mardi 12 juillet 2022

Une gonalgie bien ordinaire. Histoire de santé publique sans consultation 5.

Le genou de Claire. Eric Rohmer. 1970


Monsieur A, 83 ans et est en pleine forme (il est cependant traité, selon lui, pour une hypertension légère à modérée, il reçoit une statine, mais je n'en sais pas plus car il n'y a pas eu de consultation, c'est un voisin, je n'ai pas insisté). 

Il a marché un peu plus longtemps que d'habitude et il a désormais mal au genou. Non seulement il a mal au genou mais son genou est gonflé.

Son médecin traitant ne peut le recevoir avant quelques jours.

Sa femme est inquiète.

Il se rend aux urgences de l'hôpital public.

Il y passe six heures.

Les urgences, pardon de vous déranger, c'est quand même un lieu à risque majeur d'infection nosocomiale et, en cette période de pandémie, malgré la vaccination complète de Monsieur A (2 + 2 Pfizer), il vaut mieux ne pas trop y séjourner.

Quoi qu'il en soit, pendant ces six heures, il a eu droit à des radiographies simples du genou ("y a de l'arthrose") et à un diagnostic de sortie qui est, je cite, "épanchement de synovie". Un peu de paracétamol, ajoute-t-il.

On lui a conseillé de consulter un rhumatologue et on lui a prescrit une IRM du genou.


Rien ne va dans cette histoire de santé publique sans consultation.

Rien.

(Il est possible à ce stade de commencer par engueuler le patient et son entourage : on ne va pas aux urgences pour un genou qui fait mal et qui est gonflé)

(On peut aussi engueuler le médecin généraliste qui n'a pas assez de plages d'urgence pour recevoir un patient de 83 ans qu'il connaît pour un genou mécanique qui fait mal et qui est gonflé)

(On peut aussi engueuler la structure publique d'urgences qui n'a pu "trier" à l'entrée et dire à ce patient qu'il risquait plus à attendre six heures aux urgences dans un lieu clos mal ventilé que de souffrir quelques jours en attendant un rendez-vous chez son médecin traitant)

(On peut aussi engueuler le gouvernement pour ne pas donner assez de moyens à l'hôpital et aux urgences pour pouvoir recevoir en urgences un vieux monsieur qui a mal au genou)

(On peut aussi engueuler la médecine libérale qui est défaillante parce que les médecins ne veulent plus travailler, surtout les femmes, ne veulent plus prendre de gardes et ne veulent plus assumer le fait de recevoir de façon urgente un "épanchement de synovie")

(On peut aussi engueuler les pouvoirs publics de ne pas contraindre les médecins libéraux, à qui, je cite, "on a payé les études", à être disponibles 24/24, 7/7, 365/365, pour recevoir un patient épanché de synovie)

(On peut aussi s'étonner que le patient sorte des urgences avec le conseil d'aller voir un rhumatologue et de pratiquer une IRM)

(On peut encore s'étonner du degré de méconnaissance de la santé publique de base pour un citoyen qui fait partie des Catégories Socio-Professionnelles supérieures. Il est possible également que notre épanché de synovie ait parcouru un article écrit par un médecin attiré par les lumières des réseaux sociaux et des magazines de vulgarisation scientifique ou par un journaliste épris de cardiologie voulant sauver son prochain pour garder son poste de pigiste en éblouissant son employeur rapportant que les douleurs isolées d'un genou, le gauche, celui du coeur, peuvent être un signe précoce d'infarctus du myocarde chez les personnes âgées où les symptômes sont si différents et trompeurs...)

Rien ne va donc mais ainsi va le monde.

Et ce, d'autant plus, et là je suis coupable, que rétablir la "vérité" ou commencer un semblant d'information avec son voisin de boulangerie sur les "vrais" enjeux de la santé publique en France, non seulement ne servirait à rien mais plongerait encore plus notre octogénaire dans le doute qui le conduirait, la prochaine fois, non pas à se rendre chez son médecin traitant ou chez un rhumatologue, mais chez un ostéopathe ou un naturopathe. 

Je n'ai donc rien rétabli du tout, j'ai rassuré.

Cela dit, consulter ce que raconte l'assurance maladie sur les gonalgies (ICI), aurait pu conduire notre Monsieur A à vérifier que sa convention obsèques est de qualité.


dimanche 10 juillet 2022

Bilan médical du lundi 4 juillet au dimanche 10 juillet 2022 : Variole du singe, Innovation, Médecine patient-centrée, complications du covid chez l'enfant, un influenceur qui dépiste mal, vaccins anti covid, Damien Barraud, Mépris des MG

 
Yves Hirschfeld (2022)

Un Pu-PH en forme olympique



"Variole du singe" : un cas d'école pour la Loi Inverse des Soins.

Un billet de @MartetChristoph dans Komitid (ICI) souligne l'urgence de s'intéresser à la très mal nommée "variole du singe". Plusieurs sujets sont traités : 1) le fait que cela touche surtout des hommes gays et bis, 2) l'absence de visibilité sur la disponibilité du vaccin, 3) la nécessité d'aller vite et de cibler les population pré citées et notamment les utilisateurs de la PrEP, 4) les mesures barrières (et y compris la diminution des partenaires sexuels).

Mais.

D'autres voix se font entendre pour ne pas stigmatiser les gays et bis et, je cite, "pour ne pas refaire les erreurs commises lors du sida". 

OK. 

Mais : 1) on ne connaît pas l'efficacité du vaccin antivariolique contre la variole du singe, 2) on ne connaît pas les quantités de stock de vaccin, 3) il vaudrait mieux, donc, au risque de stigmatiser, et tout en donnant des conseils barrières, commencer par administrer le vaccin aux groupes les plus à risque (et ne pas commettre les mêmes erreurs que pour la vaccination anti Covid où les populations les plus à risque n'ont pas été suffisamment ciblées) puis, en fonction de l'extension de l'épidémie et des stocks disponibles, étendre à la population générale...


Quand seulement 14 % des molécules (en oncologie et en onco-hématologie) approuvées par la FDA ont remplacé un traitement standard.

