lundi 1 avril 2013
Un malade qui fait chier. Histoire de consultation 1146.
lundi 12 octobre 2009
DIRE LA VERITE AUX MALADES - HISTOIRES DE CONSULTATION : QUATORZIEME EPISODE
C'est la première fois qu'il vient au cabinet avec sa femme, ils sont indépendants pour les consultations, et, a fortiori, qu'un de ses fils l'accompagne, ajoute à la solennité.
Il y a trois semaines l'urologue de l'hôpital lui a enlevé sa sonde, l'a réséqué et, depuis, je l'ai eu au téléphone, il pisse spontanément. Il pisse rouge mais il pisse.
Cet homme est aussi un anxieux dépressif qui a fait un épisode aigu il y a dix ans et qui en a gardé un très mauvais souvenir.
"Que me vaut cette consultation inhabituelle ?
- Le docteur D m'a dit que j'avais un cancer.
- Un cancer de quoi ? je demande d'un air ahuri."
Il me montre son bas ventre et, déboussolé, je m'attends au pire.
"Ben, de la prostate, cette affaire... De quoi voulez-vous donc que j'ai un cancer ?"
Son fils me jette un regard stupéfait et réprobateur (j'ai l'air de débarquer de Mars) et sa femme, presque tremblante, est prête à toutes les révélations funestes.
"Il vous a dit ça quand ?
- Avant hier.
- Et c'est tout ce qu'il vous a dit ?
- Non, que j'allais avoir des rayons et des piqûres...
- C'est tout ?
- Vous ne croyez pas que c'est suffisant ?"
Si j'avais voulu faire de l'humour, déplacé, déplacé, j'en conviens, je lui aurais dit que c'était à la fois trop ou pas assez.
"Bon, bon, bon..."
Il y a encore quelques années il était de bon ton, en France, de ne jamais dire la vérité aux malades, sauf exception, les exceptions étant, malade emmerdant, famille chiante ou nécessités sociales. cela faisait partie, sauf erreur de la théorie paternaliste de la médecine française : ce que je fais est forcément bon pour le malade qui est un con et qui ne peut comprendre puisque j'ai fait x années de médecine et que lui... Puis, presque du jour au lendemain, sous l'influence de la culture dominante anglo-saxonne, et, il faut le dire, en raison de nombreux textes de réflexion publiés par ces mêmes anglo-saxons (au sens large) et au nom de la philosophie libérale (le corps du patient appartient au patient et c'est lui qui doit décider en toute connaissance de cause), on s'est mis à tout dire. Mais l'inhumanité des médecins, leur arrogance, leur suffisance, leur manque de réflexion et de prise en considération du patient qui se trouve en face d'eux, toutes ces qualités sont restées telles quelles avant, pendant et après ce changement d'attitude. On pourrait dire, en paraphrasant Proust qui parlait de toute autre chose (faut-il dire à son meilleur ami que sa femme le trompe ?), que les médecins ne disaient pas la vérité puis l'assenaient des années plus tard avec tout autant de conviction et de bonne conscience, par méchanceté quand ils étaient méchants, par gentillesse quand ils étaient gentils, par bêtise quand ils étaient bêtes, par ignorance quand ils étaient ignorants...
J'ai regardé Monsieur O droit dans les yeux, je ne lui ai pas dit que l'urologue était un gros con avec de la merde dégoulinant de partout sur son visage, de la bonne vieille merdre ubuesque ou de la bonne vieille merde rabelaisienne, mais sans nul doute que le non verbal l'a frappé en pleine figure, pas seulement lui, sa femme, son fils, et j'ai tenté de le rassurer (il était peut-être un peu tard).
Je pensais aussi que la bêtise des urologues (mais, mon cher ami, il ne faut pas généraliser, insulter une corporation, ostraciser une communauté, c'est vraiment très mal, c'est vraiment pas citoyen, c'est aussi peu convenable de parler comme cela de pauvres chirurgiens qui tentent d'éliminer les prostates de la surface de la terre, que de ne pas vouloir se faire vacciner par le vaccin contre la grippe A), je reprends : que la bêtise de la majorité des urologues, ne se résumait pas au dosage généralisé du PSA dans les populations mâles des pays industrialisés, mais à la traque incessante de ce putain de bordel de cancer de la prostate qui tue tant de personnes de par le monde...
