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dimanche 24 juin 2018

La médecine m'inquiète : microf(r)ictions (89).



Sur twitter nous avons l'insigne honneur de pouvoir lire les propos d'un oncologue anonyme et nous sommes contents de pouvoir lui faire de la publicité car il s'agit d'un médecin hors pair, d'un pédagogue accompli, d'un empathique exceptionnel, en bref, d'une pépite que le monde entier nous envie. 

Nous reviendrons plus loin sur les raisons de cet anonymat.


Toujours est-il que cet oncologue distingué, et en remontant son fil twitter anonyme vous comprendrez qu'il est un grrrrrand oncologue, qu'il a une haute idée de lui-même, qu'il est le seul compétent sur la question de l'oncologie et comme il n'a pas de concurrence française sur twitter il ne risque pas grand chose à affirmer des choses que lui seul connaît..

Ce garçon, sans doute PUPH, cumule les qualités inestimables, inestimées et sous-évaluées de l'hospitalo-académisme français traditionnel et de l'expertise à la Française, celle qui fit de la médecine française et dans une période sans doute très courte, entre le deux février 1967 à 7 heures 42 et le trois mars 1968 à 20 heures 13, la meilleure du monde. 

Nous pensions, tels de naïfs citoyens bercés par l'immanence du néo libéralisme économique et culturel, que l'ère de l'expertise absolue, l'ère du paternalisme béat, l'ère de la corruption assumée, s'était dissoute dans la crise de la pseudo pandémie grippale de 2009 (et vous pourrez lire Christian Lehmann ICI ou LA, Marc Girard LA, mais dont le blog comporte au moins une vingtaine de papiers consacrés à ce sujet) ou dans l'affaire Mediator pour laquelle on nous avait promis "Plus jamais cela".

Eh bien non.

La nouvelle génération des experts (mais après tout il n'est peut-être pas aussi jeune que cela) n'a rien appris du passé.

Pour en revenir à notre héros médical qui est aussi un héraut anti FakeMed (voir LA) et un héraut pro Big Pharma (et plus précisément pro Big Onco), la lecture de ses gazouillis est instructive.

Sa doctrine générale est la suivante :

  1. L'oncologie est une science exacte.
  2. L'innovation est le maître mot de la médecine : les produits innovants sont innovants.
  3. L'industrie pharmaceutique est propre, philanthrope mais il est normal qu'elle gagne de l'argent.
  4. Pour être un bon médecin il faut travailler avec l'industrie pharmaceutique (Big Pharma) ou, plutôt, il faut avoir été élu par elle (ce qui, par raisonnement tautologique, rend le médecin excellent)
  5. Le fait de recevoir de l'argent, des compensations, des pots de vin, des invitations à dîner, à voyager, à dormir, n'est pas condamnable à condition a) de les déclarer selon les lois en vigueur, b) que plusieurs laboratoires soient les promoteurs. Cette doctrine que nous avons identifiée à partir des déclarations de foi du virologue Bruno Lina peut être résumée à celle-ci : "Trop de corruption tue la corruption." Je vous renvoie, et je le renvoie, à Célimène dans Le Misanthrope de Molière quand Alceste lui reproche d'avoir trop de soupirants et qu'elle lui répond en substance que le fait d'en avoir beaucoup signifie qu'elle n'en a pas un en particulier, ce qui devrait le rassurer (ICI). Cela ne nous rassure pas.
  6. L'immunothérapie est l'avenir de l'humanité.
  7. Les critères de survie globale (OS in English) et de Qualité de Vie (QoL) sont dépassés en oncologie et doivent être remplacés par le substitut magique qu'est la PFS (Progression free Survival). Rajout : article comparant OS et PFS pour les traitements des cancers par PD-1inhibiteurs (ICI).
  8. Les essais randomisés contrôlés en oncologie sont de vieilles lunes non innovantes et ne méritent qu'un haussement d'épaules (sauf cas particuliers bien entendu) et de citer la métaphore du parachute : on n'a jamais fait d'essais contrôlés parachute vs placebo (voir ICI pour une analyse critique).
  9. Les réunions de concertation pluridisciplinaires (les fameuses RCP) sont un lieu dont doivent être exclues la partie la plus importante (le patient) et la partie négligeable (le médecin traitant). Ce qui renvoie à la conception patriarcale de la décision partagée : le praticien explique au patient après qu'il a pris la décision.
  10. Les Boards pharmaceutiques (cf. Agnès Buzyn) sont des aréopages d'hyper spécialistes où les stratégies médico-pharmaceutiques sont décidées, ainsi que la méthodologie des essais et sont l'Olympe de la recherche (voir aussi les steering committees pour les essais cliniques).
  11. Etre Key Opinion Leader (KOL) est une ambition estimable pour diffuser la bonne parole de l'innovation (un de ses hashtags favori). Nous savons comment on devient KOL par l'intermédiaire de l'expert mongering : voir LA.
  12. Bla bla.

