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dimanche 3 décembre 2023

Bilan médical du lundi 27 novembre au dimanche 3 décembre 2023 : MG sans masques, MG et Marguerite, Eglise de préventologie/Church of Screening, Booster, Comas toxiques, Ne pas fumer, Certificats absurdes

 

Médecin généraliste en voie d'extinction en train de franchir la marguerite des soins

314. Les MG donnent l'exemple : ils ne portent pas de masques en lieux clos.

Source photo : @mimiryudo


Nous émettons de nombreuses hypothèses concernant le non masquage des MG (on me dit qu'environ 200 ou 300 en portaient sur 3234 participants ; pendant combien de temps ? A quel moment ?)

  • L'épidémie de Covid est terminée 
  • Les MG ne consultent qu'en télémédecine
  • Ils ont tous fait un test covid avant d'entrer dans la salle
  • Il croient à l'immunité naturalo-vaccinale
  • Ils pensent que le covid long est psychosomatique
  • Ils n'ont pas de parents
  • Ils n'ont pas d'enfants
  • Ils viennent de lire un essai randomisé paxlovid vs placebo chez les vaccinés
  • Il pensent que les infusions de Marguerite protègent contre la transmission du virus
  • Ad libitum


315. Marguerite, donne-moi ton coeur.

Pendant que la médecine générale meurt, les médecins généralistes tentent (avec ou sans Doctolib) de trouver des zones de recouvrement.


316. L'Eglise de Préventologie et le Comité Central de la bureaucratie dépensent des fortunes (en GB)

Une opinion de Margaret McCartney dans le British Medical Journal : LA.

Notre MG écossaise s'insurge contre les programmes coûteux mis en place pour, à partir d'une goutte de sang, établir un score polygénique... 

C'est, selon elle, de l'argent jeté par les fenêtres. Après avoir dépensé 640 millions de livres en 3 ans pour un programme, depuis lors abandonné, de triage des patients par intelligence artificielle ou plusieurs milliards dans un système intégré de dossiers électroniques aujourd'hui abandonné, le NHS, en association avec des industriels et des associations charitables se lancent dans la prévention des cancers...

Il faut des médecins, des cliniciens, des praticiens, pas du vent.



En France, on a  le Synlab : ICI


Un programme alléchant : 


Du charlatanisme.

Le slogan est : de la prévention sans ordonnance.




317. Chez les angineux stables un coroscanner vaut mieux qu'une coronarographie. 


C'est LA



Rappelez-vous, ce qui est important, ce n'est ni le succès ni même le bien faire, mais c'est travailler ensemble dans la joie et la bonne humeur. 


318. Le dernier booster Pfizer n'est pas adapté au virus circulant (aux US)




C'est LA.

Cela nous rappelle l'année où, en France, le vaccin contre la grippe saisonnière ne contenait pas le virus majeur circulant et où les autorités n'en faisaient pas la publicité car il fallait bien écouler les stocks.



318. Ne pas intuber les comas toxiques.

Une équipe française a publié dans le JAMA.


On peut se dire que les médecins généralistes s'en battent les couilles.

Les habitués de ce blog peuvent se poser les questions suivantes (comme dans tous les domaines de la médecine) :

  • Combien de temps les équipes qui n'ont jamais publié un article de leur vie sauf dans des revues paroissiales de réanimation ou d'urgentologie vont-elles continuer à le faire ?
  • Combien de temps des équipes vont continuer de dire "On l'a toujours fait et ça marche, pourquoi changer ?"
  • Combien de temps les équipes françaises parce que c'est français vont être encore plus réticentes à abandonner leurs pratiques alakhon ?




319. Une étude montre que fumer 1 cigarette par jour n'est pas moins dangereux qu'en fumer 20 pour le risque cardiovasculaire : est-ce bien sérieux ?



Nous entrons de plain pied dans l'ère de l'hygiénisme.

Une étude faite à partir de la littérature montre qu'un seul verre de vin était mauvais pour la santé : c'est LA.

Je ne dis pas qu'il faut fumer ou qu'il faut boire (ce sont les propos que j'ai retenus contre moi), je dis qu'un monde sans tabac et sans alcool n'est pas possible.

Que la Santé publique, que les politiques de Santé publique doivent non pas tout faire mais faire de façon efficace pour que la consommation d'alcool et de tabac diminue, pour que l'on ne commence pas à boire et à fumer (les jeunes gens) : OUI.

Mais la méta-analyse parue dans le British Medical Journal n'est pas une bonne étude.

