vendredi 4 septembre 2015

Fluorette, on aime ta médecine générale.


Fluorette, je l'ai vue en vrai (c'est mon lien d'intérêt déclaré), eh bien, elle m'a fendu le coeur quand j'ai lu son billet annonçant son départ (lire ICI avant de continuer) parce qu'elle a raconté notre exercice quotidien à tous (sauf qu'elle a oublié plein de trucs qui m'énervent encore plus que les trucs qu'elle a cités) et que je l'ai plainte qu'elle en souffre de cette façon. 

Parce qu'au delà de ses emmerdes, en dépit des raisons pour lesquelles elle ne peut plus continuer, et, sans trahir de secret, mais le secret est public, elle accumule pas mal de choses et que, vu de l'extérieur, ça commence à bien faire, et, je crois, mais je dis cela comme cela, les conseilleurs ne sont pas les payeurs, elle a bien raison d'ouvrir la porte pour la fermer...

Et au delà de tout ce qu'elle raconte et chacun d'entre nous, je veux dire les médecins généralistes qui sont en train de passer un sale quart d'heure avant de disparaître, peut témoigner du fait que c'est du vécu vrai, donc, la Fluorette, en sa tristesse et son malheur, elle a quand même l'air d'être une drôle de bonne médecin généraliste. Elle a l'air d'avoir vachement compris ce qu'est notre métier, bien qu'elle soit jeune, bien qu'elle n'ait pas encore de "bouteille", bien qu'elle sorte de la fac il n'y a pas si longtemps que cela, et les gens de mon âge peuvent témoigner qu'à son âge on n'avait non seulement pas compris le quart de la moitié de ce qu'elle comprend mais, bien pire encore, on ne se posait même pas de questions, on (je parle de moi) se laissait porter par la griserie de l'indépendance, l'enthousiasme d'être un docteur et de voir des gens attendre dans la salle d'attente pour venir nous voir...

Tout ce qu'elle dit, énumère, rapporte, fait partie du quotidien des médecins généralistes installés, mais c'est peu enseigné, peu décrit et les jeunes médecins, les pas encore installés comme les futurs thésards, ont spontanément peur de tout ce qui peut tomber sur les épaules d'un médecin frais émoulu de la Faculté de Médecine qui prend tellement les futurs médecins généralistes pour des demeurés que plus personne ne veut exercer cette merveilleuse profession de merdre. parce que, la médecine, quoi qu'on en dise, c'est une profession de merdre : c'est un gouffre insondable tant sur le plan de la science que sur celui des sentiments. Il faut être solide.

Les malades nous disent souvent "Mais comment faites-vous pour vous rappeler les noms et les posologies de tous les médicaments ?..." mais s'ils savaient que cette "performance" est sans commune mesure avec le reste, c'est à dire écouter, construire, analyser, synthétiser, prendre en compte, non seulement les symptômes et éventuellement les maladies mais surtout ces bon dieux de citoyens immergés dans une société où tout est fait, toutes choses égales par ailleurs quand on examine l'augmentation continuelle de l'espérance de vie, pour que l'hygiène de vie soit mauvaise.

Fluorette fend le coeur parce que son constat n'est pas seulement celui de quelqu'une qui regrette qu'on lui mette des bâtons dans les roues mais surtout celui d'une jeune femme qui sait quel type de mèdecine elle veut exercer, dans quelles conditions, dans quel environnement et avec quels collègues qui seraient non seulement gentils mais gentils. Fluorette a lu, entendu, pratiqué, discuté, remis en questions, douté, et pourtant elle sait ce qu'elle veut. Pas d'un machin hyperbolique ou rêvé mais d'un endroit proche où elle serait en mesure de faire de la médecine générale, de la simple médecine générale.

Parce que mon boulot c’est la médecine générale, c’est m’occuper de gens entiers, pas juste des bouts de gens et la fois d’après l’autre bout..

