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vendredi 3 février 2012

Quant aux chimiothérapies, il vaut mieux en faire un peu trop que pas assez ! affirme le docteur Legmann, Président du CNOM.


La remise en cause du dépistage du cancer du sein par mammographie commence à ne plus être, en France, un sujet tabou.
Mais le chemin à parcourir est encore long pour qu'enfin les arguments soient discutés de façon sereine et non plus envoyés à la figure des uns par les autres et des autres par les uns.
Ce blog a rendu compte d'un certain nombre de faits et de débats : ICI.

Avant d'entrer dans le vif du sujet je vais vous raconter une anecdote qui illustre l'état des préjugés. Dans le groupe de pairs que je fréquente, je parle, il y a un ou deux mois, du problème du sur diagnostic du cancer du sein et j'avance, prudemment, l'hypothèse de Bernard Junod selon laquelle il pourrait s'élever à 50 % (je dis prudemment car je suis moi-même étonné par ce chiffre et je ne voudrais pas qu'il fût ensuite infirmé). Je rappelle qu'un sur diagnostic signifie faire le diagnostic d'un cancer alors qu'il ne deviendra jamais méchant. Un de mes collègues, très remonté, me dit de façon péremptoire : "Je n'y crois pas, je ne veux pas y croire, il faut me montrer les publications, mais, de toute façon, je n'y crois pas !" Que lui répondre ? Je tente de l'apaiser en lui disant qu'il faut cesser de croire à l'inéluctabilité de la croissance cancéreuse, qu'il y a des cancers non méchants et des cancers ultra méchants, comme d'ailleurs dans le cas de la prostate, et cetera, et cetera, que le mythe de la découverte précoce est très ancré mais faux, que même des cancers invasifs peuvent régresser, bon, je lui sers la sauce habituelle (et je ne développe pas tout ce que je sais grâce au livre de Rachel Campergue : ICI et j'en reproduis la substantifique moelle à la fin de ce post pour les feignants qui ne veulent pas cliquer). Je dois dire ici, et je ne l'ai pas dit ce jour là, que j'ai eu du mal, en partant de mon idéologie de la prévention (juvénile et pré médicale puis médicale durant mes études, puis médicale lors de mon installation et de ma longue pratique), à accepter toutes ces informations sur le cancer du sein alors que je sais depuis des lustres, la fin des années 80, que le dépistage du cancer de la prostate par le dosage du PSA est une horreur (peut-être parce que mon statut masculin me fait envisager de façon claire les conséquences du sur diagnostic). Mais mon collègue n'est pas convaincu et nous passons à autre chose, dans cette fameuse réunion de pairs. Puis, une demi-heure après, mon collègue me dit ceci : "Cela me fait penser que l'on a découvert il y a trois ans deux nodules pulmonaires chez ma mère de 83 ans, que j'en ai discuté avec le pneumologue et que nous avons décidé, vu l'âge et les pathologies associées, de ne rien faire, pas de chimiothérapie, pas de radiothérapie... et deux ans après les nodules avaient disparu." Sans commentaires. 

Et donc, le débat sur le dépistage du cancer du sein par mammographie commence à se faire jour dans les médias français.
Et voilà que je lis un article dans le Bulletin d'information de l'Ordre des Médecins (n° 21 de janvier-février 2012) (LA), un article qui s'appelle "Dépistage organisé du cancer du sein : vraiment utile !" On demande à trois médecins de répondre à des questions concernant le dépistage : le Professeur Agnès Buzyn, présidente de l'INCa (Institut National du Cancer), le docteur Michel Legmann, président du CNOM (Conseil National de l'Ordre des Médecins), radiologue et responsable de la campagne de dépistage organisé du cancer du sein dans les Hauts-de-Seine (92) et le docteur Philippe Autier, vice-président de l'IPRI de Lyon (Institut International de Recherche et de Prévention). Je vous laisse lire l'article à la page 10 du Bulletin. Il ne s'agit pas d'un vrai débat et la propagande officielle s'étale au mépris de toutes les données sérieuses : baisse de la mortalité, faible taux de sur diagnostics (5 %), et cetera. Le docteur Autier arrive à placer deux ou trois trucs mais le temps de parole n'est pas vraiment respecté... Mais là où cela devient grave c'est quand je lis, de la bouche de Michel Legmann, la phrase suivante qui rend toute discussion difficile, dans la même eau que ce que j'entend parfois ici ou là (il faut tout faire pour sauver une vie, ce qui revient au même que on ne peut faire d'omelettes sans casser des oeufs) : Quant aux chimiothérapies, il vaut mieux en faire un peu trop que pas assez! Là, je me demande qui vient de parler : Roselyne Bachelot bonimentant sur les estrades de la pandémie virale, un marchand d'élixir de longue vie vantant le bonheur éternel, non, le président du Conseil National de l'Ordre des Médecins ! Cette phrase est choquante, méprisante, moralement méprisable, éthiquement inadmissible. Mais de quel droit peut-il dire des choses pareilles ? Même dans le secret de son cabinet de radiologue cela serait indigne. C'est le Président du Conseil National de l'Ordre des Médecins qui cause... Ouah... Mais, Monsieur le Président, vous êtes à côté de la plaque : la mammographie entraîne beaucoup de faux positifs (sur 2000 femmes invitées au diagnostic pendant dix ans, 200 seront victimes d'un faux positif) mais également 20 % des cancers ne seront pas diagnostiqués par la mammographie non pas en raison de faux négatifs mais en raison de l'impossibilité de faire le diagnostic par la mammographie !
Je comprends, cher Président, que soyez intoxiqué par les faux chiffres ressassés, par l'idéologie de la prévention, par l'idéologie de la mammographie, par l'idéologie du bonheur, mais, de grâce, ne prononcez pas des phrases pareilles !


