lundi 2 juillet 2012

Elle vient de prendre une claque de son copain. Histoire de consultation 123


(Mise en garde : Les textes en italiques peuvent ne pas être lus par les lecteurs qui considèrent que les médecins généralistes sont des bobologues, des ignares, des demeurés, des inaptes, des débiles, des incapables de lire une analyse statistique, des résistants aux recommandations, des inertes thérapeutiques et qui estiment que la consultation de médecine générale n'est qu'un prétexte à délivrer des arrêts de travail,  des médicaments placebo et des médicaments dangereux, qui peuvent être les mêmes, d'ailleurs ; nous demandons donc expressément à Bernard Kouchner, Emmanuel Chartier-Kastler, Michaël Peyromaure, François Bricaire, Serge Halimi et autres disciples des précédents et aussi d'Elena Pasca de ne pas lire ces lignes en italique ; quant à ceux qui pensent que la réflexion épistémologique, sociétale, anthropologique, historique, analytique ou anti ananlytique est absente des cabinets de consultation des médecins généralistes, ils peuvent aussi s'abstenir)

Mademoiselle A, 23 ans, est venue avec sa (jeune) grand-mère qui s'occupe de ses trois petites filles depuis des années avec un fatalisme qui force mon admiration. La mère des trois filles qui ont toutes le même père (au contraire des deux derniers enfants que je n'ai jamais vus) est aux abonnés absents depuis de nombreuses années pour des raisons si complexes qu'un lacanien bon teint en dénouerait l'écheveau en deux coups de cuillère à pot, non, je plaisante, trop difficile de comprendre comment une mère peut à ce point se désintéresser de ses premiers enfants, pour les autres je ne sais rien,  et la jeune femme pleurote devant moi avec un bel hématome de la joue gauche (le frappeur doit être droitier).
Je n'ai pas besoin de poser de questions, elle n'a pas besoin de me parler, les faits sont là, elle en a pris une bonne.
Ce n'est pas la première fois (mais je ne le savais pas bien que je sois le médecin traitant, on est bien peu de choses, elle n'avait surtout pas envie que je le sache, apprendrais-je plus tard). Elle est décidée cette fois à porter plainte.
(Je ne ferai pas de longs développements sur la rédaction des certificats de coups et blessures, sur la façon de les rédiger, sur la façon de décrire les lésions et sur la façon d'estimer l'ITT - Incapacité Temporaire Totale - et sur l'immense hypocrisie qui entoure leur rédaction, la façon dont les services de police les reçoivent, la façon dont les avocats les utilisent ou les contre utilisent et la façon dont les magistrats... car il me faudrait une dizaine de posts différents pour en venir à bout tant les implications et les aboutissants sont nombreux et n'ont que rarement de rapports avec la médecine ; question sociétale quand tu nous tiens).
La grand-mère la regarde en coin, elle a beaucoup de choses à dire qu'elle va finir par dire mais je ne n'ai pas besoin de les entendre pour en connaître la substance.
J'interroge quand même la jeune femme et j'écoute même ce qu'elle raconte (bien que chacun le sache, les médecins généralistes n'écoutent jamais), j'examine, je rédige, je décide d'une ITT en mon âme et conscience.
"Qu'est-ce que tu comptes faire ?" (Je tutoie la jeune femme parce que je la connais depuis son premier dtpolio et, contrairement à Françoise Dolto, dont je n'ai jamais été un fan pour des raisons qui demanderaient là aussi, de longs développements, une thèse en Sorbonne, pourquoi pas ?,  qui exigeait que l'on vouvoie les nourrissons, ce qui n'est pas si idiot que cela paraisse, je n'ai jamais vouvoyé  les enfants et je continue, sauf exceptions, de tutoyer les jeunes femmes ou les jeunes hommes que j'ai connus enfants et que je tutoyais à cette époque ; la médecine générale, vous l'imaginez, est un puits sans fond où la société au sens large déverse des signes, des croyances, des habitudes, des coutumes, des légendes, des inférences et de signes sociétaux qu'il est impossible pour un médecin généraliste, serait-il de bonne composition, de connaître, de recenser de manière exhaustive et a fortiori de comprendre tant les points de vue sont différents, pertinents et déroutants)
"Heu."
Elle est surprise. Elle regarde sa grand-mère assise à sa gauche, sa grand-mère qui est encore dans le non verbal mais qui va s'en mêler, ce n'est qu'une question de temps.
"Je veux dire, tu imagines comment l'avenir proche ? - Rien. Vous aller me faire un arrêt de travail ? - Oui, certes. Mais ce n'est pas la question. - C'est quoi la question ? - La question c'est ton copain..."
Elle baisse les yeux, les relève, me sourit sans conviction, elle n'est pas prête à me dire la vérité...
Silence.
Je la regarde et ses yeux charbonneux m'évitent.
La grand-mère a décidé que c'était son heure : "Docteur, dites-lui qu'il faut en finir avec son copain. Elle doit le quitter... Et puis, il y a le bébé..."
Ah oui, y a un bébé. Je n'avais pas oublié mais j'avais mis de côté. La jeune femme prenait la pilule, elle s'est retrouvée enceinte ("Je vous assure, je ne l'ai jamais oubliée..."), au début elle voulait garder, puis non, puis oui et, finalement elle a gardé. Le gamin a sept mois, il s'appelle B. Elle le fait suivre à la PMI (il aura donc droit à tous les vaccins de la terre et il en a déjà eu un paquet, à sept mois, je l'ai vu en consultation, dans les PMI il y a de moins en moins de monde et les rendez-vous ne peuvent pas toujours être assurés aux dates fixées par le CTV ou Comité Technique de Vaccination, les dates fixées en fonction des taux d'anticorps retrouvés dans les grandes études menées sur d'énormes populations de très peu de nourrissons, des dates politiques, pas scientifiques puisque, contre toute logique, elles ne sont pas les mêmes dans tous les pays de l'Union Européenne, je m'arrête, je m'égare, je voulais seulement dire ceci : la seule fois où j'ai vu ce bébé je lui ai fait un infanrix hexa car c'était le vaccin prescrit par la PMI et, donc, contrairement à mes principes, et puisque la vaccination contre l'hépatite B avait été commencée, pour ne pas inquiéter la jeune femme qui avait déjà de bonnes raisons de s'inquiéter, j'ai donc vacciné son bébé non sans lui avoir quand même dit que, moi, généralement, je ne