dimanche 11 février 2024

Covid long : quelques réflexions après une discussion sur X.

La discussion sur X






La discussion est ICI.

L'article de Santé Publique France (LA) fait suite à un premier article (ICI) paru en juillet 2022.

Il ne faut pas oublier que le niveau de preuves est faible : enquête par questionnaire en ligne chez des volontaires supposés être atteints d'un syndrome de Covid long.

L’essentiel des résultats à retenir selon Santé Publique France

  • La prévalence de l’affection post-COVID-19 (définition OMS) est estimée à 4 % en population générale adulte (correspondant à 2,06 millions de personnes).
  • 1,2 % des personnes interrogées déclarent un impact fort ou très fort sur leurs activités quotidiennes.
  • 7,1% des participants ont déclaré avoir été atteints de COVID long lorsque qu’on leur posait la question (COVID long rapporté).
  • Parmi les 48% de personnes ayant eu une infection par le SARS-CoV-2 depuis plus de trois mois, 8% présentaient les critères d’une affection post-COVID-19.
  • La prévalence était plus élevée chez les femmes (10,2%), chez les personnes en recherche d’emploi (14,9%) et chez les sujets ayant été hospitalisés pour COVID-19 (18,6%).
  • 21,3% des personnes rapportant une affection post-COVID-19 ont été infectés à l’occasion de la vague du variant Delta et 53,2% lors des vagues de variants Omicron.

Quelques réflexions sur la discussion sur X :

  1. Il se semble pas que chaque MG reçoive en moyenne 40 patients/patientes souffrant de Covid Long comme l'affirme, en extrapolant, Santé Publique France
  2. Des patients/patientes souffrant de Covid Long affirment qu'iels ne vont plus consulter les MG car ceux-ci, pour résumer, ne les prennent pas en considération, n'y connaissent rien en termes de littérature sur le Covid Long et/ou en termes de traitements et les prennent pour des "C'est dans la tête". 
  3. On reproche donc généralement aux médecins de n'être pas au fait des dernières hypothèses étiopathologiques sur la maladie. Hypothèses qui, comme au début de l'apparition de la pandémie aiguë de Covid, couvrent tout le champ de la médecine.
  4. Mais aussi de ne pas faire de bibliographie.  
  5. Mais aussi de ne pas être au courant des derniers traitements (il faut savoir qu'aucun traitement actuellement n'a fait la preuve de son efficacité dans le traitement des covid longs lors d'essais contrôlés)
  6. Des patients/patientes souffrant de Covid Long se plaignent également de ne pas recevoir assez de traitements symptomatiques.
  7. Des patients/patientes souffrant de Covid Long pensent qu'il existe des spécialistes de la maladie qui, eux, savent prendre en charge et traiter dans certains hôpitaux.
  8. Des patients/patientes souffrant de Covid Long disent qu'à l'étranger, c'est mieux.
  9. Il existe donc une grande souffrance des patients/patientes souffrant de Covid Long sévères et qui ne sont pas soulagés.
  10. Il existe donc une grande souffrance des patients/patientes souffrant de Covid Long légers à modérés  qui ne sont pas soulagés et qui ont même cessé de consulter.
  11. Que faire ? Des patients/patientes souffrant de Covid Long citent un certain nombre de traitements, pour l'instant symptomatiques qui ne sont pistous anodins, en parlant d'anti-histaminiques, de rivotril ou d'abilify.
  12. Des patients/patientes souffrant de Covid Long ne supportent pas que des médecins leur disent qu'il n'y a pas, actuellement, de traitement validé, ne supportent pas que des médecins ne leur prescrivent pas des médicaments hors AMM, que des médecins nient le Covid long.
  13. Certain.e.s patients/patientes vont même jusqu'à comparer le Covid long au sida ! Ou aux VSS (violences sexistes et sexuelles)
  14. Il est donc nécessaire de mener des études épidémiologistes plus précises en France et bien que des études de ce type existent déjà dans d'autres pays avec des résultats pour le moins divergents.
  15. Enfin, des patients/patientes souffrant de Covid Long, reprochent à certains médecins de ne pas faire assez preuve d'empirisme vis à vis des déclarations des souffrants, d'être trop critiques l'égard des publications de mauvaise qualité (c'est pourtant notre job) et de tenter de nous en tenir aux preuves.
  16. La discussion est toujours ouverte.

Quelques informations :
  • La HAS : LA
  • Un article de Stéphane Korsia-Meffre : ICI


Il y a 13 occurrences dans le blog sur le Covid long pour montrer que je ne me suis jamais désintéressé du sujet.

27 novembre 2023

309. Covid long : un rapport du COVARS qui ajoute du flou au flou. 

Le COVARS (Comité de veille et d'anticipation des risques sanitaires) a publié un rapport qui fait le point sur le Covid long et même un peu plus (LA)


Je vous rappelle, avant tout commentaire, quelle est ma DPI (Déclaration publique d'intérêts) sur le point du Covid et du Covid long en particulier. Vacciné 4 fois selon les règles de l'art (c'est à dire selon les recommandations pifométriques des agences gouvernementales et de comités, réunions de médecins, sociétés savantes autoproclamées, ayant pignon sur rue, non sur les réseaux sociaux, dont le leitmotiv est "Vaccinons, vaccinons, il en restera bien quelque chose), j'ai attrapé le Covid au moins 3 fois, dont la dernière fois début août 2023, vous allez me dire, les grands spécialistes auto-proclamés de l'affaire, si j'ai aussi attrapé un Covid long. Je signale à tout hasard que j'ai porté avec constance le masque FFP2 jusqu'au mois d'août dans les transports en commun et que, désormais, je ne le porte que lorsque je suis dans le métro dans une ambiance très confinée...

