaissaient ni ses croyances philosophiques, qui en aurait parlé avec elle ?, ni sa conception de l'existence, des inconnus, donc, ont décidé pour elle, ont décidé pour moi et je n'ai jamais pu lui reparler, je n'ai jamais pu l'entendre répondre à mes questions ou exprimer une demande... Je suis terrifiée. Je ne dors plus, je me réveille la nuit en sueurs, je fais des cauchemars, je vois la seringue qui s'enfonce dans le bras de ma mère qui lui dit c'est fini, qui lui dit 'puisque vous en avez marre, il faut en terminer avec la vie...', c'est quand même incroyable, mais pour qui se sont-ils pris ?, pour qui se prennent-ils ?, pour le bon Dieu... est-ce que le bon Dieu serait même capable de cela ?... "
Je ne suis pas un spécialiste des questions de fin de vie. Avant que de commencer à écrire cette histoire de consultation j'aurais dû m'informer plus avant sur les termes exacts de la loi Leonetti (ICI), sur les propositions de ceux qui veulent légiférer sur l'euthanasie, sur ceux qui sont déçus qu'on ne le fasse pas, sur les avis et futurs avis du Comité Consultatif National d'Ethique (LA) mais mon expérience interne, cet exemple comme deux autres que je vais vous détailler brièvement, me font dire que l'euthanasie active est courante dans les établissements de soins et à l'insu du plein gré de tout le monde.
Il y a donc une profonde hypocrisie sociétale : dans les faits "on", c'est à dire l'institution médico-hospitalière constituée en norme (locale ?, locorégionale ?, nationale ?, politique ?, confessionnelle ?, idéologique ?, bobooïque ?), décide de ce qui doit être fait et non fait sur de simples constatations, sur de vagues impressions, sur des propos de fin de nuit en établissement hospitalier, entre le bassin et la distribution des médicaments, entre la toilette et le bruit des sabots dans les couloirs, sans demander l'avis ni du malade (dans le cas que j'ai décrit) et encore moins (si c'est possible) de la famille du malade, des personnels hospitaliers constitués en démocratie d'opinion, en web 1.0 de l'hôpital, qui décident (dans la salle de soins l'interne ou le senior ou le chef de clinique ou le chef de service, allez savoir, il passe parfois, qui jette à la cantonade un 'Madame A, elle est fichue' et tout le monde de prendre des mines et de préparer le geste qui tue pour soulager des souffrances terrestres une malade condamnée... qui a dit l'autre matin qu'elle en avait assez de mal dormir), des personnels hospitaliers qui ne reverront jamais la famille, avec qui ils ne discuteront plus, dont ils ne connaîtront pas le destin ou la "vraie" vie à l'extérieur de l'hôpital...
Je parle avec Madame A et nous reprenons un à un les éléments de cette discussion et j'essaie de distinguer ce qui touche à l'information elle-même sur le pronostic de la maladie dont sa mère souffrait, le déphasage entre ce qu'elle a perçu et ce que voulaient dire les "soignants", de son désarroi, du fait qu'elle se raccrochait au moindre sourire de la moindre agent hospitalière, au moindre rictus de la moindre aide-soignante, au moindre clignement des yeux du moindre médecin pour se faire une opinion, j'essaie de distinguer le reste, c'est à dire le pronostic lui-même et la désinvolture de l'équipe soignante quand il s'est agi de prendre la décision activiste de l'euthanasie sans le dire...
Une euthanasie médiatisée avec des débats sans fin et des décisions privées et minables prises dans le dos des patients et des familles. Du bla bla pour amuser la galerie.
(Deux autres exemples : la famille s'aperçoit qu'un patch a été collé sur la peau du patient sans que personne n'ait été informé ; une autre famille s'entend dire que de l'hypnovel a été administré et aucun dialogue, aucune discussion n'a précédé ce geste. La politique du fait accompli, comme si la morale hospitalière se substituait à la morale privée des familles, une sorte de prise de pouvoir sauvage. Au nom de quoi ? Ainsi, des familles demandent et en sont pas écoutées et d'autres ne demandent rien et sont privées de leur réflexion.)
L'arrogance de l'Institution qui dit la morale pour les autres.
(Précisions importantes : il ne s'agit pas d'un hôpital de Bordeaux ; il ne s'agit pas d'un service de pneumologie ; il s'agit d'une famille)
PS du 19 mai 2013 : une famille porte plainte : LA
Pas seulement l'arrogance, je suis en train de lire un livre dont le sujet est le suiccide chez les personnes agées. Il est aussi question de l'euthanasie, le droit de mourir dignement et l'exemple des Pays-Bas est cité.