Rassurer un homme de soixante-treize ans n'est pas une chose facile quand on sait qu'il a déjà fait un infarctus, qu'il porte des stents, qu'il est diabétique non insulinodépendant et qu'il prend aussi des médicaments contre l'hypertension et contre son excès de mauvais cholestérol.
Cela fait des années que j'aurais dû l'inquiétéer et lui dire que son espérance de vie est probablement fort compromise mais certainement pas en raison de son cancer de la prostate.
Heureusement que son PSA est peu interprétable après la résection, heureusement que le scanner est rassurant, heureusement que la scintigraphie osseuse est normale... Non, non, je dis des bêtises : ces examens, à part le dosage du PSA, n'ont pas été réalisés et je ferai en sorte que l'oncologue de l'hôpital, mon ami, pas les autres qui sont payés au pourcentage sur les examens réalisés, fasse le minimum et laisse ce patient tranquille, sans rayons, sans antiandrogènes qui, tout le monde le sait sauf certains urologues, ne sont pas des traitements très favorables chez les patients "cardiaques".
Je ne sais pas si ce patient aura été rassuré par son médecin traitant mais je lui ai prédit plusieurs années heureuses sans traitement.
Me croira-t-il ?
Je n'ai pas appelé l'urologue qui ne m'a pas encore communiqué plusieurs semaines après les faits un compte rendu de la consultation où il a annoncé, sans ambages, que le patient avait un cancer...
Je lui ferai lire mon blog.
dimanche 16 octobre 2022
Bilan médical du lundi 10 au dimanche 16 octobre 2022 : Dépistage du cancer colorectal, maladies chroniques, surdiagnostic (Australie), AC/FA, Ordres, Myocardites post ARNm, Pittet...
Via Rithy Panh |
1. NordICC : Le dépistage du cancer colo-rectal par coloscopie unique ne sauve pas de vies.
- Moins de cancers (0,98 vs 1,2 %) ont été détectés avec une différence relative significative de 18 % Ce qui signifie que le nombre nécessaire de personnes à inviter au dépistage pour éviter un cancer colorectal est de 455 (IC à 95% : 270-1429)
- Le risque de mortalité liée au cancer colorectal n'était significativement pas différent (0,28 vs 0,31)
- Le risque de mortalité totale était identique : 11,03 vs 11,04 %.
Conclusion : le dépistage du cancer colorectal par coloscopie sur invitation chez des personnes asymptomatiques ne sauve pas de vie.
Pourtant :
Rappelons qu'en France le dépistage organisé du cancer du colon invite les personnes âgées entre 50 et 74 ans (cette invitation est adressée par voie postale aux populations concernées et est relayée par les médecins traitants lors de consultations) à pratiquer eux-mêmes une recherche unique de sang dans les selles dont le résulta est transmis au médecin qui a prescrit le test. Cette façon de procéder ne diminue ni la mortalité relative, ni la mortalité totale.
Pro :
Mais il y a des critiques de Prasad favorables à l'essai :
- La critique principale est que l'essai aurait dû s'intituler : Effet d'une invitation unique par coloscopie sur les risques de cancer colorectal et de la mortalité associée. Avec des résultats négatifs sur la mortalité relative et la mortalité totale.
- Le chiffre de 42 % d'acceptation de la coloscopie est inférieure à celui des Etats-unis (60 %) dans une population éligible. Que se serait-il passé si 60 % des personnes avaient accepté l'invitation ? Probablement peu de changement selon BG puisque le risque de mortalité liée au cancer colorectal est diminué de 0,15 % entre l'ensemble des patients invités et les patients ayant répondu à l'invitation.
- Pour mémoire, en France le taux de participation à la détection de sang dans les selles est environ, selon les années de 28-29 %
- L'analyse per protocole, c'est à dire en ne prenant en compte que les patients ayant accepté l'invitation, c'est tricher dans le cadre d'un essai randomisé. En effet cela n'analyse pas les résultats de la décision partagée mais seulement les résultats du protocole.