La substantifique moelle du livre de Rachel Campergue pour les lecteurs pressés ou pour ceux qui veulent réviser (avec, en sus, un post de la même paru après la publication de ce post : ICI) :
  1. Il n'existe pas un mais des cancers du sein : des cancers qui grossissent rapidement (parmi eux les fameux cancers de l'intervalle, ceux qui apparaissent entre deux mammographies et qui sont déjà métastasés lorsqu'ils sont découverts), des cancers qui progressent lentement, des cancers qui ne grossissent pas du tout, des cancers qui sont si lents à progresser qu'ils ne donneront jamais de symptômes et des cancers qui régressent spontanément (ces deux dernières catégories pouvant être considérées comme des pseudo-cancers).
  2. La mammographie ne permet pas un diagnostic précoce car elle découvre des cancers qui étaient en moyenne présents depuis 8 ans !
  3. Les cancers de l'intervalle ne sont, par définition, pas découverts par la mammographie lors du dépistage et ce sont les plus rapides à se développer et les plus mortels. ATTENTION, CORRECTION (faite le 6 février 2014) : les cancers de l'intervalle d'après des données plus récentes n'ont pas de caractéristiques particulières.
  4. La mammographie peut se tromper et passer à côté de 20 % des cancers du sein et ce pourcentage est encore plus fort chez les femmes plus jeunes (25 % entre 40 et 50 ans), ce sont les faux négatifs.
  5. La mammographie peut se tromper et annoncer un cancer alors qu'il n'en est rien : ce sont les faux positifs. On imagine l'angoisse des femmes que l'on "rappelle" après la mammographie pour leur demander de passer d'autres examens et pour leur dire ensuite, heureusement, qu'elles n'ont pas de cancer... Voici des données terrifiantes : Après avoir subi une dizaine de mammographies, une femme a une chance sur deux (49 % exactement) d'être victime d'un faux positif et une chance sur 5 (19 % exactement) de devoir se soumettre inutilement à une biopsie du fait d'un faux positif.
  6. La seconde lecture de la mammographie par un autre radiologue ne se fait qu'en cas de résultat normal, pas en cas de résultat anormal : on ne recherche que les faux négatifs, pas les faux positifs (ceux qui conduisent aux examens complémentaires anxiogènes dont la biopsie qui peut être dangereuse)
  7. La mammographie est d'interprétation d'autant plus difficileque la femme est jeune (importance du tissu glandulaire) et qu'elle prend des estrogènes qui sont un facteur de risque du cancer du sein et d'autant plus difficile que la femme est ménopausée prenant des traitements hormonaux substitutifs (heureusement arrêtés aujourd'hui)
  8. On ne lit pas une mammographie, on l'interprète et il faut se rappeler que la variabilité inter radiologue peut atteindre (dans la lecture d'une radiographie du poumon, ce qui est a priori plus facile) 20 % et que la variation intra individuelle (on demande à un radiologue de relire des clichés qu'il a déjà interprétés) de 5 à 10 %
  9. L'interprétation erronée d'une mammographie dans le cas d'un faux positif (cf. le point 5) conduit les femmes à être "rappelées" (pour biopsie) : le taux de rappel peut varier, chez les "meilleurs" radiologues, de 2 à 3 % et atteindre 20 % chez les autres ! Certains estiment que le taux "idéal" de rappel serait de 4 à 5 % alors qu'il est de 10 à 11 % en pratique : sur 2000 femmes invitées à la mammographie pendant dix ans 200 feront face à un faux positif ! Anecdotiquement (mais pas tant que cela) le taux de rappel augmente quand le radiologue a déjà eu un procès.
  10. Quant à la lecture (i.e. l'interprétation) des biopsies elle laisse encore une fois rêveur : Un essai a montré que la lecture de 24 spécimens de cancers du sein par 6 anatomo-pathologistes différents a entraîné un désaccord pour 8 spécimens (33 %). Quand on connaît les conséquences d'une biopsie positive...
  11. La biopsie positive ne fait pas la différence entre ce qui n'évoluera jamais et ce qui évoluera de façon défavorable (sauf dans les rares cas de cancers indifférenciés) et c'est cette définition statique qui est source d'erreurs fatales... Et encore n'avons-nous pas encore parlé des fameux cancers canalaires in situ...
  12. Sans compter que nombre de cancers REGRESSENT spontanément comme cela a été montré dans la fameuse étude de Zahl de 2008 : une comparaison entre femmes dépistées et non dépistées montre que les femmes suivies régulièrement pendant 5 ans ont 22 % de cancers invasifs de plus que celles qui ne l'avaient pas été... Et encore les cancers canalaires in situ n'avaient-ils pas été pris en compte...
  13. L'exposition des seins aux rayons X n'est pas anodine.L'historique de l'utilisation des rayons X en médecine laisse pantois (pp 331-382). Mais je choisis un exemple décapant : dans les familles à cancers du sein (mutation des gènes BRCA1 et BRCA2) une étude montre que le suivi mammographique depuis l'âge de 24 - 29 ans de ces femmes à risque entraînait 26 cas de cancers supplémentaires (radio induits) pour 100 000 ; ce chiffre n'était plus (!) que de 20 / 100 000 et de 13 / 100 000 si le dépistage était commencé respectivement entre 30 et 34 ans et entre 35 et 39 ans !
  14. Il n'y a pas de sein standard pour les doses de rayon administrés par examen ! Ou plutôt si, cette dose a été définie ainsi : pour un sein constitué à parts égales de tissu glandulaire et de tissu graisseux et pour une épaisseur comprimée (sic) de 4,2 cm. Je laisse aux femmes le soin de vérifier...
  15. Terminons enfin, à trop vouloir prouver on finit par lasser, même si nous n'avons pas rapporté la question des biopsies disséminatrices de cellules et de l'écrasement des seins lors des mammographies répétées, sur le problème des carcinomes in situ qui "n'existaient pas auparavant" et qui sont devenus les vedettes de la mammographie de dépistage (environ 50 % des cancers diagnostiqués). Une enquête rétrospective a montré que sur tous les carcinomes in situ manqués seuls 11 % étaient devenus de véritables cancers du sein alors que la règle actuelle est de proposer mastectomie ou tumorectomie + radiothérapie... Sans compter les erreurs diagnostiques : un anatomo-pathologiste américain a revu entre 2007 et 2008 597 spécimens de cancers du sein et fut en désaccord avec la première interprétation pour 147 d'entre eux dont 27 diagnostics de carcinome in situ.