Mais ce qui nous choque le plus chez lui est ceci : 
  1. L'anonymat. L'anonymat est un comportement de voyou (voire plus) mais on peut arguer ceci : certains lanceurs d'alerte ou activistes ne peuvent s'exprimer à visage découvert pour des raisons de sécurité professionnelle ; pour notre héraut il est possible que la perte de son anonymat lui barre une nomination universitaire ou permette qu'on le juge sur ses titres et travaux à l'aune de ses publications (ses non pairs et ses pairs pourraient-ils s'en donner à coeur joie ?) ; mais aussi : insulter sans se montrer est quand même plus facile et un peu couard.
  2. L'arrogance, son arrogance à l'ancienne à l'égard de ceux et celles (et a priori les "celles" sont sa cible favorite pour des raisons que je vous laisse deviner) qui n'ont pas ses titres universitaires, qui n'ont pas travaillé en tant qu'experts sur les questions, qui donc ne peuvent juger de l'activité des spécialistes auto recrutés (il n'est que d'écouter les chroniques santé de DK, oncologue chef de service et, semble-t-il peu apprécié par notre héros, sur Radio Classique).
  3. La fierté de toucher de l'argent (et autres) de Big Pharma (Big Onco) qui va même jusqu'à, il l'écrit avec tant d'innocence, faire des cours aux visiteurs médicaux des firmes qu'il conseille.
  4. La haine qu'il voue à l'oncologie anglo-saxonne et non française en réalité qui ose critiquer les protocoles, les agences gouvernementales (FDA), faire preuve de scepticisme, s'interroger sur elle-même à visage découvert (pas d'anonymat) et... faire des propositions. Vinay Prasad est l'archétype de ce qu'il déteste le plus (ICI) (ma propre naïveté ne va pas jusqu'à penser que Vinay Prasad est un saint, que tout ce qu'il dit est vrai, non critiquable, qu'il n'a pas d'ambitions académiques et/ou financières, bla bla mais nous aimerions tant que cette liberté de ton soit contagieuse et que les débats indispensables sur l'oncologie en France ne se résument pas à des propos de couloir et fassent l'objet d'articles circonstanciés)

On peut cependant le remercier de s'exprimer sur twitter, peu le font, et cela nous permet de connaître la vraie nature de Bernadette.
Qu'il en soit remercié.

PS : On peut donc être un médecin anti FakeMed et ne pas être gêné par les liens/conflits d'intérêts, voire même les revendiquer.


jeudi 21 juin 2018

La médecine m'inquiète : microf(r)ictions (90)



Voici donc ce que prétendent les 124 (ou l'un d'entre eux) à propos de leur mouvement. 

Je rappelle que le régime du concordat existe toujours en Alsace-Moselle.

Faut-il être assez ignorant pour penser que la médecine serait une sorte d'entité hors sol, non construite, bien entendu, pure comme un théorème, sans croyances ?

Nous demandons la séparation de la Médecine et de l'Eglise de Dépistologie.