- Si cet essai a été mené, c'était pour savoir si les résultats de l'étude randomisée méritaient que le dépistage du cancer colorectal soit généralisé à la population entière d'un pays. La réponse est probablement non. D'une part il est rare que la validation externe d'un essai randomisé montre des chiffres plus importants que l'essai lui-même... D'autre part cet essai montre que l'invitation ne modifie pas ou très peu le risque de mourir d'un cancer colorectal ni d'autre chose.
- Ainsi, il est important de dire que cet essai ajoute une pierre de plus à l'édifice du dépistage du cancer colorectal par coloscopie. Le citoyen non malade doit être informé avant toute décision de dépistage du résulta de cet essai. Idem pour le test de détection de sang dans les selles. On peut aussi se demander pourquoi la sigmoïdoscopie, peu pratiquée en France, n'est pas proposée (pas d'anesthésie) (LA), avec de meilleurs résultats que les deux procédures précédentes.
- Un citoyen informé asymptomatique a le droit à une coloscopie de dépistage.
2. DREES : Les maladies chroniques touchent plus souvent les personnes modestes et réduisent davantage leur espérance de vie
- Les personnes les plus modestes ont 2,8 fois plus de risques de développer u diabète que les plus aisés
- Le risque de développer une maladie respiratoire chronique est 1,4 fois plus élevé chez les ouvriers que chez les cadres
- Les plus modestes ont un risque 2,8 fois plus élevé de vivre avec une maladie psychiatrique que les plus aisés.
- Le risque de vivre avec un diabète est plus inégalitaire chez les femmes, celui de vivre avec une maladie psychiatrique l'est plus chez les hommes.
- Les maladies chroniques accroissent les inégalités en termes d'espérance de vie.
"Est-ce que tout va bien ? Vous n'avez pas photographié votre nourriture." |
3. Surdiagnostic : On n'en peut plus !
via @Bourrigaud |
4. Un dépistage qui ne sert à rien et qui est "recommandé" par les médias GB : celui de la fibrillation auriculaire
5. Que l'Ordre des médecins se mêle des rapports de la Cour des comptes pas de l'organisation des soins.
L'Ordre des médecins propose une nouvelle organisation
du parcours de soins
5. Les survivantes et les survivants des cancers n'ont pas à être félicité.es pour leur courage.
6. Loni Besancon et Eric Topol sont dans un bateau : myocardites/péricardites post vaccinales.
- Y a plus de myocardites/péricardites post vaccinales dans certaines tranches d'âge
- Mais elles ne sont pas graves (les hospitalisations sont douces)
- Mais elles sont moins nombreuses que les m/p acquises post covid (qui sont plus graves)
- Circulez, y a rien à voir.
- Les chiffres les plus élevés ne sont pas pris en compte par Topol
- Si on fait une analyse comparative hommes/femmes, tranches d'âge par tranche d'âge de la façon dont Topol aime présenter les résultats de l'efficacité des vaccins (en chiffres relatifs et non absolus), cela donne ceci :
- Pour les 12-15, 16-17 et 18-29 ans : respectivement 6.2, 14.7 et 16.2 fois plus !
- Si on veut rester objectif, dans l'absolu, c'est peu, mais : quand même
7. Les recommandations de l'Union européenne pour le dépistage des cancers : une abomination ascientifique
Remplacer Oz par Raoult ! |
8. Pittet et le HCSP : pas de masques et du gel hydroalcoolique
Enfin :
jeudi 26 avril 2012
Retour du Kenya : les soins palliatifs, le berger Masaï et le patient de Mantes.
Il y a quelque temps je suis allé visiter une patiente dans un établissement parisien de gériatrie dépendant de l'Assistance Publique où sont regroupés plusieurs types de services : rééducation fonctionnelle post chirurgie orthopédique, soins de suite post hospitalisation aiguë et soins palliatifs.
La patiente va bien, on discute de tout et de rien et de son retour à domicile (qui s'est fait depuis), et elle me dit ceci : "Vous avez vu, je ne vais pas trop mal, je vais m'en sortir, mais ces pauvres personnes qui sont en phase terminale... comme je les plains..." Elle voulait parler des malades du service des soins palliatifs qu'elle avait repéré en arrivant.
Le fait est que dans tout le bâtiment des flèches de couleur indiquent la direction des divers services. Je ne me rappelle plus les couleurs de la mort. J'ai oublié. Mais j'y ai pensé avant même que la patiente ne m'en parle.
