vendredi 11 octobre 2013

Cas de conscience.


Deux collègues médecins généralistes ont disparu de ma zone de chalandise : l'un pour cause de maladie (et de retraite) et l'autre parce qu'il est parti retrouver sa famille en province.
Je ne les connaissais ni des lèvres ni des dents. Ils ne m'ont pas prévenu.
Je ne connaissais pas mes collègues parce que, pour ce faire, il aurait fallu que je fréquente les réunions de Formation Médicale Continue qui présentent deux inconvénients dans ma région : le premier, c'est qu'il est organisé par les laboratoires, le second, c'est qu'il est organisé par l'hôpital et que les thèmes sont hospitalo centrés (j'ai essayé une fois ou deux de mettre mon grain de sel pour faire une présentation -- volontiers iconoclaste -- mais, manifestement, je n'étais ni attendu ni désiré ni par les hospitaliers, ni par mes collègues généralistes).
On annonce partout que les médecins généralistes sont en train de disparaître : c'est vrai.
Des patients de ces deux médecins se présentent parfois à mon cabinet sur recommandation de mes propres patients. Je fais du coup par coup pour savoir si je dois les recevoir ou pas.
En revanche j'ai des patientes âgées qui m'appellent, qui n'étaient vues qu'en visites par les deux médecins sus nommés et qui disent ne pas pouvoir se déplacer. Je ne peux pas faire plus de visites que je n'en fais actuellement. Et ce d'autant que mes propres patients vont devenir impotents. Je leur dis non. Mais où est la solution ?
Demander un transport en ambulance ou en taxi à mon cabinet pour chacune de ces nouvelles patientes ?
Refuser tout le monde ?
Que vont devenir ces patients et patientes ? 
Je n'en sais rien. 
Mes horaires de travail font que j'effectue environ 46 heures par semaine.
N'est-ce pas suffisant ?
Je ne demande pas d'aide.
J'exprime mes difficultés à dire non.
Je ne dis pas que c'est dû, j'inspire un grand coup : au gouvernement, aux syndicats, au capitalisme, au paiement à l'acte, à la Faculté de médecine, à big pharma, au tiers-payant, à la CMU, au secteur 2, à l'hospitalocentrisme, à Guy Vallancien, à mon voisin de palier, à l'euro, aux immigrés, à Xavier Bertrand (Philippe Douste-Blazy, Bernard Kouchner ou Michèle Barzach...), au mauvais temps, au ROSP, à la gérontocratie ambiante, au taux de chômage... J'ai oublié quelque chose ?
Nous passons notre temps, au cabinet, à refuser.
Nous refusons des rendez-vous, nous refusons des visites, nous refusons, nous refusons, nous refusons et nous passons beaucoup de temps à rediriger les patients.
Car refuser peut paraître facile à certains mais que dire à un malade inquiet ? Comment ne pas lui donner un conseil, même si nous ne sommes pas le médecin traitant, comment le laisser se débrouiller avec le système de santé que nous dénonçons tout au long de l'année, comment envoyer à Pelloux un malade dont nous ne voulons pas pour des raisons de temps et d'engorgement et qui n'a rien à faire aux urgences ?
Nous sommes convenus, ceux qui répondent au téléphone au cabinet, qu'il faut changer de paradigme, qu'il faut recevoir, prendre des rendez-vous en fonction du diagnostic annoncé. Un rhume : non (voir ICI ou LA). Une gastro : non. Une toux : non.
Est-ce cela la dé médicalisation de la vie ? Le début de la dé prescription ?
Cet après-midi, et alors que je me tatais pour savoir si j'allais rappeler la malade de 83 ans, diabétique insulino-requérante, j'ai eu au téléphone Madame A, la maman du petit A, pour me dire que A allait mieux et qu'elle me remerciait. Je me suis rappelé que le petit A, m'avait été montré par sa maman, Madame A, pour une rhinopharyngite et que la dite maman m'avait bassiné pour que je precrive des antibiotiques, "A quoi cela sert d'aller voir le médecin si c'est pour que vous prescriviez du serum physiologique, du doliprane et que vous me disiez de surélever le lit ?", et que cela m'avait (un peu) énervé, et voilà qu'en me rappelant la maman faisait augmenter le NMNT (Nombre de Malades à Ne pas Traiter) de façon intéressante... J'ai relu ce que j'avais écrit à ce sujet (LA) et notamment en rapportant cette étonnante phrase de Tom Marshall :  si un médecin généraliste prescrit des antibiotiques à 100 malades de moins, 33 de moins vont penser que les antibiotiques sont efficaces, 25 de moins vont désirer consulter dans l'année suivante et 10 de moins ne reviendront pas consulter dans l'année suivante..
J'ai rappelé la vieille dame et je la verrai lundi à son domicile.