(Le Dr Michel Legmann a été élu président du Conseil national de l’Ordre des médecins le 28 juin 2007. Electroradiologiste libéral en cabinet et dans une clinique chirurgicale à La Défense, le Dr Michel Legmann est vice-président du Cnom depuis 1997 et maire-adjoint de Neuilly-sur-Seine. A ce titre, il passe pour être un proche de Nicolas Sarkozy, ancien maire de Neuilly-sur-Seine. )

mardi 31 juillet 2012

Une métaphore tragique liée au PSA : un oncologue "guéri" du cancer et incapable de courir.


Dans les Archives of Internal Medicine, Charles L. Bennett, médecin, oncologue, spécialiste du cancer de la prostate depuis 25 ans et titulaire d'un diplôme de santé publique, raconte ICI (A 56-year old physician who underwent a PSA test Arch Intern Med. 2012;172(4):311-311. doi:10.1001/archinternmed.2011.2246) la tragique histoire d'un patient de 56 ans dont il s'est occupé et dont le destin morbide (parésie du bras et de la jambe droites apparue en post opératoire immédiat) le taraude en raison des décisions qu'il a prises et qui ont amené le patient à cette condition.
Le problème majeur : Charles L. Bennett est à la fois le médecin qui a décidé l'attitude thérapeutique et le patient qui a subi les effets indésirables.
Il conclut son article ainsi : "Même le patient le plus informé (moi en l'occurrence) a des difficultés à prendre une décision vraiment informée."
Cette lettre peut être interprétée de multiples façons.
Merci de la lire auparavant, c'est court, afin que vous puissiez vous faire une idée avant que je ne commente de façon qui pourrait vous paraître orientée.

Voyons d'abord la succession des faits :
  1. Il décide à 50 ans de faire son PSA annuel et rituel : 2,5 ng / ml (il était l'année précédente à 1,5). Et savez-vous ce qu'il fait ensuite ? D'en parler à un urologiste qu'il connaît bien et avec lequel il a effectué des recherches. L'urologiste lui demande de faire des biopsies.
  2. Les biopsies sont effectuées 6 semaines après et il va les lire lui-même avec l'anatomopathologiste. Le score de Gleason est à 3+3 dans 1 sur 12 des prélèvements et il n'y a aucun envahissement.
  3. Il a peur du cancer. 
  4. Son expérience interne lui rappelle que la majorité de la centaine de malades qu'il a vus avec le même tableau clinique ont, dans ce cas, opté pour la chirurgie, et une faible proportion pour la radiothérapie ou pour la simple surveillance. Son expérience externe, il la recherche auprès des meilleurs spécialistes du pays (chirurgiens, oncologues, radiothérapeutes) et non dans la lecture des publications.
  5. Il décide de se faire opérer (prostatectomie radicale).
  6. Pour mettre toutes les chances de son côté, et parce qu'il a peur, à 50 ans, de subir des conséquences sexuelles de l'intervention, il choisit un leader national pour l'opérer pensant que chez un homme en bonne santé de son âge les risques de troubles sexuels, de troubles vésicaux ou intestinaux sont faibles et qu'il y a 100 % de chances qu'il n'ait plus de cancer 20 ans après.
  7. Cinq ans après : pas de cancer, dit-il, PSA à 0 mais parésie du bras et de de la jambe droite. Il ne parle pas de sexe mais il ne peut plus faire sa course à pied quotidienne.
  8. Il cite alors les recommandations récentes de l'US Preventives Service Task Force (LA) et se lamente de ne les avoir pas connues auparavant. Il dit que si c'était à refaire il opterait pour la surveillance active.
De mon point de vue il s'agit d'une succession d'erreurs de raisonnement médical. Est-ce dû au fait que nous avons affaire à un spécialiste du cancer de la prostate ? Est-ce lié au fait qu'il soit à la fois le médecin et le patient ? Est-ce dû à sa pratique, à savoir travailler dans une équipe multidisciplinaire spécialisée dans la pathologie dont il croit être atteint ? Est-ce provoqué par la croyance répandue qu'en matière de cancer Le plus tôt c'est le mieux ? Est-ce lié à la cancérophobie personnelle du médecin malade ?

La communauté urologique croit majoritairement, notamment aux Etats-Unis d'Amérique, aux bienfaits du dépistage du cancer de la prostate par dosage du PSA.
Charles Bennett  a agi avec lui-même comme il agissait avec ses patients, prétend-il.
Travaillant dans un centre d'oncologie urologique depuis 25 ans il y a acquis une incontestable technicité et une façon de penser. Ce n'est pas une pensée sectaire mais une pensée communautaire de travail. Comme il existe une pensée communautaire majoritaire chez les boulangers ou chez les enseignants ou chez des employés de coca cola. Cela ne signifie pas que tout le monde pense la même chose, la réalité dit le contraire tous les jours, cela signifie que le fait d'endosser un statut entraîne de façon presque automatique une façon de penser et de se comporter qui ignore le reste du monde.
Robert Musil faisait dire à l'un de ses personnages dans L'homme sans qualités qu'il ne fallait jamais interroger quelqu'un sur son travail car il ne pouvait pas dire la vérité.

Dans les faits qui nous sont rapportés nous pouvons extraire quelques comportements erronés ou dangereux. 
  1. Demander une biopsie avec un PSA à 2,5 contrairement à toutes les recommandations, émaneraient-elles de la communauté urologique et / ou oncologique
  2. Lire lui-même les plaques histologiques le concernant
  3. Etre cancérophobe en étant oncologue
  4. Ne pas se mettre dans la position d'un questionnement EBM à propos de son propre cas, ce qui, admettons-le, est pratiquement impossible. Nul doute que son expérience interne aura changé...
  5. Décider de se faire opérer pour être à 100 % "cancer free" 20 ans après
  6. Etre persuadé que les complications post opératoires sont malades dépendants (il se dit en bonne santé) et opérateurs dépendants et donc non liées au hasard (ce qui, selon mon expérience interne est quand même assez vrai) et choisir le "meilleur" pour se faire opérer
  7. Etre un malade guéri
  8. Croire que les dernières recommandations, celles de l'USPSTF, sont sorties de nulle part et non de publications qu'il aurait dû lire (expérience externe).