La prise en compte de 141 études de cohorte et de 55 rapports d'études montre qu'en fumant 1 cigarette par jour on réduit le risque de 50 % (Réduction du Risque Relatif) pour les événements cardiovasculaires et les accidents vasculaires cérébraux.

Je passe sur la méthodologie qui, à partir d'une extraction de données sur PubMed, modélise le risque.

Ainsi, rien n'est très certain.

Le tabac et l'alcool sont mauvais pour l'espérance de vie globale et pour l'espérance de vie en bonne santé.

DPI : Je ne fume pas. Je bois de l'alcool et j'ai un score FACE indiquant une absence de dépendance.


Jim Harrison : 1937 - 2016
Heureux ceux qui n'ont jamais lu Jim Harrison, ils découvriront un géant.
Heureux ceux qui vont relire Jim Harrison, ils redécouvriront un géant.


320. Les certificats absurdes : le point avec les fédérations sportives.

Le site Certificats absurdes (LA) qui est un endroit indispensable pour s'y retrouver en termes, par exemple, de tâches administratives inutiles, dévoreuses de temps et empêchant de faire du soin et de la "vraie" prévention, offre un panorama presque exhaustif ce que demandent les fédérations sportives.





dimanche 27 novembre 2022

Bilan médical de la semaine du lundi 21 au dimanche 27 novembre 2022 : articles et ordonnance alakhon, la réintégration des soignants vaccinés, le cannabis thérapeutique, vérités aujourd'hui = erreurs de demain, soins palliatifs, antidépresseurs.



Viggo Mortensen
Il est temps de renoncer à changer la médecine.

1. L'article alakhon de la semaine. Laure Dasinières

Après avoir publié un article le 22 novembre 2022 dans Numerama (ICI) intitulé sobrement "'J'aimerais qu'il existe  un traitement' : la détresse du Covid long toujours sans remède" et que l'on peut résumer ainsi :

  • Disease Mongering
  • Fear Mongering
  • Veillée des chaumières
  • Hype pharmaceutique
  • Hype boursier
  • Indignité

article qui aurait mérité une publication plus appropriée dans Gala ou dans Closer...

Lire ma version longue : ICI.

2. Mais la semaine alakhon n'était pas terminée.

... notre journaliste qui-ne-se-trompe-jamais publie le 25 novembre suivant un nouvel article (LA) appelé sobrement "Le populisme nuit gravement à la santé" en association cette fois avec le prophète helvète Antoine Flahault, l'épidémiologiste qui-ne-s'est-jamais-trompé-sauf-une-fois-au-moment-de-la-pseudopandémie-de-grippe-mais-il-est-pardonné-parcequ'il-s'est-excusé que l'on peut résumer ainsi : 

  • Nous sommes les représentants du Ministère de la vérité 
  • Nous savons ce qu'est la Science 
  • La médecine est une science
  • Toute personne qui n'est pas d'accord avec nous est trumpiste, bolsonarienne ou rahoultienne
  • Théorie de l'homme de paille.
  • Fausse objectivité.

Résumons encore : toute personne qui ne pense pas comme le duo Flahault-Dasinières ou le duo Dasinières-Flahault est : trumpiste, bolsonariste ou raoultien. Et donc criminel.


James Dean (1931-1955)
En train de calculer son score calcique


3. Faut-il réintégrer les soignants non vaccinés ?

Le débat fait rage à l'Assemblée, chez les professionnels de santé, dans la société civile.

Je pense que non, il ne faut pas réintégrer les soignants non vaccinés.

Mais de quels non vaccinés s'agit-il ? Ceux qui n'ont reçu aucune dose ? Ceux qui ont refusé le premier booster ? Ceux qui ont refusé le deuxième ?

Il existe une gradation à l'intérieur du cerveau des non vaccinés et il est possible de faire la différence entre les professionnels de santé qui pensent que les vaccins ARNm protègent incomplètement contre la transmission et ceux qui affirment que les vaccins ARMm tuent.

Où placer le curseur ?

Voici une réflexion sur twitter qui mérite attention : LA.

Ne nous embêtons pas : il y a des recommandations, il faut les suivre. En sachant que les recommandations ne sont pas fondées.

La question suivante est celle-ci : faut-il désintégrer tous les professionnels de santé qui ne suivent pas en ce moment les recommandations (je ne dis pas 'de la science' puisque vous savez ce que je pense de cette assertion mensongère en médecine...) ?