Expulsion du grand séminaire des idolâtres du dépistage organisé du cancer du sein par mammographie

Légende réelle : Expulsion du grand séminaire de Quimper en 1906 (à la suite de la loi de 1905)


dimanche 20 mai 2018

La médecine m'inquiète : microf(r)ictions (97)

Le professeur David Khayat, oncologiste, est un éminent médecin.

Les aliments anticancer du Pr David Khayat

Les aliments anticancer du Pr David Khayat

Pour lire la suite : ICI.

Sans commentaires.

dimanche 25 mars 2018

L'homéopathie, la médecine sans les preuves qui cache la forêt de la mauvaise médecine.

Henri II guérissant des écrouelles

La pétition de 124 médecins contre les Fake Médecines suscite énormément de commentaires. Vous lirez la pétition  ICI.

(Attention : le 4 mai 2021 je constate que le site sur lequel était publié la pétition des 124 a été supprimé. Pourquoi ? Les signataires avaient balayé à l'époque les arguments avancés ici ou là sur le fait qu'il y avait plus important que l'homéopathie en santé publique. L'arrivée du Covid et du professeur Raoult l'ont confirmé. Ils avaient également affirmé haut et fort que leur combat contre l'homéopathie n'était qu'un début. C'était une fin.)

Je n'ai pas signé cette pétition.

Pour de mauvaises raisons, sans doute.

La plus mauvaise raison est celle-ci : je ne pense pas que l'homéopathie soit un problème majeur de santé publique. La réponse que l'on m'a faite : "Il faut bien commencer par quelque chose."

Pas par ça.

La meilleure raison : je ne suis pas certain que mes fesses soient assez propres pour monter au cocotier.

L'homéopathie est le bouc-émissaire facile (pas si facile que cela d'après les réactions) de la mauvaise médecine.

Combattre l'homéopathie est scientifiquement juste mais la tribune n'est pas juste avec la médecine en général.  Elle s'attaque à une pratique infondée et magique comme si la médecine académique n'était pas, elle-aussi, (très) souvent infondée et magique.

La pétition ne rend pas compte de la pratique réelle de la médecine en général et comment elle s'inscrit dans le contexte général du consumérisme sociétal au double sens du terme : sociologique (la société de consommation) et libéral (la consommation comme moteur du capitalisme). Avec comme corollaire :  la satisfaction du client. La médecine moderne, non homéopathique ou pas, suggère aussi qu'il est possible de tout traiter. Cette sur promesse hédoniste (je n'ai pas le temps ici de parler du refus de la mort dans les sociétés modernes) fait le lit de la magie.

L'autre mauvaise raison est que l'on met les doigts dans un engrenage terrible.

Pour la première fois à ma connaissance ce sont les prescripteurs qui sont attaqués. Nommément. Tous les homéopathes sont des charlatans.

Dans l'affaire Mediator on avait attaqué Mediator, on avait attaqué Servier (en préservant d'ailleurs les autres firmes), on avait vaguement attaqué les autorités réglementaires, on avait soigneusement préservé les prescripteurs (ces pauvres prescripteurs qui ne pouvaient pas savoir ce qu'ils faisaient).

Ici, il est demandé que les médecins homéopathes purs (des médecins qui ne pratiquent que l'homéopathie) et impurs (des médecins qui utilisent aussi l'homéopathie dans leur pratique) soient frappés d'interdiction professionnelle.

Pas moins.

La pétition fait aussi appel au serment d'Hippocrate (elle oublie de nous préciser de quelle version il s'agit car lorsque l'on invoque, je cite, "un des plus anciens engagements éthiques connus", s'agit-il de celui qui mentionnait l'interdiction de l'avortement ?) et au Conseil de l'ordre des médecins comme garant de son application.

Est-ce une rigolade ?