Un article de Benjamin DJ et al (LA) rapporte qu'entre 2016 et 2021 270 molécules ont été approuvées par la FDA. Les auteurs remarquent que 28 molécules (14 %) ont remplacé un traitement standard (innovation thérapeutique), que 32 molécules (15 %) sont devenues des équivalents du traitement standard (me-too), que 61 (29 %) étaient des adjuvants et 86 (42 %) des traitements de dernière ligne (niches ou en plus).

Cela signifie que l'innovation ne représente que 14 % de la production des laboratoires.


Remettre en cause la médecine patient-centrée qui serait la cause de (tous) les maux. Pour, sans rire, demander de revenir à une médecine médecin-centrée. Panique.

La "crise" de la santé publique, la "crise" de l'hôpital, la "crise" des urgences, serait liée, selon certains (je ne les cite pas pour ne pas leur donner une visibilité inappropriée) au fait que la médecine, science pure et dure (comme si la médecine était une science), serait trop tournée vers le patient !

Au nom de théories fumeuses dans le style s'occuper d'abord des patients, c'est, je cite, "un langage de bonne soeur", ou ce serait comme "le client a toujours raison"...

Les médecins cherchent toujours des boucs-émissaires pour excuser leurs erreurs : les médecins hospitaliers accusent les administratifs, ne cessent d'adresser des piques contre la ville (les libéraux) mais c'est donner trop d'importance à ces pelés et ces galeux, et, désormais, ils ont vraiment un cerveau rétréci, ils s'en prennent aux malades. 

Le rêve des hospitaliers : un hôpital sans malades.

Voir un article que ces médecins new scientists (l'EBM sans les patients) devraient lire : ICI.


En résumé : les médecins sont amenés à faire quotidiennement des choix entre leurs propres intérêts, les intérêts de leurs patients et les intérêts de la société qui doit préserver les ressources médicales. Pour surveiller ces choix, la société compte à la fois sur l'éthique professionnelle, la gestion bureaucratique et le contrôle. 

On peut exprimer cela autrement : l'éthique des praticiens, dans le cadre de préférences sociales qui les lient entre eux, voudrait qu'ils placent l'intérêt des patients avant leurs propres intérêts (altruisme) et qu'ils délivrent les ressources limitées dont ils disposent de façon efficiente (selon un principe d'égalité et d'efficience).

L'étude en question montre qu'ils sont deux fois plus altruistes qu'un groupe social équivalent mais que pour les critères égalité/efficience, il n'y a pas de différence. Les étudiants en médecine attachent plus d'importance que les médecins praticiens.

Cependant, il ne faudrait pas que les décideurs en santé publique comptent trop sur le professionnalisme des médecins pour assurer l'efficience.

Quand il devient très difficile, chez l'enfant, de savoir si les inflammations post covid et/ou les décès dus au Covid sont un mythe ou un problème de santé publique.

Nos amis les ZéroCoviders, nos amis les Faiseurs de Peur (Fear Mongers), nos amis les "précautionneux" (la nouvelle catégorie sociologique découverte et/ou inventée par A&L --Antoine et Laure, éditions Slate), nos amis les Faiseurs de Maladie (les Disease Mongers)...

... Nos amis les rassuristes, les signataires de la déclaration de Barrington, les darwinistes sociaux, les eugénistes (et climatosceptiques)...

... ont l'art consommé du cherry-picking, c'est à dire de ne retenir, éventuellement de lire, et de ne citer que les articles (et quelle soit la qualité de la publication car la lecture critique se dissout dans l'idéologie) qui vont dans leur sens.



Une étude islandaise très inconfortable pour tout le monde sur les hospitalisations des enfants : 

Cette étude (ICI) a suivi tous les enfants islandais infectés par le covid (1749) pendant les 3 premières vagues du Covid (entre le 28/02/20 et le 31/08/22). Aucun enfant n'a eu des symptômes sévères, 81 (4,6 %), 1287 (73,9 %), et 374 (21,5 %) ont présenté respectivement  des symptômes modérés, légers et pas de symptômes.
Aucun enfant n'a été hospitalisé.
La source de l'infection a été le foyer familial dans 65 % des cas.

Des données françaises d'avril 2022 donnent des informations différentes :

ICI


Mais volontiers moins alarmistes que celles fournies par les sites Faiseurs de peur.


Covid-long

Ce commentaire (LA) d'un article danois (ICI) résume assez bien la situation sur le Covid long : l'article (épidémiologie rétrospective) est rassurant mais la méthodologie est loin d'être parfaite. Il rapporte également des faits contradictoires.

Mais, encore une fois, la "vraie" question est celle-ci : si le Covid long est un problème de santé publique, existe-t-il un essai contrôlé montrant que la vaccination sera la solution ?

Shamez Ladhani se pose des questions : ICI. Et Noah Louis-Ferdinand lui répond : LA.

La disparition mystérieuse des MIS-C

Alasdair Munro raconte comment le Multi-system Inflammatory Syndrome a quasiment disparu des radars : LA.


Pourquoi ? Et selon l'auteur : 
  1. Le virus a changé. On ne sait pas pourquoi les enfants attrapent le MIS-C mais il est possible que les nouveaux variants avec un changement de la protéine spike entraînent moins cette complication
  2. Les enfants ont changé : en GB tous les enfants ou presque ont attrapé le Covid ; une étude épidémiologique (peu robuste) montrerait que chez les enfants entre 12 et 18 ans la vaccination par 2 doses de Pfizer diminue le nombre de MIS-C (LA) ; il existerait une double immunité (naturelle et vaccinale et combinée) qui empêcherait la survenue de nouveaux MIS-C 

C'est également le cas pour la nécessité ou non, par exemple, de vacciner les enfants de moins de 5 ans.


Mais aussi pour les taux de myocardites/péricardites post Covid chez les adultes.