RépondreSupprimerLe hic est que pas tout n'est pas communiqué par les média. Initialemnet, c'était bien pensé (aux Pays-Bas) mais plsu maintenant où le médecin décide d'interrompre le traitement de lui-même (donc sans demande de la part du patient) et ainsi diminuer la durée de vie, ou de mettre des médicaments à une dose mortelle encore sans demande de la part du malade. Le pourcentage de ces actes est assez élevé, le chiffre exact n'est pas dans ma tête mais dépasse 2 chiffres, et selon le calcul du total tourne souvent autour des 50% si je me souviens bien. Je nomme ceci pas de l'euthanasie mais un meurtre. Selon le livre, les citoyens hollandais portent un document où ils expriment clairement être contre l'euthanasie afin être sur d'obtenir tout les soins médicaux utiles. Le philosophe écrivain Precht soulève également ce point dans un chapitre d'un de ses livres.
Le débat sur l'euthanasie est restrictive et montre pas tous les angles. Sans ces deux livres, pas mal de questions ne me sont jamais passé par la t^te sur ce débat. Les deux livres se demandent si pas, avec E., justement la société n#attendra pas qu'une personne une fois malade, agée et inutile (plus productive pour la société, donc n'apporte rien mais goute) naurait pas une obligation de mettre fin à sa vie de souffrance de viellesse et ainsi soulager la vie des jeunes!
Le premier livre dit que le problème ne sont pas les personnes agées ou handicapés qui coutent trop au systhème social mais les jeunes qui n'ont pas d'enfant! A là, le débat est vraiment sur un tout autre angle et pourtant touche la fin de vie.
Désolé pour votre patiente. Les hopitaux peuvent être effrayante quand on n'a pas l'habitude aussi en tant que proche d'un malade. C#est une machinerie qui perd son humanité et sa compassion plus le bâtiment est grand et technologique.
Bonne soirée
Et que dire de l'arrogance du praticien qui est loin de l'action, dans son cabinet, juge depuis les dires de sa patiente sans connaître ni la mourante (qui est morte), ni l'équipe soignante (bizarre mais je serais tenté de penser qu'une équipe de pneumologie en CHU qui soigne des cancers du poumon a une certaine pratique des soins de fin de vie) ? Un peu de recul pour apaiser le proche, sa mère est morte, dans des conditions qu'elle a perçu pour elle (et je dis bien pour elle, c'est fout parfois les conflits et la différence de point de vue entre le patient en fin de vie et famille…) difficile mais pas forcément pour sa mère.
RépondreSupprimerOn a tous des exemples de familles qui ne supportent pas l'idée que papa/maman (parfois très âgés et très malades) puissent mourir alors qu'on a encore temps et de choses à vouloir partager... Pendant ce temps, papa/maman agonise, meurt d'asphyxie dans des conditions inhumaines... N'en déplaisent aux proches, c'est à la personne malade que l'équipe soignante doit en premier son dévouement. Je vois très souvent des propos bien plus durs et plus directs échangés entre patients et soignants qu'avec la famille. On les épargne.
Enfin, l'hypnovel/midazolam, on l'utilise beaucoup aujourd'hui à petites doses anxiolytiques, alors ce type de réflexion qui va être lu par des familles qui vont appeler inquiets croyant qu'on euthanasie leur proche, merci, c'est digne (la notoriété et le battage médiatique en moins) des propos à la Even sur les statines... On est très très loin des doses anesthésiques, croire que cela puisse tuer le patient, c'est vraiment de la méconnaissance totale de même sur les doses de morphine, suffit d'avoir pratiqué un peu en réanimation pour avoir une notion des doses et pouvoir comparer...
@ Picorna.
RépondreSupprimerJe réponds rapidement.
Réflexion corporatiste typique. Moi je sais sur les doses, moi je sais sur ce qui se passe dans les services de pneumologie des CHU, moi je sais ce qui se passe entre soignants et soignés.
Avis d'expert.
Les USP (Unités de Soins Palliatifs) ont été créées parce que les services de pneumologie des CHU s'occupaient bien des malades en fin de vie Mais c'était une erreur.
Au lieu, Picorna, de vous interroger sur les conditions de cette affaire, sur la perception et non sur les faits établis que dans les CHU on se comporte bien avec les malades et les familles, cela se sait depuis toujours, vous m'accusez de ne pas m'occuper de la fille de la malade, vous étiez dans le cabinet avec elle et moi, vous faites des analogies avec Even, ce qui est d'une gratuité totale, vous êtes méprisant sur la famille, sur le patient, sur le médecin généraliste (qui n'a aucune expérience de fin de vie selon vous), vous êtes content de vous, restez le.
Les réflexions sur la fin de vie, j'en suis certain, et vos commentaires me le montrent, devraient être démédicalisés et les profanes devraient être plus impliqués.
Je suis déçu par une telle attitude mais elle me conforte dans le fait que l'on est mieux pour mourir dans son lit qu'à l'hôpital.
Ma réflexion est épidermique mais mon expérience interne de soignants et l'attitude institutionnelle vis à vis de la mort, au delà des comportements individuels moraux et compassionnels, est à changer.
Bonne journée.
J'ai vu beaucoup de patients me dire "Docteur, quand ça n'ira plus, il faudra me faire une piqûre", mais toujours des patients en pleine santé.