Illustration : Edward Hopper, Excursion into philosophy, 1959 
Sur le site LA : Edward Hopper :  Peindre l'irréfragable conscience.

12 commentaires:

  1. Phrase lue :
    ”C’est malheureux à dire, mais les jeunes veulent pas travailler. Ils ne veulent pas faire 20h par jour, préfèrent les hôpitaux ou les grandes villes”.

    Elle se trouve à la fin de l'article suivant :
    http://www.miroir-mag.fr/6795-y-a-t-il-un-medecin-dans-la-region-pour-sauver-imphy/

    Que dire ?

    Rien

    Que faire ?

    Soupirer !!!!!

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  2. Et voilà, nous entrons ds le désert médical ... Avec tous les problèmes que cela engendre.
    Les enrhumés guériront seuls, mais les cardiaques, cancereux etc... mourront plus tot que prévu.
    Bof.. Sécu en faillite, chomage de masse , plus d'argent ds les caisses de l'Etat.. ...Fin d'une époque .

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  3. C'est une situation que nous rencontrons déjà ponctuellement: WE prolongés, période d'été...Le problème est que nous ne pouvons pas répondre à tout: nous avons des limites physiologiques que nous devons respecter. Pensons à certains d'entre nous épuisés, exposés à des stress psychologiques ou a des problèmes somatiques. Nous ne pouvons pas nous substituer à la disparition de services hospitaliers (c'est le cas dans ma région ou le CH local a disparu il y a 14 ans). Il faut également avoir en tête les obligations médico-légales car, en fin de compte , c'est sur cela que nous serons jugés. Peut être est il utile de disposer d'un secrétariat et de travailler sur RV? C'est ce que je fais depuis 15 ans, ce n'est pas la panacée mais cela préserve un certain confort. Peut être favoriser le regroupement de professionnels de santé en maison médicale? . je souhaite que vous trouviez les solutions qui vous préservent.