Les soins palliatifs sont certainement une invention formidable. Nul n'en doute. La façon dont, jadis (là, je suis optimiste), on traitait la douleur et les mourants dans les établissements hospitaliers, n'était manifestement pas parfaite (voir LA et ICI). Et les médecins qui ont choisi de s'intéresser à ces problèmes, les douleurs, la mort, ont permis à la société d'évoluer et à tout le monde d'y réfléchir.
Je jette un oeil sur Google. Je repère le site de la SFAP (Société Française d'Accompagnement et de Soins Palliatifs) qui, entre autres, soutient la campagne de publicité de la JALMALV qui signifie Jusqu'à la Mort Accompagner la Vie (je n'invente rien). La SFAP a de nombreux partenaires institutionnels et big pharmiens (Voir ICI). Les soins palliatifs, selon ce site, ne sont pas loin de l'euthanasie. Mais, surtout, quel esprit "humaniste" pourrait s'en formaliser, la SFAP dit Soulager la douleur est une obligation. "La loi dit le devoir et l’obligation pour les médecins à tout mettre en œuvre pour soulager au mieux les malades en fin de vie." Qui pourrait s'y opposer ?
Je me rappelle pourtant avoir lu un article de Marc Cohen dans Causeur (22 décembre 2008) que vous pouvez lire en intégralité ICI et dont j'extrais deux passages. Le titre me plaît assez : "Mourir dans la dignité ? Et pourquoi donc ?"
Voici le premier qui rapporte un propos de Houellebecq : “Ce qui me dégoûte, c’est qu’on veuille mourir dans la dignité. Et il me dégoûte encore plus que des parlementaires s’apprêtent à faire une loi pour m’y obliger : je ne veux pas mourir dans la dignité…”
Voici le second et qui me donne beaucoup de force dans la perspective de MA fin de vie :
"J’imagine que personnellement, si j’étais atteint d’une maladie incurable et furieusement douloureuse, je saurais me débrouiller pour trouver les pilules qu’il faut, ça ne peut pas être beaucoup plus dur que de trouver un exemplaire en bon état des Cadets d’Ernst von Salomon, et ça, je sais faire, ben oui.
Les soins palliatifs pourraient bien être l'aboutissement d'un rêve post moderniste confinant à un cauchemar aseptisé, commencerais-je par provocation, mais, au bout du compte, pour finir, il est possible, ajouterais-je, que nous n'en soyons pas loin. Une vie parfaite, sans douleurs (jamais les sociétés occidentales n'ont consommé autant d'antalgiques), sans déceptions (merci les antidépresseurs), sans chagrins (merci les anxiolytiques), sans délires (grâce aux psychotropes), une existence anhédonique en quelque sorte, voilà ce dont Big Brother a rêvé pour nous. Et nous en redemandons. C'est devenu la norme.
En cette époque de sécularisation de la société, les soins palliatifs sont une réponse laïque au problème de l'au-delà : les prêtres et autres rabbins, pasteurs ou imams sont remplacés par des saints laïques, des médecins accoucheurs de l'âme et du corps, étrangement réunis, qui n'auraient plus le droit de souffrir. Pour quoi souffrir ? Pour qui souffrir ? La loi interdit la souffrance et autorise la dignité de la mort.
Un ami médecin m'a raconté avoir téléphoné dans un service de soins palliatifs pour obtenir une place pour l'un de ses patients et que le ton de son interlocuteur médecin était tellement doux, tellement suave, tellement onctueux, qu'au bout d'un moment il avait été obligé de lui rappeler qu'il était le médecin, pas le malade.
Les soins palliatifs, indispensables, ne me faites pas écrire ce que je n'ai pas écrit, parachèvent l'entreprise sans cesse recommencée et inachevée de la médicalisation de la maladie, de la médicalisation de la vie et de la médicalisation de la société, avec respectivement les trois abus qui s'y rattachent que sont l'extension du domaine de la maladie (disease mongering), l'extension de la définition de la Santé (voir l'OMS) et l'extension de la main-mise de la société sur nos vie (l'obligation d'être dans la norme hygiéniste et l'idéologie de la prévention). Nous retrouvons bien entendu Illich en cette occasion.