La fréquentation des hôpitaux publics, des cliniques à but non lucratif ou lucratif, des cabinets médicaux de ville, est désespérante, j'ai des sources sûres, des infiltrée.e.s dans ces différents lieux, pour ce qui est du respect, hors vaccin, du respect des mesures-barrières (ah, le lavage des mains avant, pendant et après les soins, le non port des masques, le port farfelu des masques, je parle toujours des professionnels de santé) et le hiatus entre l'affichage (les petites croix dans les petites cases de respect des consignes et le non-respect des consignes)... S'il y avait un permis à point pour le non-respect des mesures-barrières de base, j'investirai dans les sociétés organisant des stages de requalification des soignants...

Quant au reste...


4. L'addictologue de la semaine. Nicolas Authier.


Mais n'oublions pas les dernières références sur l'absence de preuves (et je rajoute pour les savants : l'absence de preuves n'est pas la preuve de l'absence) : ICI


5. Il y a aussi l'alcool thérapeutique.


(Via Daniel Corcos).

Il est quand même rassurant que le bon docteur Bertillon se soit reconverti dans les glaces...


6. Margaret McCartney toujours juste.

Cela peut s'appliquer à ce que nous faisons en ce moment, bien entendu.

Voir ICI pour la suite : pratiques inadaptées

  • Rester allongé en cas de sciatique
  • Utiliser des anti-arythmiques en post infarctus
  • Un débriefing après un traumatisme empire la situation
  • La vertébroplastie en cas d'ostéoporose 
  • Chirurgie Arthroscopique pour inflammation du genou
  • Couchage en procubitus pour les nourrissons
  • Les soins palliatifs améliorent la survie par rapport à des soins "normaux"
  • Vous avez le droit de rajouter plein de trucs

Quelques brèves conclusions :

  • Le bon sens ne remplace pas les essais cliniques robustes
  • La physiopathologie n'est pas de la médecine
  • Le lucre n'est pas une bonne idée médicale
  • Avant de proposer une prise en charge, assurez-vous de posséder des données solides
  • Avant de suivre les recommandations, lisez-les


Jimmy Hendrix
1942-1970


7. Mon espace santé : une porte d'entrée pour le privé.



On savait déjà l'inanité médicale de Mon Espace Santé mais on sait désormais qu'il s'agit désormais d'une plate-forme commerciale. Rien ne nous sera épargné.


8. Le nouveau schéma vaccinal alakhon contre le Covid





9. Les soins palliatifs : les patients doivent savoir.



Cela fait des années que nous dénonçons le fait que les choix thérapeutiques en oncologie sont le plus souvent décidés en réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) où la personne la plus importante, le patient, n'est pas présent et où le médecin qui connaît le mieux le patient, le médecin généraliste, n'est jamais convié.

Quant à la phase Palliative spécifique, c'est un mensonge.

Rappelons ici à tous que le but de l'oncologie est d'administrer des soins à des patients avec des prises en charge qui ont montré qu'elles augmentaient l'espérance de vie globale (et pas, par exemple, la réduction de la taille d'une tumeur solide dans incidence sur la survie) tout en respectant la qualité de vie.

Quant aux soins palliatifs : ne pas emmerder le ou la patiente en respectant la qualité de vie.


10. Freudisme



Via Christian Lehmann
-20% en envoyant le code #TaMèreAToutFaux au 81212


11. L'ordonnance alakhon de la semaine

Via @gniwing


Behind the scenes of Rear Window...
Via Rithy Panh



12. Le Danemark est le seul pays d'Europe où la prescription des antidépresseurs a diminué.


Lire l'article LA.

Et la France n'est pas mal placée.


Mads Mikkelsen attendant que la médecine change.




mardi 4 décembre 2018

Calendrier de l'avent des lectures médicales : Margaret McCartney. #11

Margaret McCartney est médecin généraliste à Glasgow. Elle était éditorialiste au BMJ. C'est une femme formidable.

J'ai résumé le livre ICI en, pardonnez du peu, 23 points.

J'espère qu'une traduction en français est prévue. 




McCartney Margaret. (2012) The patient paradox. How sexed-up medicine is bad for your health. Londres : Pinter and Martin, 335 pp.