Je voudrais également souligner un fait qui a dû, tout comme moi vous choquer : il ne dit pas un seul mot des centaines de malades qui ont défilé dans son bureau et pour lesquels il a appliqué les mêmes principes !


vendredi 10 avril 2009

CANCER DE LA PROSTATE : QUAND LE PROFESSEUR BERNARD DEBRE S'EN MELE

Le cancer de la prostate est un sujet trop sérieux pour être confié aux urologues.

Nous vous avions indiqué dans un article récent que les deux dernières études (l'une américaine, l'autre européenne) publiées sur l'intérêt du dépistage systématique du cancer de la prostate n'apportaient rien de nouveau : il n'était toujours pas nécessaire de le faire.

Mais c'était sans compter avec le grand professeur Debré, illustre chef de service d'urologie (on rappelle ici que le président Mitterrand n'a pas été opéré par lui mais par le professeur Steg dans son propre service), qui vient de présenter, sous l'égide de l'OPEPS (Office Parlementaire d'Evaluation des Politiques de Santé), un rapport qui tend à vouloir, contre toute évidence scientifique, généraliser le dépistage de masse du cancer de la prostate par le dosage du PSA (Prostate Specific Antigen).

Le Professeur Debré ferait simplement pitié si ce rapport ne reflétait pas l'état déliquescent de la Société Française dont les mammelles sont le copinage et l'acoquinage et, dans le cadre plus particulier de la Santé, à la puissance quatre.

Pour une lecture d'une critique argumentée de ce rapport qu'il est possible de télécharger, je vous conseille de vous diriger sur le site du docteur Dominique Dupagne où l'auteur fait une analyse saisissante des incohérences, des approximations et des mensonges colportés par l'OPEPS via le professeur Debré.

Voici quelques données que l'on peut tirer de cette affaire :

  1. Une mission parlementaire est confiée à un homme, le professeur Bernard Debré, qui est connu pour ses positions a priori en faveur du dépistage de masse du cancer de la prostate (conflit d'intérêt intellectuel).
  2. C'est à l'Association Française d'Urologie, dont Bernard Debré est membre, que l'on confie l'enquête. Cette association d'urologues français est connue elle-aussi pour ses prises de position extrêmistes dans le domaine du dépistage de masse du cancer de la prostate et ses "Recommandations" sont elles-aussi connues pour être en désaccord avec celles de la Haute Autorité de Santé, et de l'Institut national du Cancer, Recommandations qui devraient faire autorité en France. Rajoutons qu'à part l'American Urological Association, aucune société savante urologique dans le monde ne préconise non plus le dépistage de masse... (Conflit d'intérêt intellectuel et financier).
  3. Le rapport est commenté de façon généralement très favorable dans la presse médicale et grand public et les "journalistes" français, médicaux ou non, se contentent des déclarations de Bernard Debré pour faire leur opinion et celle de leurs lecteurs. En France le journalisme médical d'investigation n'existe pas ou de façon sporadique.
  4. Le rapport de l'OPEPS est globalement un tissu de mensonges. Nous avons commenté ici les deux études dont il fait mention et souligné combien l'étude européenne était imparfaite et l'étude américaine convaincante pour continuer de ne rien faire et pourtant Bernard Debré, mentant comme un arracheur de prostate, en tire des conclusions opposées. Il oublie en particulier de dire que les cas français ont été enlevés de l'analyse finale. Notre bonté d'âme nous interdit d'en donner les raisons (incompétence ?).
  5. La mission parlementaire a confié aux seuls urologues le soin d'évaluer leurs propres pratiques sans tenir compte des critiques formulées par des experts en Santé Publique comme le professeur Gérard Dubois ou l'épidémiologiste Catherine Hill
  6. Où sont indiqués les conflits d'intérêt du professeur Debré ? Où sont indiqués les conflits d'intérêt de l'AFU ?
En conclusion : Il est fort peu probable que ce rapport finisse par faire autorité mais que d'efforts pour le critiquer ! Sa simple lecture permet de se rendre compte de sa fausseté scientifique et nous espérons que l'Université Française, que les Autorités Académiques se réveilleront afin que l'on puisse dire à propos de l'OPEPS, à l'instar de Cornelius Castoriadis à propos de l'URSS, cinq lettres, cinq mensonges.

lundi 14 septembre 2015

Le gardasil a gagné. Circulez y a rien à voir.


Un article de Libération (ICI) au titre provocateur "la vaccination contre le papillomavirus est indispensable", une étude (entre parenthèses) que l'on n'a pas encore lue, des commentaires appropriés du Directeur général de la Santé, Benoît Vallet, un billet de blog de Jean-Yves Nau (LA), un commentaire d'Agnès Buzyn, la directrice de l'INCa, celle qui ne sait pas ce qu'est un sur diagnostic lors du dépistage du cancer du sein par mammographie, des arguments de tolérance alakhon, des non réponses à des questions qui se posent et des réponses à des questions que l'on ne se pose pas, et passez muscade. 
Sans compter la stigmatisation des dubitatifs, la culpabilisation des familles et pas un mot, pas un mot sur le frottis.
Nous vivons une époque formidable.
Quant à l'étude qui permet cette première mondiale, c'est la base de données de la CPAM qui servit récemment à demander le retrait du domperidone sur des arguments pour le moins fallacieux (ICI) ou, avec une méthodologie à faire frémir un élève de CM1, à écarter l'actos, que je ne défendrai pas non plus (voir LA)... 

Le seul test de dépistage qui marche vraiment en cancérologie, le frottis vaginal effectué tous les trois ans chez les femmes entre 20 et 65 ans (sauf modalités particulières), est enterré.