Deux petits faits pour conclure :
1) Chez les Masaï du Kenya, quand un vieux va mourir, on l'emmène dans le bush, les Masaï n'aiment pas voir la souffrance conduisant à la mort, on attache une corde à son pied et, une fois par jour, depuis le village, on tire sur la corde. Si la corde "répond" on apporte eau et nourriture au mourant. Si la corde ne bouge plus, on cesse de le faire. Drôle de soins palliatifs traditionnels...
2) Pendant mes vacances, un de mes patients est mort à domicile. Il avait 88 ans. Dès mon retour, et la veille de l'enterrement, j'appelle sa femme qui me parle de lui avec enthousiasme et amour. Elle me dit ceci : "Nous l'avons gardé à la maison. Et chaque fois que j'entre dans la chambre, j'ai l'impression qu'il va me parler. Il est tellement beau, mon homme..."
(Photographie : enfants de Subukia. Docteur du 16)
samedi 13 juillet 2019
Les maîtres du monde de la médecine.
Le docteur parle de moi (et d'autres).
- La médecine est une science
- La médecine est une entité qui se développe hors sol dans des tours d'ivoire satellisées avec une orbite géostationnaire au dessus des lieux saints de la médecine : Jolimont, Harvard, Johns Hopkins, la Pitié-Salpétrière...
- La médecine est axiologiquement neutre (au sens weberien de l'expression) c'est à dire qu'elle fonctionne en autarcie intellectuelle et qu'elle délivre ses messages neutres et scientifiquement fondés par l'intermédiaire d'agences gouvernementales, de sociétés savantes, de conférences de consensus, de congrès scientifiques et de formation médicale continue, sans compter l'inénarrable Conseil National de l'Ordre des médecins et ses succursales départementales
- La méritocratie à vie est une valeur intangible (même pour les neurologues qui ne sont pas chefs de service dans La Mecque de la neurologie à savoir La Pitié-Salpétrière où les dits neurologues tournent sept fois en rond autour des pierres noires des instituts privés qui ont rendu hype ce vieil hôpital parisien) : le régime des experts qui "disent" la médecine comme d'autres disent le droit
- L'esprit critique doit être réservé au cénacle médico-médical, enfin à l'Olympe académico-universito-hospitalo-public : nos légitimes interrogations doivent rester dans l'entre-soi, ne pas être publiées surtout au cas où elles pourraient nuire à l'avancement...
- Le capitalisme néo-libéral est indépassable du moment qu'il tolère encore l'hôpital public (rassurons-nous le pays de l'ultra libéralisme, les Etats-Unis d'Amérique, tolère encore ces institutions...)
- Les laboratoires pharmaceutiques sont incriticables car qui les critique est a) un.e dangereux gauchiste, b) un complotiste (toute personne qui utilise l'expression Big Pharma est un.e dangereux complotiste), c) un.e médecin qui a perdu ses repères (les autres ont trouvé leurs repaires), d) un.e doux rêveur qui nie la réalité du monde
- L'assistanat social (on aimerait en connaître les limites car l'hôpital public est avant tout pour les contribuables un abyssal assistanat social, pas en faveur des patients, non, en faveur des soignants) est une horreur de gauchistes anti scientifiques (voir le point 3.)
- Les citoyens/patients/malades sont des khons dont le seul intérêt, lorsqu'ils ne posent pas de lapins, est de remplir les consultations et les lits des hôpitaux.
- Les khons citoyens/patients/malades doivent aussi fermer leurs gueules, qu'on ne vienne pas parler de décision partagée, ils doivent fermer leur gueule pour que les relents nauséabonds de la société profane n'atteignent pas les blouses immaculées (avec quelques taches propres) des porteurs de macarons rouges
- La médecine étant une science dure (cf. point 1.) les sociologues, les philosophes, les épistémologues, doivent passer leur chemin, sans compter les romanciers qui auraient l'indignité de parler de choses qu'ils ne connaissent pas, la médecine appartient aux médecins, non, la médecine appartient aux professeurs...