Quoi qu'il en soit, outre les syndromes pseudo grippaux qui ont accompagné les trois épisodes symptomatiques que j'ai subis, fièvre, céphalées, courbatures, j'ai identifié deux séquelles : une pseudo-engelure du quatrième orteil droit (dont les lésions cutanées et les symptômes ont complètement disparu) et un acrosyndrome volontiers déclenché par le froid et par les efforts (course à pied) des trois premiers orteils droits dont la fréquence de survenue et l'intensité ont diminué de façon considérable jusqu'à ne plus me gêner du tout.

Pas d'asthénie, pas de brouillard cérébral, à moins que les longcovidolâtres ne pensent que le fait de ne pas adhérer à 100 % au concept du Covid Long Maladie ne soit une façon d'être brouillardeux.

Une analyse de Stéphane Korsia-Meffre sur le rapport du COVARS dans le Vidal (ICI) est tout à fait pertinente car elle permet de soulever les problèmes que pose le Covid Long.

J'ai plusieurs fois sur ce blog (il suffit de taper covid long dans le moteur de recherche) fait preuve d'une prudence de sioux quant à la réalité du Covid long ou, plutôt, à sa spécificité, par rapport à d'autres séquelles post virales et bactériennes connues.

J'ajoute, car je suis mauvaise langue, que mes expériences passées de clinicien concernant l'hystérie, la tétanie (le nom a changé, pardon), la neuro-algo-dystrophie (le nom a changé, pardon), la fibromyalgie (le nom a changé, pardon), l'intolérance au gluten et le Lyme chronique m'ont, pardon encore , vacciné contre les associations de signes cliniques, les mécanismes physiopathologiques à la gomme et les médecins qui ont consacré leurs vies de charlatans à s'instaurer tsars des maladies précédentes.

Mes réticences n'ont donc pas changé.

Voici ce que j'écrivais le 25 septembre 2022 : 

  1. Des personnes estimables, et je pèse mes mots, ne cessent de citer des études observationnelles, pas toujours cas-témoin, pour pousser en même temps des cris d'orfraie sur le poids des covid longs, sur le "vrai" problème de santé publique que cela représente et sur, ouvrez grand les yeux, la nécessité d'une prise en charge et y compris médicamenteuse
  2. Ce n'est pas bien (voyez, je sais faire de la morale à bon marché) de citer de telles études a) sans les avoir lues, b ) en n'en ayant lu que l'abstract, c) uniquement parce qu'elles vont dans le sens de croyances end) pour ne pas avoir à se dédire
  3. Je répète : il est possible que le covid long existe et, quelle que soit l'intensité initiale des symptômes mais, pour l'instant, il n'existe aucun marqueur spécifique de cette atteinte prolongée.
  4.  Cela ne veut pas dire que les personnes malades qui se plaignent de symptômes prolongés attribués au Covid a) mentent, b) sont hypochondriaques, c) sont à adresser chez un psychiatre et/ou un psychologue... en l'état actuel de nos connaissances.
  5. Car l'absence de physiopathologie uniciste, l'absence de marqueurs tissulaires, l'absence de marqueurs biologiques,  et l'absence ne signifie pas que l'on ne passe pas à côté de quelque chose, l'absence de traitements non et médicamenteux, toutes ces absences conduisent les personnes malades vers les spécialistes autoproclamés du Lyme, de la fibromyalgie et de l'intolérance au gluten.

et le 15 janvier 2023 :

  1. Un problème de définition : plus de 200 symptômes ont été identifiés avec des impacts multiples sur divers organes
  2. Un problème de causalité : on n'a pas encore retrouvé de lésions spécifiques liées au Covid
  3. Un problème de fréquence : dans le même article (ICI) les auteurs écrivent qu'il survient chez 10 % des patients ayant présenté une affection pulmonaire sévère due au Covid ; plus loin : l'incidence est estimée à 10-20 % des patients non hospitalisés ; plus loin : 50 à 70 % des patients hospitalisés et 10 à 12 % des vaccinés.
  4. Un problème d'essais cliniques de qualité et notamment des essais prospectifs.
  5. Un problème de prise en charge.

Es-ce que le rapport du COVARS a changé quelque chose ?

A voir.

Terminons par une provocation : il ne sera pas possible d'éradiquer le Covid sur la surface de la terre. Ceux qui écrivent maintenant, les nouveaux moralistes ou les nouveaux hygiénistes, qu'il aurait été possible de le faire dès janvier 2020 mentent.


Le 16 avril 2023

149. Covid long : un article analyse les critères retenus pour le définir : du grand n'importe quoi.

L'article paru le 25 mars 2023 (ICI) analyse les critères de définition du Covid Long dans 92 études publiées : dans seulement 54 % des études les résultats de laboratoire affirmant le covid étaient mentionnés ! Pour définir le Covid Long 8 durées de symptômes ont été retrouvées (entre 4 et 52 semaines) avec une moyenne de 12 (alors que 36 % des études ne précisaient pas la durée retenue). Un total de 57 symptômes a été pris en compte ! 


Le 2 avril 2023

127. Covid long : une étude norvégienne chez les enfants et les adolescents innocente le Sars-CoV-2.

L'étude : ICI

Conclusion décoiffante des auteurs (PCC = Post Covid Condition) : 

The persistent symptoms and disability that characterize PCC are associated with factors other than SARS-CoV-2 infection, including psychosocial factors. This finding raises questions about the utility of the World Health Organization case definition and has implications for the planning of health care services as well as for further research on PCC.

