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vendredi 22 septembre 2023

BeyfortusⓇ/niservimab : dernières nouvelles. Ce que l'on sait médicalement et politiquement. Avec une note finale du CNGE.

Le capitalisme d'Etat


J'ai déjà écrit deux billets sur le sujet, le premier pour critiquer la recommandation très curieuse de la HAS (c'est LA) et le deuxième (c'est ICI) pour montrer combien le complexe santéo-industriel français s'était mobilisé pour imposer le remboursement d'une molécule française en dépit de toutes les réserves qui pouvaient être émises sur son efficacité.

Au moment où j'écris ces lignes le prix du BeyfortusⓇ/niservimab  n'a pas été communiqué. C'est une information confidentielle secret défense.

Pourtant nous apprenons que le gouvernement français aurait commandé 200 000 doses à Sanofi en février-mars 2023, donc avant la recommandation de la HAS et même avant que la seule étude contrôlée positive n'eut été publiée (Le Moniteur des Pharmacies : LA).

Sanofi, de plus, va gérer les stocks et recevra directement les commandes des pharmacies. 

Je vous parlais de capitalisme d'Etat.

Et bien entendu, nous sommes le premier pays à le faire car les intérêts de Sanofi sont à préserver car d'autres molécules arrivent pour les nouveaux-nés et nourrissons et également un vaccin chez la femme enceinte.

Avec élargissement des prescriptions aux sages-femmes. Pour rendre la population des nouveaux-nés et des nourrissons complètement captive (environ 750 000 en France par an).


On se résume : 

  • La HAS recommande le remboursement d'une molécule sans prendre en compte le seul essai contrôlé positif chez les nourrissons "fragiles" alors qu'elle a pris en compte une étude positive mais ouverte, c'est à dire sans aveugle (les soignants savaient à qui ils ou elles avaient affaire) : on n'a jamais vue telle précipitation et une telle confusion (on me dit dans l'oreillette qu'avec la HAS tout est possible).
  • Une molécule dont l'ASMR est cotée IV et le SMR coté V, c'est à dire efficacité nulle ou presque
  • Une molécule Sanofi-Aventis (multinationale française)
  • Le gouvernement achète à un prix non communiqué mais probablement très élevé (plus cher qu'un vaccin) car il s'agit d'un anticorps monoclonal une molécule dont, officiellement, les résultats cliniques ne sont pas connus (sauf pour les nourrissons en bonne santé chez lesquels on ne diminue pas significativement le nombre des hospitalisations)
  • Le nouveau DGS, nommé dans la précipitation, un politique de chez politique, Grégory Emery, s'empresse de tout valider.
  • Le Ministre de la Santé et de la Prévention et toute l'administration communiquent de façon triomphale sur le traitement universel de tous les nourrissons en affirmant que cela va faire baisser le nombre d'hospitalisations de tous les nouveaux-nés et de tous les nourrissons de 80 % (RRR) (alors qu'il y a eu manipulation des résultats en agrégeant 2 études concernant des population sans risques et une population à risques).

Ce que l'on sait sur le plan de l'efficacité : 

  1. Chez les nouveaux-nés et nourrissons en bonne santé et nés à terme : l'étude contrôlée indique une diminution significative du nombre de crises avec un nombre de sujets à traiter (NST) de 14 (NST=1/RRA, soit 1/(0,026-0,095)) mais pas de diminution significative du nombre d'hospitalisations
  2. Chez les nouveaux-nés et nourrissons prématurés et/ou porteurs d'une affection grave : l'étude contrôlée indique une diminution significative du nombre de crises (NST = 14) et du nombre d'hospitalisations (NST = 62, soit  1/(0,022-0,096)).

Ce que l'on sait sur la plan de la tolérance :

  • Une étude spécifique de tolérance a été réalisée nirsevimab vs palivizumab (étude MEDLEY : LA) et non par rapport à un placebo et au moins un effet indésirable chez plus de 60 % des sujets dans les deux groupes (ce qui est beaucoup) et dans les groupes nirsevimab, et non attribués au produit : 5 décès 
  • Dans l'essai chez les enfants "sains" : 3 décès dans le groupe nirsevimab
  • Dans l'essai chez les enfants "fragiles" : 2 décès dans le groupe nirsevimab et 3 dans le groupe placebo 


Notes : 
RRR = Réduction du Risque Relatif
RRA = Réduction du Risque Absolu

DERNIERES NOUVELLES.

La société savante des médecins généralistes (@CNGE sur twitter) communique ce 29 septembre 2023 et confirme tout à fait l'analyse que nous avions faite.



A lire absolument : ICI

vendredi 1 septembre 2023

Remboursement du Beyfortus (nirsevimab) dans la bronchiolite aiguë du nourrisson due au Virus respiratoire Syncitial : le naufrage de la Haute Autorité de Santé.



La communication Beyfortus®/nirsevimab est une histoire triste car c'est la répétition, le bégaiement et la palingénésie de la déliquescence avancée de la santé publique française et internationale. 

Au centre de cette affaire, nous observons la corruption des esprits, la corruption des savoirs et la corruption des comptes en banque.

Avec comme contexte plus général, l'importance du complexe santéo-industriel (comme on parle du complexe militaro-industriel).

Je vous raconte l'histoire française. 

Pour les profanes, il ne s'agit pas d'un vaccin mais d'un anticorps monoclonal, donc, le premier, et j'ai des sources, qui disent que cet article est antivaxx, a droit à une entrée directe au Paradis des khons.

Le produit/molécule est le fruit d'un développement conjoint entre Sanofi et Astra Zeneca.