RépondreSupprimerQuand effectivement ils ne vont plus bien, je n'ai plus jamais ce genre de demande. Ils veulent habituellement être soulagés, et ne pas mourir.
Et quand vraiment ils n'en peuvent plus, ils "décrochent", se laissent aller, et il n'y a alors rien à faire …
Cet article me touche beaucoup. Ma mère nous a quittés il y a trois mois d'un cancer généralisé atteignant également les os du bassin. Seul recours contre les douleurs infernales : la morphine. Elle était tout à fait consciente de sa fin prochaine. Elle était à l'hôpital public dans un service de soins palliatifs où, je dois reconnaitre qu'elle était bien suivie.
RépondreSupprimerPremier choc : lorsque le médecin m'annonce qu'ils vont la transférer de service après 30 jours. Elle me précise qu'elle a des instructions (traduction : elle coûte trop cher). Finalement ils l'ont gardée. Mais jamais, elle n'a exprimé le désir d'en finir.
Condoléances pour votre patiente, quel que soit l'âge que l'on a, 20 ou 70, c'est une perte irréparable.
GB
Bonjour.
RépondreSupprimerMerci pour ce récit.
Vous avez retranscrit fidèlement, j imagine, les mots de cette patiente, et il est difficile de ne pas être profondément ému.
Que ses impressions soient fondées ou non sa détresse est forte, et il sera probablement difficile de l'apaiser. Le manque de dialogue préalable en est probablement une des causes.
Les réflexions médicales, sociales que vous soulevez sont importantes et méritent d'être débattues.
Merci.
F Dussauze
J'ai vécu deux euthanasies. Celle de ma mère il y a 13 ans et, tout récemment, celle de mon père. Pour ma mère, ça s'est passé à peu près comme dans cette histoire, mais avec en plus un accompagnement merdique. Pour mon père, on s'est organisés. Il nous a dit ses volontés, on les a respectées le moment venu, c'était très dur mais c'était consenti. Dans le deuil, ça change tout. Et clairement, ne soyons pas hypocrites, c'est bien de l'euthanasie, et dans certains cas de l'euthanasie active.
RépondreSupprimerMerci pour ce récit qui souligne les différences de perception d'une même situation(je choisis un angle volontairement indulgent). Dans un contexte moins dramatique, j'ai récemment - et je ne retrouve plus le lien - lu un billet de sage-femme racontant un accouchement sans péridurale. Tout en s'étant occupé de la patiente et en l'ayant soutenue moralement autant qu'elle le pouvait, la SF - et c'est tout à son honneur - avouait qu'elle avait détesté cette sensation de ne rien pouvoir faire, de devoir accompagner pendant des heures une personnes en souffrance, qu'elle n'avait qu'une envie c'était qu'elle l'accepte cette fichue péridurale pour que la patiente et elle-même soit soulagées.
RépondreSupprimerJ'ai dû moi-même accoucher sans péridurale pour des raisons médicales et j'ai bien vu que cet épisode - peu exceptionnel quand même - embêtait voire angoissait infirmière et SF, l'infirmière passait son temps à me refaire des prises de sang pour vérifier si on ne pouvait vraiment pas me la faire alors que l'anesthésiste avait bien affirmé que c'était inenvisageable.
En lisant ce billet de SF, je n'ai pu m'empêcher à l'époque de faire le parallèle avec l'euthanasie et le fait qu'un acte médical peut être proposé/imposé pour soulager autre chose ou quelqu'un d'autre que le patient. Votre billet faire remonter à la surface cette impression.
La position de l'équipe de soignants face à la souffrance est difficile humainement, j'en suis aussi certaine qu'une étrangère au milieu peut l'être, mais dans le cas d'une fin de vie elle ne peut être le baromètre de la décision de provoquer la mort de quelqu'un, pas plus que le seul avis de la famille d'ailleurs.
Pourtant,lorsque la famille dit "docteur,faites tout ce que vous pouvez pour qu'il ne souffre pas ,et "sous entendu" :ne vous acharnez pas. On n'est pas loin de l'euthanasie (mot tabou en France ,je ne sais pourquoi ).
RépondreSupprimerDB
Un ami médecin m'a téléphoné ce soir.
RépondreSupprimerIl m'a dit, les larmes dans la voix, que c'était arrivé à sa fille un vingt-six décembre dans un grand hôpital de l'Assistance Publique de Paris.
L'équipe de nuit avait pris une décision contraire à ce qu'il avait été convenu auparavant.
C'est pour ceux qui pensent que le cas que je décrivais était isolé.
Je peux témoigner pour mon père ...et pour mon fils.
RépondreSupprimerMon père,soigné pour un cancer, dont il ne disait rien si ce n'est pour se féliciter parfois de la diminution du nombre de petites bêtes, fut transféré du Val-de-Grâce à ce que ma mère présenta d'abord comme une maison de repos un centre de soin palliatif. J'ai parlé avec mon père la veille de son transfert. Quand je l'ai revu quelques jours plus tard, il m'a , je crois, reconnu malgré son délire morphinique. Alors je lui parlais sans être certain d'être entendu. J'aurais aimé pouvoir échanger quelques paroles avec mon père ce que je n'ai pas vraiment pu faire. Les médecins ont été sans doute surpris de la rapidité du processus. Mon père lui même quand je le vis encore parlant, n'a peut-être pas voulu envisager sa disparition si proche....