Alors que les campagnes de dépistage par mammographie pour le cancer du sein sont encouragées malgré ses dégâts collatéraux, que le dépistage du cancer du colon par détection de sang dans les selles est prôné malgré son "efficacité" pratique (atteindre 75 % de détection de la population cible) inexistante et que l'on continue à laisser faire le dépistage du cancer de la prostate par dosage du PSA...

Je comprends que les jeunes médecins ne veuillent pas "faire" médecine générale pour se retrouver, en bouts de chaîne, en tant que pivots ou proximologues, comme exécutants de politiques de santé infondées et désastreuses.

Qu'ils fassent spécialistes d'organes, profession éminente parmi laquelle peu de gens (il y a des exceptions) se mettent en travers des autorités pour s'opposer à des politiques liées à l'argent du lobby santéo-industriel, d'abord c'est plus classe, ensuite c'est plus confortable sur le plan de l'éthique.

Vous pouvez,mais il est trop tard, consulter des articles consacrés à la vaccination contre le papillomavirus sur ce blog et en particulier celui-ci : LA ainsi qu'un billet de Marc Girard comme celui-ci : ICI.

Addendum (ce jour et un peu plus tard) : Dans l'émission La tête au Carré sur France Inter (LA dans les dix premières minutes) discussion surréaliste sur le gardasil entre Dominique Dupagne et le directeur de l'ANSM où la notion de Frottis vaginal n'a jamais été énoncée ! Cela fait partie de la stratégie globale de big vaccin pour semer le doute.

PS du 12 décembre 2016.
Un article du journal Le Monde indique comment l'agence européenne a mis à la trappe des effets indésirables du vaccin anti apillomavirus : ICI.
Et voici la plainte de la Nordic Cochrane émanant de Peter Goetzsche de mai 2016 : LA.
Et la réponse de l'EMA : ICI.

jeudi 28 mai 2009

TOUCHE PAS A MES SEINS - HISTOIRES DE CONSULTATION : NEUVIEME EPISODE

Madame T, soixante-douze ans, vient me revoir, à l'occasion de son renouvellement de traitement (elle est hypertendue traitée par bêtabloquant depuis environ vingt ans, toujours en monothérapie, toujours à la même dose, et toujours dans les normes tensionnelles), pour m'apporter le compte-rendu de mammographie, compte-rendu que je n'avais pas encore vu et qui date de trois mois. Elle me fait de grands sourires et je les lui rends bien volontiers.
Voici l'affaire.
Il y a donc à peu près trois mois, cette sympathique retraitée (elle travaillait dans les écoles comme dame de service comme on disait dans l'ancien temps), active (elle fait de l'aquagym et de la marche sportive) et déterminée (on va le voir) est venue consulter (affolée) parce qu'on lui avait trouvé une tumeur ACR4 dans le sein gauche et qu'il était question qu'elle aille chez un chirurgien pour faire une biopsie et plus si affinités.
- Je ne suis pas d'accord pour que l'on touche à mes seins ! C'est comme ça !
Retour en arrière : je suis le médecin traitant, elle n'a pas fait de mammographie depuis cinq ans, ses seins sont parfaits à l'examen clinique, elle n'a jamais reçu de THS, il n'y a pas d'antécédents familiaux de cancer du sein, elle a reçu les convocations pour se rendre au dépistage du cancer du sein par mammographie et y a répondu par le mépris. Mais c'était sans compter sur ses filles qui, bonnes filles et fidèles télespectatrices de Télé-matin (avec l'inénarrable BFC dans le rôle de la journaliste reproduisant les avis éclairés des grands pontes de la médecine, ceux-là mêmes qui ne déclarent aucun conflit d'intérêt -- mais, je m'égare, ou l'ineffable LO assidue des médecines "douces") et du Magazine de la Santé de MC et HCE, nid de laboratoires et de produits sponsorisés, lui demandent de façon insistante, de faire la fameuse mammographie ("D'ailleurs on se demande pourquoi ton médecin ne te l'a pas prescrite !"). Rendez-vous est pris dans un cabinet de radiologie de ma bonne ville où, justement, l'une des filles est manipulatrice radio.
Et c'est ainsi que Madame T se retrouve d'abord avec une mammographie ACR2 qui, relue en aveugle dans le cadre du dépistage, se retrouve promue ACR4. Le radiologue patron de la fille de la patiente organise tout sans en référer une seule seconde au médecin traitant mais, surtout, parle : 'Il faut rapidement faire une biopsie, je téléphone au chirurgien X pour qu'il vous donne un rendez-vous...' Le radiologue "clinicien" ne se préoccupe pas, je le répète, du médecin traitant, ni des filières suivies par icelui dans ce cas et, avec l'aide de la manipulatrice (celle-là, je la trouve bien bonne), conduit la patiente vers la biopsie, la chirurgie, la radiothérapie voire la chimiothérapie (l'ordre des facteurs est laissé à l'appréciation des "tendances" de la cancérologie, des "modes" ou des intérêts académico-financiers régnant).
- Je ne suis pas d'accord pour que l'on touche mes seins ! C'est comme ça !
Quand la patiente me dit cela, je suis bien embêté.
D'abord, parce que je n'ai pas les clichés.
Ensuite, parce que je ne connais pas encore l'épisode du passage d'ACR2 à ACR4.
Enfin, parce que je me sens, d'une certaine façon, coupable de ne pas avoir insisté pour que le dépistage se fasse.
Et, au bout du compte, parce qu'elle ne m'en veut pas mais qu'au contraire elle veut se servir de moi pour échapper à une atteinte de ses seins (que je repalpe pour ne pas passer à côté...).
Je lui propose : un, de récupérer la mammographie (avec sa fille ça ne doit pas quand même être trés compliqué), deux, je lui prends rendez-vous avec un oncologue ami (qui partage pour mes patients, pour les autres, je ne sais pas, quelques similarités de vue sur les Valeurs et Préférences des Patients, troisième pilier de l'EBM, mais pour le dépistage du cancer du sein par mammographie tous les deux ans et / ou du cancer de la prostate par le dosage du PSA, il y a encore du chemin à faire), trois, j'écris une lettre à l'oncologue ami, quatre, je prescris une IRM des seins hors de ma ville (afin qu'il ne puisse pas y avoir trop de conflits d'intérêts idéologiques et cléricaux entre professionnels de la même spécialité) et, quatre, j'écris une lettre au radiologue qui réalisera l'IRM. Ouf !
Résultat des courses : l'IRM est normalissime et le radiologue ami écrit à la fin : "... à confronter toutefois avec les examens radiographiques habituellement pratiqués..."
Conclusion (provisoire) :
  1. Il n'existe toujours pas d'études contrôlées indiquant que le dépistage du cancer du sein par la mammographie pratiquée chez les femmes au delà de 50 ans diminuait la mortalité totale.
  2. Le système du médecin traitant a du bon quand il s'agit de respecter les Valeurs et les Préférences des Patients.
  3. Il semblerait que l'IRM puisse devenir l'examen de choix dans l'imagerie du sein (pas encore d'études comparatives convaincantes jusqu'à aujourd'hui) mais deux obstacles : le nombre insuffisant d'IRM et les investissements déjà faits par les radiologues dans le domaine de la mammographie