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  4. Tu mets en lumière un aspect essentiel et tu es en plein dans l’actualité. La question est comment réagit-on en période de raréfaction des ressources et quel rapport cela peut-il avoir avec le surdiagnostic et le surtraitement ?
    La surprescription et la difficulté croissante d’accès aux soins pour les personnes qui en ont le plus besoin sont étroitement liées. C’est une des idées force qui ressort de la conférence sur la surprescription et le surdiagnostic qui s’est tenue à Dartmouth , New Hampshire, USA en septembre. La deuxième édition de la conférence en 2014 aura lieu à Oxford http://www.preventingoverdiagnosis.net/ .
    Le propos de cette conférence est résumé dans la vidéo qui apparaît dans la page d’accueil de la conférence de Dartmouth http://tdi.dartmouth.edu/initiatives/healthy-skepticism-programs/overdiagnosis/preventing-overdiagnosis-conference .
    En fait, il s’agit d’une véritable discipline qui est en train de naître et peut-être un mouvement de fond qui vient s’opposer à une tendance croissante à la surprescription. Dans la vidéo en page d’accueil de la conférence de Dartmouth Shannon Brownlee nous explique que la surprescription et le défaut d’accès aux soins sont les deux côtés de la même médaille. Dans le même temps où une partie croissante de la population n’a plus accès aux soins et où les inégalités se creusent, une autre partie de la population, la partie solvable, se verra proposer de plus en plus de médicaments, et de procédures à visée préventive ou curative par des médecins dont le mode de rémunération est incitatif. C’est un problème qui a atteint son summum aux Etats Unis où les dépenses de santé sont désormais totalement déconnectées de l’augmentation de l’espérance de vie (qui diminue depuis peu) mais qui est commun à l’ensemble des pays développés, c'est-à-dire là où se situent les patients solvables. Des exemples de surtraitement aux conséquences dramatiques sont cités et il faut se rappeler que, d’après une méta-analyse publiée dans le JAMA datant de 1998, 225 000 décès sur 2 700 000 soit 8% des décès aux Etats Unis avaient des causes iatrogéniques. On peut supposer, compte tenu des orientations de la politique de santé dans ce pays que cette proportion n’a pu qu’augmenter depuis et que les surtraitements pourraient être un facteur explicatif de la diminution de l’espérance de vie à la naissance http://www.lemonde.fr/ameriques/article/2010/10/07/esperance-de-vie-les-etats-unis-reculent-au-classement-des-pays-industrialises_1422014_3222.html . En France une dégradation est notée pour l’évolution de l’espérance de vie sans incapacité à 50 ans http://www.ined.fr/fr/publications/documents_travail/bdd/publication/1529/ .
    La médecine est l’un des rares domaines où l’on peut affirmer que plus n’est pas toujours synonyme de mieux. Mais le public n’en a pas toujours conscience et de nombreux facteurs interfèrent pour que cette prise de conscience ait lieu. Les associations de patients et internet jouent un rôle de plus en plus prépondérant et si efficace que les Pharmas se déclarent prêtes à délaisser les moyens classiques telle la VM depuis qu’elles se sont aperçues que collaborer avec des associations de patients et s’attirer les bonnes grâces de blogueurs connus étaient des moyens bien plus efficaces d’influencer les futurs clients. C’était le sujet du post précédent.

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  5. Mais dans la vidéo sont pointés trois aspects explicatifs essentiels :
    - l’abandon de la médecine de premier recours qui s’est accompagnée d’une vision de plus en plus spécialisée et technique des patients. L’incapacité à avoir une vision globale des patients incitant les spécialistes à proposer des procédures diagnostiques et des traitements de manière systématique
    - l’organisation du système de soins par les politiques, le système de soins aux Etats Unis étant organisé pour inciter les médecins à en faire plus (plus ils en font plus ils en tirent des bénéfices) et de même pour les hôpitaux. En fait les médecins interviewés expliquent que la masse des médecins est très sensible aux incitations (et ce qui importe à une échelle de santé publique est ce que fait la masse des médecins et non ce que font les médecins les plus consciencieux ou les plus militants). Les incitations peuvent influencer les médecins dans un sens ou dans un autre. Les inciter à en faire plus ou moins. Ce qui importe donc, pour le médecin qui s’exprime, c’est que les modes de rémunération soient le plus neutres possibles (on note que ce n’est pas le chemin suivi en France avec le ROSP et la tarification à l’activité)
    - aux Etats Unis la recherche en médecine est financée à 80% par les laboratoires. Sans parler de la fiabilité de la recherche en question, les sujets eux-mêmes de la recherche qui visent à promouvoir les produits des laboratoires ne sont simplement pas pertinents pour permettre une amélioration de la prescription car ils visent toujours à la promotion de produits (médicaments ou dispositifs) alors que les médecins ont besoin d’information désintéressée sans conflits d’intérêts pour savoir ce qui ne marche pas. Seule la recherche publique peut mener cette recherche (à condition de ne pas être asservie à des intérêts privés ce qui est de plus en plus le cas en France).