Pour mon fils, le décès "prématuré" était une éventualité avec laquelle nous vivions depuis sa naissance. La mort est tout de même arrivée par surprise, mais en deux temps : il y eut d'abord un coma survenu en pleine nuit à la suite d'un arrêt cardiaque prolongé....Une décision dut être prise, au cul du camion...J'étais prêt à débrancher tous les tuyaux de ma propre autorité dussé-je aller en prison après. Spectacle insupportable de cette respiration heurtée interminable ,alors que, à plusieurs reprise dans le passé, mon fils était revenu des rives de la mort dans mes bras !
L'équipe de l'hôpital parisien d'enfant - que la politique de concentration menace de fermeture- fut extraordinaire : tout fut fait pour accompagner ce mouvement vers la mort, en minimisant la souffrance de mon fils. De la morphine mais pas trop, des perfusions pour l'hydrater, un matelas antiescarre, des coussins pour bien l'installer... Je voulais d'abord en finir vite : je suis reconnaissant à l'équipe d'avoir déployé toute cette attention pour mon fils.
Les locaux étaient décrépis, mais le médecin et le personnel soignant étaient extraordinaires d'humanité.
Marie de Hennezel avait exposé sa réflexion dans deux articles incontournables dans le Monde en 2007 ( http://www.lemonde.fr/idees/article/2007/02/28/fin-de-vie-la-loi-existe-par-marie-de-hennezel_877212_3232.html ) et 2012 ( http://www.lemonde.fr/idees/article/2012/02/15/la-loi-leonetti-sur-la-fin-de-vie-reste-mal-appliquee-et-les-francais-en-souffrent_1643326_3232.html ). Il y a un an, avant l'élection présidentielle elle écrivait : "Je viens de donner ma démission de membre du Comité de pilotage de l'Observatoire national de la fin de vie. Celui-ci a été mis en place, il y a deux ans, pour "observer" les conditions dans lesquelles on meurt en France. Le rapport qui sera remis dans quelques jours au gouvernement n'apporte rien de très nouveau que nous ne sachions déjà. La loi Léonetti reste mal appliquée, et les Français en souffrent. En désaccord avec la mission de l'Observatoire, qui s'est contenté de pondre un rapport de plus, sans prendre la mesure de l'urgence de la situation et de la priorité qu'il y avait à mettre en place des actions concrètes pour une meilleure compréhension et application de la loi, je refuse de continuer à cautionner une telle utilisation dispendieuse de l'argent du contribuable." Aujourd'hui, Emmanuel Hirsch - du collectif Plus digne la vie- écrit : "Dans un texte du 8 février 2013 qu’il rend public aujourd’hui, le Conseil national de l’ordre des médecins exprime une position favorable à l’euthanasie par « devoir d’humanité ».
RépondreSupprimerNe voulant pas se marginaliser et intervenir dans le débat lancé par François Hollande le 17 juillet 2012, le CNOM a souhaité prendre de cours le Comité consultatif national d’éthique qui doit se prononcer à se sujet dans les prochaines semaines, saisi par le chef de l’État le 18 décembre dernier. L’échéance est le projet de loi annoncé pour juin prochain.
La rupture profonde ainsi décidée constitue un élément qui s’avèrera déterminant. Depuis des années l’instance ordinale maintenait en effet une position identique à celle promue par l’Association médicale mondiale. Une opposition absolue à l’euthanasie assortie d’un refus de tout acharnement thérapeutique et d’un soutien inconditionnel à la démarche des soins palliatifs. Il s’agit de l’esprit même de la loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie désormais contestée de plein fouet par l’instance qui l’avait transposée dans son code de déontologie." http://plusdignelavie.com/
......
Pour dire aussi que ce qui est réclamé à un bout de la vie l'est aussi à l'autre, à son commencement...je veux dire juste après la naissance. Quant au milieu...
RépondreSupprimerQuant au milieu...: si vous n'avez pas suivi toutes les préconisations , les programmes de santé préventive désolé, mais là vous ex-âge-errez...!
RépondreSupprimerUn communiqué du Ministère des affaires sociales et de la santé, en date du 18 décembre 2012, - date de remise du rapport du Pr. Didier Sicard au Président de la RF- rapporte que le Président : " a donc décidé de saisir comme la loi le prévoit le Comité consultatif national d’Ethique, afin que celui-ci puisse se prononcer sur les trois pistes d’évolution de la législation ouvertes par le rapport :
RépondreSupprimer1/ Comment et dans quelles conditions recueillir et appliquer des directives anticipées émises par une personne en pleine santé ou à l’annonce d’une maladie grave, concernant la fin de sa vie ?