(Une étude israélienne rétrospective portant sur 196 992 adultes publiée en avril 2012 (entre 03/2020 et 01/2021) (ICI), avec un groupe contrôle apparié non covid de 590 976 sujets montre :
5 patients post-COVID-19 ont présenté une myocardite (0.0046%) et 11 patients une péricardite (0.0056%) et dans le groupe contrôle : respectivement 27 (0.0046%) et 52 (0.0088%), le sexe (masculin) et une pathologie vasculaire périphériques étaient plus souvent associés à la péricardite, Conclusion : cette étude n'a pas retrouvé d'augmentation de l'incidence de myocardite/péricardite chez les patients ayant contracté le covid.

Mais il y a aussi des articles (déjà plus anciens) qui disent le contraire : LA
Cet article compare les taux supplémentaires de myocardites/péricardites chez les patients ayant eu le covid vs les sujets ayant été vaccinés : 40 myocardite vs 10 respectivement pour 1 M de covidés vs 1M de vaccinés.

Il y a même un article Qatari (preprint) qui parle de l'efficacité de l'immunité naturelle.


Trop beau pour être vrai ?
L'étude menée sur deux ans montre que les réinfections sont le plus souvent non sévères.

Eglise de Dépistologie : un influenceur raconte n'importe quoi sur le dépistage du cancer du sein.

Voici ce qu'il écrit : 

"Le cancer du sein est la principale cause de mortalité par cancer chez les femmes.
1 cancer du sein sur 5 touche les femmes de moins de 50 ans.
Plus tôt il est détecté tôt mieux il se soigne.
A partir de 25 ans un examen clinique de vos seins (palpation) par un professionnel de santé est recommandé tous les ans."
Bla-bla-bla.

Le procédé est toujours le même : mélanger des faits et des non faits.

Il a eu son diplôme de médecin dans une pochette surprise ou il a suivi les cours de l'Eglise de Dépistologie qui est à la médecine ce que la scientologie est à la religion : une entreprise de décérébration.

Pour avoir des informations non erronées sur le dépistage du cancer du sein par palpation ou par mammographie, voir le site Cancer Rose LA.

Ras-le-bol des courbes explicatives mono causales !


Désormais, quand vous croisez quelqu'un dans la vraie vie comme dans la fausse (Twitter), iel défend ses positions sur les "vraies" causes de l'échec/réussite de ses théories. 

Dans le débat d'idées et pour s'en tenir à masques/aération/vaccination/distanciation/lockdown/traçage (et n'oubliez pas que pour chaque item il existe des sous-sections) vous pouvez être certain (il faut bien être certain de quelque chose) que votre interlocuteur/trice va vous envoyer dans les tympans les mots Japon, Corée, Nouvelle-Zélande, Singapour, Islande, Italie, GB, US, Brésil, et cetera, avec une courbe expliquant tout et vous renvoyant dans les cordes.

Misère de l'infographie et infographie de la misère.

Rappel : le score calcique ne sert à rien.

Le CNGE nous l'avait dit. On le rappelle : voir LA. "Aucun élément de preuve ne suggère qu'il peut avoir un bénéfice clinique." Fermez le ban.

Rappel : la visco-supplémentation par acide hyaluronique pour les genoux arthrosiques ne fait pas mieux qu'un placebo.

L'accumulation de données n'y fait rien : les orthopédistes et les rhumatologues continueront de le faire.

Voir une revue récente dans le British Medical Journal : ICI.

Qui confirme les données de 2012 : LA.

Les vaccins anti Covid : efficacité, évanescence.

Une nouvelle publication EPIPHARE (ICI) (dont on connaît les limites méthodologiques, à savoir qu'il s'agit de comparaisons épidémiologiques rétrospectives entre groupe de sujets et de patients et non d'un essai prospectif comparatif contrôlé comparant l'efficacité d'une dose de rappel vs placebo entre deux ou plusieurs groupes de patients) montre une efficacité de 80 % (hospitalisation) (delta et omicron) et de 72 % pour omicron pour la première dose de rappel (booster 1) des vaccins ARNm.

Rappelons que ce papier ne parle pas de diminution du risque absolu mais que, surtout, le critère de substitution "hospitalisation" est une daube absolue. Sans compter la signification d l'hospitalisation : service covid, soins intensifs, réanimation.

OK.

Et voici les données (pré print) d'une étude italienne de la littérature (LA) (c'est son défaut) qui montre que vis à vis d'omicron la deuxième dose de vaccin n'est efficace qu'à 70 % après la deuxième dose, et qu'après la troisième dose de vaccin  moins de 20 % et 25 % d'efficacité sur, respectivement, l'infection et sur l'apparition de formes symptomatiques 9 mois après le booster.

Vous voulez des nouvelles de Damien Barraud ? Le voici qui parle de Raoult et ac (acolytes) sur Sud-Radio avec son franc-parler et son autorité habituelle.


C'est ICI, proposé par Alexandre Samuel @AlexSamTG

Il y a plusieurs enregistrements que l'on peut consulter les uns après les autres.
ccc

Voici comment le CHU de Montpellier voit la médecine générale (mépris) : 







Pause.

jeudi 7 juillet 2022

Le masque. Histoire de santé publique sans consultation 4.



Je croise une dame d'un certain âge en train de faire son footing (on ne peut pas dire qu'elle court vraiment ni qu'elle marche vraiment, elle est entre les deux) dans une grande allée ombragée du parc de Versailles. Je l'ai vue arriver de loin.

Je cours moi-même (un peu plus que du footing, mais pas loin) et je n'ai rien à vous proposer : pas de moyenne horaire, pas de distance, pas d'iPhone chargé sur une application course, pas de montre connectée, pas d'iPhone du tout, pas de musique dans les oreilles, j'écoute le bruit de mes foulées (mais pas de sentimentalisme, pas d'ego sur dimensionné, je ne fais pas de sport, je m'entretiens le physique et le mental en courant, je n'ai jamais été bon, toujours moyen, plutôt dans la dernière moitié de la classe, pas en première division, mais j'aime courir. On pourrait dire, par analogie, les analogies étant la figure de style la plus médiocre qui soit, que je suis un grand lecteur qui aime lire depuis toujours les romans à la mode et les essais grand public (je ne donnerai pas de nom pour ne fâcher personne), je suis donc un médiocre coureur qui n'a jamais fait mieux, même au temps de ma jeunesse que du 12 à l'heure pendant une demi-heure... Mais j'en suis plutôt à 9 à l'heure en ce moment.

