mardi 24 août 2021

Air Médecine


Joe Cocker

L'Air Médecine est à l'origine une expression ironique employée par certains médecins sur les réseaux sociaux à l'égard des non médecins qui les critiquent sur leur façon de pratiquer la médecine (éthique et soins). 

L'idée est la suivante : seuls les médecins, parce qu'ils ont fait de longues études, sont capables de comprendre les maladies, de les traiter et de gérer leurs comportements à l'égard des patients qui les consultent.

Cela est tout à fait faux.

Voici ce qu'entre autres j'avais écrit sur le sujet en septembre 2016 : LA.

Certains médecins, par compétence, par corporatisme, par arrogance, par sentiment de faire partie de l'élite et par d'autres raisons que je vous laisse imaginer dont économiques ne sont pas réceptifs à la critique profane.

Cette rigidité est sans doute liée au sentiment que leur pouvoir (le pouvoir médical) s'est amenuisé au fil du temps. 

Par rapport aux patients : le fait que la pratique de l'Evidence Based Medicine inclut "les valeurs et les préférences des patients" n'est pas passé. La décision partagée, c'est à dire pour résumer, le choix des soins à pratiquer (et aussi, ne l'oublions pas, à ne pas pratiquer) après que la présentation des différentes possibilités a été proposée par le soignant n'est pas entré dans les moeurs. 

Par rapport aux administratifs : certains médecins pensent que les hôpitaux et toutes les structures de soin en général "allaient mieux avant" quand les médecins étaient aux commandes. 


La pandémie de Covid a montré de façon éclatante que les études de médecine, courtes, moyennes ou longues ne rendaient pas les médecins intelligents et "scientifiques". Que de pauvres médecins généralistes, je veux dire pauvres en esprit, puissent réaliser des études bidons sur les bienfaits en préventif de l'azithromycine, de la prednisone et/ou de l'HCQ et/ou des anticoagulants, passe encore, mais que de grands professeurs issus du sérail puissent se fourvoyer dans leurs services (et là soulignons encore le poison du corporatisme qui fait qu'aucune enquête ne sera faite, qu'aucune sanction ne sera prise, qu'aucun changement dans le processus de commandement ne sera entamé) et sur les réseaux sociaux et sur les écrans en racontant tout et n'importe quoi. Pas tant comme de vulgaires administratifs ou de vulgaires patients ou de vulgaires citoyens, mais comme des médecins se prétendant des scientifiques et alignant les contre-vérités avec un aplomb étonnant et un manque d'esprit autocritique désespérant. 

Et ainsi, le paradoxe de cette affaire est le suivant : la pandémie covidienne a montré que l'Air Médecine s'appliquait aussi et surtout aux médecins, soit qui ne "voient" jamais de malades, soit qui en "voient" pour d'autres raisons que la spécialité dont ils sont spécialistes. On a vu des épidémiologistes parler de démographie, des démographes parler d'épidémiologie, des infectiologues parler de statistiques, de statisticiens parler d'infectiologie, d'urgentistes parler de pré hospitalier, de pré hospitaliers parler d'urgences, et cetera. De médecins parler de politique, de politiques médecins parler de médecine.

Cette pandémie aura été un naufrage pour la communication médicale à la fois grand public (proposer des mesures de santé publique fondées sur du vent, revenir sur ces mesures à partir de vent, expérimenter sans faire d'essais contrôlés, tirer des conclusions sur un coin de table, affoler les populations, les rassurer à tort, mentir encore, stigmatiser les citoyens, les traiter de débiles) et à destination de la communauté médicale (publications pourries, études pourries, communiqués pourris).

Tristounet.

Et je vous parie un dollar contre un hôpital chinois flambant neuf construit en huit jours que le monde d'après sera identique.