Attention : 

  • C'est une étude prospective comparative (on en connaît les limitations)
  • L'effectif d'enfants et d'adolescents est maigre (300 covid vs 85 non covid) mais apparemment suffisant pour l'analyse statistique a priori
  • Le point majeur : à 6 mois 48,5 vs 47,1 % des covids et des non covids présentaient un syndrome post covid (Post Covid Condition) (non significatif)
  • Le point secondaire : à 6 mois 14 vs 8,2 % des covids et des non covids présentaient un syndrome de fatigue post infectieuse (non significatif)
  • Les enfants ne sont pas la meilleure cible à étudier.

Autres réflexions que j'adapte de Vinay Prasad  (LA): 

  • Les études sur le covid long sans groupe contrôle ne servent à rien
  • On ne pourra plus faire d'études avec des contrôles puisque tout le monde aura eu le covid
  • Il est impératif de mener des études contrôlées sur les patients souffrant de covid long (dont des méthodes non pharmacologiques).
  • Toute prise en charge non validée par des essais devrait être administrée avec précaution 


Le 26 mars 2023

116. Covid long.

On veut des études !

On veut des marqueurs !

On veut des traces de virus !

On veut des études épidémiologiques prospectives !


Le 19 mars 2023

116. Covid long : les désinformateurs continuent


via @dlang57500


L'extrême-gauche sanitairement autoproclamé, pour montrer l'authenticité du Covid long (et ceux qui voudraient m'attaquer sur ce point peuvent relire ce que j'ai déjà écrit), cite le Financial Times, Fortune et Bloomberg : LA.

Que personne ne s'esclaffe.


Le 15 janvier 2023

14. La collection des études de très bas niveau de preuves continue sur le Covid long

Pour le covid long sur lequel j'ai déjà écrit ICI il existe 5 problèmes majeurs : 

  1. Un problème de définition : plus de 200 symptômes ont été identifiés avec des impacts multiples sur divers organes
  2. Un problème de causalité : on n'a pas encore retrouvé de lésions spécifiques liées au Covid
  3. Un problème de fréquence : dans le même article (ICI) les auteurs écrivent qu'il survient chez 10 % des patients ayant présenté une affection pulmonaire sévère due au Covid ; plus loin : l'incidence est estimée à 10-20 % des patients non hospitalisés ; plus loin : 50 à 70 % des patients hospitalisés et 10 à 12 % des vaccinés.
  4. Un problème d'essais cliniques de qualité et notamment des essais prospectifs.
  5. Un problème de prise en charge.
Voilà que paraît une étude israélienne dans le BMJ (ICI) indiquant que les patients ayant présenté un Covid modéré (mild) sont à faibles risques de conséquences pour leur santé un an après leur diagnostic.

Un certain Jérôme Larché, je cite : Docteur en médecine interne et spécialiste du Covid long, est interrogé par Léa Giandomenico dans une revue grand public et conteste les résultats de l'étude (LA) avec des arguments plutôt raisonnables. Dans cet article Antoine Flahault, un Fearmonger connu, reconnaît, je résume, que c'est rassurant.

Un article en forme d'éditorial publié sous l'égide de l'université du Minnesota (LA) est lui-aussi très critique sur les résultats de l'article israélien.

Qu'allons-nous devenir ?


Le 6 novembre 2022

8. Covid Long : le club des CovidsLongs fait feu de tout bois.

On résume le point de vue du club des LongsCovids (qui est décalque de l'ex-club des ZéroCovids) :
  1. Il y a de plus en plus de patients présentant des Covid longs (le club des FearMongers est mobilisé pour l'occasion)
  2. Il y a de plus en plus de publications (non françaises, on rappelle ici pour les ignorants que la France  se place au 48° rang mondial pour le nombre de publications biomédicales mais c'est dû au manque d'argent alors que la majorité des études biomédicales sont financées par l'industrie pharmaceutique qui doit trouver que c'est parce que les médecins français n'ont pas d'argent qu'ils n'ont pas de cerveau...) ce qui montre que la maladie existe (le fameux saut qualitatif que les marxiens de l'extrême-gauche ne manqueront pas de rappeler)
  3. La France est, comme toujours, à la traîne. 
  4. Il y a une perte de chance puisque les patients ne sont pas pris en charge ou considérés comme psychosomatiques...
Réponses :
  1. On attend autre chose que des études au doigt mouillé ou sur un coin de table mais plus les études annoncent des covid longs, plus les LongsCovids trépignent
  2. Le nombre de publications ne signifie pas a) que l'on avance, b) que les données scientifiques sont de qualité, c) que la non-découverte d'un mécanisme physiopathologique commun soit la preuve qu'il y en a un
  3. C'est la haine de soi bien classique
  4. Il n'y a pas de traitement mais une prise en charge empathique serait effectivement la bienvenue.
  5. Un pré print (ICI) du premier novembre 2022 annonce que la prescription pendant 5 jours de Nirmatrelvir (une des composantes du paxlovid) vs rien (étude épidémiologique cas-témoin non randomisée) chez des patients covid présentant au moins un facteur de risque pouvant entraîner une maladie sévère réduisait les syndromes post SARS-CoV-2 à 90 jours quel que soit le statut vaccinal (non,vacciné, vacciné, boosté) en cas de primo infection ou de réinfection.
  6. A suivre.


Le 25 septembre 2022

Covid long : j'en remets une couche.