Je traduis une partie de la quatrième de couverture : 

"Bienvenue dans le monde de la médecine sexy où les patients ont été transformés en consommateurs, où les centres médicaux et les salles d'attente sont encombrés de gens en bonne santé attirés par la prise de leur pression artérielle et par le dosage du cholestérol, les frottis du col utérin et les dépistages des cancers du colon ou du sein.
Dans le monde de la médecine sexy les compagnies pharmaceutiques dissimulent les recherches qu'elles n'aiment pas, les associations de bienfaisance utilisent souvent des connaissances scientifiques douteuses et des attaché.e.s de presse rusé.e.s pour alerter sur les maladies en laissant un cortège de désinformation dans leur sillage.
Notre obsession du dépistage engloutit le temps des dirigeants du NHS et l'argent de gens en bonne santé qui paient des mille et des cents à des compagnies privées pour des tests dont ils n'ont pas besoin.
Dans le même temps on laisse les vrais malades se débattre avec des services incohérents et des options confuses..."

Et encore : 

"Le plus grand changement qui est survenu dans ma carrière a été l'apparente détermination des professionnels de santé à amener les personnes en bonne santé à fréquenter les consultations et les centres de santé pour les transformer en malades."

La claire distinction entre qui est un patient et qui est une personne n'existe plus. Les citoyens sont désormais invités de façon pressante à passer des tests de dépistage soit pour confirmer un état de non maladie, soit pour prédire un risque de mort ou de maladie. (...) ... Les victimes de la nouvelle médecine sont les gens qui sont étiquetés malades ou à risque d'être malades ou qui sont traités par des médicaments ou soumis à des procédures alors qu'ils n'en profiteront jamais.



NB : Je conseille de lire les commentaires épatants de CMT à la fin du billet de décembre 2015 : LA.

jeudi 17 décembre 2015

The patient paradox. Why sexed-up medicine is bad for your health. Margaret McCartney.


Ce livre est remarquable.
Après l'avoir lu je me suis dit qu'il ne me restait plus qu'à ranger mon clavier, à ne plus écrire de billets, à cultiver mon jardin car cette médecin généraliste écossaise, Margaret McCartney (MMC), a "tout" compris à la problèmatique du médecin généraliste et de la médecine générale tout en exerçant dans un système qui nous est étranger, le National Health Service (NHS), système sur lequel beaucoup de bruits contradictoires courent et sur lequel certains se fondent pour stigmatiser notre propre sécurité sociale ou pour montrer du doigt les voies vers lesquelles nous ne devons pas nous diriger.

Mais ce livre est écrit en anglais, n'est pas traduit en français, et j'ai demandé à l'éditeur anglais si cela pouvait se faire : il m'a affirmé que son éditeur français correspondant n'envisageait pas de le traduire. Dommage.

Et, de plus, c'est écrit dans un anglais limpide, clair, persuasif, démonstratif et empathique.

Destiné pour le grand public britannique il devrait être lu par tout médecin tant il est clair, documenté et éclairant. Il devrait surtout être à la base de l'enseignement de la médecine dans les facultés du même nom.

Ce livre s'inscrit dans la lignée des médecins qui ont réfléchi sur la médecine en général et sur la médecine générale en particulier, sur ses succès et ses limites et sur le fait qu'elle est à la merci des politiques publiques dont les objectifs peuvent paraître inadaptés et dont les fondements sont le plus souvent erronés. Bien qu'il s'inscrive dans le contexte du système de santé britannique dont le fonctionnement est très différent du nôtre, il a une portée universelle et française dans la mesure où la CPAM et les autorités de tutelle ont engagé les médecins généralistes français dans la voix déjà empruntée à tort par le National Health Service, à savoir le paiement à la performance et ses coûteuses initiatives inefficaces.


Je ne sache pas qu'un médecin généraliste français ait pu écrire un pareil livre si documenté, si peu polémique, si drôle par moment et qui ne tombe jamais dans l'invective ou dans le ressentiment.

Les quelques sujets qu'elle n'a pas abordés me laisse cependant entrevoir quelques possibilités de billets, sans compter les points sur lesquels je ne suis pas d'accord.

N'oublions pas que MMC est éditorialiste au Brtish Medical Journal et qu'elle tient un blog (ICI).

***

"... the biggest change to medicine that has arisen over the course of my career has been the seeming determination of healthcare professionals to bring healthy people into surgeries and clinics, and turn them into patients..."

***

Il est difficile de résumer ce livre tant le nombre de thèmes abordés  est important.
Le nombre de références et d'exemples est impressionnant.

Je vais tenter d'en dégager quelques idées forces et je vous demande de ne pas vous offusquer en disant "Mais on sait cela depuis longtemps" car : d'une part peu de médecins connaissent tous les points qu'elle développe et d'autre part, ceux qui les connaissent, les appliquent peu.