BONNES REFLEXIONS

mardi 30 mars 2010

LETTRE OUVERTE A MICHAËL PEYROMAURE

Monsieur et cher confrère,

L'article que vous avez publié dans le journal Le Monde (édition électronique du 27 mars 2010) est un tissu d'âneries.
Souffrez qu'un médecin généraliste vous le dise.
Après un paragraphe de généralités et de truismes dignes du Journal de Suzette (non référencé dans Pub Med) qui vous permet de camper un décor dramatique et de le positionner à côté de solutions évidentes et tellement applicables, qui font de vos futurs contempteurs de présumés idiots, vous entrez, si j'ose dire, mais pour un chirurgien urologue la métaphore est facile, dans le vif du sujet.
Vous fournissez des données épidémiologiques d'un niveau de première ES : "... la proportion des cancers de la prostate diagnostiqués à un stade précoce a beaucoup augmenté. Et celle des cancers découverts tardivement, à un stade métastatique non curable, a nettement diminué." Et vous ajoutez, Monsieur bon sens, Joseph Prudhomme de la cancéro-épidémiologie, "Il est logique de penser que le dosage systématique du PSA, chez les hommes en âge de développer un cancer de la prostate serait un progrès en matière de santé publique." Vous oubliez ceci dans votre présentation idyllique du monde parfait de oui oui l'urologue : Il faudrait aussi que, dans le même temps, le taux de dépistage des cancers de la prostate à tous les stades soit constant. Ce qui n'est pas le cas. Je vous signale, malgré ce que vous affirmez, que le problème du dépistage du cancer du sein n'est pas résolu non plus.
Comme vous n'êtes pas très à l'aise sur le plan scientifique, vous bifurquez, dans le chapitre suivant sur le débat médico-économique.
Vous citez alors deux essais parus dans le prestigieux (sic) New England Journal of Medicine. Vous citez notamment l'étude européenne (dont les défauts méthodologiques sautent aux yeux et qui sont en accord avec les essais menés sous l'autorité de l'Association Française d'Urologie). Vous écrivez sans sourciller : "Le dépistage s'accompagnait d'un taux plus élevé de cancers de bon pronostic, et surtout d'un meilleur taux de survie." La messe est dite. Vous oubliez, très cher urologue spécialiste en médico-épidémiologie, les choses suivantes : "il faut proposer le dépistage à 1410 hommes et proposer un traitement à 48 autres pour éviter UN cancer pendant une période d'observation de dix ans. Avec un surdiagnostic de 50 % !"

Ensuite, vous vous lancez dans une analyse économique comme personne n'oserait le faire dans une revue anglosaxonne de seconde zone. Reprendre vos mots serait trop désagréable pour vous. Mais moi je vais vous dire ce que l'étude européenne dit : Si la mortalité a pu être abaissée de 20 % entre le groupe dépisté et le groupe non dépisté, cela représente, étant donnée la faible fréquence de mortalité par cancer de la prostate dans les populations à l'essai : - 0,71 mort pour 1000 patients pendant une période de neuf ans. Et au prix de 17000 biopsies prostatiques !"

Mais, Monsieur Peyromaure, il est vrai que vous publiez des articles tendant à montrer qu'au delà de 75 ans il serait légitime de doser le PSA alors que le plus grand spécialiste de ces problèmes, Michael Barry, pourtant régulièrement appointé par la "prestigieuse" Association américaine d'urologie (AUA), dit le contraire dans un article publié dans le "prestigieux" New England Journal of Medicine...

Je vous remercie, Monsieur Peyromaure, pour cet exercice de style journalistique de la meilleure eau qui rend justice à l'excellence scientifique de l'urologie française. Il faut plus de chercheurs comme vous pour rendre à notre beau pays la meilleure médecine du monde.
Merci !

vendredi 14 janvier 2011

POUR LE PRIX NOBEL DE MEDECINE A MICHEL CYMES

Michel Cymes : Pour ne pas passer à un doigt du diagnostic.