vaccinais pas contre l'hépatite B, elle m'a demandé pourquoi et je lui ai dit que je préférais ne pas le faire en raison des risques de maladies auto immunes possibles comme la sclérose en plaque, par prudence, elle ne savait pas quoi me dire, j'avais comme un inconscient assené des faits qu'elle ne connaissait pas, des faits controversés par la communauté scientifique internationale, des faits qui pouvaient n'être qu'un avis d'expert, je suis le con des experts vaccinaux et elle est la conne de son médecin, son médecin qui balance au coin d'une phrase, et contrairement à tout ce qu'elle aurait pu entendre ici et là, que la vaccination contre l'hépatite B, notamment chez le nourrisson, n'était pas si inoffensive que cela, je me suis comporté en expert privé dans le huis clos de mon cabinet, sans que Robert Cohen puisse m'apporter la contradiction ou Daniel Floret en personne, du haut de sa compétence expertale reconnue par le gouvernement français, tiens, le gouvernement a changé et Daniel Floret est toujours là, fier comme un vaccin hexavalent bousté aux squalènes, non, ce n'est pas vrai, pas de squalènes dans l'infanrix hexa, ne faudrait-il pas faire quelque chose ?, et donc, je me répète, je reviens à ma consultation, j'ai joué au malin, au type qui sait tout avec une jeune femme qui prenait déjà des beignes dans la figure et qui ne m'en avait pas parlé par peur que je lui balance un avis d'expert que les jeunes femmes qui se font taper par leur, je ne sais comment dire, copain, compagnon, père de son enfant, petit ami, concubin, sont des ou des..., elle était inquiète tout d'un coup, inquiète non pas d'une hypothétique sclérose en plaque, je ne pouvais pas lui décliner l'étude Hernan, inquiète simplement que je ne "fasse" pas le vaccin à son bébé, pour le protéger...).
"Grand-mère... Laisse-moi tranquille, si je suis venue c'est pour avoir un certificat et porter plainte... - Oui mais tu devrais dire au docteurdu16..."
J'écoute donc ce que je sais déjà : la jeune A vit chez sa grand-mère avec son bébé et voit son copain le week-end. Et le dernier week-end, nous sommes lundi, elle a pris un pain dans la figure.
Pas méchant le pain : la pommette n'est pas fendue, l'os malaire n'est pas cassé, dans quelques jours il n'y paraîtra plus.
Je ne savais pas, en revanche, comme je vous l'ai dit, que ce n'était pas la première fois, mais j'apprends aussi de la grand-mère, que ce n'était pas la deuxième fois non plus, qu'avant la naissance du bébé il le faisait déjà.
"Alors..." je relance la conversation qui s'était un peu éteinte.
Elle baisse les yeux encore une fois. Je ne suis pas sur la bonne voie.
"Elle ne veut pas rompre" ajoute la grand-mère.
Nous en sommes arrivés au point crucial de la consultation de médecine générale.
(Il n'est pas possible d'entamer une relation psychothérapeutique avec cette jeune femme qui n'en fait d'ailleurs pas la demande. Pour des raisons de statut et de compétence. Pour des raisons de statut car la consultation de médecine générale ne peut devenir un lieu de psychothérapie de type analytique ou non alors que la personne que nous avons en face de nous est déjà une patiente somatique que nous avons touchée, examinée, et cetera. Pour des raisons de compétence car il me semble (et c'est un euphémisme) que cela mérite une formation pratique, quelle que soit la technique utilisée (mais la technique est aussi très importante d'un point de vue philosophique, idéologique, scientifique, pratique et autres, je pourrais développer), mais que cette formation pratique est impossible à moins que le médecin généraliste ne se spécialise... Je m'explique : les médecins généralistes ont besoin de formation pratique dans nombre de domaines que la Faculté de Médecine ne leur a pas enseignés, et qu'elle ne pouvait leur enseigner puisqu'elle n'en connaît ni l'alpha ni l'omega, et il n'est pas matériellement  et intellectuellement possible que les médecins généralistes puissent y arriver, il est donc nécessaire qu'ils se spécialisent et, en se spécialisant, on finit par voir des malades pour lesquels on s'est spécialisé et, ainsi, on finit par oublier que l'on était généraliste.)
Crucial, car il faut choisir.
Choisir en tentant de ne pas faire plus de mal que de bien et, en même temps, ne pas rater le moment de dire ce qu'il faut dire au bon moment, car le mal peut rapidement l'emporter sur le bien.
Crucial, car l'interventionnisme (c'est à dire l'arrogance médicale, pour simplifier, ou l'avis d'expert, ou l'avis de gourou) peut être aussi néfaste que le non interventionnisme (au nom du respect des valeurs et des préférences du patient et de la neutralité).
Que faut-il faire ? Bien malin celui qui pourrait donner un réponse unique qui pourrait convenir à tout le monde.
Sans compter la relativité des opinions qui peuvent être vraies ou fausses historiquement mais refléter à un moment le consensus (coucher les enfants sur le ventre) et être dangereuses et, dans le cas cité, être très dangereuses ; sans compter que le médecin peut en être à un stade de son développement personnel qui pourrait lui faire proférer des opinions qui ne vont pas dans le sens de l'histoire au moment donné et, surtout, être néfastes au patient qu'il a en face de lui ; sans compter qu'il pourrait arriver que la "bonne" opinion à fournir au patient est tout à fait contraire à la morale dite commune et à celle, accessoirement, du médecin ; on le voit, tous les cas de figure sont possibles.
"Je crois", finis-je par me décider, "qu'il faut que tu analyses la situation vis à vis de ce garçon. Je suis prêt à t'accorder que tu l'aimes, je suis prêt à comprendre que tu tiens à lui, mais je vais te dire ce que je répète depuis trente-deux ans que je suis médecin généraliste : quelqu'un qui t'a mis des coups comme cela, qui l'a fait plusieurs fois, ne te demande pas s'il t'aime, si tu l'aimes, s'il sera ou non un bon père, quitte le. Pars. Ne le laisse pas recommencer. Ne lui donne pas l'occasion de le refaire, de se montrer violent avec toi. S'il l'a fait une fois il le refera..."
La grand-mère me fait les yeux doux, ce qui ne me rend pas particulièrement content.
"Pour l'instant, je vais faire une pause" répond la jeune femme.
Mon boulot ne fait que continuer.