  1. Des personnes estimables, et je pèse mes mots, ne cessent de citer des études observationnelles, pas toujours cas-témoin, pour pousser en même temps des cris d'orfraie sur le poids des covid longs, sur le "vrai" problème de santé publique que cela représente et sur, ouvrez grand les yeux, la nécessité d'une prise en charge et y compris médicamenteuse
  2. Ce n'est pas bien (voyez, je sais faire de la morale à bon marché) de citer de telles études a) sans les avoir lues, b ) en n'en ayant lu que l'abstract, c) uniquement parce qu'elles vont dans le sens de croyances end) pour ne pas avoir à se dédire
  3. Je répète : il est possible que le covid long existe et, quelle que soit l'intensité initiale des symptômes mais, pour l'instant, il n'existe aucun marqueur spécifique de cette atteinte prolongée.
  4.  Cela ne veut pas dire que les personnes malades qui se plaignent de symptômes prolongés attribués au Covid a) mentent, b) sont hypochondriaques, c) sont à adresser chez un psychiatre et/ou un psychologue... en l'état actuel de nos connaissances.
  5. Car l'absence de physiopathologie uniciste, l'absence de marqueurs tissulaires, l'absence de marqueurs biologiques,  et l'absence ne signifie pas que l'on ne passe pas à côté de quelque chose, l'absence de traitements non et médicamenteux, toutes ces absences conduisent les personnes malades vers les spécialistes autoproclamés du Lyme, de la fibromyalgie et de l'intolérance au gluten.
Cette infographie montrant la prise en charge du Covid long explique mon propos


Le 5 juin 2022

Le Covid long, ou nouveau Syndrome Post Infectieux : juste "organique" ?

L'excellent Stéphane Korsia-Meffre a écrit un commentaire passionnant sur le Covid long (ICI) à partir d'un article paru dans Nature Medicine (LA). 

Choutka et al. suggèrent que tous (ou presque) les SPI auraient une étiopathogénie commune, qu'ils s'inscrivent partiellement ou totalement dans le cadre d'une entité appelée encéphalopathie myalgique ou syndrome de fatigue chronique et qu'il s'agirait d'une nouvelle maladie auto-immune. Les auteurs envisagent différentes hypothèses étiopathogéniques : réservoir infectieux, auto-immunité, dysbiose et dommages tissulaires.

Ils suggèrent également que des recherches biomédicales soient menées de façon sérieuse pour élucider ce mystère et trouver un traitement.

Comment pourrait-on penser le contraire ? 

Les patients souffrant d'un SPI post Covid ont besoin d'écoute et de reconnaissance. Ils ont besoin d'aller voir des soignants qui ne leur disent pas "Tout ça, c'est dans la tête" ou "De toute façon cela va s'arranger... On ne peut rien faire..."

Il nous semble encore plus dangereux que ces patients rencontrent des soignants qui leur disent qu'il existe d'ores et déjà des molécules qui pourraient les soulager, voire les soigner. On pense bien entendu aux cocktails médicamenteux associant : antalgiques de paliers 1 et/ou 2, antidépresseurs, anxiolytiques, anti-épileptiques, décontracturants, et autres...

Primum non nocere. Informer. 

Mais il sera difficile de penser que les interactions entre les SPI et les mesures barrières (indispensables, mais on peut discuter sur leurs modalités, leur rigueur, leur momentum...) qui ont été mises en place un peu partout dans le monde n'ont pas d'influences sur la perception des SPI, sur la dépression et sur l'anxiété des populations depuis deux ans et demi.


Le 29 mai 2022

Le Covid long suscite des recherches.

Des données non comparatives US : ICI

Une étude comparative de cohorte : LA. Les résultats sont assez étonnants. La lecture du papier est intéressante.

A high burden of persistent symptoms was observed in persons after COVID-19. Extensive diagnostic evaluation revealed no specific cause of reported symptoms in most cases. Antibody levels were highly variable after COVID-19.

... Et les faiseurs de peur font des déclarations fracassantes.


Un article non rassurant en pré print : ICI.

@kunstjonas


le 18 avril 2022


Covid long : une étude de cohorte ouverte mal fichue et inquiétante qui fait partie de la désinformation des Faiseurs de Peur.

Un article de Sciences et Avenir (LA) commenté sur twitter par l'auteur, Nicolas Gutieriez, à partir d'un essai français de cohorte (ICI) rapporte, dès la deuxième phrase que

Le Covid long (...) toucherait près de la moitié des personnes ayant développé le Covid.
Or, que nous apprend l'article princeps ?

... qu'environ 10 % des personnes ayant présenté un syndrome respiratoire sévère dû au covid ont présenté un Covid long...

On arrête là ? 

Je ne suis pas ici pour négliger les covid longs.
Je ne suis pas ici pour nier les covid longs.
Je ne suis pas ici pour ne pas prendre en compte et en charge et en soin les covid longs.
Je demande des données issues d'essais robustes.


Le 6 mars 2022


Troubles mentaux dus au Covid et Covid long : une étude britannique de novembre à décembre 2021


134 écoles et 4870 élèves. Enfants entre 4 et 11 ans et entre 11 et 18 ans.
Limitations : questionnaires remplis sur la base du volontariat.
Faibles effectifs ne permettant pas des analyses de sous-groupes..

Points principaux.

  • Since March 2020, 1.0% of primary school-aged pupils and 2.7% of secondary school-aged pupils met the Delphi criteria for having experienced long COVID lasting at least 12 weeks.

  • "Loss of taste or smell" was the only symptom group where the prevalence was significantly higher for those who had received a positive coronavirus (COVID-19) test since March 2020 than those who hadn't, for both primary and secondary school-aged pupils aged under 16 years.

  • Both primary and secondary school pupils who tested positive for COVID-19 showed no significant difference in the number presenting with a "probable mental disorder" compared with those without a positive test.