Et en lisant ce qu'elle a écrit ce premier septembre 2015, on a beau écarquiller les yeux, relire, chercher, on ne trouve ni le prix de la consultation, ni la lourdeur des charges et des impôts, ni, ni, on ne trouve que le terrible désespoir de ne pas pouvoir exercer un métier qui permet d'écouter les gens, de les conseiller et, éventuellement, en les soignant, de les guérir.

En fait, Fluorette, je l'ai vue IRL quelques instants dans une manifestation contre la Loi Santé, mais je la connais surtout par son blog, ses activités twiteriales, et cetera, je crois donc qu'elle ne peut pas ne pas rebondir pour faire ce qu'elle a envie de faire.

Mais il est vrai, comme elle le dit, qu'elle n'est pas aidée.

J’ai envie que le rêve devienne réalité. Oh je me rends bien compte que tout ne sera pas parfait. Mais je suis prête. Ça y est. Je commence à en parler. Je confirme la rumeur, j’essuie leurs pleurs, je dis au revoir, mon bide se serre.

Illustration : de Paul Signac (1863-1935) : Au temps d'harmonie (1893-1895)

10 commentaires:

  1. Ah ouais? C'est curieux, parce que les commentaires laissés par ta Fluorette sur Twitter, ils respirent pas franchement l'amour du métier et des patients, mais plutôt l'aigreur et la frustration. C'est peut-être en partie lié à son problème d'infertilité, mais, personnellement, ça me donne pas envie de consulter ce genre de médecin. A mon avis, ses patients ne s'en porteront pas plus mal lorsqu'elle aura dévissé. Si elle aime pas son boulot, qu'elle fasse autre chose...

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    1. voila un commentaire pertinent sous le couvert de l'anonymat. Quel courage ! avant de juger quelqu'un mettez vous dans sa vie, son metier, sa situation. Apres argumentez sous votre nom et assumez

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  2. grandeur et misère de la médecine générale, ou l'on peut aider un mourant à mourir, examiner un nouveau né, suturer une plaie, annoncer un diagnostic redoutable, inciser des hémorroïdes, rencontrer des symptômes anodins qui peuvent révéler une pathologie d'urgence, écouter l'angoisse d'un dépressif suicidaire... et bien d'autres choses; parfois dans la même journée.
    Tout cela nécessite un environnement professionnel et personnel serein, à la fois dans notre cadre de travail, avec les professionnels environnants, mais aussi avec les tutelles administratives. Si tout ne peux jamais être parfait, ce n'est pas un échec d'essayer de modifier ce que l'on souhaite améliorer, dans la mesure ou on le peut.

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  3. Joli article plein qui respire le bon sentiment mais qu'en pense le smicard soumis aux contingence de la pression hierarchique ?

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  4. Je laisse très, très rarement des commentaires. Mais le négatifs plus haut m'ont décidée.
    Je suis une lectrice silencieuse de Fluorette et toute la bande. Je suis à la fois attristée par le déplaquement de Fluorette que j'adorerais avoir comme MT, mais à la fois et surtout très heureuse pour elle de cette nouvelle aventure.
    Fluorette, Jaddo, DrTiben,Math, et j'en oublie désolée, sont tous des médecins qui me font retrouver le côté humain des docteurs (Même si j'ai la chance d'avoir un très bon medecin).
    Merci à eux, merci à vous. Pour tout ce que vous faites pour nous, au quotidien, malgré tous ces "ni, ni" . Juste merci.

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  5. @Anonyme, le premier

    Étrange, je n'ai absolument pas le même ressenti. Son travail elle l'aime. Ce sont les conditions qui sont difficiles. Et qu'on ne peut s'imaginer quand on n'est pas à la place de la personne en question.