mardi 26 juin 2012

Hospitalisation A Domicile : cauchemar à domicile ! Histoire de consultation 122


J'ai hésité un moment, et, en accord avec Monsieur A et sa femme, nous sommes convenus qu'il n'était plus possible d'y arriver seuls, je veux dire, la famille, les infirmières libérales et moi-même, Madame A est épuisée, son mari commence à être agressif : les soins post érysipèle sur les faces antérieures et postérieures des deux membres inférieurs sont devenus ingérables et l'hospitalisation qui avait été programmée n'a pas fait évoluer les lésions dans le bon sens.
Monsieur A, 86 ans, a une lourde pathologie : coronarien dilaté hypertendu dyslipidémique bronchitique chronique. Avec le traitement ad hoc comprenant aussi previscan pour cause d'antécédents de phlébite compliquée d'embolie pulmonaire. Il y a vingt ans son cardiologue lui avait donné deux ou trois ans à vivre (le cardiologue est mort prématurément depuis d'une affection non cardiovasculaire).
J'ai hésité car je sais (voir ICI) quel traumatisme peut entraîner l'intrusion brutale de l'hôpital à domicile et le comportement hospitalier des personnels dans une zone privée.
Le fait que le patient habite dans une tour HLM dont l'état ne cesse de se dégrader avec le temps (hygiène, dégradations multiples) ne rend pas les choses plus faciles. Nous en reparlerons peut-être.
Quoi qu'il en soit, j'ai d'abord prévenu le patient et sa femme de ce qui allait se passer. J'ai prévenu les infirmières libérales qui étaient en charge des soins locaux et qui, manifestement, n'ont pas été préoccupées quand je leur ai annoncé qu'elles allaient être mises hors jeu.
Cela s'est fait assez vite et nous avons pris rendez-vous à domicile avec le patient, sa femme et les intervenants, l'infirmière chef et, semble-t-il, la chef administrative.
J'ai écouté poliment et j'ai pris les devants en expliquant devant les dignes représentantes de l'hôpital quel traumatisme cela pouvait constituer de voir débarquer chez soi l'institution dans toute sa grandeur. Les deux femmes ont réagi avec calme et m'ont souri quand j'ai développé quelques thèmes qui me sont chers, à savoir que l'hospitalisation à domicile (HAD) se comporte parfois en terrain conquis, que ses membres arrivent souvent à n'importe quelle heure, ne portent jamais de badge et, pire, ne se présentent pas, comme si les familles pouvaient savoir par avance qui était l'infirmière chef, la responsable de la coordination, la psychologue, l'aide-soignante ou le livreur de médicaments que l'HAD ne connaît pas la pudeur des lieux, la pudeur des corps, la pudeur de la politesse. Le même sourire que lorsqu'elles doivent annoncer à un patient et à sa famille que cela va mal : extase rentrée.
J'ai résumé la situation, les soins, les prescriptions et j'ai réécrit des ordonnances car il n'est pas possible en HAD d'acheter les médicaments à la pharmacie du coin. 
J'ai donc décidé que les infirmières libérales ne viendraient pas faire les pansements quotidiens en association avec les infirmières non libérales afin de responsabiliser tout le monde et d'éviter toute surenchère ou tout malentendu sur la qualité des soins.
Tout roule ?
Pas exactement.
Deux jours après, les antibiotiques que j'avais prescrits n'avaient pas été délivrés et, deux jours plus tard ils l'avaient été mais en conditionnement hospitalier, boîte de cent comprimés alors que moins du quart aurait suffi pour ce brave patient. 
Les pansements que j'avais prescrits, ils n'en avaient finalement pas en magasin et la coordonnatrice m'a proposé par téléphone de prescrire autre chose, d'autres pansements (très chers) et sûrement téléguidés par la visite médicale hospitalière par le biais des marchés également hospitaliers.
Mais surtout : l'HAD sonne à toute heure chez ces pauvres gens. L'aide-soignante passe pour les toilettes entre huit heures et une heure de l'après-midi et on ne discute pas, c'est comme ça ; les livreurs de matériel peuvent sonner à onze heures du soir pour apporter une caisse de compresses dont on se rendra compte le lendemain qu'elles ne sont pas à la bonne taille ; les infirmières, les aide-soignantes changent tout le temps, et Monsieur A, âgé, vivant dans son HLM depuis bientôt quarante ans, est perdu, il ne sait plus qui fait quoi et quoi fait qui, son environnement est perturbé, je finis par me demander si je n'ai pas fait une grosse bêtise en le confiant à ces fous furieux ; quelques jours après la femme du patient m'appelle pour me dire que les patchs anti douleurs sont manquants et que je dois faire une ordonnance à part pour qu'on puisse aller les acheter à la pharmacie habituelle ; que l'HAD a piqué du previscan à mon patient pour en donner à un autre qui n'en avait pas... Non, non, je ne plaisante pas, je ne raconte pas d'histoires, c'est vrai. 
Aujourd'hui la femme du patient est venue au cabinet pour prendre des médicaments pour elle et m'a dit qu'elle allait bientôt les envoyer paître.
A noter que sur le plan local, cela va mieux. La qualité des soins locaux et l'autorité de l'hôpital pour imposer au patient de ne pas dormir dans son fauteuil et d'utiliser le lit médicalisé, ont fait le boulot. Madame A est moins fatiguée car ce n'est plus elle qui fait les toilettes de son mari...
Il y a quand même des raisons d'espérer...
Et le bon docteur traitant, il fait des visites à domicile, il met des rustines, fait des sourires, pousse des coups de gueule, tente de ne pas perdre pied dans ce dédale administratif où le souffle de l'hôpital s'engouffre dans ce petit appartement situé au deuxième étage, avec quelques cafards qui se baladent sur le palier.
Tout le monde est épuisé : Monsieur A, Madame A et, probablement, le personnel de l'HAD.
Mais, comme dirait l'autre, le bilan est globalement positif. Enfin, à court terme. les jambes coulent moins, l'érysipèle se porte mieux, et l'INR se balade moins.
Le fax installé ne fonctionne pas.
Un détail mineur.
Les médicaments prescrits finissent par arriver.
Mais quelle débauche d'énergie, quelle débauche d'argent.
Moi, cela ne change pas grand chose, je passe peut-être un peu plus souvent. Et j'ai l'impression que la famille est contente.
Dur, dur.
Nous avons probablement rendu service à ce patient (encore qu'il faille se méfier et penser à l'avenir proche) mais j'ai bouleversé l'équilibre précaire de cette famille (en apportant des améliorations et en pointant du doigt certaines insuffisances d'organisation dont la femme du patient s'est rendu compte et s'est déjà sentie coupable) et je ne parle pas de l'augmentation des coûts. Croire que l'HAD puisse être une solution d'avenir est un leurre car la mobilisation de ressources est excessive. Me semble-t-il.

Tout le monde se pose la question du rôle de la médecine générale et pleure des larmes de crocodile sur sa disparition.
Le rôle du médecin généraliste, dans le cas précis le docteurdu16, eût été (mais sera désormais) de résister à la tentation de la dévolution des pouvoirs à l'hôpital hors les murs, de résister à la demande de la famille dépassée, à s'interroger avec les infirmières libérales (qui n'en peuvent mais en raison de la lourdeur de leurs journées) sur l'organisation des soins.
Il ne s'agit que d'un cas d'espèce.
Dans d'autres situations nous utiliserons, certainement avec profit, l'HAD. Mais nous y réfléchirons à deux fois.

jeudi 21 juin 2012

Le boîtage pharmaceutique : 28, 30, 60, 84 ou 90 ?


Un des problèmes mineurs de la délivrance des médicaments par le pharmacien est celui des durées de traitement par boîtage dans le cadre des maladies chroniques.
Le problème majeur étant celui de la délivrance des génériques (nous n'y reviendrons pas).

Je prescris donc à mon malade ALD préféré le 21 juin 2012 :
  1. Statine : un comprimé le soir pendant trois mois 
  2. Acétyl salicylique poudre  75 : un sachet par jour pendant trois mois 
  3. Bêta bloquant : un comprimé par jour pendant trois mois
  4. Sulfamide hypoglycémiant : un comprimé matin, midi et soir pendant trois mois
Eh bien, mon patient préféré, il n'est pas content.

Pour plusieurs raisons : 
  1. La statine n'existe qu'en boîtes de 84 (j'aurais dû donc écrire un comprimé les soir pendant 12 semaines)
  2. L'acétyl salicylique poudre existe en boîtes de 30
  3. Le bétabloquant est en boîtes de 28 (idem pour les 12 semaines)
  4. Le sulfamide hypoglycémiant est en boîte de 60 (je ne sais pas ce que j'aurais dû faire)
Je résume : je prescris pour trois mois un traitement de fond pour un diabéto-hypertendu et le patient va devoir se rendre tous les mois à la pharmacie pour l'aspirine et pour le bêtabloquant, il va manquer de statine au quatre-vingt cinquième jour et il aura trop de sulfamide hypoglycémiant au bout du quatre-vingt quatrième ou du quatre-vingt dixième jour...
On me dira que c'est facile à résoudre, ce genre de problème (mineur), le pharmacien est là pour y pourvoir : c'est lui qui calcule, c'est lui qui délivre, et il a le droit, une fois par an, je crois, de délivrer du dépannage pour les traitements chroniques.