2/ Selon quelles modalités et conditions strictes permettre à un malade conscient et autonome, atteint d’une maladie grave et incurable, d’être accompagné et assisté dans sa volonté de mettre lui-même un terme à sa vie ?
3/ Comment rendre plus dignes les derniers moments d’un patient dont les traitements ont été interrompus à la suite d’une décision prise à la demande de la personne ou de sa famille ou par les soignants ?"
http://www.social-sante.gouv.fr/actualite-presse,42/communiques,2322/fin-de-vie-remise-du-rapport,15474.html
Sur le site du CNE on ne trouve pas encore de trace de cette saisie. Le Conseil National de l'Ordre des médecins, comme indiqué plus haut, s'est récemment prononcé sur cette délicate question ; c'est là : http://www.conseil-national.medecin.fr/article/fin-de-vie-1303 ( en bas de page on trouve un lien vers une enquête IPSOS effectuée auprès de 605 médecins du 10 au 23 janvier 2013 )
L'Institut National d'études démographiques - INED- publiait en nov 2012 une enquête - décrite comme la première du genre - permettant de connaître les circonstances de la fin de vie : http://www.ined.fr/fichier/t_publication/1618/publi_pdf1_494.pdf
RépondreSupprimer@au deux derniers anonymes: vous venez de montrer qu'on va arriver à demander, voir à exiger des personnes gravement malades de mettre un terme à leur vie, afin que l'Etat et la société n'ont pas à se mettre ni en question et encore moins à mettre des structure en place pour accueillir des personnes malades, handicapés ou âgés dont on considère leur vie de souffrance / incurable (quelle maladie ne l'est point? A commencer par la plus belle: la Vie!)/ une charge pour leur proche, etc et donc uniquement une source de dépense et un poids mort!
RépondreSupprimerLe débat de l'euthasie actuelle est un débat aveugle, passant á coté de l'HUMANISME au profit de l'ECONOMIE! N'oubliez pas que le diabète est une maladie incurable, pour autant est-ce une vie en souffrance exigeant une mise de mort soi-disant volontaire?
Bonne soirée
@Picorna
RépondreSupprimerLe midazolam serait utilisé souvent et à petites doses comme anxiolytique ??? Je ne l’ai vu jusqu’à présent utilisé que dans les fins de vie, souvent associé, bien que j’aie également travaillé en pneumo. Nous disposons tout de même d’un arsenal bien fourni de benzo courantes et neuroleptiques en vogue pour y remédier, et le midazolam semble plus associé au confort du patient terminal, quand ce n'est pas à la gestion des lits du service..
Juste cette réflexion d'une jeune interne qui était en charge de malades au pronostic médiocre . "j'ai l'impression de passer plus de temps à soigner la famille que la patiente " .
RépondreSupprimerAvoir de l'humanité, informer avec tact la famille , font partie du rôle de soignant. Mais certains ne veulent rien entendre submergés par la douleur.
Oui Picorna ,on connait tous des gens qui se laissent surprendre par la fin imminente de leur proche âgé.
C'est pourtant l'ordre des choses.
@ Je réponds encore à Picorna et à cette jeune interne.
RépondreSupprimerCette histoire de consultation n'est pas une étude clinique. Cette histoire de consultation n'est pas une étude épidémiologique. C'est un ressentiment. Et je voulais apporter ma pierre au débat qui, comme d'habitude, est confisqué par ceux qui savent et ceux qui ont la connaissance des mots (en fin de vie le signifiant et le signifié ont de l'importance) : il existe effectivement des familles de patients qui demandent l'euthanasie et qui ne l'obtiennent pas dans les condition où elles voudraient l'obtenir (je ne donne ici mon avis ni sur l'euthanasie ni sur le "combat" des familles) et des familles qui ont l'impression de ne pas avoir assez informées et du diagnostic et de la façon dont la fin de vie pouvait se passer (et je ne donne pas mon avis en général, je cite trois cas précis + un quatrième et je ne rajoute rien sur les autres...).
Le débat est confisqué car on va entendre encore des experts, des experts religieux, des experts sociologues, des experts anthropologues, et cetera et peu d'experts "profanes".
J'ouvre une parole discordante.
Pourquoi la nier ?
Bonne soirée.
@Cath : je commence par elle, oui on utilise le midazolam car il a une demi-vie très courte, cela permet d'agir bien plus vite et surtout bien moins longtemps qu'avec une benz plus classique à demi-vie plus longue. Quand on manie les morphiniques et parfois d'autres psychotropes (genre anti-émétiques neuroleptique-like par exemple), c'est parfois plus confortable pour le patient d'avoir un traitement de faible durée d'action. Quant au sous-entendu sur la gestion des lits : c'est ignoble, soit vous en êtes témoin et bien dénoncez le, soit c'est purement de la médisance pour ne pas dire plus.