  • Primary school pupils with long COVID (under the Delphi criteria) were significantly more likely to have a probable mental disorder (30.0%) than those without long COVID (7.7%); the trend was similar for secondary school pupils (22.6% compared with 13.6%), but this is not statistically significant.

Le 6 avril 2022


Covid long

Une étude danoise comparative sur dossiers, rétrospective, avec des interrogatoires électroniques sur internet avec faibles taux de réponse dans les deux groupes, remet en cause la fréquence des covid longs chez les 0-19 ans, leur gravité et, surtout, doute sur la validité des signes cliniques assumés par certains comme pathognomoniques du Covid long (voir LA).

• 0.8% of SARS-CoV-2 positive children reported symptoms lasting >4 weeks (‘long COVID’), when compared to a control group.
• The most common ‘long COVID’ symptoms were fatigue, loss of smell and loss of taste, dizziness, muscle weakness, chest pain and respiratory problems.
• These ‘long COVID’ symptoms cannot be assigned to psychological sequelae of social restrictions.
• Symptoms such as concentration difficulties, headache, muscle- and joint pain as well as nausea are not ‘long COVID’ symptoms.
• In most cases ‘long COVID’ symptoms resolve within 1-5 months.

Remarquable constatation : Children in the control group experienced significantly more concentration difficulties, headache, muscle and joint pain, cough, nausea, diarrhea and fever than SARS-CoV-2 infected

dimanche 4 février 2024

La Revue Prescrire est malade. Episode 2 : Une rencontre-débat Prescrire 2024 qui m'a pourtant déçu en bien.


 

Programme alléchant sur l'évaluation des médicaments et le malade d'aujourd'hui et le malade de demain.

(Je n'ai pas très bien compris la signification du titre.)

Ce que je savais avant la Rencontre : 

  1. Il existe une crise de l'évaluation des médicaments : critiques multiples des essais randomisés et mise en avant des études en vie réelle  par les industriels et leurs employés pour obtenir des commercialisations de leurs molécules plus rapidement (FDA>EMA pour la permissivité).
  2. Il existe une remise en cause par les industriels et par les agences gouvernementales de la taxonomie des preuves en fonction de leur poids.
  3. La décision partagée est une vaste rigolade. L'information des patients est biaisée en raison des points 1) et 2) et par l'asymétrie originelle des relations médecins/patients.
  4. Les agences gouvernementales sont internationalement infiltrées par l'industrie, dont la HAS.
  5. Les maladies rares sont à la fois peu étudiées, et bien que les médicaments soient hors de prix, mais la pratique du disease mongering est majeure : extension des indications depuis des maladies rares jusqu'à des maladies moins rares.
  6. Les associations de patients souffrent d'un manque de représentativité, de financements, d'indépendance et sont trop souvent le bras armé des gouvernements et/ou des industriels. Et donc d'un manque de confiance.


La réunion est animée par Pierre Chirac, inamovible prescririen qui ne posera pas une seule question gênante aux invités. Puisqu'il les a invités, c'est qu'ils sont bons. 


DPI : Puisque l'auto-citation est punie par la loi implicite de ceux qui n'ont jamais rien écrit ou qui n'écrivent pas les articles qu'ils publient (mais comme je me tamponne des points récoltés) et révérée par la Revue Prescrire qui adore cela, je vous conseille de relire ce que j'ai déjà relaté sur les réunions Prescrire (1). C'est méchant. Mais ce sont mes liens d'intérêts. La note (2) complète mes observations.


Avant de vous relater la rencontre je peux préciser quand même que j'ai été déçu en bien.


Photo : docdu16


Vous pouvez bien entendu regarder la réunion dans son ensemble. Mais pour que vous soyez tenté de le faire je vais vous faire un résumé de l'affaire.

La réunion en video est LA.

Je vais essayer de vous en simplifier la vision ou plutôt de la résumer tant elle est est riche.

Qui peut organiser de telles réunions pour profanes en France ? Personne.

******

Je vous conseille de commencer par regarder l'intervention de Florian Naudet car elle met les points sur les i des essais cliniques. Son intervention est d'une grande clarté et vous verrez, comme pour les autres participants, qu'il complètera ses propos dans la partie Débat et dans la partie Questions.

La video est ICI

Un méthodologiste de l'évaluation des médicaments : Florian Naudet.


Sa présentation est explicite, concise et permet en peu de temps de se faire une idée des enjeux sur la méthodologie des essais cliniques. C'est connu des spécialistes de ces essais mais c'est un bon rappel pour ces spécialistes qui sont à la fois payés par leurs employeurs respectifs, qu'ils soient industriels dans la majorité des cas ou publics, et portés par leur ego de chercheurs. J'en conclus : "Un bon spécialiste des essais cliniques est un spécialiste qui arrive à atteindre le nirvana, c'est à dire la significativité : p < 0,05)".

La bibliographie de Florian Naudet sur le sujet de la méthodologie de la méthodologie des essais cliniques est éloquente, vous la retrouverez sur Pubmed (LA).

Cet exposé intéressera bien entendu les profanes mais aussi les méthodologistes qui connaissent tout sur ce qu'il dit, et les médecins qui participent aux essais cliniques en tant que concepteurs ou recruteurs de patients.

J'ai retenu plusieurs points ce cette intervention et des interventions qu'il a faites dans la section Débat et Questions.

1) Florian Naudet parle des essais en vie réelle, la vraie vie, et cetera. Il dit d'abord ceci : "Nous, les méthodologistes, ça nous intéresse plus, ce genre d'essais, parce qu'il faut plus réfléchir que dans les cas des essais randomisés". Il exagère à moins qu'il ne pense que certains initiateurs d'essais contrôlés ne réfléchissent pas beaucoup quand ils conçoivent ces essais.