  1. MMC insiste sur la tendance générale de la médecine moderne : rendre malades les gens bien portants.
  2. Le premier sujet qu'elle aborde : celui du dépistage. Et elle l'accole au premier principe : First do not harm. 
  3. Elle donne l'exemple connu mais souvent oublié en pratique, et plus particulièrement lors du dialogue singulier avec le patient, du test précis à 90 % ("sûr" à 90 %) pour une maladie qui affecte 1 % de la population et pose la question : "Si vous êtes positif pour ce test quelle est la probabilité que vous soyez affecté par cette maladie ?" (voir la note 1 pour la réponse)
  4. Elle rappelle la notion parfois erronée : plus on diagnostique tôt et plus longue est l'espérance de vie, et nous explique  ce qu'est le lead-time bias. (voir la note 2)
  5. Dans un autre chapitre MMC parle du business du risque cardiovasculaire. Je n'insiste pas. Elle souligne l'inanité des dépistages de masse et la propagande des politiques et des marchands de médicaments et insiste sur la volonté de ce beau monde (et de certains médecins bien entendu) de remplacer la relation patient-médecin par la relation consommateur-médecin : les consommateurs ont le droit de demander et de payer tout ce qu'ils désirent indépendamment du coût ridicule, dangereux, inutile ou sans intérêt de la commande.
  6. Elle souligne en passant (désolé pour ceux qui connaissent cela par coeur mais j'ai lu cela récemment à propos d'un essai truvada) le scandale des promoteurs de santé qui présentent les résultats des essais en valeur relative et non en valeur absolue : un médicament qui réduit le risque de crise cardiaque de 2 à 1 %, par exemple. Cela signifie que la molécule diminue le risque relatif de crise cardiaque de 50 % et le risque absolu de 1 %, ce qui, dans le discours, n'est pas la même chose.
  7. Elle aborde le problème du cancer. Du cancer du sein (et notamment du cancer canalaire in situ) et reprend les données de 2009 du Journal of the National Cancer Institute : il est désormais démontré que plus de femmes meurent avec un cancer canalaire in situ qu'en raison de lui.
  8. Encore le sein et les nombreuses controverses sur la négation par les promoteurs du dépistage des risques induits. MMC insiste sur une notion forte : "Les experts peuvent être une source de biais simplement parce qu'ils sont des experts : si une étude paraît disant que votre propre spécialité, toute votre recherche et le travail de votre vie, étaient une perte de temps, il se pourrait que cela soit difficile à accepter."
  9. Il faut parler au patient et au public des risques et des dangers de toutes les procédures.
  10. MMC assène ceci : Il faut informer les patients des avantages et des risques des dépistages (et/ou des traitements ou des non traitements) car, au bout du compte, c'est le patient qui doit choisir. Ce que nous traduirions, merci JB Blanc (voir LA) par l'Evidence Based Medicine, toute l'EBM, mais avec la prise de décision partagée en sus. Nous verrons plus loin que MMC met un bémol à tout cela.
  11. Elle écrit un chapitre particulièrement dérangeant (je dois dire que je ne me rappelais plus avoir lu cela dans La Revue Prescrire) sur le dépistage du cancer du col par le frottis du col utérin en insistant sur le fait que rien n'a été démontré quant à la diminution de la mortalité globale par la mise en place généralisée de ce test. "L'ironie est étonnante. Le véritable problème éthique est d'avoir soumis des millions de femmes à un programme de dépistage qui n'avait pas été testé selon des standards élevés." Et elle conclut : "Les femmes ont plus de chance d'avoir un test faux positif que d'avoir une espérance de vie prolongée." (Voir la note 3).
  12. MMC en remet une couche sur les dépistages des cancers de la prostate et du colon et sur le dépistage des anévrysmes aortiques. Les habitués de ce blog sont familiers de ces problèmes. MMC sur le cancer du colon (dépistage par test fécal) : "Si vous avez 60 ans, le dépistage va réduire votre risque de mourir d'un cancer du colon de 78 à 58,8 pour 10000, soit une diminution du risque absolu de 0,7 à 0,58 %"
  13. "La claire distinction entre qui est un patient et qui est une personne n'existe plus. Les citoyens sont désormais invités de façon pressante à passer des tests de dépistage soit pour confirmer un état de non maladie, soit pour prédire un risque de mort ou de maladie. (...) ... Les victimes de la nouvelle médecine sont les gens qui sont étiquetés malades ou à risque d'être malades ou qui sont traités par des médicaments ou soumis à des procédures alors qu'ils n'en profiteront jamais."
