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mardi 14 avril 2020

Billet d'humeur (purulente) au temps du confinement.



Cet après-midi, je suis allé au supermarché et à la boulangerie.

Nous sommes à Versailles.

J'ai revêtu un masque chirurgical juste avant de sortir de mon domicile (à 15 heures 34), un masque recyclé qui a subi un passage au four pendant 25 minutes à 70 ° (le niveau de preuves est faible quant à l'efficience du procédé). C'est nickel : les élastiques ne sont pas distendus.

Dehors, il fait frais à l'ombre et plutôt tiède au soleil. Avec le masque le ressenti de tiède va plutôt vers le chaud.

Peu de monde dans les rues et pratiquement pas de masques (mais je ne sais pas si les gens se promènent ou vont faire des courses).

Mon masque se voit de loin puisque certaines personnes changent de trottoir quand ils m'aperçoivent.

Six personnes dans la queue extérieure du supermarché.

Distance d'un mètre à peine respectée. Notamment par deux jeunes, le casque au bout des bras, qui colle la dame qui est devant eux. Le mètre étalon n'était pas au programme. Le Khon étalon non plus.

Une dame âgée avec un masque en tissu attend patiemment.

A l'intérieur c'est open fun.

Les oeufs sont manquants depuis des siècles. A moins que des voleurs de poulaillers ne viennent le matin à l'ouverture quand les poules viennent de pondre.

Au rayon légumes les gens se collent. Quelques masques chirurgicaux, un ou deux masques en tissu, un masque canard échappé de la mare, et des façons de porter ledit masque qui mériteraient quelques photos sur le site The sartorialist (ICI) : sous le nez, sous la bouche, de guingois, mais aucun ne l'a mis en visière. Il y a aussi les foulards, les cache-nez, les mains, la main devant la bouche pour parler... Les gens, gantés plastique ou non, palpent les fruits comme à l'habitude, enfonçant leurs  doigts avec un enthousiasme communicatif, ça doit faire mûrir les fruits...



Au rayon frais, il manque des trucs, mon fromage industriel favori, le Saint agur, peu de crème et, au moment où j'allais ouvrir un panneau transparent pour me saisir du dernier pot de fromage blanc 0 % je suis bousculé par une dame, une vieille dame dans la soixante-dizaine bien plus proche de quatre-vingt que de soixante, habillée avec grâce, plutôt le genre foulard Hermès, pull Saint-James et mocassins Céline, sans masque (il me semble pourtant qu'elle fait partie de la population cible pour se covider), et, contrairement à tous mes pronostics, non seulement elle ne tombe pas à la renverse quand je lui mets un grand coup de chaussures dans les tibias (je plaisante mais je n'aime pas les vieilles dames resquilleuses qui sont aussi nombreuses à Versailles que les cloches des églises) mais elle se saisit avec autorité du dernier pot géant de Jockey. Ouf, je n'ai pas eu à lui donner un deuxième coup dans les tibias pour lui faire lâcher prise le pot de fromage blanc que je visais...

Ah, je ne vous ai pas parlé de cette autre vieille dame versaillaise d'âge ehpadien, qui prend un camembert, ouvre le couvercle et appuie son pouce dedans avec une force que l'on n'aurait jamais imaginée chez une femme de cet âge au point que le papier aurait pu être déchiré et le replace dans le rayon juste avant d'en essayer un autre...

Je passe du côté des produits ménagers où le savon est toujours aussi rare à croire que les Français font des stocks pour Covid-20, et je vois une jeune femme sans masque, vingt-cinq ans, l'air concentré, en train de renifler avec détermination un flacon de shampooing (désolé, je n'ai pas vu la marque, je ne peux vous faire la liste des 23 colorants considérés comme cancérigènes par Corinne Lepage et des 212 perturbateurs endocriniens considérés par Yannick Jadot comme extrêmement dangereux) en collant son nez, la narine droite, puis la narine gauche sur l'orifice béant (à moins bien entendu qu'elle ne soit déjà Covid + et anosmique et qu'elle ne suive des cours de rééducation olfactive en supermarché grâce à un tutoriel aimablement mis en ligne par une société savante d'ORL) avec une inconscience frisant le grand art...

Un jeune homme barbu porte un masque curieux, genre masque à gaz qu'il aurait trouvé dans le grenier familial et qui aurait appartenu à son Grand-père taxi de la Marne...  

Les caisses sont peu achalandées mais il y a toujours des petits malins/malignes qui aimeraient bien passer avant, et j'observe ceci : les caissières ont des visières transparentes pour travailler, elles ne portent pas de masques mais ont enfilé des gants (les fameux gants bleus). Quant à la superviseuse, elle va de caisse en caisse, sans visière, sans masque et sans gants (cherchez l'erreur). Et je vois ceci : une jeune caissière, dans les vingt ans tout mouillés, passe sa main gantée de bleu sous sa visière et se frotte vigoureusement les yeux en envoyant sans doute quelques SARS-CoV-19 là où il faut pas.

Je ressors, non sans avoir salué le vigile qui organise les entrées et les sorties dans le magasin (et qui ne porte pas de masque).

Je me dirige d'un pas alerte malgré mes deux bras chargés vers la boulangerie où la queue est peu importante (deux personnes devant moi et trois personnes à l'intérieur). Je suis talonné, c'est le mot, par un frère et une soeur qui n'ont pas non plus suivi les cours de géométrie et pour lesquels une visite au pavillon de Sèvres pourrait leur donner une idée des distances à respecter dans une queue, tout en sachant que leur façon d'être habillés, jeunes gens versaillais bien sous toutes les coutures, 14 ans pour le garçon et 10 pour la fille, indique à l'évidence que les conseils de distanciation sociale leur ont déjà été donnés.



A l'intérieur, il y a une vieille dame avec masque en tissu du plus bel effet, qui met trois heures pour extraire le compte juste de son porte-monnaie, les deux jeunes qui me collent et qui laissent traîner leurs doigts partout, surtout la jeune fille, et il y a une dame, la cinquantaine et demie bien conservée, veste rouge à galons, chemisier blanc, collier de perles autour du cou (le bas je n'ai pas regardé) qui toussote, qui met la main devant sa bouche pour ne pas envoyer de postillons quand elle tousse, et qui le fait aussi pour parler. Elle colle la vieille dame qui a du mal avec sa monnaie et elle dit bien fort qu'elle achète des chocolats pour une vieille dame et que, bien sûr, elle va lui déposer devant sa porte pour ne pas risquer de la contaminer (elle a donc réussi, dans la même phrase, à illustrer sa dissonance cognitive et le kitsch kundérien - voyez comme je fais de bonnes actions et combien il est important que tout le monde le sache et s'extasie devant mes bonnes actions).

Je paie mes deux traditions à la patronne qui officie derrière un Plexiglas et qui rend la monnaie avec des gants.

Je sors de la boutique, il fait plus chaud que tout à l'heure et j'arrache mon masque.

C'est pas gagné. 

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Le site Stop-Postillon : LA

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Bien que le niveau de preuves soit faible.

Si vous sortez et que vous comptez rester à distance des gens, ne pas aller dans un lieu public fermé : pas de masque.

Si vous sortez faire des courses, il vaut mieux porter un masque.

Le masque canard n'est pas indiqué.

Le masque dit chirurgical est indiqué et recommandé.

Le masque en tissu, si vous n'avez pas de masque chirurgical, est mieux que rien et vous allez voir le site Stop-Postillons pour savoir comment les faire...

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Ce billet est dédié à @DocArnica, @Mimirudyo, @DrJohnFa, @Gomi et @DocteurAbbas.