RépondreSupprimer@Doc du 16 : trop facile, à partir du moment où on s'exprime publiquement sur sa tribune bloguesque, ben oui, on se prend des commentaires surtout quand on balance (parfois à juste titre) sur les collègues (cf. autres articles). Les USP ont surtout et d'abord été créés pour accueillir des patients qui n'étaient pas dans les unités d'oncologie ou de pneumologie par exemple. Après, je vous fais exactement les mêmes reproches que vous faites à dans le billet aux collègues pneumologues. Non, je n'étais pas de le cabinet avec la fille de la patiente de même que vous n'étiez pas dans le service de sa mère.
Démédicaliser le débat de la fin de vie, je veux bien mais alors que les gens arrêtent de mourir dans les établissements de santé majoritairement.
Ma réaction est également épidermique et quand je lis la réponse, je sens que j'ai du appuyer sur un pont sensible : j'ai tout de suite droit aux insultes "méprisant sur la famille, sur le patient, sur le médecin généraliste (qui n'a aucune expérience…"). Non, je ne suis jamais content de moi, je ne suis jamais content de perdre un patient même si parfois on ne peut rien faire qu'accompagner. Mais je suis jugé par vous comme méprisant parce que je ne suis pas d'accord avec vous ? Pour qui vous prenez vous ? J'ai un profond respect pour les collègues généralistes (la majorité de mes amis médecins sont généralistes d'ailleurs), l'équipe soignante ne semble pas trouver que je suis le pire des monstres, ni les familles ou les patients d'ailleurs. On fait ce qu'on peut, parfois on ne peut pas grand chose.
Après, je n'ai jamais exercé sur Bordeaux, je me garderais bien d'écrire un billet tel que le vôtre basé sur les dires d'une fille qui a perdu sa mère, qui est dans la douleur, peut-être dans l'incompréhension dont la mort de sa mère s'est produite. Peut-être qu'elle a tout parfaitement suivi et que cela s'est réellement mal passé, mais je ne jugerais pas sur ce qui s'est passé là-bas. Je rencontre une à deux fois par an une famille mécontente quand elle se manifeste (et je me dis qu'un certain nombre de familles ne prend ni le temps ou n'a ni le courage d'écrire), ce n'est jamais agréable mais c'est toujours enrichissant : on se dit que parfois on aurait pu faire mieux et quand ce n'est pas le cas sur le plan médical, c'est qu'on a mal communiqué.
L’utilisation du midazolam comme simple sédatif parait tout de même marginale, et vous semblez parler d’une utilisation brève, peu dosée et ponctuelle. Mon expérience dans son administration n’a concerné que les phases palliatives terminales.
RépondreSupprimerQuant à la gestion des lits, je faisais référence à la triste histoire qui est en cours de jugement, où l’urgentiste, sur lequel je ne porte sincèrement aucun jugement, a évoqué le manque de lits derrière les urgences pour justifier l’élimination de personnes âgées dites “en fin de vie” (il n’a aps été évoqué dans leur cas de douleur ou d’angoisse difficiles à gérer) par midazolam + curare IV.
Le traitement médiatique de cette affaire a été particulièrement ignominieux et mal renseigné, mais les réactions fréquentes des professionnels de santé, mes collègues y compris, sont de considérer cette exécution furtive et radicale comme un service rendu.
Il s’agit là d’un cas exceptionnel, et je pense que ce qui se pratiquait en milieu hospitalier il y a une vingtaine d’années, c’est-à-dire l’élimination en douceur (sous-cut systématiques de morphine) de personnes âgées en fin de vie qui n’étaient pas douloureuses mais de peu d’avenir, sans relations familiales ou amicales, et qui encombraient le service ne se pratiquent plus, du moins aussi ouvertement. Il m’est bien sûr arrivé à plusieurs reprises d’y participer, par nécessaire discipline et par naïveté, car j’étais élève ou jeune diplômée.
Il m’arrive d’appeler les urgences, et d’entendre “pff..” lorsque je donne l’âge du patient, et d’avoir parfois droit au médecin débordé qui se lâche parce que je l’emmerde avec un vieux; il y a tout de même une sorte de postulat implicite très répandu qui voudrait que les vieux très âgés soient souvent demandeurs d’être soulagés de cette vie, qui ne peut plus présenter aucun intérêt lorsque l’on devient aussi négatif et aussi laid, tout ce que personne ne voudrait être. Le paradoxe est que tout ça n’empêche pas parallèlement une fréquente surmédicalisation et un acharnement thérapeutique souvent sans demande du patient ou de la famille.
Je mets en lien l’accueil aux urgences d’un AVC chez ma mère en 2010, en précisant qu’elle est actuellement à son domicile, malgré quelques troubles de l’équilibre:
http://www.atoute.org/n/forum/showthread.php?t=139029
Oui, il y a une énorme hypocrisie sociétale, et même un malaise culturel abyssal face à la vieillesse et à la mort; j’imagine mal qu’une loi, si bien faite soit-elle, puisse harmoniser la relation de la médecine au mourant, pardon, à la personne en phase terminale..
@ Picorna.
RépondreSupprimerMon expérience interne de la fin de vie dans les hôpitaux est malheureusement celle que je décris.