  14. Elle s'attaque ensuite à la médecine protocolaire, à la médecine binaire, celle des croix dans des cases, au tri des malades fait désormais par des non médecins, à la dévolution des tâches, au paiement à la performance en fonction du nombre de cases cochées et des examens prescrits, et, accessoirement, s'interroge sur le droit qu'a une femme correctement informée de refuser un frottis, elle se moque de la médecine de dépistage (ce patient est-il déprimé ?) qui est tout sauf une médecine de diagnostic... Cette médecine de dépistage qui ne fait pas la différence entre la tristesse et la dépression et qui conduit, grâce à l'incentive proposé aux médecins, à la prescription inutile de millions de boîtes d'antidépresseurs, probablement inutiles, certainement dangereux.
  15. MMC se demande aussi avec ingénuité : Qui doit décider ce que les médecins doivent faire ? Big pharma, les politiciens ou les patients ? Et elle donne des exemples convaincants sur seroquel, vioxx, herceptine et paroxetine à propos desquels l'industrie a menti et a continué de mentir (et pour lesquels une majorité de médecins ont continué de prescrire). Qui fallait-il écouter ? Big Pharma ou les médecins qui, informés par la presse indépendante, ont cessé de prescrire ou n'ont jamais prescrit ?
  16. Elle aborde le problème des Charities (les associations caritatives) et des associations de patients, largement sponsorisées par l'industrie pharmaceutique (mais pas seulement quand on prend l'exemple d'Octobre Rose où Estée Lauder se taille la part du lion), dont les rôles sont beaucoup plus importants outre-Manche. Elle souligne que les Charities se font les avocats des patients et que rendre les patients aware n'est pas sans risque si l'on considère le seul point de vue de la communication promotionnelle. En effet les Charities ne choisissent pas les thèmes de dépistage des maladies en fonction de données solides de Santé publique mais en fonction des subventions et des dons qu'elles pourront recevoir. Elle détaille en particulier les campagnes promotionnelles des Charities à partir des documents qu'elles diffusent et dénonce leurs mensonges nombreux :  pour elles les tests sont toujours fiables, les traitements donnent toujours d'excellents résultats, le sur diagnostic et le sur traitement n'existent pas, les effets indésirables des tests, des traitements médicamenteux, chirurgicaux, radiothérapeutiques n'existent pas plus ou sont mineurs. (MMC aborde plus loin la promotion du patient expert sponsorisé). Les Charities et les associations de patients font du compassionnel pour gagner de l'argent mais, surtout, nombre d'entre elles ont abandonné leur objectif initial qui était d'aider les patients pour adopter les politiques des lobbys ou groupes de pression (notament liés à big pharma).
  17. MMC souligne que les messages de santé publique se font désormais par l'intermédiaire de public relations, de dossiers presse, que le marketing prend le pas sur l'information scientifique.. Que certains professionnels sont des marchands (elle n'aime pas beaucoup les chirurgiens cosmétiques) et seulement des marchands. Que le paiement à la performance pervertit la relation médecin patient et que les arguments pour l'avoir instauré, mettre l'Evidence Based Medicine en première ligne, est erroné : "... evidence-based medicine simply provides us with knowledge; it does not tell us what to do with knowledge." (la médecine fondée sur les preuves nous fournit simplement de la connaissance ; elle ne nous dit pas ce que nous devons faire avec cette connaissance). (voir note 4)
  18. Paiement à la performance. MMC prend l'exemple de la patiente qui consulte pour parler dépression. L'ordinateur placé en face du médecin et ouvert sur le dossier de la patiente rappelle, pour obtenir des points (et de l'argent, pas seulement pour le médecin lui-même mais pour le cabinet dans lequel il travaille) que le praticien doit s'assurer du statut de la patiente vis à vis du frottis, engager la conversation sur le tabac, mesurer la pression artérielle, et cetera. L'objectif de cette consultation dépression (et MMC nous dit en passant que la durée moyenne de la consultation est de 10 minutes outre-manche) est d'écouter, de faire un diagnostic, de discuter de possibles actions, de s'assurer que la patiente ne présente pas de risques... ce qui revient à briser le contrat du paiement à la performance entre le MG anglo-écossais et le NHS puisque le dit contrat, hormis ce que nous avons vu plus haut (frottis, tabagisme, et cetera), ne s'intéresse qu'à une chose : que l'une des cases dépression sévère, modérée, ou légère, soit cochée, et au besoin en se servant d'un questionnaire, PHQ-9, approuvé par le contrat, développé par Pfizer (qui comme on le sait vend des antidépresseurs).