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  6. J'ai totalement retrouvé Fluorette dans tes dires. Une personne entière, aimant son boulot plus que tout, et si triste de ne pouvoir faire son métier comme il le faudrait, en aidant ses patients dans les meilleures conditions qu'ils soient. Non pas car elle ne veut pas, mais parce qu'on ne lui en donne pas les moyens.
    Pour répondre à Anonyme, le premier, celui qui ne lis pas entre les lignes et qui ne comprend pas grand chose à la vie je crains, je ne suis pas soignant, ai connu Fluorette sur Twitter, puis IRL. Il y a beaucoup de médecins sur twitter qui vivent leurs métiers à fond, qui rentrent exténués le soir car, pour leurs patients, ils se sont battus contre le système. Qui effectivement se servent souvent de twitter comme défouloir. Mais mieux vaut se défouler dans un monde "fictif" que de baisser les bras et de devenir comme "associé pénible" qui consulte dans les couloirs... Alors oui, il vaut mieux que vous choisissiez un médecin qui vous ressemble, quelqu'un qui vous prendra la tension par dessus la chemise pour ne pas perdre de temps. Et vous dirigera encore plus rapidement vers un confrère plus qualifié que lui pour un mal bénin, mais qui ne manquera pas de passer votre carte vitale et d'encaissez votre chèque. Il vaut mieux oui, tout le monde s'en portera mieux, vous, et les médecins comme Fluorette.
    Dernière chose, signer ce genre de commentaire "Anonyme" montre bien le niveau... On se croirait sur un forum de jeux videos pour pré-ados.
    Signé : @ChatBoudin

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  7. Soyez gentil les gars, laissez le troll jouer avec ses faeces. Il lui en reste un peu de la veille

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  8. Si on fait un blog c'est parce qu'on est passionné par son métier, ce n'est pas alimentaire uniquement.
    Alors monsieur le premier anonyme, très courageux peut garder ses réflexions pour lui.
    Et Fluorette a du aider pas mal de personnes avant de décrocher.

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  9. Dommage, vraiment.

    Sur les posts que j’ai pu lire d’elle j’ai remarqué beaucoup de nostalgie, souvent, de sa région natale, qui pouvaient laisser prévoir, peut-être, la suite.
    Il me semble que l’histoire de Fluorette est aussi celle d’une transplantée (au sens botanique) dont la greffe n’a pas pris.

    Elle a eu aussi la malchance de tomber sur un représentant d’une petite minorité de médecins qui considèrent que la médecine n’est rien d’autre qu’un moyen de s’enrichir en embobinant les patients. Une sorte de repoussoir.

    J’ai été marquée par une des chose qu’elle a dit dans un de ses posts : « je n’étais pas préparée à ça ».
    Il est vrai que l’exercice de la médecine s’est terriblement compliqué (je ne vais pas me lancer ici sur des supputations sur les raisons pour lesquelles il s'est compliqué, il y en a), sans que, semble-t-il, les étudiants soient préparés à ça. Il serait pourtant bien utile que les étudiants aient des cours sur comment choisir leurs logiciels, les règles de base de la comptabilité, la connaissance et l’utilisation de la nomenclature http://www.ameli.fr/professionnels-de-sante/medecins/votre-convention/tarifs/tarifs-conventionnels-des-medecins-generalistes/tarifs-des-medecins-generalistes-en-metropole.php ,l’ orientation des patients en fonction de leur situation socio-professionnelle vers les bonnes démarches et bons services, gestion des rendez-vous et de la patientèle en fonction de ses aspirations personnelles… Toutes choses qui revêtent une importance fondamentale dans l’exercice de la médecine au quotidien et le service rendu au patient mais qui ne sont pas traitées, comme tant d’autres, dans les études de médecine.

    Il serait pourtant assez simple, aussi, de mettre en place un service destiné à apporter une aide concrète aux médecins pour tous ces aspects pour lesquels les nouveaux installés perdent beaucoup de temps personnel.
    Enfin, ce que j’apprécie surtout chez Fluorette, mis à part son côté entier, c’est son positionnement particulièrement juste vis-à-vis des patients : à l’écoute mais ni victime, ni dupe, ni complaisante.

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