    Shannon Brownlee met en avant l’importance de l’implication des revues généralistes de médecine et déjà le BMJ et le JAMA se sont très fortement associés à cette réflexion.
    Le JAMA propose aux étudiants d’écrire des articles sur des cas de surprescription.
    http://www.h2mw.eu/redactionmedicale/2013/10/etudiants-publiez-sur-le-th%C3%A8me-too-much-medicine-dans-jama-intenal-medicine.html
    http://archinte.jamanetwork.com/article.aspx?articleid=1741887

    Au total, je retiens que , contrairement à ce qu’on pourra croire, le développement des inégalités d’accès aux soins vont de pair avec une dégradation GENERALE de la qualité des soins, y compris pour ceux qui sont persuadés d’être les bénéficiaires de ces inégalités.

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  6. Le problème ,c'est que la patientèle de 2 médecins se retrouve SANS médecin du jour au lendemain ." surprescritions ": quel rapport avec cette réalité ???

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  7. @ CMT
    Merci pour ces commentaires.
    Je rebondis sur ce que tu dis : les "riches" sur consomment et à tort. Les femmes qui vont voir leur gynéco tous les trois mois, se font faire un frottis tous les ans, des mammographies avant 50 ans, et cetera. Les bobos qui entraînent une IRM pour être "sûr", et cetera. Quand on entend les libéraux s'insurger contre le tiers payant généralisé (avec lequel je ne suis pas tout à fait d'accord pour des raisons administratives) car cela va conduire à une inflation des consultations et des prescriptions, ils oublient de dire que les "pauvres" sur consomment des produits bon marché (paracetamol, et cetera)...
    et que ce sont de mauvais clients pour les secteurs 2 qui demandnt d'énormes dépassements.
    Je rebondis sur un de mes dadas : l'éducation nationale. Les "riches" et les intellectuels se sont désintéressés de l'école des "pauvres" dans les banlieues parce que leurs enfants ne fréquentaient pas les mêmes écoles mais l'épidémie s'étend aux beaux quartiers tant en termes de "discipline" que de contenu de l'enseignement.
    L'apartheid social a du mal avec la réalité.
    Bonne journée.

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  8. A anonyme,
    Si vous n’avez pas compris c’est que vous n’avez pas compris non plus ce que disait JCG dans le post. JCG parle de surprescription d’antibiotiques (NMNT= nombre de malades à ne pas traiter). L’incitation (et le marketing, les stratégies d’influence, la publicité) ne marchent pas seulement pour les médecins. Elles marchent très bien aussi pour les patients. Dans un sens ou dans un autre, pour emmener les patients à consommer plus ou moins de médecine.
    10% des consultations d’adultes aux Etats Unis aboutissent à la prescription d’antibiotiques et 20% lorsqu’il s’agit d’enfants http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/22065263 . Dans la plupart des cas ces prescriptions ne sont pas justifiées médicalement. Si on considère que c’est la même chose en France si un médecin refuse de prescrire des antibiotiques (en expliquant bien sûr) quand ce n’est pas nécessaire il peut réduire notablement le nombre de patients qui reviendront l’année suivante réclamer des antibiotiques. Si le médecin fait la même chose pour d’autres traitements il peut réduire facilement son activité, d’autant plus qu’il surprescrit et donc faire de la place pour des patients qui ont de vrais besoins et qui étaient vus par d’autres médecins.

    En ce moment je vois régulièrement des nourrissons ou enfants revenir des urgences avec pour toute prescription du sérum phi et/ ou du paracétamol. Les parents s’en plaignent. Mais il est clair que c’est non seulement justifié médicalement mais que c’est aussi un moyen efficace de dissuader les parents de consulter inutilement aux urgences. Bien entendu ce serait encore mieux en expliquant aux parents le pourquoi du comment pour qu’ils ne se sentent pas simplement frustrés ou insécurisés. Mais il ne faut pas en demander trop aux services d’urgences qui en font déjà beaucoup. C’est souvent moi qui me charge de fournir les explications.