  19. Le chapitre 13, j'espère ne pas trop vous lasser ou alors j'espère vous lasser de me lire pour lire  en direct le livre de MMC (LA), aborde le sujet suivant : The inverse care law. Cela signifie que moins vous êtes malade et plus vous bénéficiez d'attention et plus vous êtes malade moins votre cas est pris en compte. Ce chapitre est important mais pourrait nous paraître exotique tant il s'applique à nos voisins. MMC veut dire ceci : trop de ressources (temps, argent) sont attribuées aux non malades ; le système de l'auto-adressage des patients parasite le système ; le tri doit être fait pas des professionnels de santé mais au mieux par des médecins ; c'est le médecin traitant qui connaît le mieux son malade, mieux que des structures dédiées ; l'automédication n'a qu'un seul objectif : enrichir les laboratoires pharmaceutiques et les pharmaciens ; les centres de référence n'ont pas fait la preuve de leur efficacité ; la politique du two-week wait instaurée en 1998 par le Labour, au lieu de diminuer les délais de prise en charge des malades, a eu l'effet inverse en parasitant le système avec des non malades (d'où l'intérêt du MG pour "trier")... Elle dénonce aussi l'abandon de la liste personnelle des patients pour les MG au profit de la liste du cabinet de groupe (déresponsabilisation personnelle) et se moque de la multi-disciplinarité, notamment en psychiatrie, où les équipes types comprennent : "psychiatres, infirmières communautaires, travailleurs sociaux, psychomotriciens, psychologues cliniciens, pharmaciens, équipe de direction, professionnels de la santé mentale, secrétaires, réceptionnistes, assistants sociaux, benefits workers, visiteurs sociaux, secouristes, art therapists, et cetera" Ce qui, pour MMC, empêche la continuité des soins et déresponsabilise et le patient et le médecin.
  20. Quels patients ? Les patients sont au centre du système, nous dit-on. Oui et non. MMC aborde les sujets à la mode pour les dénoncer : disease awareness campaigns ; disease management (5) ; patients experts (avec le programme EPP - Expert Patient Programm- institué par le NHS dont le slogan est : "Contrôlez votre maladie, ne la laissez pas vous contrôler") ; autonomie et partage des connaissances ; pas de décision me concernant sans mon avis ; notez vos médecins. MMC fait la part de ce qui est acceptable et non acceptable dans ces programmes mais, surtout, elle se pose la question de savoir si ce sont les patients les mieux informés (c'est à dire en réalité les patients qui ont les moyens intellectuels et le temps de s'informer, par rapport aux autres dont les malades psychiatriques, les malades en fin de vie, et cetera) qui seront les mieux soignés grâce à ces programmes et si, encore une fois, ce ne seront pas les moins malades dont on s'occupera le plus. Ce chapitre 14 fourmille d'idées et de réflexions et met en valeur ce qui devrait être la qualité essentielle des médecins : le professionnalisme. 
  21. MMC ne préconise pas plus d'information mais une meilleure information. Elle regrette qu'il n'existe pas d'evidence-based politics, que les politiciens ne citent des preuves que lorsqu'elles les arrangent et qu'avant d'imposer des politiques ou des programmes ils ne fassent jamais une analyse systématique de la littérature scientifique, ce qui conduit à des désastres financiers.
  22. Getting back to the right kind of care. Ce chapitre est capital. Je vous le résume : quand on a un pré diabète (sic), une prè hypertension (sic), pas besoin de médicaments mais des prescriptions d'hygiène de vie ; les facteurs causant une mort prématurée partout dans le monde sont : "le niveau socio-économique, le stress, les conditions précaires de la petite enfance, l'exclusion sociale, le travail, le chômage, les addictions, la nourriture, ..." ; traiter la pauvreté avec des pilules n'est pas la solution ; les populations les moins à risque sont les plus dépistées et les plus traitées et, à l'inverse... ; les produits pharmaceutiques ne peuvent être une réponse à l'exclusion sociale ; les médecins doivent-ils se sentir coupables de croire que les prescriptions peuvent traiter la pauvreté ? ; n'est-ce pas un emplâtre sur une jambe de bois ? ; l'hygiène en général ne devrait-elle pas être la principale occupation des Charities ? ; l'expression, la guerre contre le cancer, cette autre, la bataille contre la maladie et contre la mort, ne sont pas des réponses adéquates à la prise en charge du cancer ;  si les soins palliatifs étaient un médicament ce serait un block-buster or les crédits qui lui sont alloués sont insuffisants ; dans le traitement contre le cancer les MG et les infirmières, au lieu d'être au centre du processus, ont été déplacés en périphérie ; il est dangereux que le "soin" du patient ne soit plus le premier objectif du médecin ; le patient bien informé (truly informed patient) devrait être la règle.
  23. Avant de conclure ce recensement, je voudrais insister sur un point capital souligné par MMC : "c"
Je n'ai rapporté que quelques éléments de ce livre d'une grande richesse et j'ai tenté de m'interdire de commenter en bien ou en mal ce que disait notre généraliste écossaise.
Mais il y a de quoi faire.