La dernière campagne de Santé Publique menée par Michel Cymes, le docteur Michel Cymes, est un exemple démonstratif et convaincant de ce qu'il faut faire en médecine (ici).
Le docteur Michel Cymes est, outre un scientifique convaincant dont témoigne l'exceptionnelle qualité de ses émissions grand public, un grand communicant, ce qui, en ce siècle de confusionnisme et de pipolisme, ne peut être un défaut quand il s'agit de proposer des idées claires.
La dernière campagne pour le dépistage du cancer de la prostate est un modèle d'honnêteté et de professionnalisme. Elle souligne combien la science a besoin du journalisme, et réciproquement, pour diffuser ses bienfaits dans la société. Grâce au bon docteur Michel Cymes, que je ne connais pas, et avec lequel je n'ai aucun lien d'intérêt (Art. L.4113-13 du Code de la santé publique), nous savons désormais de façon évidente ce qu'il faut faire dans le cadre du dépistage du cancer de la prostate. Elle souligne combien l'expertise, si malmenée et de façon infondée, soulignons-le de façon forte, pendant la dernière campagne vaccinale contre la grippe A/H1N1v, est indispensable au bon fonctionnement des sociétés démocratiques.
Ainsi, pour toutes ces raisons et pour d'autres que je vais développer maintenant, je pense que le Comité Nobel devrait s'occuper de lui. Et, sans modestie aucune, je me propose de créer une Association pour l'Obtention du Prix Nobel de Médecine à Michel Cymes afin que l'opinion publique, animée comme il se doit par des impératifs altruistes et compassionnels, puisse appuyer cette démarche de façon coordonnée. Souffrez que je sois le modeste organisateur de cette entreprise de salubrité publique.
Il le mérite.
Ses qualités sont constantes.
Ses publications méritent le respect (ici).
C'est d'ailleurs un récidiviste renommé en Santé Publique.
Ses écrits sont passionnants.
Prenons d'abord cette campagne en exemple.
Le docteur Michel Cymes a identifié la raison pour laquelle les patients ne voulaient pas se faire examiner la prostate par un geste simple, quasiment naturel, en tous les cas anodin, leur peur de se, je cite, "désaper". Comment avions-nous pu passer auparavant à côté de cet oeuf de Colomb ? Comment avons-nous échappé à cette évidence : les patients ne veulent pas se déshabiller devant leur médecin en raison d'interdits que Michel Cymes vient de lever avec son index tendu ?
Le génie de Michel Cymes s'exprime ici dans sa totalité, il frôle, désolé de cet humour potache, les cimes. Le pantalon baissé et l'index tendu, accompagné de ses camarades tout aussi les jambes dénudées et l'index dressé vers le ciel, il mériterait qu'on le sculptât, tel une statue antique dans le marbre et qu'on l'exposât dans les Facultés de Médecine.
Debout à côté de grands professeurs d'urologie, le célèbre Arnaud Méjean, le non moins célèbre François Haab et le cuisinier chirurgien François Desgrandchamps, professeurs qui, comme notre héros nobélisable, ne craignent pas d'affronter la misère des Ayatollahs de la Santé Publique dont doit faire partie la très prudente et très critiquée HAS. Debout à côté des addictologues Loewenstein et Batel qui reçoivent de nombreux urologues en leurs consultations afin de les délivrer de leur obsession de la prostate. Debout à côté du psychosomaticien Mimoun qui reçoit de nombreux prostatectomisés qui ont du mal à être puissants. Debout à côté d'un autre spécialiste du toucher rectal, un certain Godeberge (sic) qui ne passe pas à un doigt des colites radiques post radiothérapie... Mais arrêtons-nous là.
Revenons à cette fameuse campagne.
"Pour ne pas passer à un doigt du diagnostic..." Michel Cymes, fort de ses compétences et des communications du trio Mejean/ Haab / Desgrandchamps dans les congrès de l'AFU écarte d'un doigt vengeur le fait que la Valeur prédictive Positive du toucher rectal dans le diagnostic du cancer de la prostate est nullissime et un peu moins mauvaise si elle est associée à la mesure du PSA.
Ce qui signifie qu'il faut lever un autre tabou : faites un toucher rectal et demandez un PSA. Pour ne pas passer à côté du diagnostic.
L'HAS, nid d'ayatollahs de la Santé Publique, serait mauvaise fille de s'en offusquer.
Michel Cymes, tel un Galilée de la pensée, s'opposant au conservatisme ambiant " Et si on avait dû compter sur les bien-pensants de la médecine, on en serait encore à la saignée et aux ventouses…" écrit-il sur son blog, ne craint pas de s'opposer aux recommandations de la plupart des Agences mondiales concernant le dépistage du cancer de la prostate, car, comme on le sait, ce n'est pas la démocratie qui rend les données vraies en science mais leur seule véracité.
Michel Cymes, fort de ses amitiés urologiques, sait combien les urologues français sont, chaque fois qu'il est nécessaire, partisans du watchful waiting en français ou de l'attente vigilante en anglais, c'est à dire qu'au décours du diagnostic d'un cancer de la prostate par la mesure du PSA, ils n'opèrent pas, ils ne proposent pas d'anti androgènes, ils ne proposent pas de radiothérapie.
On voit combien notre héros est un rebelle.
Et un rebelle plein d'humour qui n'hésite pas à se comparer, sur le plan de l'humour, à Albert Einstein...
Pour une fois que nous pouvons compter sur un médecin de cette trempe : pourquoi nous en priver ?
Le docteur Michel Cymes est aussi un indépendant. Jamais il ne se compromettrait avec les puissants. Jamais il ne se compromettrait avec les politiques. Jamais il ne ferait confiance à des marchands aux dépens des scientifiques. Son site en fait foi : ici.
Il a déjà mené deux campagnes fortes de Santé Publique dans le passé. Je ne voudrais pas mentionner les autres pour ne pas le gêner et pour que la Communauté Scientifique ne me reproche pas d'en avoir trop fait et de façon trop voyante.
Il fut d'abord un adversaire émérite du traitement hormonal substitutif (THS) de la ménopause, en association avec de grands médecins qui n'avaient aucun lien avec l'industrie pharmaceutique. Il a ainsi combattu tous ces gynécologues non indépendants qui promouvaient un traitement améliorant la qualité de vie des femmes sans les prévenir du risque significatif de cancers du sein qu'ils leur faisaient courir. Il a eu tellement raison, le Michel Cymes, que la FDA l'a écouté, bien avant la France, et que les Américains ont interdit ces hormones : grâce à Michel Cymes, notre nobélisable, des cancers et des décès de femmes ont été évités. Chapeau !
Il fut, l'an passé, un grand adversaire de la vaccination généralisée de la population française tout entière contre la grippe A/H1N1v, un pourfendeur de la politique calamiteuse de Madame Bachelot qu'il n'a pas invitée sur son plateau, il a été un dénonciateur des propos alarmistes de nos experts français virologues, des experts infectiologues de l'OMS et, en enquêtant avec ses équipes, il a pu ainsi mesurer l'innocuité du virus A/H1N1v et, grâce à lui, les milliers de morts des années précédentes sont devenus 349 (ici).
Quel homme !
Enfin, pour ce qui est de la prostate, il réussit à rendre ringardes toutes les données de Santé Publique Ayatollesques, qui prétendent que le dépistage généralisé du cancer de la prostate ne diminue pas la mortalité globale et entraîne un sur diagnostic responsable d'événements indésirables nombreux et inutiles (voir ici les données ayatalollesques).