Il dit aussi : "les essais en vie réelle... c'est du marketing... du marketing méthodologique... la vraie vie, c'est un slogan d'Auchan..." 

Parce que, quand on utilise les bases de données pour mener ces essais en vie réelle, dit-il, on n'arrive pas à identifier les vrais malades, on le fait par approximation, en fonction des médicaments prescrits, par exemple. Ce qui est pour le moins problématique.

2) Florian Naudet insiste sur la notion de flexibilité des essais cliniques, c'est à dire que l'on ne devrait pas y recourir : on devrait définir dans le protocole initial quels sont les critères de jugements principaux et/ou secondaires que l'on prendra en compte, que l'on analysera et ne pas se lancer dans des études post hoc de sous-groupes.

3) Il plaisante, mais il ne devrait pas, sur la tendance à considérer que les maladies non rares deviennent des maladies rares, c'est à dire que les critères moins stricts appliqués aux protocoles pour les maladies rares (difficulté de faire des essais comparatifs, seuils des critères d'efficacité abaissés) le sont pour des maladies plus courantes. Il prend l'exemple de l'eskétamine qui est tout à fait étonnant : les psychiatres nient la notion de dépressions résistantes et proposent des essais sur les dépressions résistantes en abaissant les seuils d'efficacité. D'où l'affaire eskétamine.

4) Il souligne la nécessité dès le début de la conception des essais que des spécialistes de la synthèse des preuves, des méthodologistes, des patients (faisabilité de l'essai, pertinence clinique, qualité de vie) et des cliniciens habitués aux essais ainsi que des membres des agences soient impliqués dans un souci de transparence

5) Dans la partie Débat, à partir de 21'12, il parle de l'effet parachute qui est utilisé à tort et à travers dans des situations où il n'y a pas besoin de parachute, de l'impossibilité de mener de vraies études post commercialisation en double-aveugle contre placebo en affirmant que les preuves viendront après, en prenant l'exemple du baclofène pour lequel les patients participants pouvaient se le procurer en ville sans le dire, 

6) et du fait que la transparence est nécessaire mais qu'elle est difficile à obtenir : il donne l'exemple de données demandées à l'EMA depuis 2017 et qui arrivent tous les 45 jours depuis cette période (le temps de refus/acceptation des industriels). Et, paradoxalement les industriels donnent plus de données que les académiques !



La deuxième vidéo que je vous propose de regarder est celle de Charlotte Roffiaen.

Il faut coupler son intervention à celles qu'elle a faites dans le Débat et dans les Questions car elle précise son propos avec beaucoup d'acuité.

La vidéo est LA.

La représentante d'une association de patients (ELLyE) : 



Exposé clair. 

L'association ELLyE (ICI) s'intéresse particulièrement aux malades touché.e.s par les lymphomes, la leucémie lymphoïde chronique et la maladie de Waldenströmm.

L'association, on le reverra, est "aidée" dans des proportions que je ne connais pas, par 20 firmes pharmaceutiques (on le reverra plus loin dans la partie Débat). 

Voici ce que l'on peut retenir des propos de Charlotte Roffianen : 

1) Il est difficile de faire entendre la voix des patients lors de l'élaboration des protocoles et que les patients, par exemple à l'EMA, sont tenus par la confidentialité. Elle rapporte la complexité des procédures des essais cliniques qui peuvent obliger des patients à venir 4 fois par mois à l'hôpital pour des analyses qui ne sont pas obligatoirement pertinentes. 

2) Le problème des associations est celui de la confiance qu'on ne leur accorde pas toujours en raison des financements qu'elles reçoivent. 

(Je passe sur le fait qu'elle pense que le fait d'avoir plusieurs sponsors est un atout, - commentaire personnel : trop de corruption tue la corruption-, mais que le plus dangereux est le la proximité, le verre pris au bar avec un représentant d'une firme... - commentaire très juste-)

3) Elle souligne le problème de la difficile validation externe des essais cliniques dans la mesure où, par exemple dans le lymphome, les patients sont âgés et présentent de nombreuses comorbidités qui sont des facteurs d'exclusion des protocoles cliniques. Or ce sont aux patients poly morbides et polytraités que les molécules vont être prescrites.

4) Elle insiste sur les études de qualité de Vie qui ne sont pas la cerise sur le gâteau mais la dernière roue du carrosse des essais cliniques. 

Commentaire personnel : Dans un système où la majorité des 71 molécules anti cancéreuses (tumeurs solides réfractaires et/ou métastase et/ou avancées) qui ont obtenu de la part de la FDA une autorisation de mise sur le marché augmentent l'espérance de vie globale de 2,1 mois (LA) ! Il est clair que l'appréciation de la qualité de vie durant cette (très) courte période est primordiale pour informer le patient dans le cadre d'une décision partagée.

5) Elle nous fait remarquer que les essais cliniques sont parfois le seule façon pour les patients d'accéder à des traitements. Voir dans les questions, celle d'une journaliste de UFC Que choisir : a-t-on intérêt à participer à des essais cliniques ?

6) Les représentants des patients sont trop souvent mal informés pour l'élaboration des essais ou pour l'analyse de ces essais car on ne leur fournit pas des dossiers complets.

7) Les patients ont un manque d'information sur les protocoles mais surtout la décision partagée se réduit, dit-elle, chez certains médecins à une explication desdits protocoles et no à une information éclairée sur les choix possibles (moi : selon les valeurs et les préférences des patients).