Si vous aviez bien lu, il ne s'agissait ni de Bordeaux, ni de pneumologues.
J'anonymise toujours.
Si j'ai quitté l'hôpital c'est parce que je ne supportais pas l'autosatisfaction, la hiérarchie, les avis d'experts, le mandarinat, le sous mandarinat, le mépris pour le personnels.
Mais c'est mon expérience.
Je parle de l'expérience de "mes" patients.
Qui parlera pour eux ?
Vous pensez que tout va bien dans le meilleur des mondes possibles hospitalier ? Alors, brisons là.
Oui, je suis pour la dé médicalisation de la mort.
Il est amusant de voir que lorsque l'on n'est pas d'accord avec les décisions expertales, on se fait renvoyer dans les cordes...
Que vous ayez des amis généralistes, j'ai des amis juifs, vous savez, c'est pourquoi je ne peux être antisémite... cela ne prouve rien.
Les familles de malades se plaignent peu.
Elles devraient le faire plus souvent, non pour des raisons juridiques ou plaintives, mais pour informer des dysfonctionnements de la fin de vie en France.
Le sur traitement et / ou l'acharnement est un problème complexe car il fait intervenir les "nouveaux" médicaments, l'espoir des patients, l'espoir des familles, la nécessité de ne pas baisser les bras, la volonté partagée de ne pas laisser passer une seule chance...
Il faut donc en parler et ne pas nous laisser emporter, comme je viens de le faire.
Je suis un profane et j'écoute depuis 34 ans ce que l'on me dit en fin de vie.
Les choses ont beaucoup changé depuis 34 ans.
Bonne journée.
@ Cath le midazolam est la benzo la plus simple à manier (mis à part sa voie d'abord), car elle agit vite et peu de temps, vous pouvez obtenir une activité anxiolytique en moins de 15 minutes et en cas de surdosage, on l'arrête et le patient à fonction rénale normale récupère très vite. Franchement, il ne faut pas hésiter à l'utiliser (0,2 mg/h pour commencer)
RépondreSupprimer@ Docdu16 : moi aussi j'ai quitté le CHU pour un peu les mêmes raisons, ras le bol d'être comme à l'armée dans un service avec son chef suprême qui a toujours raison (les plus belles conneries, celles qui se passeraient mal devant un tribunal, elles ont été faites à 90% par des universitaires pourtant souvent bon mais ne se remettant jamais en question, n'acceptant pas la moindre critique/discussion sur leur décision à eux - quant aux nouveaux universitaires nommés sur titres et travaux, un voyage aux states mais dont l'expérience clinique est souvent pitoyable à quelques exceptions près, je ne m'appesantirait même pas dessus).
Je me refuse à utiliser certains médicaments, pour moi, l'absence d'amélioration de la survie pour des maladies mortelles brèves échéance me pose d'énormes problèmes quand je lis certaines études... (je suis assez critique aussi sur les critères secondaires de qualité de vie surtout quand on a participé à des études et qu'on voit comment sont construits les questionnaires de QOL (quality of life...)... quitte à passer pour un ringard en RCP.
Quant au décès à domicile, mais qu'on nous donne les moyens, merde ! (là je m'adresse aux tutelles), combien de fois suis-je appelé par le médecin traitant démuni parce qu'il n'arrive pas obtenir la mise en place d'aides suffisantes, se fait rembarrer par l'HAD etc… C'est facile de mourir à domicile quand on est riche ou bien qu'on a 6 enfants et 14 petits-enfants près à se relayer 24/24 à son chevet... c'est provoquant mais malheureusement asse proche de la réalité.
La plupart des patients pourraient mourir à domicile, sur le plan médical strict, rien ne s'y oppose, après c'est parfois difficile pour les familles qui ont l'impression qu'on fait quelque chose en hospitalisation alors qu'en fait, on ne fait qu'accompagner. Moi, plus que de démédicaliser la fin de vie, j'aimerais qu'on ait vraiment le choix : le jour où on pourra proposer à tout le monde de pouvoir partir chez soi, dans des conditions optimales de même qu'on pourra accueillir ceux qui le souhaitent, alors là, on sera meilleur. Maintenant, j'entends notre ânesse de ministre parler de refonte des tarifs des prises en charge palliative. Je peux vous dire que dans certains établissements (et je pense à mes amis du CHU où est passé mon proche en particulier), si y'a de l'argent à se faire, on va en créer des unités ou des lits de soins palliatifs...
@Dr du 16: je pense que mon père ai eu de la chance lors de son dernier séjour, aux soins intensify où il décéda. Le médecin charcha a me rencontrer (déjà une surprise, peu habituer à ce geste dans les Ch ou CHU, mais bon là ce fut une clinique), m'informa que l'espérance de vie est de maximal un an s'il s'en sort, qu'ils feront tout pour le soutenir das sa lutte contre la maladie, mais que s'ils sentent que le patient cesse de lutte de le laisser partir avec l'objectif principal sans douleurs les derniers instant sur terre.