Quoi qu'il en soit, il est vraisemblable que cette dame d'un âge certain, il fait tiède, a entre 60 et 67 ans. Elle porte une casquette, sa tenue est Décathlon pur jus (je ne vous ferai pas une période sur la mondialisation, l'uniformisation et la raréfaction des marques, et tout le tintouin car cela nous emmènerait très loin de la santé publique et ne manquerait pas de m'attirer les foudres de nombre de personnes véhémentes... quoique la mondialisation, l'uniformisation et la raréfaction des marques, et tout le tintouin soient très proches de la santé publique...).

La dame est essoufflée.

A part moi qui vais la croiser à bien dix mètres d'elle, il n'y a personne aux alentours.

Eh bien, cette dame respectable, et sans doute respectée, porte un masque chirurgical pour courir.

Quelle drôle d'idée.

Qui a bien pu lui faire croire qu'il était nécessaire, intéressant, productif, sain, hygiéniquement correct, covidement compatible, de porter un masque en courant dans les allées désertées du parc de Versailles ?

Qui ?

Quel.le est cet influenceur.e anonyme ?

Qu'iel se dénonce.


mardi 5 juillet 2022

Respecter les prostates ? Histoire de santé publique sans consultation 3.

Simon Hantaï (1922 - 2008)


Je croise Monsieur A, 77 ans, dans la rue, le salue et nous nous arrêtons pour parler.

Monsieur A est boucher charcutier et je suis son client depuis plus de trente ans. Il vend des produits de choix.

Cet homme a beaucoup travaillé dans sa vie, il travaille encore mais il a laissé les rênes de l'entreprise à son fils et à sa belle-fille.

Je trouve Monsieur A amaigri. Mais je ne dis rien.

Il sait que je suis médecin.

"Bonjour, comment ça va ? Vous avez l'air fatigué...
- Ah, j'ai été opéré de la prostate... et après l'opération j'ai beaucoup saigné.
- Mince... Cela arrive...
- Oui, mais là, j'ai été servi."
Je ne sais pas comment poser la question du pourquoi du comment de l'intervention.

" Vous étiez très gêné ?
- Oui, je pissais quatre à cinq fois par nuit. Et dans la journée cela devenait difficile, les déplacements en voiture devenaient difficiles. Le chirurgien m'a dit que j'avais une énorme prostate...
- Vous aviez combien de PSA ?
- C'était peu élevé. Six ou sept.
- Ah...
- Mais, surtout, j'ai été opéré par voie haute.
- Par voie haute ? Ah... Et pourquoi ?
- Parce que le chirurgien m'a dit qu'il y avait un truc bizarre à l'IRM, qu'il voulait voir.
- Et vous avez eu des biopsies ?
- Oui, elles sont revenues négatives. Mais j'ai été opéré dans un très bon service, par un professeur qu'on m'avait conseillé, en privé, bien entendu, ils ont été formidables. Je suis quand même resté trois semaines...
- Hospitalisé ?
- Oui. Le temps m'a paru long.
- Et vous avez un traitement ?
- Non. Enfin, si, du proscar. Je dois faire redoser mes PSA dans trois mois, c'est tout.
- Et vous allez moins souvent pisser ?
- Oui. C'est beaucoup mieux."

Je n'ai pas demandé à Monsieur A, nous sommes dans la rue et je ne le connais pas assez, s'il bandait encore...

Cette histoire de non consultation est navrante.

Il est clair qu'une non consultation dans la rue ne cadre pas avec les données de la science. Le patient me dit ce qu'il a envie de me dire, il se trompe peut-être sur les chiffres de PSA, il rapporte les propos du chirurgien qui ne lui a peut-être pas du tout dit ça. Il me cache un cancer dont il n'a pas envie de me parler. Et cetera.

Mais l'histoire qu'il me raconte compte quand même. C'est quand même son ressenti.

La cascade d'examens complémentaires et d'événements n'est malheureusement pas banale. Mais quand on met le doigt dans l'engrenage...

Et, en plus, que demande le peuple ?, Monsieur A est content de sa prise en charge.

Monsieur A me demande : "Vous avez quel âge ?" - Presque 70. - Et votre PSA ? - Je ne sais pas. - Je ne vous crois pas. Vous êtes médecin, vous devriez vous tester... Vous avez vu ce qu'il m'est arrivé..."

Je m'arrête là. Je ne vais quand même pas lui raconter ce que je pense du PSA, comment pourrait-il ne pas mal le prendre ? Et en quoi cela lui servirait pour qu'il aille mieux ? 

1967

PS : Monsieur A ne s'appelle pas Monsieur A. Il n'a pas 77 ans. Il n'est pas boucher.

dimanche 3 juillet 2022

Bilan médical du lundi 20 juin au dimanche 3 juillet. Paxlovid, invalidité et inaptitude, mortalité infantile Covid, myocardite et péricardite, Vitamine D, Pfizer et IVG, KOL, Hépatite C, Antoine et Laure.



Quand la société savante de médecine générale fait le point sur le paxlovid : ne pas en donner chez les vaccinés.

Le collège scientifique du Collège national des généralistes enseignants rappelle LA les conditions de prescription du paxlovid en se fondant sur les essais cliniques : elle contredit à juste titre la HAS (voir ICI  dans un billet précédent)  et rappelle que les vaccinés contre le covid n'ont pas été inclus dans l'essai pivot. 

En l’état actuel des connaissances et en l’absence d’alternative et de contre-indication, le conseil scientifique du CNGE considère que la balance bénéfice risque du Paxlovid® est favorable pour les patients à risque de forme grave, non-vaccinés et consultant dans les 5 jours après le début des symptômes.

Dans notre série bien connue (plusieurs saisons, plusieurs épisodes par saison) "Y a pas qu'en France", on rapporte qu'en Californie au Kayser Institute, paxlovid est prescrit chez 92 % de vaccinés (LA).