8) Elle souligne, à l'instar de Florian Naudet, qu'il est très difficile de retirer du marché une molécule qui n'a pas fait ses preuves.

J'ai été impressionné par la qualité des éclairages qu'elle a donnés.


Le "représentant" de la HAS


Voir la vidéo ICI.

Plaidoyer pro domo pour la HAS qui est belle, intelligente, intègre, efficace, efficiente, qui sait gérer les industriels mais qui a du mal quand même. Où sont les patients ?

Le rôle de la HAS pour accélérer les autorisations rapides de mise sur le marché des médicaments et l'allusion à la fameuse tribune (ICI) où les liens d'intérêts ont été peu déclarés et à la contre tribune (LA) qui reprend nombre de propos que l'on n'a pas entendus lors de la réunion Prescrire (j'en reparlerai au moment des questions).

La petite musique sur la Santé publique, que l'on avait déjà entendue dans l'intervention précédente, fait un peu rire quand on sait qui décide de développer des molécules : les industriels.

Une comparaison entre les patients et les avions dont nous avons déjà dénoncé la stupidité mille fois et nous citerons un blog (LA) pour montrer combien c'est inapproprié.

Des propos lénifiants sur la surveillance post AMM dont on sait qu'elle ne sert à rien. Adam Cifu et Vinay Prasad sont des lectures mises à l'index par la HAS : Medical Reversal.

Rappelons également mais quand j'ai pris la parole pour poser des questions, le modérateur ne pouvait me laisser parler trop longtemps, et donc que je n'ai pu mentionner que la HAS est, d'une part, critiquée constamment par le Revue Prescrire pour ses publications sur la prise en charge des maladies (guides...) et d'autre part mise en cause pour son manque d'indépendance par le Formindep (LA)...

Nous avions un bisounours. Il a tenu un discours de bisounours.


Voir la vidéo : LA.

Le "représentant" des patients de l'AFM (Téléthon)



Beau plaidoyer sur les maladies rares, orphelines, et là il est dans son domaine.

1) Il souligne que dans les maladies rares il est possible de remettre en cause, en raison de cette rareté, les études randomisées vs placebo, notamment quand les maladies sont rapidement mortelles, quand la taille d'effet est forte et il prend l'exemple de l'amyotrophie spinale chez le tout petit enfant.

2) Mais aussi que les critères intermédiaires, dans ce type de maladies, sont parfois pertinents et suffisent.

3) Il met en avant des études en vie réelle qui sont dans le cas de ces maladies nécessaires.

4) Il souligne l'intérêt de l'accès compassionnel aux médicaments...

5) Remarque personnelle Il est intéressant de noter que la remise en cause de la taxonomie des preuves en fonction de leur poids peut et parfois doit se justifier dans les maladies rares.


Il ne vous reste plus qu'à visualiser les deux dernières vidéos

Le débat (entre les participants).

La video est LA.

Les questions de la salle.

La video commence ICI

Je pense que c'est la partie la plus intéressante de la réunion car les intervenants se "lâchent". Et surtout parce que j'y apparais... (hi hi hi).


Conclusion : 

Prescrire a organisé une rencontre passionnante qui demanderait des développements et un suivi.

Merci.

Notes :

(1)

Janvier : 2014 : Ennuis mortels lors de la (non) remise de la pilule d'Or Prescrire : ICI
Mai 2014 : Rencontres Prescrire : LA
Octobre 2014 : Les prix Prescrire : ICI
Janvier 2015 : Le palmarès Prescrire 2014 :  LA

(2)  Je n'aurais pas l'impudence de rappeler que les rencontres-débats Prescrire ont invité dans le passé, et en grande pompe, Michèle Rivasi, alors députée européenne et qui se vantait, entre deux affirmations péremptoires et erronées sur les médicaments et notamment les vaccins, d'avoir initié bla-bla-bla, la déclaration des événements indésirables par les patients et qui se vantait un peu moins d'avoir confié, entre autres, la pharmacovigilance européenne aux seules firmes... Paix à son âme. C'est LA et pour ceux qui n'iraient pas cliquer : 

Lors des questions de la salle l'incontournable députée européenne Michèle Rivasi a mis en avant la possibilité qu'ont désormais les patients européens de signaler eux-mêmes les effets indsésirables en oubliant de préciser que l'Europe avait lâché la pharmacovigilance à l'industrie dans le cadre vide d'EudraVigilance (LA) (le fameux Paquet pharmaceutique de 2008). Un intervenant pharmacovigilant a souligné combien la déclaration par les patients des effets indésirables était de la poudre aux yeux qui allait augmenter le bruit de fond et empêcher de recueillir les vrais signaux.  Bruno Toussaint n'a pas été d'accord. Le père de Marion Larat, victime  de Méliane, est intervenu pour dire combien les choses avançaient et il a semblé très optimiste pour la simple raison que les informations étaient désormais données aux médecins. Il ne connaît sans doute pas l'inertie du milieu médical. Le professeur Giroux, pharmacologue à la retraite, a souligné combien la pharmacologie clinique n'était pas enseignée à la faculté et, en privé, m'a dit que cela allait en se détériorant. Irène Frachon a parlé, à la suite de Sophie Le Pallec,

(3) Il eût été intéressant de savoir, mais vous verrez que je ne l'ai pas fait lors des questions, si quelqu'un sur le devant de la scène, était traité par une molécule ou plusieurs (je blague, cela s'appellerait la DPM, le Déclaration Publique de Maladies). Par ailleurs : je sois hypertendu et bitraité.

jeudi 1 février 2024

La Revue Prescrire est malade. Episode 1 : un avis narratif personnel.