    Le propos de la conférence sur la surprescription était encore un peu différent. Le report du manque à gagner pour les médecins en matière de prescriptions apparaît encore plus clairement aux Etats Unis. Car il s’agit d’un pays où il existe encore des grandes inégalités dans la couverture maladie. Les médecins gagnent d’autant plus d’argent qu’ils en font plus. D’où la dénonciation par la conférence des modes de rémunération incitatifs. Ce qu’ils ne gagnent pas en ne traitant pas des malades qui ne sont pas solvables ils auront tendance à le récupérer auprès des malades solvables en surprescrivant chez ceux-ci. Il s’agit pour eux, consciemment ou non, d’exploiter le filon. Il existe un contexte, en partie fomenté par le marketing des laboratoires, qui les légitime dans l’idée que ce qu’ils font est en accord avec les intérêts du patient. En faire plus c’est toujours mieux selon le crédo scientiste et le marketing de Big Pharma.

    Il se passe un peu la même chose en France mais de manière moins visible et plus nuancée. Parce qu’en France il existe une couverture maladie universelle. Mais les différences tiennent avant tout à l’organisation du système de santé. Ce qui signifie qu’il faut réfléchir en amont et que c’est à l’Etat de réguler. Si l’Etat ne fait pas ça l’Etat ne sert à rien.
    En France les très gros prescripteurs se situent dans des zones plutôt semi-rurales et dans des régions plutôt défavorisées. La liberté d’installation fait que les médecins choisissent de s’installer de préférence dans des zones urbaines surdotées.

    Il n’y a pas de manque de moyens mais un problème d’affectation de moyens. Moins d’actes inutiles (c’est un problème avant tout de formation) et plus de médecins là où il y a des besoins.

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  9. A JCG
    Quant au problème de la conception de l’enseignement les études de médecine représentent le summum de ce qui se fait en la matière en France tout au long des études de la maternelle à l’université. Le but est d’empiler les connaissances sans leur donner de sens ni établir des liens. Cela légitime la sélection d’ élèves de haut niveau socio-économique mais cela n’apprend certainement pas à réfléchir ni a bien faire de la médecine.
    Il y a encore eu une étude récente de l’OCDE montrant à quel point les adultes Français sont peu capables de raisonner et d’utiliser les connaissances acquises http://www.franceinfo.fr/education-jeunesse/question-d-education/les-16-44-ans-meilleurs-eleves-que-les-45-65-ans-1170729-2013-10-09 . Simplement parce que à ce niveau, comme aux niveaux inférieurs de l’enseignement l’objectif principal du système d’enseignement n’est pas de diffuser le savoir et d’améliorer les compétences mais d’opérer une sélection parmi les élèves selon des critères rigides et scolaires.

    Ce que devrait être une bonne médecine paraît assez simple à formuler : une médecine qui maximise les bénéfices pour le patient en tenant compte de ses valeurs et préférences, tout en minimisant les nuisances. Dans la réalité cela devient terriblement compliqué en raison d’une insuffisance de la formation et parce que des intérêts totalement étrangers au but premier de la médecine viennent interférer dans cette équation.

    Le problème, à mon avis, c’est que le pouvoir de nuisance des médecins augmente beaucoup plus vite que leur pouvoir de bienfaisance. Parce qu’il y a des médicaments aux effets indésirables de plus en plus ravageurs mis sur le marché et aux bénéfices de plus en plus discutables. Et des procédures de plus en plus lourdes techniquement avec un risque de iatrogénie accru. De même, il y a un glissement vers la prévention curative, comme dans l’intervention mutilante pour « guérir » un cancer du sein qui n’existe pas encore.

    Donc la question de la surprescription est une vaste question qui risque de définir l’avenir de la médecine selon la manière dont on va la traiter.