Comme il faut que je me justifie, on pourrait m'accuser d'être un suppôt des homéopathes purs et impurs, de Boiron et consorts, voici quelques données simples :
  1. L'homéopathie est une croyance.
  2. Une croyance datée.
  3. L'homéopathie a été initiée en 1796. En opposition à la médecine traditionnelle. Il est vrai qu'il était possible d'être déçu, à cette époque, par les thérapeutiques inexistantes, je ne parle pas que des lavements et des saignées. Rappelons que le fondateur de l'homéopathie, Samuel Hanhemann, est mort en 1843. La lecture des traités de thérapeutique traditionnelle en 1843 ne manquerait pas de faire également rire.
  4. La médecine d'alors était essentiellement magique, issue du chamanisme, du dieu médecin et ne pouvait prétendre à une quelconque scientificité.
  5. Nombre d'homéopathes purs et impurs disent la messe (prescrivent) mais ne croient plus depuis longtemps (j'ai des exemples dans mon coin de transformation des obésologues, mediatoro-prescripteurs, qui sont devenus homéopathes comme ils étaient mésothérapeutes, tisanothérapeutes, naturopathes et autres billevesées). Ils préfèrent prescrire un placebo pur plutôt qu'un placebo impur.
  6. Le dé remboursement de l'homéopathie est donc une option raisonnable.
  7. Son non enseignement dans les Facultés de médecine paraît tout aussi justifié.


Je voulais vous faire partager cette video (watch) qui critique la pétition : je ne sais pas qui se "cache" derrière, je ne sais pas si la jeune femme est médecin, marchande des quatre saisons ou ingénieure, mais elle dit beaucoup de choses justes (et certaines choses fausses).

Revenons à la pétition.

L'homéopathie est une cible que je croyais facile, trop facile. Pratiquée par des médecins, non étayée par des essais modernes (contrôlés), vaguement sectaire, je me demandais qui elle pouvait bien attirer.

Les réactions ont été curieuses. Démesurées. Irrationnelles.

Il n'est pas étonnant que les homéopathes se défendent. Il n'est pas surprenant qu'ils utilisent des arguments peu étayés leur permettant d'éviter le point central : l'homéopathie n'a rien démontré scientifiquement parlant.

Finalement, ce sont les réactions des non homéopathes, des médecins médiatiques, des pharmacologues médiatiques, pro, sympathisants ou tolérants à l'égard de l'homéopathie, qui justifient a posteriori l'intérêt de cette pétition. Elles permettent de souligner que la pensée magique n'est pas seulement homéopathique. En résumé : les Kierzek et compagnie (Chast et consorts) prétendent que cela ne peut pas faire de mal, que les homéopathes prennent plus de temps avec leurs malades, les écoutent mieux, et cetera.

Mais le plus intéressant n'est pas là : les pétitionnaires contre l'homéopathie utilisent des arguments à son égard, des arguments "justes" a priori, qui sont le reflet d'une dissonance cognitive avancée car ces arguments s'appliquent parfaitement à leurs (nos) propres pratiques.

Mais pas que des arguments justes. Il est écrit dans la pétition "Les thérapies dites "alternatives" sont inefficaces au delà de l'effet placebo, et n'en sont pas moins dangereuses". Vraiment ? Cela signifierait-il que l'effet placebo serait non dangereux ?

Ce qu'on peut le plus reprocher à un médecin c'est de prescrire un placebo en sachant que c'est un placebo ! Qu'il soit pur (des granules homéopathiques) ou impur (des antibiotiques pour traiter une rhino-pharyngite). J'écrivais ceci en répondant à un confrère : "La prescription d'un placebo (pur ou impur) est une rupture du pacte de confiance avec le patient puisqu'on lui ment sciemment ; que lui répondrez-vous quand il vous demandera à quelle classe thérapeutique ou pharmacologique il appartient ? Que penserez-vous de lui quand il "répondra" au placebo ? On ne peut plus écrire des ordonnances sans expliquer au patient quel est le but de cette prescription. ... Quand vous avez devant vous un patient venant de chez un autre médecin qui réagit, par exemple, au magnesium vous en penserez quoi ? Vous serez content pour lui, pour vous ou vous le regarderez comme un demeuré ? ... Prescrire un placebo, enfin, c'est tourner le dos au questionnement EBM, c'est considérer le patient comme persona non grata dans la démarche thérapeutique. Tout au plus peut-on dire à un patient à qui on prescrit un placebo, que notre geste est irraisonné, magique, que cela marche parfois et que l'on peut faire le pari que cela marchera dans ce cas précis et contre toute attente. (je rajoute ceci : des études ont montré que dire au patient qu'on lui prescrit un placebo "marche" aussi). Il ne faut pas confondre prescrire un placebo et profiter de l'effet placebo pour renforcer les effets déjà démontrés d'une molécule." Voir ICI pour le billet. Dans le cas des homéopathes purs ou impurs il y a un doute : certains pensent qu'ils ne prescrivent pas un placebo. Quant à la démarche d'aller consulter un médecin homéopathe elle contient l'effet placebo en elle-même... puisqu'il s'agit d'une croyance.

