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dimanche 13 juin 2010

UNE CONSULTATION A DOUBLE ENTREE - HISTOIRES DE CONSULTATION : VINGT-NEUVIEME EPISODE

(La Vénus de Milo : femme grecque au décours d'une intervention pour panaris bilatéral)

Madame A me ramène sa petite fille de 14 mois pour la troisième fois en quelques jours. Elle continue de tousser. La maman a peur d'une bronchiolite et le médecin en a assez que cela dure. L'examen clinique est maigre, les conseils d'hygiène ont été donnés, les paroles rassurantes prodiguées, les sirops non prescrits (1), bon, le boulot a été fait.
Madame A est aide-soignante dans une clinique de la région. Pour éloigner les nouvelles questions comme "Est-ce grave ? Y a pas besoin de kiné ? Ca va durer combien de temps ? Faut pas faire une radio ?" et autres fariboles, je l'interroge sur ses activités en clinique. Mal m'en a pris !
Elle me raconte que la clinique manque de personnel (air connu), qu'il n'y a que le fric qui compte (je sais), qu'il a failli avoir un gag il y a trois jours, que la malade a été récupérée de justesse, une hémorragie post op, une tension dans les chaussettes, le chirurgien qui a tardé à monter voir la patiente, la patiente qui a été "reprise", "on l'a échappé belle, un jour il va vraiment y avoir un drame, si les médecins qui adressent des patients savaient comme cela se passe..." J'écoute la dame avec attention car je fais partie des médecins qui adressent des patients à la clinique sans me poser trop de questions... Et je lui dis de se taire : "J'en ai trop entendu. Vous devez me dire cela mais cela me choque... Il faut que je réfléchisse..."
Trois jours après cette consultation une de mes patientes me téléphone : "Alors, Madame B, ça s'est bien passé l'opération ? - Non, c'est pour cela que je vous appelle..." Et elle me raconte l'histoire d'une femme (c'est elle) qui a saigné en post opératoire dans une clinique de la région, qui avait quatre de tension et qu'on a rattrapée par les cheveux. C'est concordant : c'est "mon" aide-soignante et c'est "ma" malade. "Et comment ça va ? - C'est OK mais je ne me ferai plus jamais opérer là-bas..." Je comprends. Je ne l'ai pas envoyée pour cette intervention de chirurgie esthétique et elle y est allée de son plein gré. Elle a accepté les dépassements.
Je fais comment maintenant ? Je n'adresse plus de patients à la clinique ?
Je réfléchis.