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  10. J'adore les commentaires de CMT et surtout les liens qu'elle nous donne (sauf quand ils sont anglicisants et longs parce qu'alors je rame). J'aime qu'elle nous donne une vision décalée, plus sociologique de notre pratique, à nous pauvres MG la tête dans le guidon. j'ai découvert cette après-midi qu'elle allait aussi porter la bonne parole chez JADDO. Par contre elle pige mal que la désertification qui est réelle sur le terrain, je peux en témoigner, loin d'améliorer la déprescription va l'accroître entrainant un cercle vicieux. Pour dé-prescrire il faut du temps, beaucoup plus de temps que pour prescrire, et en cette saison d'octobre rose et de vaccin grippal je sais de quoi je cause. L'humanité est ainsi faite, et les MG n'y dérogent pas, que l'on tend plus facilement vers la facilité. Il ne faut pas croire qu'au tarifs actuels, les MG qui vont se retrouver avec une clientèle de plus en plus pléthorique, vont en profiter pour déprescrire,au contraire ayant moins de temps pour expliquer et (s') interroger, ils vont encore plus massivement suivre les injonctions de Big Pharma, des Médias, des pseudo comités d'experts, des ROSP tordus de conflits d'intérêt...j'en passe et des meilleures. Donc je suis d'accord (partiellement) avec toi, la surprescription favorise la difficulté d'accès au soin, mais la difficulté d'accès aux soins favorise aussi la surprescription. Bref le serpent se mord la queue et on est pas sortis de l'auberge, et il n'y a bien que toi pour croire que l'Etat va y changer quoique ce soit (cf ROSP)., mais je dois être de mauvaise humeur ce soir...

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  11. A Popper 31
    la vision que je donne (que j'essaie de donner) est plus "santé publique" que sociologique. A savoir, que la médecine est constituée de la somme des actes individuels des médecins. Peut-être sociologique au sens où j'essaie de dégager les grandes tendances.
    La question de l'incitation et du rôle que cela joue dans les caractéristiques de prescription de la majorité des médecins rejoint ce que tu dis. A savoir que la masse des médecins suivra d'abord son intérêt immédiat en tentant de légitimer cette position à ses propres yeux. C'est la loi de la plus grande pente.
    La question est de savoir qui et comment est définie cette pente en amont. C'est pourquoi les modes de rémunération sont importants parce que par des incitations financières on peut faire que la masse des médecins prescrive plus de telle chose et moins de telle autre. D'où la conclusion prônée dans la vidéo que le mode de rémunération doit être le plus neutre possible parce que ce qui doit importer au médecin c'est l'intérêt du patient et non ce qu'il pense gagner en prescrivant plus de ceci et moins de cela.

    Pour le reste tu as aussi raison. Ce sont les médecins dans les zones sous-dotées qui prescrivent le plus (et expliquent et réfléchissent le moins). Parce qu'ils pensent que c'est le meilleur moyen de voir le plus de patients et de répondre à la demande. Mais en réalité ils auto-aggravent leur cas jusqu'au burn out et j'ai vu récemment passer une ordonnance où un MG avait marqué "vous nous les brisez menu avec vos PAI" avec en prime le diagnostic écrit sur l'ordonnance(vaste sujet mais ça ne m'était pas adressé).

    Les études montrent que les médecins prennent plus de temps en consultation avec des personnes de leur propre milieu social. D'où il faut conclure que ce sont les médecins installés dans des secteurs surdotés et déjà favorisés qui prennent le plus de temps pour expliquer.
    C'est encore un facteur annexe d'aggravation des inégalités.

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  12. il y a 5 ans, 13 médecins. Aujourd'hui, 7. Acceptation des nouveaux patients qui ne savaient où aller. Plus de visites, plus de personnes âgées, plus travailleurs, plus d'enfants, plus d'arrêts de travail, plus de transports, plus d'antibiotiques .....Convocation à la "sécu" et menaces. Discours sociologique ou pas, tout ça c'est du bla bla; je pars. Il en reste 6 qui vont encore davantage prescrire et qu'on va encore davantage préssurisé. L'état censé régler ça, je rigole. Bon vent à docdu 16. Frollo.

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