Quand un.e médecin.e du travail explique la différence entre invalidité et inaptitude.

Je vous laisse lire le texte paru sous forme de thread sur twitter : ICI

Les informations fournies sont très pertinentes.

Quelques commentaires personnels d'un médecin de terrain : 
  1. Toutes ces modalités administrativo-médicales sont à peu près équitables pour des travailleurs intellectuels mais sont franchement inégalitaires pour les travailleurs manuels. 
  2. Toutes ces modalités administrativo-médicales sont défavorables aux travailleurs immigrés manoeuvres et possédant mal la langue française.
  3. Je lis au hasard une phrase : "Un travailleur peut être inapte à un poste physique mais peut se reconvertir dans les bureaux..." ou "Un travailleur de 42 ans peut se reconvertir..."
  4. Donc, en gros, pour la réglementation française, les douleurs musculo-squelettiques dues à certains travaux pénibles sont médiocrement et injustement indemnisées.

Quand des chiffres contredisent les alarmistes sur la mortalité du Covid chez les enfants (GB).

Un papier d'Alasdair Munro (ICI) fondé sur un pré-print d'article (UK) (LA) rapporte qu'entre mars 2020 et novembre 2021 le risque de décès dû au covid  chez les personnes de moins de 20 ans est extrêmement rare, qu'il se produit dans les 30 premiers jours de l'infection et chez des enfants présentant des comorbidités. Le taux de mortalité est de 0,7 pour 100 000 infections.

Je n'aime pas utiliser ce genre de comparaison mais ce risque est le même que celui de courir un marathon, de skier pendant 10 jours ou d'un vol de retour entre Londres et New-York.

Quand une étude épidémiologique israélienne rétrospective (100 000 vaccinés Pfizer  vs 100 000 témoins) montre que :

- chez les enfants de 5 à 11 ans

- deux doses de Pfizer entraînent 50 % d'efficacité sur la contamination et sur les formes symptomatiques liées à omicron (c'est à dire moins que sur delta).

Voir LA.

- Et que le nombre absolu de réduction de cas de covid est de - 0,6 %


- Et qu'il n'y a eu qu'1 hospitalisation chez les vaccinés contre 2 chez les nonvaccinés

Il est difficile de dire qu'il s'agit, chez les enfants de 5 à 11 ans, d'un problème de santé publique...



Quand une étude française (re) parle de myocardite et de péricardite post-vaccinale : c'est du lourd. 

L'équipe de Le Vu et Coll (dont Zureik M dont j'ai souvent parlé sur ce blog) publie un article dans Nature (LA) qui montre l'excès de risque de myocardite post vaccinale. ces donnes sont déjà connues : elles ont déjà été publiées en novembre 2021 et avril 2022.

C'est une étude cas témoin dont on connaît les limites et dont on connaît la place dans le niveau de preuves des essais.

Les chiffres sont les suivants (mais lisez l'article en détail) : le risque de myocardite post vaccination est 30 fois supérieur pour moderna et 8 fois supérieur pour Pfizer (par rapport aux témoins). Notamment lors de la première semaine après la première vaccination. Mais aussi après la deuxième.

La tranche d'âge des 18-24 ans est la plus touchée mais ce que l'on apprend c'est que le sur risque concerne toutes les tranches d'âge et pas seulement les hommes. Pour les 18-24 ans avec Moderna : un cas pour 5900 doses. 

Les myocardites/péricardites induits ne sont pas plus graves que celles non induites.

Lisez bien la discussion qui est remarquablement menée par les auteurs.

Cela pose quand même un certain nombre de questions. Et notamment pourquoi, aux US, je ne sais pas pour d'autres pays, Moderna est toujours administré chez les jeunes.

Et le premier qui dit que les auteurs n'auraient pas dû publier parce que cela fait le miel des antivaxx, ils peuvent aller à confesse avec les progressistes scientistes vaccinolâtres.

Une étude canadienne (Ontario) de juin 2022 (ICI) rapporte un sur risque (toujours chez les 18-24 ans) de myocardite/péricardite après vaccination par Comirnaty puis Moderna (et surtout si le rappel est à 30 jours et moins) : 1 cas pour 1287 !

Quant à la vitamine D chez les enfants : les recommandations ne sont pas fondées sur les preuves.

Il peut paraître curieux, voire anticonformiste et provocateur, de remettre en question la prescription de vitamine D chez les enfants. Un billet de blog de Jean Doubovetski (ICI) raconte l'affaire.

Quand Pfizer est à la manoeuvre pour dégommer l'IVG aux US

Pfizer, le chantre de l'innovation, le chantre du scientifisme progressiste, mène double jeu. Non seulement le laboratoire ne veut pas lever l'exclusivité sur son brevet Covid mais il mène une politique entrepreneuriale très forte (selon ses dires) sur la parité dans l'entreprise.

Bravo.

Ne parlons pas de paxlovid, traitement du Covid qui n'a pas été testé chez lesvaccinés et qui est prescrit large manu chez les vaccinés...

Mais surtout : selon un article (ICI) Pfizer  fournit de l'argent aux politiciens qui vont, à la suite de l'avis de la Cour suprême sur l'IVG (ce n'est plus un droit fédéral), interdire l'IVG dans les 13 Etats US où ils sont élus ! 

Quand un oncologue est payé 110 000 dollars par an par l'industrie pharmaceutique...

Ce n'est pas un KOL (Key Opinion Leader), c'est un employé de l'industrie.

Une étude tout à fait intéressante, cela ne se passe pas en France, cela ne pourrait pas se passer en France,  est parue dans le JAMA (LA) qui montre à quel point, en 2017, parmi les oncologues du secteur public touchant un salaire de plus de 100 000 dollars par an, 66,2 % ont été payés par l'industrie. 