Il y a quand même parfois des rouages qui se grippent.
  1. Quand le pharmacien ne donne que pour un mois la statine "parce qu'il n'a pas de grand modèle" (un euro de franchise en plus pour le patient)
  2. Quand le pharmacien, pour le dépannage, demande au médecin (qui n'a que cela à faire) de refaire une ordonnance (ce qui veut dire faire cela entre deux, modifier une ordonnance toute faite pour trois mois en changeant et les boîtes, passer d'un grand modèle à un petit modèle, et changer la durée de prescription) de dépannage
  3. Quand le malade râle et dit toujours la même chose : pourquoi des boîtes de 28, pourquoi des boîtes de 84 alors que les mois font 30 jours ? Je suis épuisé de ne pas trouver de raisons à ce mic mac administratif et de dire au patient que le système semainier serait plus logique : tous les ans il y a 52 semaines.
Si quelqu'un, en lisant cela, pense qu'il s'agit d'une attaque contre les pharmaciens, c'est qu'il a l'esprit mal tourné...
Je pense qu'ils doivent être encore plus embêtés que nous.
Quand les choses nous dépassent....

(Illustration : Magasin MMS de New-York)

mardi 19 juin 2012

Un entretien (presque) imaginaire avec Elena Pasca


Docteurdu16 : Elena Pasca, je suis tellement content de vous rencontrer et de vous faire connaître, si jamais quelqu'un pouvait vous ignorer, tant votre blog Pharmacritique est devenu le phénix des hôtes d'internet.
Elena Pasca : Vous trouvez ? Je crois effectivement que j'ai réussi à imposer un style inimitable qui est celui de l'expression libre sur la santé et sur tous les lobbies et conflits d'intérêts qui la mettent en danger.
Doc16 : Votre cursus scientifique est par ailleurs véritablement remarquable : philosophe vous réclamant de L'école de Francfort, vous êtes capable d'embrasser à la fois la philosophie et toutes les sciences sociales, vous avez aussi beaucoup travaillé en psychanalyse et, sans doute, seriez-vous capable de travailler dans n'importe quel domaine touchant à l'interdisciplinarité du fait social.
EP : Vous oubliez de dire que je suis germaniste et que je pourrais écrire des livres entiers sur la psychologie des médecins et des musiciens et, dans une moindre mesure des journalistes, mais surtout, et c'est ma fierté, j'interviens pour écouter, aider, conseiller des patients maltraités et mal traités par les médecins, et dans de nombreux pays.
Doc16 : Il est également frappant de constater que vos immenses connaissances médicales tranchent avec la médiocrité du discours ambiant. Je pense notamment que vous êtes devenue la spécialiste mondiale de l'endométriose comme en témoignent les commentaires et les conseils médicaux que vous prodiguez sur votre site à l'attention de toutes ces femmes qui n'ont pas eu la chance ou la clairvoyance de consulter le docteur David Redwine.
EP : Je suis contente que vous ayez remarqué cela. Après les recherches sérieuses que j'ai menées sur le sujet je suis arrivée à la conclusion que la seule solution dans l'endométriose est la chirurgie par exérèse radicale conservatrice, et aucune autre technique, de toutes les lésions en même temps. Vous pourrez lire avec profit ce que j'ai écrit et qui peut s'assimiler à un véritable Etat de l'Art.
Doc16 : Ce qui frappe également c'est que vous ayez réussi à développer une sorte d'auto-analyse médicale à propos de vous-même, grâce probablement au recul que vous avez construit par la fréquentation de la psychanalyse, et qu'ainsi vous soyez devenue une formidable auto diagnosticienne.
EP : Effectivement, me concernant, c'est moi qui ai posé tous les diagnostics et trouvé les médecins les plus susceptibles de m'orienter vers ceux capables de prendre cela en charge et j'ajoute que tous mes diagnostics ont été confirmés.
Doc16 : C'est extraordinaire. Il semblerait que, contrairement à la bien-pensance actuelle, vous éprouviez une sincère détestation pour les médecins généralistes et que vous fondiez votre sentiment sur des preuves intrinsèques fortes.
EP : Et comment ! Disons que je suis contre la médecine libérale et, plus encore, je ne supporte plus la posture victimaire et le complexe d'infériorité des médecins généralistes.
Doc16 : Il est vrai que les expériences que vous avez eues avec les nombreux médecins généralistes que vous avez consultés ont été particulièrement désastreuses.
EP : Pour ma part j'avais trouvé les spécialistes hospitaliers avant d'avoir le médecin traitant et ce sont les spécialistes hospitaliers qui gèrent, sans passer par le médecin généraliste. Il faut dire que mes soucis de santé sont très compliqués...
Doc16 : Quelle manifestation d'indépendance par rapport à l'autorité ! On sent là tout le travail que vous avez accompli sur vous-même et votre absence totale d'ego ! Vous n'aimez donc pas beaucoup les médecins libéraux et, plus encore, les médecins généralistes... au point de leur dénier le rôle de médecin traitant.
EP : Vous ne trouvez pas qu'il y a de quoi ? Mes expériences personnelles s'ajoutent à cela : erreurs médicales en série, si bien qu'après avoir changé je ne sais combien de médecins, tous plus médiocres les uns que les autres, après avoir perdu beaucoup de temps à écouter beaucoup d'inepties et à me voir prescrire n'importe quoi, j'ai dû à un moment donné les envoyer balader et me mettre à apprendre et à chercher.
Doc16 : Finalement, vous ne dites faire confiance qu'à quelques médecins choisis par vous et vous en citez deux, Claude Béraud et Marc Zaffran, dont le premier est à la retraite et le second à la retraite de la médecine générale, n'est-ce pas symptomatique d'un certain renoncement ?
EP : Je ne crois pas. Je trouve simplement qu'ils sont exceptionnels et professionnels au sens anglo-saxon,...
Doc16 : On vous sent fascinée par la médecine anglo-saxonne...
EP : Il est vrai que les valeurs éthiques anglo-saxonnes comme le shared decision-making, l'empowerment ou les patients' values and preferences mériteraient d'être transplantées et enracinées en France. Sans compter qu'un Sunshine Act à la française serait le bienvenu pour lutter contre les influences délétères de l'industrie pharmaceutique.
Doc16 : Convenons que le système de santé américain est excitant : le plus onéreux du monde, le plus inégalitaire de tous les pays développés, celui dont les indicateurs de santé publique sont les plus catastrophiques, notamment pour les plus emblématiques comme la mortalité infantile, celui des plus grandes firmes pharmaceutiques mondiales dont on dénonce à l'envi les pratiques frauduleuses... Mais revenons à vous-même, votre détachement et votre manque d'arrogance, votre souci du respect du secret professionnel, votre ouverture d'esprit, ne les avez-vous pas acquis dans la douleur ?
EP : C'est surtout ma grande culture philosophique, ma formation psychanalytique, les articles que j'ai écrits dans de grandes revues, qui m'ont façonnée, qui m'ont "blindée" et qui me permettent de dominer  toutes les petites et injustes polémiques de la blogosphère (je garde tous les textes), toutes les mesquines critiques (que je garde en réserve pour confondre leurs auteurs), tous les commentaires acides (que j'ai décidé d'un commun accord avec moi-même de ne plus publier) qui montrent combien le corps médical dans son entier résiste à mes analyses décapantes, ce qui confirme combien elles sont pertinentes. Je resterai donc à la pointe du combat des citoyens.
Doc16 : Merci encore Elena Pasca.