RépondreSupprimerVu l'état de mon père, ce qu'il fut et était devenu, je me dis que c'était bien que mon père cessa sa lutte et ainsi s'être épargné cette dernière année de survie que de vie, avec en perspective que des rentrer et sortir d'hospitalisation. Même si je choque souvent les gens en disant cela, je suis contente que mon père ai pu finir sa vie dans cette clinique (à defaut à la maison), être sur qu'il n'y a pas eu d'acharnement thérapeutique, seulement un soutien dans sa lutte et lors de son abondon, une bonne prise en charge anti-douleurs, même si ôter ou diminuer la douleur signifierait une dose trop forte et un racourci de sa vie. Seul compte que ce fut le plus humain, le plus dignement possible.
Bonne fin de journée
Bouleversant et courageux témoignage. Merci. Et j'enverrai un lien depuis mon site consacré à la réflexion sur l'euthanasie. Je vous donne le lien à tout hasard http://site.christophore.com Car il est important de se lier dans cette réflexion qui devient assez urgente avec le projet de loi qui approche.
RépondreSupprimerBonsoir
RépondreSupprimerJe viens de perdre il y a quelques jours, ma Maman dans les mêmes conditions. Contre son avis et le mien (j'étais pourtant particulièrement présente, et joignable en permanence. Sans compter nos rappels à cet effet, largement réitérés). Elle voulait continuer de se battre, et moi de l'aider ; et pour son décès le cas échéant (le plus tard possible - pas aussi tôt ni aussi brutalement), être chez elle avec moi. Elle est décédée dans d'horribles souffrances (étouffement, apnées, puis arrêt du coeur). Je n'ai rien pu faire... Nous avions encore tant de choses à nous dire... Jamais je ne pourrai oublier... J'ai l'impression de l'avoir trahie en l'ayant laissée passer la nuit dans cet hôpital dans lequel nous avions pourtant toutes deux confiance. Je cherche de l'aide (si possible en Région Parisienne : association, réunion de patients... ou tout autre moyen de défense) ne serait-ce que pour défendre sa mémoire, puisque c'est tout ce qu'il me reste. Je lui doit bien cela ! Et puis aussi, pour que de telles pratiques cessent un jour... J'aurai toujours peur désormais de confier ma vie et ma santé à ces "assassins en blouse blanche" (comment les appeler autrement), d'autant plus que je n'ai désormais plus personne pour veiller sur moi en cas de besoin ou si un jour, l'on me fait la même chose. Pour me contacter : sylv_ls@yahoo.fr. Merci pour votre aide.
Bonsoir,
RépondreSupprimerAucune réponse, aucun contact depuis mon message laissé le 11 janvier dernier (2014).
Je reste persuadée pourtant que ce qui est arrivé à ma Maman est loin d'être rare ni exceptionnel ; que dans cet hôpital cela fait même partie de la "routine" tant, à y repenser, tout était réglé, organisé... Je n'ai rien vu venir... Si vous saviez comme je m'en veux d'avoir accepté de la leur laisser pour la nuit. Juste une nuit en observation et par sécurité selon eux... Mais elle va très bien votre Maman m'avait dit ironiquement une infirmière... Ben voyons... Et dès que j'ai le dos tourné, ils la font partir dans d'horribles souffrances (Hypnovel + Morphine alors qu'elle n'était que sous paracétamol et/ou Acupan, et encore, uniquement la nuit)... J'ai besoin d'aide (associations, autres personnes dans mon cas, si possible de ce même hôpital de région Parisienne banlieue est - contacter moi SVP pour plus de renseignements - email plus bas).
Ma Maman était merveilleuse (comme toutes les Mamans, je sais, on a tous eu la même...), gaie, enjouée, dynamique ; nous nous adorions, étions très complices. Elle ne voulait pas mourir (elle était passée en staff d'un autre établissement qui souhaitait la reprendre en soins, la veille. Elle en était ravie). Elle avait en moi une confiance absolue et je n'ai pas su la protéger... Pour ma part, plus les mois passent, plus je vais mal. Nous avions encore tant à nous dire, à échanger. Je n'ai même pas pu lui dire au revoir et je vivrai jusqu'à ma propre fin avec ce regret. Il faut que les gens sachent pour qu'au moins, ils soient prévenus ! Plus jamais cela ! Combien en tueront t'ils encore de nos chers Parents sans que quiconque ne réagisse au nom de je ne sais quelles économies ? J'étais hyper présente et ils l'ont fait pourtant. Quid de ceux qui n'ont personne pour veiller sur eux ? Et pour moi lorsque pour les médecins, je serai "vieille" et plus assez rentable ?. S.V.P. contactez-moi si vous vous reconnaissez dans ce témoignage, ou si vous avez des adresses, des contacts, un moyen de m'aider. Seule face à de telles institutions, je n'ai aucune chance de m'en sortir ni de pouvoir défendre, pour le moins, sa mémoire... Et les autres futurs "euthanasiés contre leurs grés aussi". Merci. sylv_ls@yahoo.fr.