Voici les chiffres : When comparing general payments with base salary for the 417 faculty who received payments, 78 (18.7%) received payments of more than 10% of their annual salary, 45 (10.8%) received payments of more than 20%, 16 (3.8%) received payments of more than 50%, and 3 (0.7%) received payments of more than 100% (Figure). The general payments-to-salary ratio for the 3 physicians with the highest ratios were 124% ($185 316/$149 532), 124% ($132 696/$106 706), and 242% ($923 938/$380 768).


Si ce sujet vous intéresse, lire un article bien documenté paru dans Slate (LA) qui renseigne sur la corruption des médecins par Purdue Pharma lors du lancement et de la promotion de l'oxycontin. 

Un point de vue sociologique sur les conflits d'intérêts rapporté par Hervé Maisonneuve en son blog : LA. Il y a du boulot !

La publicité pharmaceutique Direct to consumer fait rage aux US : en 2020, et selon Aaron Kheriaty, 75 % des pubs TV sont promues par des firmes pharmaceutiques. Cette année-là les pubs numériques ont augmenté de 43 % et cela représente 6,6 milliards de dollars !

(à signaler qu'il n'y a que 2 pays au monde où c'est possible : les US et la Nouvelle-Zélande).



Quand les accusations de "viol" concernant Chrysoula Zacharopoulou posent des questions : 

  1. La définition du viol : Le viol est un acte de pénétration sexuelle commis sur la victime ou sur l'auteur de l'acte avec violence, contrainte, menace ou surprise (dans ce dernier cas, la victime est trompée par la ruse de l'agresseur).
  2. Est-ce qu'un examen gynécologique pratiqué par une gynécologue dans un cabinet de gynécologie peut être considéré comme un viol ?
  3. Est-ce que le fait de prendre rendez-vous chez une gynécologue signifie de facto que sera pratiqué un toucher vaginal et/ou la pose d'un spéculum ?
  4. Est-ce que la gynécologue a demandé clairement à la patiente : "Acceptez-vous que je pratique un toucher vaginal dans le but de..." ?
  5. Est-ce qu'un toucher vaginal est obligatoire lors d'un rendez-vous de gynécologie ?
  6. Est-ce que considérer que la pratique d'un toucher vaginal, accompagné éventuellement d'un toucher abdominal, par une gynécologue est un viol de la même nature qu'un viol pratiqué par un ou des hommes sur une femme dans une cave, une chambre à coucher ou un couloir ?

Quand le dépistage de l'hépatite C doit être ciblé...

Encore une fois, beau billet de blog de Jean Doubovetski, LA, qui illustre à merveille le conflit permanent qui existe entre les données de la science et les dogmes de l'Eglise de Dépistologie. Et comme vous l'imaginez les liens/conflits d'intérêts des spécialistes et des sociétés savantes sont à fond pour la dépistologie sauvage.

Quand la mission flash du docteur Braun sur les urgences propose 41 recommandations. 

Voir LA.

Un commentaire de Wargon : ICI.

Les commentaires de MGFrance : ICI

Les commentaires de la FMF : LA

Quand Antoine et Laure font de la sociologie.

Le camp du Bien est fier de ses meilleurs représentants. Dans un papier paru récemment dans Slate (ICI) nos deux héros Antoine et Laure recréent la sociologie en inventant deux termes qui vont marquer l'histoire des sciences humaines : les précautionneux et les rassuristes.

Cette classification binaire permet de rejeter dans les limbes toustes ceulles qui ne pensent pas comme iels.

Ainsi apprend-on que les rassuristes peuvent être rangés d'un seul coup d'un seul dans le camp des climatosceptiques. Ça rassure. Ce sont aussi des covid longs dénialistes et, pour le prouver, A&L citent un article de Santé Magazine (LA) ce qui en jette sur le sérieux de leurs publications de référence !

Mais A&L se mettent aussi dans le cerveau des rassuristes et expriment ce qu'ils doivent penser. 

Par ailleurs, tous les maux de la terre sont attribués aux dits rassuristes : ce sont des individualistes, des libéraux, des, je cite, "chacun pour sa gueule", et, pour faire bonne mesure, la nuance n'est pas la première vertu de nos duettistes, des eugénistes et des darwinistes sociaux...

Mais, rassurons-nous, si j'ose dire, les "précautionneux" sont des sociaux-démocrates (notion qui semblait avoir disparu du champ politique français), qui défendent "un idéal de justice sociale" et qui soutiennent une santé publique "où l'on ne transige pas avec les principes de solidarité et d'équité". Diable.

Le camp du Bien réinvente la sociologie et la lutte des classes. Une lutte des classes assez molle puisque rien n'est dit sur les inégalités de délivrance des vaccins, sur Pfizer, sûrement une société précautionneuse, sur les énormes profits des sociétés pharmaceutiques qui défendent sans doute un idéal de justice sociale. Par ailleurs, les précautionneux mènent souvent leur combat avec de francs néo-libéraux.

Rappelons qu'Antoine Flahault fut un alarmiste lors de la pseudo pandémie A1H1N2, annonçant des milliers de morts, qu'il s'en est excisé, fut le directeur fossoyeur (ou presque) de l'EHSP de Rennes (avec une très modeste qualité d'enseignement), qu'il pantoufla en Allemagne à la Virchow Foundation for Global Health (où il développa des MOOC...) puis à Genève...


Quand la détection et le traitement de plus en plus de cancers du sein in situ ne conduit pas à la diminution du nombre de cancers du sein invasifs...


Lire LA cet article en anglais qui reprend toutes ces données. 

Et cela n'a pas amélioré la survie globale.

Et : An observational study in JAMA Oncology with 20 years of follow-up found that while patients with DCIS who underwent more aggressive treatment generally had a lower risk of ipsilateral recurrence, their risk of dying from breast cancer was the same as those with less treatment.





 


mercredi 22 juin 2022

L'arroseur arrosé. Histoire de santé publique sans consultation 2

Référence : Marianne.