Notes :
1) 1000 personnes sont soumises à ce test "sûr" à 90 %. Imaginons que la prévalence soit de 1 %, c'est à dire que 10 personnes sont atteintes de la maladie : le test en détecte 9 et en laisse passer 1 (test négatif) : 990 personnes n'ont donc pas la maladie et pourtant avec ce test "sûr" à 90 % 99 auront un test positif.
2) Lead-time bias : Une personne prend le TGV à Marseille et une autre le même train à Lyon, les deux passagers meurent lors du déraillement du train à l'arrivée gare de Lyon. Le passager de Marseille a survécu une heure de plus que le passager de Lyon. Trouver une maladie plus tôt peut faire penser que le patient survivra plus longtemps alors que l'heure de la mort est la même.
3) Un article de 1988 (!) a montré que sur 1781 femmes présentant des anomalies légères du frottis examinées entre 1965 et 1984, 10 présenteraient un cancer invasif et que 46 % des tests redeviendraient normaux dans les deux ans suivants.
4) L'evidence-based medicine, nous l'avons vu ici ou , n'est pas pour nous tout à fait cela.
5) A la française : sophia pour le diabète.

 ***

PS du 18 décembre 2015
Point 6 :
Le docteur JY Nau présente les résultats du dépistage du cancer de l'ovaire en valeur relative et non en valeur absolue : voir ICI.





mardi 1 décembre 2015

Evidence Based Pharmacy.

Rayonnage d'une pharmacie Evidence Based Pharmacy

Pas beaucoup d'articles sur le sujet de l'Evidence Based Pharmacy..
Enfin, un peu : ICI.

Je parle bien entendu de la partie Evidence Based Pharmacy qui s'intéresse à la vente directe, sans ordonnances, sans remboursement, l'OTC en anglais, ce que conseillent les pharmaciens en dehors de toute prescription médicale. Mais, en réalité, ce que les industriels appellent l'automédication.
Dans l'Evidence based Pharmacy il y a aussi le contrôle (non, ce mot ne me gêne pas) des prescriptions des médecins, c'est à dire l'analyse des prescriptions elles-mêmes, les doses, les posologies pour chaque molécule/produit, des interactions médicamenteuses possibles, et cetera, mais imagine-t-on cela ? Il y aurait tant à faire et tant de conflits en perspective (et tant de chiffre d'affaire en moins).

Etant entendu que les médicaments ou matériels sur prescription ne seraient pas visibles sur les étagères des EB Pharmacies car il n'est pas possible d'en faire la publicité.

Que pourrait-il bien y avoir comme produit OTC dans les rayonnages d'une EB pharmacie ?

Du paracetamol.
De l'ibuprofène.
De l'acide acétyl salicylique.
De l'acide folique pour les femmes enceintes ou celles qui voudraient l'être...
Une crème émolliente.
De l'alcool à 70 °
Un ou deux anti histaminiques.
Des pansements.
Des compresses.
De la vaseline.
Du savon de Marseille.
Du serum physiologique.

Vous voyez autre chose ?

Allez, je vous vois venir :
La contraception d'urgence.
La pilule pour dépanner.
Et d'autres trucs.

Dans une EB Pharmacie, les produits sont peu onéreux car ce sont des génériques de molécules commercialisées depuis longtemps, amorties, tombées dans le domaine public...

C'est donc un rêve, l'Evidence Based Pharmacie, et un cauchemar pour les pharmaciens qui vendent  en OTS des produits non evidence based par des essais contrôlés.

Je m'attends à ce que mes amis pharmaciens m'assassinent. C'étaient mes derniers mots.

Ce billet m'a été fortement suggéré par la lecture du livre de Margaret McCartney, The patient paradox, Why sexed-up medicine is bad for your health (pages 214 à 216) : ICI.

PS du 8/12/15 : les labos se sucreraient sur les produits OTC ? Sans blague ! Voir LA. Dans le journal Le Monde.