Le texte de John Berger et les photographies de Jean Mohr sont déchirant.e.s : ce livre est à la fois un hymne à la médecine générale alapapa (John Sassall, le médecin, fait "tout", il écoute, il recoud, il prend soin, il guérit, il rate, il lit, il déprime, ...) et un formidable plaidoyer pour ne plus la pratiquer (il a quand même fini par se suicider).
J'ai déjà vanté le livre ICI.
Berger John et Mohr Jean. (1967 et 2009 pour l'édition française). Un métier idéal (A fortunate man) : Paris : Editions de l'Olivier, 170 pp.
John Sassall est un médecin de campagne et pourtant, si différent, il ressemble au médecin de la ville de Lyon raconté par Jean Reverzy dans Place des angoisses, voir ICI.
La récognition est le maître concept de ce livre (la récognition comme l'action de la reconnaissance en identifiant) : "Je sais, je sais..." ne cesse de répéter John Sassall à ses patients au lieu de murmurer "Oui, oui..."
«Quand il parle avec un malade ou qu’il l’écoute, c’est comme s’il le touchait aussi avec les mains dans l’espoir d’être moins susceptible de se tromper ; et quand il examine physiquement un malade c’est comme s’il conversait avec lui. »
Il exerce dans un milieu rural pauvre, il roule en Land Rover, s'habille avec élégance et raffinement : il ne fait pas semblant d'être peuple.
Dans le British Journal of General Practice Roger Jones commente de façon éclairante (LA) le livre consacré à John Eskell, le "vrai" nom du praticien, et le compare de façon pertinente à Julian Tudor Hart (qui inventa The inverse Care Law ou en français La loi inverse des soins, voir ICI) et à John Fry (voir LA) qui ont, depuis leurs lieux d'exercice de médecins généralistes, posé les bases de ce qu'est la médecine générale et comment l'articuler avec le système se soins et la santé publique.
Tout cela est bien idéaliste mais nous pouvons encore rêver.
John Sassall (1919 - 1982) |
Et, pour finir :
John Berger par lui-même. |
Et John Berger et Jean Mohr, cinquante ans d'amitié.
John Berger (1926 - 2017) et Jean Mohr (1925 - 2018) |