Monsieur A, 69 ans, a mal aux dents. Il a mal aux dents et son ex-dentiste favori, celui qu'il pouvait consulter en moins de 10 minutes, son voisin de palier, et un bon encore, est parti à la retraite depuis deux ans et quand il prend conscience qu'il serait utile savoir ce qu'il a, en plus de la gengivite qui lui fait mal et de la pression lorsqu'il mange, un abcès sous un bridge, un descellement de bridge, ou autre, c'est la veille de l'Ascension, sa nouvelle dentiste attitrée chez qui il a effectué deux détartrages ne travaille pas le mercredi. Sur Doctolib, le prochain rendez-vous non urgent est dans vingt jours et comme il est un médecin à la retraite il ne veut pas abuser de la case Urgent car cela ne lui semble pas urgent.

Monsieur A se rend à pied (il n'est pourtant pas écolo compatible avec Corinne Lepage ou Sandrine Rousseau) dans deux centres dentaires de sa ville qui viennent de se créer (en fait, ça fleurit partout). Dans le premier une charmante secrétaire lui dit que le prochain rendez-vous est dans trois semaines et que si c'est urgent il faut appeler la Pitié-Salpétrière. Dans le second, une tout aussi charmante secrétaire lui dit que c'est possible dans sept jours.

Il consulte Doctolib et trouve un rendez-vous pour 17 heures le même jour à l'autre bout de la ville (il y va quand même à pied).

Il est reçu par un jeune dentiste qui demande à son assistante de pratiquer un panoramique et : 

"Je n'ai pas retrouvé d'abcès. Il y a une zone de frottement sous le bridge (il me montre sur l'écran géant qui est en face de moi, une solution noire de continuité, sous l'incisive, alors que je n'ai pas mal à cet endroit), un bridge comme on n'en fait plus, c'était bien à l'époque et, pour l'enlever, ça va être une galère, et, vous voyez, là, il manque de l'os, pour poser des implants, et il faut poser des implants, il va falloir faire une greffe osseuse..."

Avant de venir Monsieur A s'était dit que le nouveau dentiste, et il n'avait pas encore vu son cabinet ultramoderne, allait lui faire la totale. C'est le cas.

Donc, le jeune dentiste dit : "Je ne vous prescris pas d'antibiotiques mais, dans trois jours, si vous avez encore mal, faudra quand même en prendre..." Et il rédige une ordonnance.

Ensuite, il étudie l'articulé dentaire et se met à meuler les dents qui frottent (ce sont des céramiques, donc, c'est facile).

Monsieur A, le docteur A, il jubile : il a enfin trouvé un dentiste qui ne prescrit pas d'antibiotiques dans les douleurs dentaires (voir ICI).

C'était mercredi entre 17 heures et 17 heures trente.

Le fait que des antibiotiques n'aient pas été prescrits produit un effet placebo indéniable sur le docteur A.

Mais le dimanche soir il se dit qu'il voudrait avoir un autre avis. Lundi, c'est Pentecôte, et il se rend chez sa dentiste le mardi vers 10 heures, il voit son associé qui lui donne un rendez-vous pour 14 heures après avoir regardé le panoramique dentaire fait il y a un an... "Il aurait dû vous prescrire des antibiotiques..."

La dentiste reçoit à l'heure, évacue l'abcès gingival que le docteur A aurait pu percer lui-même et lui prescrit, pour 8 jours, amoxicilline plus metronidazole. Elle lui donne un rendez-vous pour le mardi suivant en lui disant que le bridge s'est sans doute rompu et qu'il va falloir agir localement.

(Monsieur A n'a pas compris toutes les explications de soins de la dentiste mais se propose de préparer des questions pour la prochaine fois pour envisager une décision commune)

Le soir, il n'a presque plus mal.

Le lendemain encore moins. Et au bout de 3 jours, les douleurs ont quasiment disparu. Et surtout : le bridge qui se baladait dans la gencive ne bouge plus.

Monsieur A se demande s'il va continuer à prendre les antibiotiques car le metronidazole le barbouille, sans plus. Mais il est possible que la dentiste fasse un geste ce mardi et il juge qu'il vaut mieux continuer de les prendre et de ne pas faire la malin avec la prescription.

La dentiste constate que l'infection a disparu, nettoie, ôte le bridge, nettoie et recolle. Jusqu'à la prochaine fois. Et fournit encore quelques suggestions thérapeutiques. Allongé sur son fauteuil et témoin passif des soins qu'il reçoit, le docteur A remarque qu'à aucun moment il n'a eu mal et que les gestes de la dentiste ont l'air d'une grande précision et d'une grande détermination. Mais qui est-il pour juger cela ?

(Encore une fois le docteur A n'a pas tout compris sur le programme de soins qui va venir et quelles en seront les conséquences, esthétiques notamment et il se promet, prendra-t-il des notes ?, de poser des questions lors du prochain rendez-vous. Disons qu'il n'a pas tous les éléments en main pour comprendre et décider.)

(La dentiste demande au docteur A de lui adresser le tableau de remboursement de soins dentaires accordés par la mutuelle afin de lui faire un devis pour les soins à venir. Le docteur A est surpris. Il n'a pas l'habitude de ces pratiques. Il se demande s'il s'agit de la part de la dentiste d'une attention de sa part, s'adapter à sa mutuelle, ou d'une optimisation tarifaire, obtenir les honoraires les plus élevés sans faire trop de mal au patient.)

Quelques leçons de tout cela.

  1. L'arroseur arrosé : le médecin champion autoproclamé de la prévention quaternaire et du primum non nocere, s'est fait piéger par un dentiste qui a prêché pour la même paroisse (en se trompant)
  2. Il est difficile (pardon pour le truisme qui va suivre) de raisonner pour soi-même, de diagnostiquer pour soi-même, de prescrire pour soi-même.
  3. Un médecin en condition de patient est un patient comme un autre et comprend assez vite combien la décision médicale est affaire de relations médecin (dentiste)/patient et combien les choix sont nombreux, soumis à la subjectivité des deux partis et peu fondés sur des preuves.
  4. Les préjugés, quels qu'ils soient, sont de mauvais conseillers pour le soignant comme pour le soigné.