Le blog Pharmacritique est ICI.
Pour l'endométriose : LA.
Illustration : Max Horkheimer (au premier plan, à gauche), Theodor Adorno (au premier plan, à droite), et Jürgen Habermas en arrière plan, à droite, en1965 à Heidelberg.

dimanche 17 juin 2012

Comment, à partir d'une réflexion sur un concept, l'inertie clinique, tenter d'augmenter la soumission ? Une contribution du docteur MG



Tout médecin généraliste est confronté chaque jour à la lutte contre la survenue de complications dans le cadre de la prise en charge des maladies chroniques.
Cette lutte quotidienne est basée sur un traitement adapté et son suivi sur le long terme.

L'adhésion des patients à leur traitement conditionne l'observance de ceux-ci aux traitements prescrits.
Depuis quelque temps l'attitude des médecins dans cette prise en charge des pathologies chroniques a été étudiée et le concept d'inertie clinique défini.
L'inertie clinique peut être définie (http://www.cnrtl.fr/lexicographie/inertie) comme une immobilité dans la relation thérapeutique médecin/patient, ou, pour le dire autrement, comme le fait de ne rien changer au fil du temps dans le traitement d'un patient.
Un article de mai 2011 dans Consensus cardio pour le praticien écrit par le Professeur Serge Halimi a attiré mon attention  (http://www.consensus-online.fr/IMG/pdf/p34-36).

En médecine, il est important de se questionner en permanence.

Préoccupé comme beaucoup par la prise en charge optimale de mes patients atteints de pathologies chroniques je me suis dit que j'allais apprendre quelque chose pour l'amélioration de ma pratique. 

Première remarque sur l'auteur : le Professeur Serge Halimi, diabétologue, a déjà pas mal fait parler de lui pour ses liens avec l'industrie pharmaceutique.
Ainsi, en 2009 UFC Que Choisir avait porté plainte contre lui (et 8 autres professeurs). (http://www.atoute.org/n/breve30.html), http://www.mypharma-editions.com/industrie-pharmaceutique-lufc-que-choisir-depose-une-plainte-contre-neuf-medecins-pour-conflit-d%E2%80%99interet) pour conflit d’intérêts.
Mais ne faisons pas de procès d'intention, ne condamnons pas avant même d'avoir pris connaissance de ce qu'il écrit.

 L'accroche est d'emblée intéressante :" un concept émergent."
C'est en effet une notion récente qui augure donc des informations prometteuses. 

"Cette incitation à l’atteinte des objectifs « durs » et précis est un concept assez récent. Il découle nécessairement de l’établissement préalable de recommandations, de leur rédaction, de leur diffusion et disponibilité, de leur connaissance et appropriation par les praticiens."Ce concept d'inertie clinique n'est donc pour l'auteur rien d'autre que l'attitude consistant à ne pas atteindre les objectifs fixés dans les recommandations .
J'avoue être déçu car c'est être très partial dans son approche.

 "Ces études aboutissent ainsi à des «preuves » suffisamment robustes pour que l’on parle d’Evidence Based Medicine (EBM) ou médecine basée sur les preuves. Sont ainsi établies des « Recommandations » ou « Guidelines » qui devraient être connues de tout praticien.Ces recommandations c'est EBM (http://fr.wikipedia.org/wiki/Evidence_Based_Medicine), je suis rassuré car qui peut être en désaccord avec cette notion ?
Cependant j'ai souvenir que l'atteinte des objectifs « durs » a été évalué et que justement cette attitude était délétère c'est à dire qu'elle faisait plus de mal que de bien.  (ICI : http://docteurdu16.blogspot.com/2009/03/diabete-le-mieux-est-lennemi-du-bien.html   et LA : http://qualitysafety.bmj.com/content/16/1/6.abstract)
Alors, où sont-elles  ces « preuves suffisamment robustes » ?
Est-ce bien EBM comme annoncé ?
Aucun renvoi dans le texte sur une référence, j'aurais pourtant apprécié.

 La définition de l'inertie clinique est donc :  « non-suivi des recommandations par le médecin » 

Quelles en sont les causes ? "Il n’est pas rare de voir des spécialistes attribuer cette attitude prioritairement aux médecins généralistes, les considérant insuffisamment motivés et actifs face à des résultats n’atteignant pas les objectifs recommandés, alors qu’ils sont informés de la teneur des recommandations publiées et disponibles." Mais tout de même:"Mais les médecins généralistes ne sont pas seuls concernés. Dans le domaine du diabète ou de l’hypertension artérielle, des études montrent que certains spécialistes s’avèrent aussi insuffisamment actifs"
J'avoue que pointer ainsi du doigt une partie de la profession médicale n'est pas « sain », mais c'est, il me semble un « sport national » ( ref  http://www.atoute.org/n/article257.html).
Cependant, hors de toute polémique, il aurait été intéressant que l'auteur s'interroge sur le pourquoi de l'attitude peu motivée et peu active des médecins qu'il dénonce.

 "Les limites du concept : vraie et fausse inertie
. Cette attitude peut aussi résulter d’un choix plus délibéré du praticien pour diverses raisons." A bon quand même !!!!!Mais c'est un peu « court »



"La faute aux recommandations ?"
Enfin elles vont être étudiées avec un regard critique et peut être même remises en cause ?Eh bien non,  juste la forme est critiquée, pas le fond:"En somme, nombre de recommandations sont trop complexes ou à l’inverse trop générales pour être applicables au plus grand nombre ou laissent de côté nombre de situations particulières, quoique non rares, qui ne sont pas abordées, du moins pas suffisamment détaillées."
Cela aurait été surprenant car il est à noter que le Pr Halimi faisait parti du collège d'expert de l'HAS responsable des recommandations pour le traitement du diabète de type 2, recommandations qui ont été abrogées par le Conseil d'état (le 27 avril 2011) sur plainte du Formindep pour cause de conflits d’intérêts.
Cependant il aurait été intéressant que l'auteur s'interroge sur le fond des recommandations qui n'étant pas conformes aux dernières données de la science, pourraient expliquer au moins en partie la faible motivation d'une partie des médecins à ne pas les appliquer.

Quelles solutions propose donc le Pr Halimi pour réduire l'inertie clinique et donc améliorer le suivi des recommandations pourtant pour le moins problématiques ?

"Des solutions concrètes à l’inertie clinique ?"

1) " Les recommandations :.....  la participation à leur rédaction des omnipraticiens (voire de paramédicaux) aux côtés d’experts de spécialité est indispensable."
 Pourquoi faire une telle différence entre les professionnels de santé. Le système des « experts » qui prévalait jusqu'à présent est donc perfectible ? Ou est-ce « démagogique » ? Je laisse chacun se faire son opinion.


2) " La FMC : on reste, en France, dans l’attente d’une FMC organisée et financée par des fonds publics, si l’on tient à s’affranchir de l’influence supposée « perverse » des firmes pharmaceutiques. Pour ma part, diffuser un message sain dans le cadre d’une réunion sponsorisée par une firme pharmaceutique ne m’a jamais posé le moindre problème."
J'adore cette phrase. A elle seule , elle résume bien l'état d'esprit de l'auteur.