Le schéma suivant, archi connu, est éclairant.



Pas que des arguments justes. Prétendre que l'homéopathie, seule, conduit à "sur médicaliser la population en donnant l'illusion que toute situation peut se régler avec "un traitement"", c'est un peu fort de café ! Comme si la médecine traditionnelle, comme si les médecins traditionnels ne faisaient pas la même chose ! Les médecins sont partout dans les médias à donner des conseils normatifs, comment être un bon père, une bonne mère, comment donner le biberon ou ne pas le donner, comment faire son deuil, comment faire l'amour, comment ne pas prendre de poids, comment ne pas avoir d'enfants ou comment en avoir, maigrir ou grossir, comment dépasser une déception amoureuse, comment ne pas souffrir de la prostate, du dos, du petit doigt...

Il s'agit, comme le disait Ivan Illich, de la médicalisation de la santé. On disait jadis "Tout est politique" on dit désormais "Tout est médical."

Oui, l'homéopathie exclusive est dangereuse car elle peut faire croire que des granules peuvent guérir des non maladies, des états anodins et, surtout, que ces granules magiques pourraient venir à bout des inégalités sociales et comportementales (il y a un lien d'intérêt entre les deux) qui sont la source majoritaire des "vraies" maladies dont on souffre et dont on meurt, il suffit de comparer les courbes d'espérance de vie dans les sous-groupes populationnels professionnels et genrés, il suffit de jeter un oeil sur la mortalité infantile dans le département 93. Mais la médecine non homéopathique agit-elle autrement ?

Oui, l'homéopathie est très dangereuse aussi quand elle prétend (mais ce sont des ultra minoritaires) guérir des cancers, par exemple. Il faut la dénoncer et dénoncer les médecins inscrits à l'Ordre qui se comportent de cette façon.

Pas que des arguments justes.
"Exiger de l’ensemble des soignants qu’ils respectent la déontologie de leur profession, en refusant de donner des traitements inutiles ou inefficaces, en proposant des soins en accord avec les recommandations des sociétés savantes et les données les plus récentes de la science, en faisant preuve de pédagogie et d’honnêteté envers leurs patients et en proposant une écoute bienveillante."

Ce paragraphe est incantatoire. Les pétitionnaires ont certainement rédigé dans la foulée une tribune contre la faim dans le monde, pour la disparition de la misère, contre le plafond de verre, et cetera.

La réalité est la suivante : la médicalisation de la santé, ce n'est pas seulement prescrire des médicaments, c'est aussi prescrire des examens complémentaires inutiles, c'est aussi céder à l'Eglise de Dépistologie (dépistage organisé du cancer du sein, dépistage sauvage du cancer de la prostate, frottis du col utérin tous les ans, mammographies avant 50 ans, et cetera), céder à la tentation de la fabrication des maladies (alias disease mongering) en étendant le champs des critères, des indications, en exagérant la dangerosité de ces dites maladies, suivre les recommandations fallacieuses des sociétés savantes et des agences gouvernementales polluées par l'argent de l'industrie et par la bêtise académique (la lecture de la revue Prescrire critiquant les guides HAS serait la bienvenue, la lecture des actions du Formindep se battant contre la corruption des agences gouvernementales serait elle aussi utile)... Faire preuve de pédagogie c'est aussi introduire la décision partagée, ce qui semble être une démarche surhumaine pour nombre de non homéopathes (quant aux homéopathes ils ne peuvent partager que leurs croyances avec leurs patients), faire preuve d'honnêteté, c'est aussi ne pas mentir aux patients sur ses conditions de survie en cas de maladies mortelles, c'est aussi parler des effets indésirables des traitements non seulement dans les maladies mortelles mais aussi dans les maladies chroniques, c'est aussi ne pas proposer que de la médecine mais des soins de support, du social, et cetera.