Cela dit, le docteur A est bien embêté : que faire de ce bridge que l'on devra enlever et sans doute difficilement remplacer sans perdre latéralement la beauté de son sourire ? 



dimanche 19 juin 2022

Bilan médical du lundi 13 juin au dimanche 19 juin 2022 : sans masques, paxlovid et EBM, corruption (oncologie), statines aspirine et Covid, mentir à son médecin, médecin traitant en cancérologie, vaccination covid enfants, mélatonine,



La société française de pharmacologie et de thérapeutique se réunit dans un lieu clos et sans masques le 14 juin 2022 : la pandémie est finie, semble-t-il.



Mais en mai 2022 (aux US), il y avait ça : 


Quand la HAS recommande le paxlovid chez des patients non inclus dans les essais cliniques, elle bafoue l'EBM

La HAS recommande ICI l'usage du paxlovid chez des patients vaccinés alors qu'il n'y avait pas de patients vaccinés non à risques dans les essais cliniques paxlovid (LA).

Dans cet essai EPIC-SR enrôlant patients non vaccinés non à haut risque et patients vaccinés à haut risque, les résultats pour ce dernier groupe (n=721) sont les suivants : 57 % de diminution du risque relatif d'hospitalisation, Paxlovid (3/361) et placebo (7/360). De qui se moque-t-on ?

La meilleure prévention des formes sévères est la vaccination.

Les indications du paxlovid devraient être : patients immunodéprimés qui ne répondent pas bien à la vaccination  et qui attrapent le Covid.

Lire ICI le communiqué du Collège National des Généralistes enseignants : parfait.


Corruption en oncologie (mais aux US)

Un article (LA) a analysé les liens et les conflits d'intérêts des oncologues états-uniens en 2018 : 1 % des 10600 oncologues états-uniens, soit 136,  touchent 37 % de tout l'argent "distribué" par l'industrie pharmaceutique en oncologie, soit 100 000 dollars/an. Soixante pour cent ont des responsabilités hospitalières importantes, 21 % ont des responsabilités importantes dans des sociétés savantes, 24 % appartiennent à des comités éditoriaux et 10 % ont rédigé des recommandations.

Une étude (française) alakhon menée sur 4 millions de personnes.

Des auteurs français ont montré (LA) que la prescription de statines en prévention primaire diminuait le risque d'hospitalisation pour Covid et le risque de décès lors de l'hospitalisation !

On s'en tamponne.

Et, pendant ce gaspillage de ressources humaines et financières, toujours pas d'essais randomisés robustes sur le port du masque dans des clusters, sur l'aération dans les classes ou à la machine à café...

Et les chercheurs français remettent ça (avec des MG participants).

Il n'a pas été trouvé d'association entre la prise d'aspirine à faible dose et la diminution des formes sévères de Covid (ICI) : je résume : A partir d'une hypothèse alakhon, on réalise une étude alakhon et on a des résultats alakhon. Prodige.

Un des auteurs me répond que ce n'était pas si Khon que cela puisqu'une étude randomisée a été menée et publiée dans The Lancet : ICI. Une étude négative menée entre novembre 2020 et mars 2021 dans 177 hôpitaux avec une dose de 150 mg d'aspirine.

58 % des patients états-uniens mentent à leurs médecins.

Une étude peu robuste (ICI) rapporte donc que les patients ne disent pas complètement la vérité à leurs médecins.

Pourquoi rapporter une étude peu robuste ? Pour réfléchir au problème. A partir des commentaires rapportés par un article de presse (ICI) intitulé "Une vérité inconfortable : pourquoi les patients mentent-ils à leurs médecins ?"

La première question à se poser : est-il possible que 42 % des personnes interrogées n'aient jamais menti à leurs médecins ?

Les 3 motifs de mensonge les plus fréquents : la santé mentale, la pratique de l'exercice physique et la consommation d'alcool. Puis viennent : le régime alimentaire, l'utilisation de drogues, l'activité sexuelle et le tabagisme.

Est-il possible qu'un médecin traitant puisse s'opposer aux décisions thérapeutiques d'un oncologue et/ou d'une réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) ?

Intéressant cas clinique développé sur twitter (LA) avec les commentaires ad hoc.

En gros, une fois que le ou la patiente ont eu un entretien avec un.e oncologue, consultation d'annonce puis choix thérapeutique partagé (?), que peut faire un médecin traitant pour s'y opposer ou pour demander des aménagements en constatant que le ou les traitements choisis ne font pas l'objet d'un consensus ou sont problématiques. Et comment savoir si le ou la patiente ont été informées selon les règles de l'art (y a-t-il des règles de l'art ?)

Il y a bien entendu plusieurs angles d'approche :

  1. La compétence supposée du médecin traitant
  2. L'information loyale du ou de la patiente
  3. L'absence du ou de la patiente et du ou de la médecin traitant lors du RCP
  4. Le suivi médical hors hôpital
  5. Quid de la perte de confiance du ou de la malade en cas d'intervention non consensuelle du médecin traitant ?
A vos réflexions.

Vaccination anti Covid des enfants 6-23 mois : les chiffres d'efficacité tirés des documents Pfizer sont médiocres.



Existe-t-il des raisons scientifiques pour proposer la vaccination des enfants de moins de 5 ans ? 

Pour l'instant : non.

Malgré le fait que la FDA ait accordé une autorisation d'urgence (EAU) au vaccin Pfizer.

Dans l'étude Pfizer chez les enfants de 6 à 23 mois on retrouve l'intervalle de confiance le plus ridicule qui ait été publié dans un article sérieux.



Si vous voyez passer cette diapositive, c'est un faux, même si elle est transmise par des gens de bonne foi.


Voici les explications (LA). Et donc : 



La mélatonine pour le traitement de l'insomnie : absence de preuves

Une revue de littérature analyse ICI les essais cliniques contrôlés qui ont comparé mélanine à un placebo ou à pas de traitement : pas de preuves d'efficacité.

Faut-il prescrire des antibiotiques en cas de suspicion d'infection urinaire basse chez des personnes âgées fragiles ?

Une étude quantitative et qualitative menée dans 4 pays européens (LA) n'arrive pas à conclure.

Nous voilà bien avancés !