3) "L’organisation des soins est certainement en mesure de pallier, pour partie, cette difficulté d’appropriation des bonnes pratiques grâce à un travail en groupe sur des situations cliniques spécifiques. Ce travail « en réseau » (formation, coordination) est sûrement un facteur de réussite." Là je renvoie au billet du docteurdu16 qui fait parfaitement le point sur cette problématique   http://docteurdu16.blogspot.com/2012/06/les-reseaux-une-mode-qui-mennuie.html


4) " Les innovations thérapeutiques : n’en sous-estimons pas les contributions"
La aussi , les choses sont claires: l'auteur n'oublie pas ses « chers partenaires de l'industrie pharmaceutique ».


5)" Enfin, l’impact des paramédicaux est de plus en plus évalué."



Je vous fais grâce de la conclusion.
En tout cas la mienne est qu'un article comme celui là est symptomatique de l'état catastrophique de notre système de santé.
Le pire, je crois, est qu'un Professeur de médecine puisse écrire de telle chose en affirmant qu'il n'a aucun état d'âme, alors que justement il devrait en avoir en tant que médecin et par la fonction d'enseignant qu'il occupe.
Cet article est par ailleurs particulièrement problématique sur le fond car au lieu d'inciter les médecins à s'interroger sur leurs pratiques, à remettre en question en permanence leurs connaissances pour les actualiser, il incite à une seule chose : suivre des recommandations élaborées par les « experts ».
Quand on sait l'influence de l'industrie pharmaceutique à tous les niveaux de responsabilité de notre système de santé, développer de telles positions dans cet article,  ne cherche qu'à renforcer ce qui se faisait jusqu'à présent.
Or l'affaire récente du Médiator nous a montré de façon criante qu'il est urgent que les médecins  ne se laissent plus dicter leurs conduites thérapeutiques par ces experts manipulés par l'industrie pharmaceutique.

Cependant, on ne s'étonnera donc pas des propos rapportés récemment sur un forum de réflexion de nos pratiques , par une consœur au sortir d'une réunion :
"...aucun des médecins présents ne savait que l'HAS ne recommande pas de dépistage (dosage des PSA ) !!!! pour tous, la question de l'intérêt du dépistage ne se pose pas.
La première (et seule) réaction qu'ils ont eu quand je les ai informés de la position de l'HAS c'est "ce n'est pas normal, ça a du être truqué, la CPAM ne veut probablement pas payer pour le dépistage, les salauds" …

Ainsi, même quand la HAS prend des positions conformes aux données de la science (ce qui n'est pas le cas pour toutes les recommandations comme nous l'avons vu plus haut), beaucoup de médecins restant sous influence n'ont plus la capacité de faire la part entre « le bon grain et l’ivraie »

Docteur MG

Illustration : Sur l'image du haut on voit une bille s'éloigner en ligne droite depuis le centre d'un disque en rotation vers la bordure, c'est le point de vue d'un observateur extérieur. Sur celle du bas, on note la trajectoire parcourue par cette même bille sur le disque, c'est le point de vue du repère en rotation.

jeudi 14 juin 2012

Les réseaux, une mode qui m'ennuie.


C'est la mode des réseaux, je veux dire : des réseaux de soin.
Il y a aussi la mode de la multidisciplinarité, c'est dans le même genre.
C'est aussi la mode des déserts médicaux.
Un conseiller ordinal (le vice président du Conseil National de l'ordre des médecins), Jacques Lucas (ICI, via twitter) pense que la solution aux déserts médicaux, ce sont les réseaux.
Je le cite "... les jeunes générations ne veulent pas exercer de façon isolée. Cela n'est pas spécifique aux médecins ni même aux seules professions libérales. Les jeunes médecins veulent retrouver "en ville" le travail "d'équipe de soins" qu'ils ont connus pendant leur cursus hospitalier de formation... En bref : il faut créer un réseau territorial, entre médecins et autres professions de santé, ne laissant plus un praticien isolé avec des contraintes insupportables."
Il est possible que Jacques Lucas ait raison d'interpréter ce que veulent les djeunes médecins.
Personnellement, si je me suis installé en ville, il y a des lustres (le 5 septembre 1979), c'était justement pour fuir l'hôpital, sa hiérarchie, ses mensonges, son larbinat, son mépris des malades, son ignorance condescendante du "petit personnel", sa dictature des chefs, sa soumission à l'autorité, son arrogance, ses avis d'expert, sa collusion avec l'industrie pharmaceutique, ses mains au cul, et j'en passe.
Mon refus était aussi lié à ce que l'hôpital m'avait rejeté comme non conforme intellectuellement, j'avais raté trois fois l'internat de Paris, et, seul de ma sous colle, j'avais dû quitter le sérail. De la déception, probablement.
Croire qu'il était facile pour les jeunes médecins généralistes de s'installer en 1979 est aussi une erreur manifeste : il était très difficile de "faire" une clientèle nouvelle, il était très cher d'en acheter une, les médecins installés avaient la volonté farouche de garder leurs patients et de ne donner que des miettes aux nouveaux.

Travailler en réseau n'est pas une panacée.

L'expérience actuelle que j'ai des réseaux ou des pseudo réseaux me fait dire ceci : 1) cela soulage effectivement l'exercice quotidien (en cas de fin de vie à domicile, notamment) mais cela augmente les contraintes (réunions en soirée, réunions de coordination devenues lassantes et peu contributives) ; 2) j'apprends beaucoup de choses en tout début de participation mais il me semble que j'ai vite fait le tour (cela mériterait une formation pratique de deux heures une fois pour toutes) ; 3) cela me replonge dans les compromis hospitaliers et les situations intenables (cf. supra) que j'avais voulu fuir ; 4) il faut choisir à quel réseau appartenir car participer à tous revient à ne plus rien faire tellement ils sont dévoreurs de temps ; 5) appartenir à fond à un réseau signifie se spécialiser, ce qui ne me semble pas une bonne idée : l'exemple des réseaux toxicomanies me laisse un très mauvais souvenir ; 6) je préfère désormais appartenir au réseau de la médecine générale, réseau informel où ce sont les médecins généralistes qui tentent de mener le jeu.