- Il est possible, la science est en perpétuel progrès, que l'on puisse délimiter, trouver, biopsier, la zone du cerveau responsable de ce syndrome intellectuel qui n'a bien entendu rien à voir avec la maudite société, ce sont des putains d'aires neurologiques apparues dès la naissance, le milieu social on s'en moque, pas plus que la culture, pas plus qu'il n'existe pas, répétons-le encore, de médecine de classe, de médecine de pouvoir, de médecine sexiste, de médecine raciste, de médecine mondaine, de médecine de merde, et donc, des IRM fonctionnelles associées à des prélèvements stéréotaxiques permettront de délimiter le syndrome des âmes pures médicales volant dans l'éther glorieux de la médecine triomphante et scientiste
- L'étape suivante sera, dans les hautes sphères intellectuelles, de trouver le moyen de détecter précocement, dès la maternelle sans doute, grâce à un test simple, fiable, sans effets indésirables (j'oubliais que les tests de dépistage n'ont, selon l'Académie de Médecine, jamais d'effets indésirables), les individu.e.s qui pourront sans effort adhérer aux 12 points précédents. On imagine donc un PACES où l'on donnerait les sujets aux testés positifs et où l'oral serait une formalité tentant cependant de pallier les défauts inhérents de sensibilité/spécificité du dit test (une enveloppe sous la table ?)... Quel monde merveilleux.
mardi 25 avril 2017
Santé publique : fermons McDo et consorts.
J'entends déjà le crétin qui argue "Oui, mais y a des salades" : un îlot de fraîcheur dans un océan de merdre. Enfin, les salades McDo, c'est de la salade ?
Les McDos sont l'exemple parfait du capitalisme hors sol, du marketing planétaire, des bas salaires, du mi-temps contraint, des étudiants qui doivent payer leurs études (et qui ne les finissent jamais, terminant avec une chemise d'équipier ou de superviseur gorgée de gras, de cholesterol et de coca-cola), des systèmes de management alakhon (l'équipier du mois), du travail sept jours sur sept et à pas d'heures le soir, de la financiarisation, de l'optimisation fiscale, et cetera. L'entreprise McDo fait grosso modo 25 milliards de CA et 4,5 M de bénéfices en France et soustrait au fisc français entre 390 et 714 millions d'euro (voir ICI). Les employés de McDo ne mangent plus de McDo, c'est dire.
Zut.
C'est de la calorie, c'est de la graisse, c'est de l'odeur, c'est de la nourriture industrielle, sans valeur nutritive, la viande n'est pas de la viande, le poisson (?), c'est un nid à obésité, un nid à surpoids, un nid à cholestérol, un nid de sucre, un nid à chirurgie bariatrique. Et, selon le théorème de PAG (il se reconnaîtra) les gros mangent aussi dans ces établissements.
"Ouais, mais c'est sympa d'y aller manger avec les enfants" : les menus enfants avec les cadeaux à deux balles en plastique mortifère, avec les pubs Disney en sus et la bouffe dégueu mais qui leur fait plaisir... Voilà une éducation à la nutrition qu'elle est bonne !
Super Size Me !
"Obésité et rein" a commencé Perruche en Automne (ICI), puis Hippocrate et Pindare a (ont) répondu LA et il y a eu des dialogues inter blogs dont celui-ci : LA.
On y trouve les mêmes débats idéologiques que pour le reste des problèmes sociétaux.
Grosso modo, la tendance respectable est de dire que les citoyens en sur poids ne doivent pas être stigmatisés, parce qu'ils n'y sont pour rien.
(Conflit d'intérêts : IMC perso = 23,5)
Bon, il n'y a donc plus qu'à tirer l'échelle.
Il ne reste plus qu'à prescrire des médicaments en suivant les conseils de l'inamovible commentateur santé de France Télévision : ICI.
Les blogueurs disent tous (et les commentateurs itou), et dans un unanimisme touchant, que, vous me suivez, comme il n'est pas possible de faire maigrir les gens, au long cours, il faut aborder le sujet (c'est le côté ambigu moral et faux cul : on ne pourra pas m'accuser d'avoir évité la question mais on ne pourra pas m'accuser de faire de la grossophobie) et ne pas stigmatiser, comprendre, accompagner, et cetera (l'expression la plus belle : envisager les raisons cachées).
Dominique Dupagne avait souligné que l'Education nationale avait été livrée aux betteraviers : LA. Il nous avait mis sur la piste.
