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dimanche 30 septembre 2012

Ostépathie, coqueluche et PMI. Histoire de consultation 132.


Madame A, 33 ans, a pris rendez-vous pour que je lui fasse un vaccin.
Elle arrive à l'heure à son rendez-vous mais elle a oublié le vaccin.
Elle voit que cela me casse les pieds qu'elle doive revenir chez elle, elle en a pour au moins un quart d'heure. Mais, bon, c'est un vaccin... Mais c'est aussi, en général, une patiente casse-pieds, dans le genre Comme je ne viens pas vous voir souvent j'en profite pour vous poser plein de questions, des malades comme moi, vous ne devez pas en voir souvent, on n'encombre pas les cabinets, donc j'ai des choses à vous demander, ça ne vous embête pas ?
Elle a l'air franchement virussée, elle tousse, sa voix est cassée.
"Vous êtes malade ? - Je crois que je suis bien grippée." Je n'y crois guère à la grippe mais au virus, probablement. "Je crois qu'il ne sera pas possible, de toute façon, de vous vacciner aujourd'hui, je n'aime pas vacciner les personnes qui ont de la fièvre... - Ah bon..."
Elle s'est assise dans mon bureau, elle sort la pochette où se trouve le vaccin, la pochette délivrée par les pharmaciens pour faire croire aux gens que les conditions de stockage des vaccins... Mais je m'égare. Cela ne vous rappelle pas quelque chose, la chaîne du froid ?
Le vaccin, c'est Repevax, la nouvelle invention de Big Vaccine pour augmenter artificiellement le prix des vaccins et pour faire un disease mongering éhonté (augmenter le nombre d'unités vendues). Il associe Revaxis (le truc qui remplace le DTPolio en rupture de stock depuis des lustres et qui, comme par hasard, est beaucoup plus cher, et dont l'AMM n'est pas tout à fait adaptée, mais, les vaccins, on s'en moque, parce qu'ils n'entraînent jamais d'effets indésirables, que l'affaire Pandemrix (voir ICI), c'est un truc inventé pour que les lobbys anti vaccin puissent entraîner toujours et plus de morts tous les ans en freinant l'élan progressif de la vaccination...) et coqueluche. Je ne dis pas que Repevax ne serve à rien, et ce, d'autant, dans le cas qui nous occupe, que la dame vient d'accoucher il y a un mois de son premier enfant, obtenu dans des conditions difficiles, et que, donc, pourquoi pas.
Elle : "Il faut absolument me vacciner. Pourquoi ne voulez-vous pas le faire ? La puéricultrice de la PMI m'a dit que mon bébé pouvait mourir si je ne le faisais pas." La première chose que nous savons, après avoir lu Freud et écouté le docteur House, c'est que les patients mentent pour savoir la vérité ou disent la vérité pour mentir, à moins que cela ne soit un mélange savant de tout cela, et que les propos rapportés, surtout s'ils nous apparaissent polémiques, sont toujours à vérifier. Je lui dis que la puéricultrice avait eu raison de lui dire de se faire vacciner mais tort de la menacer de cette façon.
Madame A "fait" une grosse rhinopharyngite, le thermomètre indique 39°, et il me paraît peu judicieux de la vacciner ce jour. "Mais, vous comprenez, je ne veux pas redonner cela à ma petite fille, c'est trop dangereux... J'espère que vous allez me prescrire des antibiotiques... Sans antibiotiques je ne guéris jamais."
Bon, je branche mon disque rayé sur la plage Antibiotiques et pourquoi je n'en prescris pas quand il me semble que je ne dois pas en prescrire, et je fais un flop retentissant. 
"Oui, oui, je connais la phrase Les antibiotiques, c'est pas automatique, mais cela ne me convient pas, moi, il me faut des antibiotiques, pour moi c'est comme ça, je suis différente. D'ailleurs, ce sont des histoires, le slogan de pub, c'est une façon de faire des économies, tout comme d'ailleurs les génériques... on nous refourgue des trucs mal fabriqués et on nous dit que c'est pareil..."
Je perds pied.
Je vérifie en douce que je suis bien le médecin traitant de la patiente, ce qui n'est pas un privilège, on le voit.
Je ne luis sers pas le disque rayé Génériques.
Je tape mon ordonnance qui ne comporte pas d'antibiotiques.
Elle fait la tronche.
Il faut dire que le résultat de la consultation, vu de son point de vue, est catastrophique : elle n'a pas eu d'antibiotiques, elle n'a pas été vaccinée, sa fille va mourir...
Mais elle a une arme fatale. Au moment de me tendre son chèque, elle se rappelle qu'elle a autre chose à me demander. Elle sort de son sac un post-it qu'elle me tend et où j'ai le temps de voir six lignes de médicaments homéopathiques. 
"C'est remboursé ?"
Je la regarde ahuri : "Je n'en sais strictement rien, je crois que ce sont des médicaments homéopathiques, mais d'où sortez-vous cela ? - Eh bien, la puéricultrice m'a conseillé de montrer ma fille à un ostéopathe et il m'a prescrit ces médicaments."
Je respire profondément, je pense très fort aux conseils que mon psychothérapeute virtuel, celui que je consulte en mon for intérieur pour éviter le fameux burn-out, m'a donnés, un mélange de psychothérapie de soutien, d'analyse freudienne, d'auto-entretiens motivationnels, de thérapies cognitivo-comportementales, et je dis : "Mais c'est quoi, cette histoire d'ostéopathe non médecin qui prescrit des médicaments en disant aux patients de les faire inscrire par leur médecin traitant ?"
Madame A n'est pas contente du tout. "Mais moi je n'ai fait que suivre les conseils de la PMI. Pourquoi vous m'engueulez ?"
C'est vrai, pourquoi je l'engueule ? Parce que ce n'est pas la première fois que l'hôpital en sortant de la maternité ou la PMI en sortant de consultation, adressent les nouveaux-nés chez l'ostéopathe. Et un copain ostéopathe, qui plus est. Je me rappelle vaguement qu'il s'agissait une fois d'une bosse séro-hématique, une autre fois d'une raideur rachidienne et, encore une autre fois de coliques. Il ne faut pas faire souffrir les nourrissons, tous les moyens sont donc bons pour atteindre des objectifs moraux. 
Madame A n'est plus ma patiente. 
Je me demande si je ne vais pas me fendre d'une lettre au Conseil général pour leur demander comment il se fait que les rebouteux soient conseillés par le service public.
Je me rappelle aussi que la délégation des tâches va rendre encore plus faciles certaines pratiques déloyales.
Le résultat de consultation de ma patiente a vraiment été désastreux.