Le capitalisme d'Etat |
J'ai déjà écrit deux billets sur le sujet, le premier pour critiquer la recommandation très curieuse de la HAS (c'est LA) et le deuxième (c'est ICI) pour montrer combien le complexe santéo-industriel français s'était mobilisé pour imposer le remboursement d'une molécule française en dépit de toutes les réserves qui pouvaient être émises sur son efficacité.
Au moment où j'écris ces lignes le prix du BeyfortusⓇ/niservimab n'a pas été communiqué. C'est une information confidentielle secret défense.
Pourtant nous apprenons que le gouvernement français aurait commandé 200 000 doses à Sanofi en février-mars 2023, donc avant la recommandation de la HAS et même avant que la seule étude contrôlée positive n'eut été publiée (Le Moniteur des Pharmacies : LA).
Sanofi, de plus, va gérer les stocks et recevra directement les commandes des pharmacies.
Je vous parlais de capitalisme d'Etat.
Et bien entendu, nous sommes le premier pays à le faire car les intérêts de Sanofi sont à préserver car d'autres molécules arrivent pour les nouveaux-nés et nourrissons et également un vaccin chez la femme enceinte.
Avec élargissement des prescriptions aux sages-femmes. Pour rendre la population des nouveaux-nés et des nourrissons complètement captive (environ 750 000 en France par an).
On se résume :
- La HAS recommande le remboursement d'une molécule sans prendre en compte le seul essai contrôlé positif chez les nourrissons "fragiles" alors qu'elle a pris en compte une étude positive mais ouverte, c'est à dire sans aveugle (les soignants savaient à qui ils ou elles avaient affaire) : on n'a jamais vue telle précipitation et une telle confusion (on me dit dans l'oreillette qu'avec la HAS tout est possible).
- Une molécule dont l'ASMR est cotée IV et le SMR coté V, c'est à dire efficacité nulle ou presque
- Une molécule Sanofi-Aventis (multinationale française)
- Le gouvernement achète à un prix non communiqué mais probablement très élevé (plus cher qu'un vaccin) car il s'agit d'un anticorps monoclonal une molécule dont, officiellement, les résultats cliniques ne sont pas connus (sauf pour les nourrissons en bonne santé chez lesquels on ne diminue pas significativement le nombre des hospitalisations)
- Le nouveau DGS, nommé dans la précipitation, un politique de chez politique, Grégory Emery, s'empresse de tout valider.
- Le Ministre de la Santé et de la Prévention et toute l'administration communiquent de façon triomphale sur le traitement universel de tous les nourrissons en affirmant que cela va faire baisser le nombre d'hospitalisations de tous les nouveaux-nés et de tous les nourrissons de 80 % (RRR) (alors qu'il y a eu manipulation des résultats en agrégeant 2 études concernant des population sans risques et une population à risques).
Ce que l'on sait sur le plan de l'efficacité :
- Chez les nouveaux-nés et nourrissons en bonne santé et nés à terme : l'étude contrôlée indique une diminution significative du nombre de crises avec un nombre de sujets à traiter (NST) de 14 (NST=1/RRA, soit 1/(0,026-0,095)) mais pas de diminution significative du nombre d'hospitalisations
- Chez les nouveaux-nés et nourrissons prématurés et/ou porteurs d'une affection grave : l'étude contrôlée indique une diminution significative du nombre de crises (NST = 14) et du nombre d'hospitalisations (NST = 62, soit 1/(0,022-0,096)).
Ce que l'on sait sur la plan de la tolérance :
- Une étude spécifique de tolérance a été réalisée nirsevimab vs palivizumab (étude MEDLEY : LA) et non par rapport à un placebo et au moins un effet indésirable chez plus de 60 % des sujets dans les deux groupes (ce qui est beaucoup) et dans les groupes nirsevimab, et non attribués au produit : 5 décès
- Dans l'essai chez les enfants "sains" : 3 décès dans le groupe nirsevimab
- Dans l'essai chez les enfants "fragiles" : 2 décès dans le groupe nirsevimab et 3 dans le groupe placebo
DERNIERES NOUVELLES.
La société savante des médecins généralistes (@CNGE sur twitter) communique ce 29 septembre 2023 et confirme tout à fait l'analyse que nous avions faite.
A lire absolument : ICI (le lien ne fonctionne pas...). Pas plus sur le site du CNGE.
PS du 08/10/2024 : Rapport de pharmacovigilance de l'ANSM !
C'est ICI.
Il commence par un résumé d'efficacité présenté en chiffres relatifs tout à fait conforme à ce qu'écrit l'HAS (et en contradiction avec le CNGE). Les agences gouvernementales se serrent les coudes.
En revanche, la partie proprement pharmacovigilance est intéressante.
Page 42 du rapport : 3 signaux potentiels de pharmacovigilance.
Des considérations tout à fait surprenantes sur les problèmes d'efficacité pour le nourrisson du vaccin contre le VRS chez la femme enceinte.
Enfin, le risque d'hypersensibilité allergique pose le problème de la deuxième saison pour les enfants de moins de 24 mois. Des données de pharmacovigilance supplémentaires sont nécessaires.
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