La tendance générale de l'addictologie moderne c'est "Comme les choses nous échappent, feignons de les avoir organisées" et il en est ainsi de l'addiction à la nourriture, à l'alcool, au cannabis ou au tabac. Pour le reste : pareil (cocaïne, et cetera). Est-ce qu'un McDo peut être considéré comme une salle de consommation à moindre risque de nourriture addictive ?
Vu la vague libertarienne aux US, relayée par l'extrême gauche ultra libérale en France et par les ultra libéraux économiques, il y aura bientôt des McCan et on viendra y fumer le "pot" en famille en parlant du progressisme et des méchants réactionnaires défenseurs de la culture hétéro-patriarcale-blanche.
Un certain nombre de confrères construisent même des théories physiopathologiques pour dire que l'obésité ne rend pas malade, que le gras n'y est pour rien, que le sucre itou, que la quantité de nourriture ingérée non plus, et qu'il faut changer de "paradigme". Ils "déconstruisent" la grossophobie causale.
Mouais.
Là, il faut que je m'accroche aux branches du raisonnement.
Les citoyens raisonnables selon la théorie libérale qui en fait des individus pensants isolés, ne choisissent ni de ne pas être en sur poids, ni d'être en sous poids. C'est comme ça. Ils ne se déterminent qu'en fonction de leurs intérêts.
Les citoyens éclairés par la théorie des Lumières clament la liberté individuelle : ils ont le droit de faire ce qu'ils veulent, de se mettre en danger, à condition qu'ils ne mettent pas les autres en danger.
Mouahahaha.
Les autres héritiers, ceux de la révolution française et de mai 68, au nom de la liberté individuelle, du droit des intersectionnés, poussent des cris : il ne faut pas interdire, il est interdit d'interdire, c'est une source de plaisir, mais surtout : il ne faut pas stigmatiser les minorités (mais nous sommes en train de rendre le surpoids majoritaire).
Faisons un tour par l'anthropologie et... le déconstructionnisme.
Les McDos sont l'exemple parfait du déconstructionnisme néolibéral.
Il y a un certain nombre de personnes (de gauche, pensent-elles) qui affirment que le capitalisme néo libéral mondialisé est conservateur, qu'il se situe du côté de la réaction morale confessionnelle (églises, mosquées, temples, synagogues), du conservatisme sociétal, du sabre, du militarisme, de la guerre des civilisations. Quelle erreur ! Le capitalisme néo libéral se nourrit de profit, d'accumulation de profits et se moque de la morale, fût-elle hétéro-patriarcale-blanche : aux US ce sont les Afro-américains qui consomment le plus de junk food. Le capitalisme se moque donc, sauf si cela lui permet de gagner de l'argent, des pro vies ou des anti mariages gays, il est pour la circulation des idées, des capitaux, des personnes, pour le mouvement perpétuel qui permettra aux riches d'être toujours plus riches et à la planète d'être dévastée.
McDo est au centre du déconstructionnisme néo libéral de droite et de gauche ou moralement neutre (le libertarianisme).
Car le succès de McDo tient aussi à sa puissance disruptive comme disent les cuistres partisans de la civilisation facebookable et/ou iphono/googleisée, le parti des GAFA.
La disruption McDo tient à ceci :
1) on a le droit de manger avec les doigts (et les sociologues déconstructurants sautent sur la table gluante du fast-food en hurlant : "A bas les valeurs bourgeoises coercitives" (manger à table avec sa famille réunie, mettre la table, faire à manger, ranger les couverts dans le lave-vaisselle) ;
2) on a le droit de manger à toute heure (les mêmes sociologues, ceux qui vous parlent à longueur de livres du vivre ensemble, louent cette liberté fondamentale du "Je mange quand j'ai faim" et retrouvent dans un élan parfait les pédiatres nutritiologues qui préconisent pour le nouveau-né et le nourrisson de donner à manger à la demande) ;
3) on a le droit de rendre moralement convenable une pratique détestable pour la santé publique.
Oups
Il est temps de déconstruire le déconstructionnisme.
Pourquoi les gens vont chez McDo ?