Notre vice président du CNO, au lieu de s'interroger sur la faillite de l'hôpital, sur la faillite de l'enseignement de la médecine (générale) à l'hôpital, sur le numerus clausus aberrant, sur comment combattre les contraintes insupportables qui pèsent sur les médecins de ville, va de l'avant dans le sens de la mode des réseaux qui sont, aussi, parfois, des contraintes insupportables et des bras armés de l'incompétence administrative hospitalière transportée hors les murs.
Les réseaux sont, in fine, la reprise en main par les experts auto désignés hospitaliers, dont je ne nie pas les qualités pour ceci ou cela, de la médecine de ville décentralisée. La reprise en main manu militari de nos pratiques. Je m'explique : c'est dans le cadre de ces réseaux organisés en fonction d'une stratégie industrielle et marketing appelée en anglais le disease management, que la normalisation des pratiques s'exerce avec, en dépit et / ou contre les valeurs et les préférences des patients (voir ICI un rapport de l'IGAS écrit à l'eau tiède). Avec, en sus, ce n'est pas tout à fait le sujet mais il existe des zones de recoupement, la mode de l'Education thérapeutique. Qui pourrait critiquer l'Education thérapeutique ? Moi.
L'Education thérapeutique fait partie des tartes à la crème de la médecine "moderne". Car la modernité passe, sans nul doute, par tous ces mots plastiques (au sens illichien) qui ont perdu tout signifiant et tout signifié. On les a prononcés et / ou écrits et on a tout (rien) dit. Disons, et je vous propose d'écouter auparavant cette petite video sur l'Education thérapeutique où Dany Baud nous explique l'essentiel (ICI), que l'Education thérapeutique n'est pas faite pour que les patients prennent leurs médicaments mais pour qu'ils vivent leur maladie (conception industrielle vs conception EBM). Nous y reviendrons peut-être un jour.
Je peux donner des exemples qui se situent en amont, au coeur ou en aval des pathologies.
Disons, en introduction, que, selon moi, les réseaux ressortent de l'idéologie et de la pratique des groupes de conviction. On réunit des gens autour d'un animateur (expert) qui fait semblant de laisser les participants s'exprimer sur un sujet (la prise en charge des patients diabétiques, par exemple) et qui fait "accoucher" le groupe (c'est pourquoi on parle aussi de maïeutique) d'une pensée commune, évidente, de bon sens et opérationnelle. Les firmes utilisent les groupes de conviction pour vendre leur politique interne à leurs employés qui leur permettront de vendre la politique externe (argumentaire) aux clients (prospects). Vous traduirez en bonne médecine.
Le réseau diabète, par exemple, est sous l'autorité expertale du diabétologue de l'hôpital, ce qui signifie donc qu'il n'y a jamais de prescriptions de metformine en première intention, jamais de glibenclamide mais toujours du servier (du diamicron pour le diabète et du perendopril pour le rein), de la glitazone, du victoza et autres produits non évalués, sans compter monsieur tahor de chez pfizer et madame crestor de chez je sais plus qui ; la diététicienne (j'aime les diététiciennes parce qu'elles sont toujours tellement aimées par les patients, tellement propédeutiques, tellement je change d'avis tous les deux ans, tellement je suis pleine de bon sens, tellement politiquement correcte,...) ; l'infirmière pour l'insuline (avec le lecteur de glycémie à la dernière mode muni de consommables hors de prix...) ; le cardiologue dont les objectifs de PA sont de plus en plus bas, les objectifs de LDL inférieurs à 0,7 ; l'ophtalmologiste qui a le laser facile... ; ne parlons pas du néphrologue qui a longtemps préconisé le double blocage (IEC + IRA) sans beaucoup de raisons ; le podologue dont je ne dirai rien ; j'ai oublié quelqu'un ? Oui : le médecin généraliste qui cherche sa place et qui pourrait faire tout cela très bien tout seul une fois deux ou trois "trucs" pratiques appris. Mais surtout : le problème du diabète sucré est celui de la malbouffe et du poids de Big Food dans la société. Ainsi sommes-nous positionnés en fin de chaîne pour tenter de colmater les brèches induites par les comportements alimentaires malsains induits par l'alimentation industrielle. Je ne crains pas de me faire appeler hygiéniste si c'est ainsi que l'on appelle les gens qui n'acceptent pas le n'importe quoi alimentaire. La dépénalisation des graisses, du sucre et du sel est pourtant une des principales causes de la mise en réseaux des patients diabétiques.
Le réseau fin de vie ou soins palliatifs à domicile est un contre exemple positif car il a une fonction majeure dans la prise en charge des patients qui ne veulent pas d'autres soins que des soins de confort. Je le propose systématiquement à mes patients ou aux familles qui en font la demande. Mais, en ce cas, je me sens vraiment comme un médecin généraliste s'occupant d'un patient et non un spécialiste s'occupant d'une pathologie qui s'appellerait la fin de vie.
Le réseau cancer est plutôt une société savante oncologique qui fait le don de quelques miettes de son savoir aux médecins généralistes qui s'y égarent car soumis aux Diktats des traitements chers et inutiles.

Je crois donc que le système des réseaux est une fausse bonne idée.
Les réseaux reformulent la hiérarchisation hospitalière en élargissement le territoire de l'hôpital à la ville.
Les réseaux favorisent la pensée unique de prise en charge des patients selon la doxa hospitalo-universitaire (ah, la noria de personnel hospitalier déboulant au domicile des patients comme s'il s'agissait d'une chambre d'hôpital, d'une salle de repos ou d'une pharmacie ; l'hôpital devrait au contraire prendre exemple sur la pudeur du généraliste entrant au domicile d'une personne âgée, sur la pudeur des infirmières libérales, sur la pudeur des kinésithérapeutes, sur la pudeur des assistantes sociales...)
Les réseaux diluent la responsabilité. On ne sait plus qui fait quoi et quoi fait qui : le médecin généraliste perd "son" patient dans les méandres de l'administration hospitalière... Et on est coincés par les membres du réseau comme les hospitaliers sont coincés par leurs collègues : on ne peut se défaire du mauvais diabétologue, on ne peut se défaire de la mauvaise infirmière, de la mauvaise aide-soignante, du mauvais kiné ou... du mauvais généraliste. Le patient suivi pour un diabète sera adressé à un chirurgien à qui on n'envoie jamais de malades, à un cardiologue qu'on n'aime pas, à un ophtalmologiste dont on sait par ailleurs...
Les réseaux, en copiant le disease management industriel, sont une porte d'entrée facile pour Big Pharma et pour Big Materiel qui investissent la pharmacie de l'hôpital ou de la clinique et le tour est joué... bien que le médecin généraliste puisse prescrire ce qu'il veut... sous les conseils du réseau. Avec la possibilité offerte dans le cadre de la toujours bienveillante prévention de chasser les pré maladies et de faire du disease mongering (ICI).
Les réseaux, enfin, n'ont jamais fait la preuve de leur efficacité (des exemples récents sur le diabète en témoignent LA), encore moins de leur efficience et le chapitre coût-efficacité est un secret de polichinelle : ça coûte la peau des...

Je n'aime pas les réseaux.
Sera-ce une solution pour les déserts médicaux ? J'en doute. Mais je n'ai pas beaucoup abordé le problème spécifique des déserts médicaux.
Un peu de provocation avant de conclure : les déserts médicaux existent-ils ? Et, s'ils existent, qui les a organisés et qui feint de croire que l'on pourra faire quelque chose ?

PS du 17/06/12 Les Suisses votent massivement contre les réseaux de soins http://www.rts.ch/info/suisse/4070154-les-suisses-s-opposent-massivement-aux-reseaux-de-soins.html

jeudi 7 juin 2012

Contraception masculine réversible : une bonne idée ou une connerie ? Histoire de consultation 121