Introduction.

Je ne suis plus abonné à la Revue Prescrire depuis que je n'exerce plus.

C'est à dire depuis que je ne prescris plus.

C'est logique.

Mais il y a une autre logique. Quand j'étais encore abonné à la Revue Prescrire, cela faisait longtemps que  je ne la lisais plus ou que je la parcourais d'un oeil distrait car elle ne me calculait plus. Elle ne correspondait plus à rien de concret pour mon exercice de médecin généraliste.

La rubrique des nouveautés concernait des molécules -mab et autres prescrites initialement par des spécialistes hospitaliers et dont, moi, généraliste, n'en avait plus la gestion, sinon celle des possibles interactions médicamenteuses et des éventuels effets indésirables. 

Invalidation externe

La revue Prescrire n'y est pour rien : ce n'est pas elle qui tient l'agenda des nouvelles molécules. Et les nouvelles molécules suivent les lois du marché pharmaceutique. C'est en effet l'industrie pharmaceutique qui tient les manettes de la Santé publique en développant des traitements qui concernent des marchés porteurs, des marchés rentables, des marchés à fortes marges, des marchés parfois orphelins (qui sont des marchés porteurs et rentables pour de multiples raisons que Marc André Gagnon, qui a déjà été l'invité de la Revue Prescrire, a souvent développées), mais pas seulement.

Les traitements immunologiques dominent le marché dans toutes les spécialités médicales, parce qu'elles ont montré, pas toujours, un rapport bénéfices/risques favorable et ensuite parce qu'elles obtiennent des prix démesurés.

Le marché qui domine le marché, c'est la cancérologie, spécialité hybride qui ne tient aucun compte des médecins traitants et qui obtient des AMM à la pelle à des prix défiant toute concurrence. Au nom de l'innovation. 

Invalidation interne

Mais surtout : il y avait de moins en moins de médecine dans la Revue Prescrire. Et quand il y en a, c'est souvent de la médecine peu praticienne, peu pratique, très littéraire, non opérationnelle, non validée par l'expérience interne des rédacteurs.

Les relecteurs de la Revue Prescrire le savent bien : les critiques médicales qu'ils adressent sur des points pourtant cruciaux ne sont (pratiquement) jamais pris en compte par la rédaction.

La revue Prescrire est dominée par les pharmaciens.

Ce n'est pas une critique, c'est un constat.

Les pharmaciens ne font pas de médecine praticienne.

Il y a de moins en moins de médecins prescripteurs dans la rédaction de Prescrire.

Une carence originelle

Les médecins spécialistes non médecins généralistes ne sont pas abonnés à la Revue. Ou très peu.

C'est normal : la Revue été fondée pour échapper à l'emprise académico-universitaire et pour ouvrir le champs des prises en charge par les soins primaires non étudiées par les essais cliniques ou par les médecins hospitaliers. Exemple que j'aime beaucoup et qui m'avait été raconté par un des fondateurs lors d'un entretien : "Pourquoi prescrit-on des semelles orthopédiques ?" 

Cette carence est expliquée, entre autres, par le fait que les hospitaliers ont des fonctions de recherche, qu'ils ont du mal à accepter la critique de la recherche, et qu'ils pensent que l'EBM est un mirage puisqu'ils croient à l'Eminence Based Medicine, à l'avis d'experts, aux bruits de couloir dans les services et aux opinions du patron. Et à leurs intuitions personnelles.

J'exagère à peine.

Source : LA

On remarque donc que 4,6 % des lecteurs de la Revue sont des spécialistes non MG (on remarque également que la spécialité médecine générale n'est pas prise en compte par la rédaction de Prescrire !).

Un manque de réactivité.

La persistance d'une édition papier old school, l'indigence longtemps coupable de la version électronique, la dégradation constante de la qualité des Tests de lecture (antipédagogiques, aussi pertinents que des QCM d'ECN, c'est dire) de plus en plus payants font que les abonnements à la revue (les derniers chiffres sont légèrement en hausse... + 0,7 %) sont stables mais que la lecture est en baisse (expérience interne et constats chez de nombreux collègues qui n'ouvrent même plus la Revue).


C'est triste.

Le jour où Prescrire disparaîtra (qu'à Esculpa ne plaise) il n'y aura plus de contre-pouvoir, il n'y aura plus qu'une presse médicale sponsorisée, une presse médicale infiltrée par la corruption, le pouvoir et l'argent.

Il n'y aura plus que des agences gouvernementales infiltrées, entrées par l'industrie, inféodées au pouvoir politique, croupions, et seules quelques voix isolées se feront entendre mais le combat sera perdu.

Sur X, Linkedin et sur les différents réseaux sociaux ne donneront leurs avis que les médecins influenceurs (PU-PH, employés de l'industrie, chercheurs en quête de financements labos, ...) qui ne déclarent pas leurs liens d'intérêts et qui ne s'expriment pas encore, sauf erreur, sur Tik Tok, mais déjà sur Instagram.

Et cet avis sera toujours favorable aux molécules fabriquées par des laboratoires auxquels ils sont tenus par des accords financiers (pas forcément sur ces molécules mais sur d'autres) et qui n'oseront pas être défavorables de peur que les autres laboratoires craignent de leur donner de l'argent pour des études de seeding (d'implantation ou de pur marketing) ou pour animer (donner la bonne parole) dans un restaurant ou dans une salle de Novotel devant des collègues épuisés par leur journée de travail.

Il ne faut pas que cela arrive.


Episode 2 à venir : 

Rencontre-débat Prescrire 2024


C'est ICI.