En raison du conditionnement publicitaire (il faudra revenir sur les "maquereaux" de la publicité, ces hommes et ces femmes idéologiquement neutres qui seraient capables de tuer père et mère pour avoir le budget McDo ou Coca-Cola et pour pouvoir convaincre les pauvres et les déshérités de manger et de boire de la merde), de la propagande institutionnelle (la junk food, c'est bon pour l'économie, pour l'emploi, pour la croissance, il y a même des économistes fous qui ont considéré le prix du Big Mac comme, je cite, un indice fruste de parité du pouvoir d'achat, voir ICI), du consumérisme, du ça, de la crédulité des masses et du pouvoir sans limites du capitalisme financiarisé.
La déconstruction du déconstructionnisme passe par la remise en cause du système mondialisé qui nous gouverne.
Stop.
Tu vas trop loin : le système capitaliste est notre horizon indispensable, incontournable, indéboulonnable, c'est la nature.
Mais surtout : la fermeture des McDos va entraîner des émeutes, les sevrés de Big Mac et autres wopper, vont faire la queue aux urgences, vont agresser des vieilles dames pour leur voler leur porte-monnaie, il va y avoir des grèves... Et big pharma va inventer le McDofène qui va permettre aux McDomanes de pouvoir continuer à consommer des Big Mac dans des limites raisonnables fixées par l'OMS.
Pour finir, voici une phrase de Fredric Jameson : "Il est plus facile de penser la fin du monde que la fin du capitalisme."
lundi 3 juillet 2023
Un congrès à Chicago (ASCO ou American Society of Clinical Oncology) : Panem, circences et sex. 19.
Un congrès à Chicago (ASCO 2023)
19
Panem, circences et sex.
La professeure Marie Carmichael n’en peut plus d’Ursula et des plaisanteries sur Ursula. Cette atmosphère de mecs impudents, de mecs qui trouvent que c’est normal, « on est quand même des carabins, on a une réputation à défendre… on nous emmerde sur tout… les fresques dans les salles de garde comme la drague au débotté… nous sommes des adultes consentants… » On la prend pour une pisse-froid, une coincée, une mal baisée, et tout le tralala bien connu. S’ils savaient combien elle s’en moque à titre personnel et combien elle en souffre pour les étudiantes et les femmes médecins. Elle est assise à côté d’une jeune chef de clinique qui va présenter un papier sur le dépistage du cancer du sein dans une section annexe du congrès. Elles ne participent pas à la curée générale et les mecs s’en foutent.
Nombre de futurs congressistes qui n’ont rien à présenter au congrès, la majorité, les invités comme futurs prescripteurs ne pensent qu’à profiter de la situation d’invités. Les trois sujets qui les préoccupent : vont-ils avoir, pour les hospitaliers comme pour les privés, des ouvertures professionnelles ? Vont-ils avoir des ouvertures sexuelles pendant cette petite semaine ? Vont-ils pouvoir profiter, loger dans un hôtel top classe, se taper de bons restaus, sortir dans des bars ou des boîtes et picoler ? C’est une sorte d’échappatoire à leurs vies normées et remplies. Car ces privilégiés, il suffit de regarder leurs comptes en banque respectifs, et notamment pour les libéraux, leurs revenus non commerciaux pour l’année dépassent les trois cent mille euros, bossent. Bossent tard et n’ont pas affaire à des malades faciles parce que leurs malades meurent plus que les autres.
Il faut donc décompenser. Déconner. Raconter des conneries. Faire des plaisanteries sur les filles, déjantées et allusives, franchement vulgaires, leurs femmes seraient horrifiées ou non. Le congrès s’amuse.
La professeure Carmichael est considérée comme une extra-terrestre qui ne saute jamais en l’air dans les pots de service, qui ne pousse pas des cris quand un malade va mieux, qui ne fait pas la maligne devant les malades, qui reçoit les familles avec autant de bienveillance que possible et qui ne prend pas le petit personnel pour de la merde en boîte. On sait qu’elle est réservée, elle ne parle jamais de sa vie privée, de ses copains comme de ses copines. Mais son secret est celui-ci : elle est la copine de la chef de clinique qui est assise à côté d’elle et elle va en profiter pendant le congrès comme un vulgaire Milstein avec sa secrétaire.
Elle ignore pourtant qu’Edmée Vachon, en saluant tout le monde d’un bout à l’autre de la cabine, a vu et compris le manège. Elle n’oubliera pas.
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