1. La Haute Autorité de Santé (HAS)

1.1 La HAS fait paraître ICI un avis le premier août 2023, un avis favorable au remboursement du produit pour, simplifions, le traitement préventif de la bronchiolite aiguë du nourrisson : 


Il me paraît important que vous le lisiez en détail et, notamment ce qui concerne les analyses des essais cliniques qui ont permis de forger l'avis de la HAS sur le remboursement et l'établissement des SMR et ASMR.

Le pitch est celui-ci : "Un progrès dans la stratégie dans la prise en charge de la population non éligible au Synagis®/palivizumab"

Le Synagis®/palivizumab a déjà obtenu le remboursement à 100 % dans l'indication "bronchiolite aiguë du nourrisson" en 2007, (voir LA les détails). Le problème avec cette molécule vient de que l'injection préventive doit être faite avant le déclenchement de l'épidémie de bronchiolite, mensuellement, au maximum 5 fois selon les études, que son prix est important (c'est un euphémisme : 403 à 670 € par injection), et que les études ne montrent pas de diminution significative du taux d'hospitalisation !

Le SMR est faible, l'ASMR est IV (mineure).

Ainsi le Synagis®/palivizumab est-il un produit peu efficace et sur prescrit hors AMM.

Par quoi va-t-il être remplacé?

Par une molécule dont l'ASMR est IV (mineure) et le SMR V (absent) !

Et dont le prix, n'en doutons pas, sera élevé.

Ainsi, la HAS est favorable au remboursement d'une molécule qui, comparée à une molécule sans intérêt médical (et c'est l'HAS qui le disait), n'est pas supérieure à celle-ci.


1.2 Les méthodes de la HAS pour évaluer

L'évaluation des molécules est confiée à la Commission de la Transparence dont vous pouvez voir la composition  : LA.

L'HAS a aussi dans son avis cité l'opinion de la Société Française de Néonatalogie (SFN) et du Groupe de Pathologie Infectieuse Pédiatrique (GPIP), qui est inclus dans la précédente,  en date du 05/06/2023. "Il a été approuvé à l’unanimité par le bureau de la SFN à l’exception de ceux de ses membres ayant des liens d’intérêt, qui n’ont pas participé au vote."

Voici le bureau de la SFN (son site ne rapporte pas de "Mentions légales" contrairement à ce qu'exige la loi) :


(A noter que le président a 91 déclarations de liens d'intérêts financiers avec l'industrie dont 12 avec Sanofi et qu'à part 2 d'entre elleux, toustes ont des liens avec Sanofi et/ou Astra Zeneca).

1.3 La présentation des résultats.

La HAS, agence gouvernementale, présente les résultats des essais en faisant preuve d'un innumérisme institutionnel qui avait déjà été dénoncé par Benoit Soulié (ICI) puisqu'elle ne fait part que de la réduction du risque relatif (RRR) et non de la réduction du risque absolu (RRA) et, ainsi, omet de préciser combien il faut traiter de sujets pour éviter un événement (nombre de malades à traiter).

La HAS, agence gouvernementale, ne connaît pas non plus la hiérarchie de valeur des essais cliniques puisqu'elle met en avant les résultats positifs d'un essai "ouvert" (HARMONIE) contre les résultats négatifs d'un essai contrôlé (MELODY).

Rappel :



En résumé pour le Beyfortus®/biservimab : 

  • Les études contrôlées ne montrent pas de bénéfice significatif chez les enfants bien portants
    • sur le nombre d'hospitalisations
    • sur la nécessité de proposer une oxygénothérapie
    • sur la mortalité
  • Il faut traiter 27 enfants pour éviter une crise de bronchiolite dans l'étude MELODY
  • A noter que pour l'étude ouverte HARMONY, il faut traiter 83 enfants pour éviter une hospitalisation.


2. Le complexe santéo-industriel. 

2.1 Le ministère de la santé a fait fort : 


Le point le plus important, c'est la communication gouvernementale : grâce à ce produit, on va diminuer le nombre d'hospitalisations ! 

C'est faux.

Le reste est littérature.

2.2 La Direction Générale de la Santé.

Un communiqué DGS Urgent : LA.



2.3 Le Collège de la Médecine Générale qui n'a fait preuve d'aucun semblant de critiques et qui a montré, mais on est habitués, son innumérisme et ses croyances : LA.




2.4 L'AP-HP


2.5 Le meilleur infectiologue de toutes les terres émergées : Nathan Peiffer-Smadja


2.6 La presse grand public


2.7 La Revue Prescrire, qu'on a connue plus travailleuse et mieux éclairée, approuve éventuellement l'anticorps monoclonal (ICI).




2.8 Quant à Sanofi, après avoir fait travailler son service de presse, publié des commentaires élogieux sur sa molécule (LA), passé des coups de fil ad hoc, le laboratoire se tourne les pouces tout en essayant d'obtenir le meilleur prix possible.

L'argumentation est simple : une étude ouverte diminue le risque d'hospitalisation, les hospitalisations pour bronchiolite, ça coûte cher, donc on va produire une étude médico-économique favorable et passer muscade.


Félix Vallotton

PS : Rajout du 15/09/2023


Un article de Lacet Elisabeth dans Vidal : LA

Il ajoute les données de la deuxième partie de l'essai Melody, confirme que le critère "Hospitalisations" était un critère secondaire et que les résultats chez les enfants "sains" ne sont pas encourageants.


PS du 18/09/2023 : deuxième volet (et deuxième billet) sur la question : c'est LA