Madame A, 38 ans, est venue pour "renouveler" "sa" pilule.
Selon moi, chez une femme de trente huit ans sans facteurs de risque particuliers, non fumeuse, il n'y a pas grand chose à faire. Parler de la pluie et du beau temps, s'assurer que les frottis ont été faits en temps et en heure, éventuellement que la pression artérielle est au beau fixe, que le cholestérol est aux taquets...
Nous parlons donc du temps qu'il fait, de la famille (cela fait trente ans que je connais la patiente et un peu plus que je reçois son père et sa mère et un peu moins ses frères et ses soeurs), de ses enfants (je les vaccine et "soigne" leurs rhino-pharyngites), de son mari (cela fait dix ans que je le connais et que je le trouve sympathique).
Incidemment, elle me dit ceci : "Vous avez vu, docteur, ils ont trouvé une pilule pour homme, c'est génial ! Qu'est-ce que vous en pensez ?" Je souris : il y a dû y avoir une brève à la télvision. "Je pense que c'est une grosse connerie. - Oh, docteur, vous n'êtes quand même pas comme ça !"
Il est des moments où il faut surveiller ses propos dans son cabinet, et notamment les gros mots. Et pas seulement quand il s'agit de secret médical. La contraception masculine réversible est une affaire sérieuse. J'ai toujours pensé que c'était une connerie. Mais j'ai souvent eu affaire à des femmes qui ne comprenaient pas que je pouvais dire cela. Le plus souvent, elles trouvaient que c'était plutôt pas mal que les hommes prennent la pilule. Voici leurs raisons telle que je les ai entendues : y en a marre de la contraception asymétrique, il faut que les hommes s'y mettent, on ne parle pas assez des contraintes physiologiques sur le corps des femmes, ça va responsabiliser les bonshommes, ras le bol des effets indésirables, de la prise de poids, des migraines, qu'ils s'y mettent...
Mais il faut être prudent. Dans son cabinet médical lors du fameux colloque singulier et , encore plus en écrivant dans un blog. Si je mets brutalement les pied dans le plat, je vais passer pour un fieffé réactionnaire et / ou un ennemi du progrès, mais, surtout, les féministes vont me tomber sur le dos et se mettre à dos les féministes (sans entrer dans les détails des différentes chapelles, universalistes versus différentialistes, genristes absolues versus genristes relatives, marxistes versus non marxistes, et cetera...) est extrêmement dangereux. C'est dire si mon Tribunal Intérieur n'a pas mis longtemps à se réunir pour savoir si ce propos n'allait pas définitivement me faire basculer dans la cohorte honnie des machistes tombés de l'arbre et déconsidérer tous mes propos, même ceux concernant la hausse des prix ou le changement climatique. Ma dernière heure idéologique n'allait-elle pas sonner ? 
"Vous ne pensez quand même pas qu'il n'y a que les femmes qui doivent être contraintes et que, vous, les hommes, vous puissiez rester à l'écart ? Vous n'êtes pas comme ça, docteur ?" 
Je dois donc m'en sortir pour ne pas passer pour un machiste, cela n'est bien vu ni par la morale commune ni par mon Tribunal Intérieur (celui de Freud).
Dans le cadre de ce colloque singulier je ne peux reprendre tous les arguments que j'ai développés dans ma tête depuis des années et notamment en mode discussion café du commerce contre la contraception masculine hormonale ou non hormonale réversible et qui mériteraient d'énormes développements écrits qui me semblent nécessiter des efforts démesurés.
Voici ce que je dis à cette jeune femme qui est sur le point d'être déçu par son médecin traitant : "Je comprends ton point de vue. Mais, si je peux me permettre, ce qu'il y a de bien avec la pilule prise par la femme, c'est que c'est elle qui mène le jeu, elle n'a pas besoin de savoir ce qu'en pense son mari ou son compagnon... - Mais... avoir des enfants, c'est un projet de couple... - Oui, oui, oui, mais toi, quand tu prends ta pilule, c'est ce que je veux dire, tu es certaine que tu l'as prise, t'as pas besoin de demander à ton mari s'il l'a prise..." Elle fait oui de la tête mais elle ne semble pas convaincue. Il y a quelque chose qui la gêne. J'attends qu'elle se remette à parler, je la regarde et je pense en moi-même : "Je ne peux pas te dire, ma chère A, ce que je pense vraiment, à savoir que la contraception féminine, c'est la meilleure chose qui soit arrivée à la femme depuis les hommes des cavernes, car elle peut désormais décider du moment où elle n'aura pas d'enfant, avec son compagnon ou avec quelqu'un d'autre, du moment où elle pourra en avoir un, et avec qui ou sans qui, et elle pourra même dire l'avoir prise et être enceinte après avoir menti à son compagnon ou à quelqu'un d'autre, et même, ma chère A, je ne peux pas te dire qu'en prenant la pilule tu pourras même tromper ton compagnon en étant certaine de ne pas avoir d'enfant, et cetera... " Je ne lui dis rien car c'est à elle de parler. 
"Mais je fais confiance à mon mari. - Je n'en doute pas. - S'il me dit qu'il prend la pilule je le croirais. - Oui, mais s'il l'oublie, ce sera toi qui porteras l'enfant. - Je pourrais toujours avorter..."
Réponse imparable. "Et puis" continue-t-elle "c'est quand même normal que les hommes prennent du poids, prennent des risques et soient stressés par le fait de ne pas oublier."
Je rédige une ordonnance de pilule contraceptive hormonale réversible pour femme.

(Voilà ce que je n'ai pas dit parce que je n'avais pas le temps : la pilule contraceptive et le stérilet ont modifié profondément l'anthropologie, la sociologie, les moeurs et l'idéologie concernant les rapports hommes / femmes  par le seul fait de rendre les femmes responsables de leur refus d'être enceinte ; on objectera que les préservatifs, et depuis la nuit des temps, ont joué un rôle non négligeable et que, désormais, en raison des risques de sida, ce rôle est redevenu prééminent ; je n'ai pas dit non plus qu'un certain nombre de faits historiques, comme la diminution de la mortalité maternelle par 131 ou de la mortalité infantile par 69 depuis le milieu du dix-huitième siècle jusqu'à nos jours, de faits démographiques comme la transition démographique, ou de faits psychologiques comme la logique de l'enfant désiré, ou moraux comme la dissociation de la conscience, se sont mélangés pour aboutir à une prise du pouvoir de la femme sur sa fécondité. L'arrivée de la contraception masculine hormonale ou non hormonale réversible (ICI) n'est pas à mon avis une bonne nouvelle en général même si elle peut rendre service en particulier, car elle risque de nous faire rebasculer dans un paradigme où l'homme reprendrait la situation en main ; en conclusion : il me semble que cette "pilule" serait une formidable régression pour la condition féminine ; il faudrait, bien entendu parler de la vasectomie mais, d'une part c'est un sujet différent, et, d'autre part, il y a aussi un déplacement de la femme vers l'homme en termes de responsabilité)
(Je n'ai pas parlé non plus, il ne faut pas désespérer Billancourt, des effets indésirables de la pilule contraceptive féminine qui sont tus car, il ne faut pas l'oublier non plus, ce type de contraception arrange effectivement les hommes qui peuvent faire porter la responsabilité d'un "accident" sur la femme elle-même, qui sont tus depuis toujours mais dont il faudra bien parler un jour : modification du tissu mammaire, modification de la libido, sécheresse vaginale, et cetera)

PS - J'espère que j'aurai le courage de m'attaquer à des notions que j'ai évoquées ici comme la transition démographique, la logique de l'enfant désiré ou la dissociation de la conscience qui sont des outils majeurs dans le décryptage de la médecine générale en certains de ses aspects. Sans compter d'autres notions comme les pratiques contraceptives dans la basse vallée de la Seine à partir de 1750 et en France exclusivement, comme le nombre d'enfants par femmes non pas lié au niveau d'instruction de la femme mais du mari... Je remercie les lectures que j'ai faites sur ses sujets avec, en vrac, Hervé Le Bras, Paul Yonnet, Emmanuel Todd et Youssef Courbage et quelques autres qui m'ont aussi ouvert les yeux.

PS (rajouté le 11 septembre 2012) : Curieux propos de Winckler dans une revue grand public : ICI