Nul doute que les pétitionnaires et les non pétitionnaires sont d'accord avec cela, je n'en doute pas. Mais l'homéopathie et les homéopathes sont bien loin.

Les commentaires de défense, les éléments de langage, des pro pétitionnaires, les plus mis en avant sont ceux-ci : la médecine non homéopathique, contrairement à l'homéopathie, prend acte des données de la science. Mon oeil.

Je vous invite à lire, en anglais, les livres d'Adam Cifu et Vinay Prasad (Ending médical reverse) et de Jeanne Lanzer (The danger within us). Dans le premier livre les deux auteurs voudraient que l'on en termine avec l'instauration trop rapide de standards thérapeutiques non fondés sur des preuves afin que l'on n'ait pas à revenir en arrière, non parce que les données de la science auraient changé mais parce qu'il n'y avait pas de données scientifiques à l'origine pour les instaurer. Dans le second livre l'auteure rapporte combien les dispositifs médicaux aux Etats-Unis (ce n'est pas le cas chez nous, rassurez-vous) font l'objet de peu d'essais d'efficacité et de sécurité avant leur implantation et combien les industriels sont favorisés par la loi contre les poursuites pénales. C'est effarant.

Ce qui est intéressant dans le livre de Cifu et Prasad c'est de compter les jours, les semaines, les mois, les années, qui s'écoulent entre le moment où un traitement, une procédure, un examen sont considérés comme inefficaces et/ou dangereux et le moment où ils sont réellement abandonnés par les praticiens non homéopathes. Les données de la science, disiez-vous ? Faisons des paris à propos de l'étude Orbita (ICI) : 100 ans pour que l'on arrête de stenter des patients qui n'en ont pas besoin ? Quand abandonnera-t-on le dépistage organisé du cancer du sein en France ? Quand les médecins cesseront-ils de prescrire des prétendus médicaments anti Alzheimer et avant même qu'ils ne soient déremboursés ?

J'ai des centaines d'exemples.

J'espère donc que la pétition, va continuer de faire son bonhomme de chemin à la télévision, sur les réseaux et qu'elle va finir par exploser à la figure de la médecine tout entière.

Mais cela n'arrivera pas.

Le tribunal intérieur des bonnes manières va envoyer ses injonctions afin de sauver le bébé, c'est à dire cette terrible médecine néo-libérale objet asservi et bientôt e-connecté au complexe santéo-industriel.

Car n'oubliez pas que l'industrie pharmaceutique, aux Etats-Unis, fournit plus d'argent aux politiciens que la trop fameuse NRA, elle s'appelle la PhRMA. Croyez-vous qu'elle le fasse pour des raisons philanthropiques ? Voir LA. Elle salarie 2 lobbyistes par membre du congrès et elle a dépensé en 2016 152 millions de dollars pour influencer la législation et 32 seulement pour les campagnes électorales.

Je soulignerai enfin que le mot patient n'apparaît pas une seule fois dans cette pétition.

C'est, comment dire, symptomatique.

Alerte enlèvement à 23H17 : Christian Lehmann me signale que le mot patient est présent dans le texte. Dont acte.

L'honneur est sauf.


PS
Pour écouter des signataires de la pétition (Christian Lehmann LA et Matthieu Calafiore ICI)

Le JIM commente : ICI.

PS. Martine Bronner nous livre une réflexion éclairante sur ce sujet. Balancée et juste. Voir LA.