jeudi 23 février 2017

Pudeur et impudeur. Histoire de consultation 195.

Chaïm Soutine : Portrait de Madame X (1919)

Madame A consulte ce matin pour le "renouvellement" de sa pilule. On parle de choses et d'autres, de sa famille, d'un deuil récent, des enfants et elle me dit : "Je crois que vous allez voir mon frère cet après-midi - Sans doute. - Il ne vous le dira pas mais sa femme l'a quitté. - Ah..." 
Elle ne me dit pas grand chose et je ne pose pas de questions. Je connais bien son frère, Monsieur B et je connais bien aussi sa femme dont je suis également le médecin traitant. 
Elle ajoute : "Il ne va pas bien. Il dort mal, il fait des genres de crises d'angoisse."
Il ne m'a parlé de rien.


Chaïm Soutine : Portrait d'homme (1922-1923)


Monsieur B consulte cet après-midi pour le "renouvellement" de son traitement anti hypertenseur. Il m'apporte également les résultats d'une prise de sang. On parle de choses et d'autres, de sa famille, d'un deuil récent, des enfants, et il me dit : "Je crois que vous avez vu ma soeur ce matin. - Sans doute. - J'imagine qu'elle ne vous a pas dit que son mari était parti. - Je ne crois pas."
Il ne me dit pas grand chose et je ne pose pas de questions. Je connais bien son beau-frère, Monsieur A, dont je suis le médecin traitant. 
Il ajoute : "Elle ne va pas très bien. Elle dort mal. Elle est fatiguée."
Elle ne m'a parlé de rien.




samedi 18 février 2017

Transparence.


Une maison transparente qui fait froid dans le dos.
Rêve totalitaire ou exhibitionnisme ?
Pas pour moi.
Par l'architecte Travis Price à Berkeley Springs, Virginie Occidentale en 2014.
image © ken wyner

Commentaires (je rajoute cela le 26 février 2017) :

Je suis assez surpris par les commentaires et par le manque de commentaires.
Je ne me ferai plus prendre à ne pas commenter ce que je suggère.

Cette maison est "transparente" car elle montre son intérieur mais elle n'est pas transparente car il n'y aucun humain visible. Une maison n'est pas faite pour ne pas y vivre et on comprend mieux l'architecture "moderne" celle des barres des "quartiers" où il est impossible de vivre.

Cette maison est donc magnifique au sens architectural du terme (on dit toujours "des maisons d'architectes", c'est à dire des théories inhabitables et inhabitées) mais elle est surtout obscène.
Son obscènité tient à ce qu'elle exhibe la richesse, la transparence, mais qu'il n'est possible pour le commun des mortels que de faire du lèche-vitrine. Ni l'acheter, ni entrer, ni y vivre.

La transparence est donc une métaphore triste en ce cas.

Une maison transparente serait une maison que l'on ne remarque pas comme on dit d'un footballeur après une partie ratée qu'il a été transparent.

Cette maison n'est pas transparente elle est faite pour être vue. Et on ne voit rien.

On n'est donc loin de la transparence morale et politique que l'on voudrait nous faire prendre pour de la démocratie.

Mais c'est une autre acception.

Cette maison est à l'image de l'architecture moderne telle qu'on la voit par exemple à la Fondation Louis Vuitton : de l'épate bourgeois comme on disait jadis, de l'épate bobo comme on pourrait le dire maintenant, mais, surtout, elle est d'une immoralité absolue, comme si l'argent n'avait pas d'odeur, c'est un pied de nez aux pauvres et à ceux qui aimeraient ne plus l'être.

C'est une architecture qui ressemble à un diamant gros comme le Ritz.