Pour toutes ces raisons il me paraît nécessaire de proposer Michel Cymes à l'Académie suédoise dans la catégorie Prix Nobel de Médecine.

Première signature : Docteur Jean-Claude GRANGE, Médecine générale. 78200.

dimanche 25 septembre 2022

Bilan médical partiel du lundi 19 au dimanche 25 septembre 2022 : Retours en arrière, éruption cutanée, PFS vs OS, lithium, Covid long, maladies injustes, inégalités sociales, cardiologie avant effort...



Retours (violents) en arrière. 

A quoi cela peut-il bien avoir servi, depuis le début de la pandémie, de contempler des médecins auto satisfaits hurlant "La science ! La science ! La science !"

alors que 

  1. L'UE finance des campagnes anti cancer (prostate, sein, col) fondées sur des non assertions scientifiques
  2. L'AP-HP étend le domaine du dépistage du cancer de la prostate sous sa propre autorité (incompétente)
  3. Les gériatres continuent de prescrire des pseudo anti Alzheimer et de regretter qu'ils ne soient plus remboursés
  4. Des rhumatologues s'insurgent contre le déremboursement de l'acide hyaluronique injectable... contre toutes les études robustes qui indiquent que ce n'est pas plus efficace qu'un placebo...
  5. Le ministre de la santé (François Braun) prône le dépistage du cancer de la prostate par dosage de PSA à 45 ans (contre toutes les recommandations internationales) ou, au même âge, la mammographie pour le dépistage du cancer du sein
  6. Le même ministre prône une quatrième (i.e. onzième) année d'étude pour les MG



Pendant ce temps la bureaucratie de la médecine (et ici de la pharmacie) se déchaîne pour une éruption cutanée :




Si vous n'arrivez pas à lire, ne soyez pas inquiets, c'est de la merdre en barre.

La PFS (progression free survival) n'a pas (toujours) de corrélation avec l'OS (la survie globale)

Est-ce que des oncologues pourraient le clamer un peu plus fort ?

Car des molécules sont commercialisées (tel le duvelisib) qui augmentent la survie sans progression de la tumeur en diminuant la survie globale !



Medical Reversal ? Le lithium ne préviendrait pas le suicide.

Une méta-analyse (je ne vous refais pas l'article sur le niveau de preuves des méta-analyses qui dépendent des essais que l'on inclut, de ceux que l'on rejette et des études -- le plus souvent négatives -- qui ne sont pas publiées et dont on n'a même pas la preuve qu'elles auraient pu exister ; GIGO : Garbage In, Garbage Out) conclut que l'utilisation du lithium ne prévient ni le suicide ni les conduites suicidaires (ICI).

A suivre. 

N'arrêtez pas brutalement le traitement. Ne cessez pas de prendre votre traitement.




Covid long : j'en remets une couche.

  1. Des personnes estimables, et je pèse mes mots, ne cessent de citer des études observationnelles, pas toujours cas-témoin, pour pousser en même temps des cris d'orfraie sur le poids des covid longs, sur le "vrai" problème de santé publique que cela représente et sur, ouvrez grand les yeux, la nécessité d'une prise en charge et y compris médicamenteuse
  2. Ce n'est pas bien (voyez, je sais faire de la morale à bon marché) de citer de telles études a) sans les avoir lues, b ) en n'en ayant lu que l'abstract, c) uniquement parce qu'elles vont dans le sens de croyances end) pour ne pas avoir à se dédire
  3. Je répète : il est possible que le covid long existe et, quelle que soit l'intensité initiale des symptômes mais, pour l'instant, il n'existe aucun marqueur spécifique de cette atteinte prolongée.
  4.  Cela ne veut pas dire que les personnes malades qui se plaignent de symptômes prolongés attribués au Covid a) mentent, b) sont hypochondriaques, c) sont à adresser chez un psychiatre et/ou un psychologue... en l'état actuel de nos connaissances.
  5. Car l'absence de physiopathologie uniciste, l'absence de marqueurs tissulaires, l'absence de marqueurs biologiques,  et l'absence ne signifie pas que l'on ne passe pas à côté de quelque chose, l'absence de traitements non et médicamenteux, toutes ces absences conduisent les personnes malades vers les spécialistes autoproclamés du Lyme, de la fibromyalgie et de l'intolérance au gluten.
Cette infographie montrant la prise en charge du Covid long explique mon propos


Une nouvelle catégorie de maladies : les maladies injustes.



J'apprends par la même occasion l'existence de cette personne qui est, ouvrez les guillemets, "Ambassadrice pour la santé mondiale au Ministère de l'Europe et des Affaires étrangères". Ouah...

Rappelons que la véritable injustice des maladies, et je vous épargne ma célèbre litanie "La maladie est le salaire du péché", au niveau mondial et français, ce sont les inégalités socio-économiques.


Le rapport de la DREES sur l'état de santé de la population en France

Madame Seydoux a dû se jeter sur le rapport avant même sa parution officielle ! LA

Eh bien, croyez-moi si vous voulez, je l'ai déjà écrit un million de fois sur ce blog (ICI par exemple), les riches sont en meilleure santé que les pauvres...

Et ça, c'est pour notre maître, le Ministre de la Santé et de la prévention :

  • Le recours au dépistage du cancer est inégal selon le niveau de vie, avec par exemple, 24 % des femmes de 50-74 ans parmi le cinquième des personnes les plus aisées n’ayant jamais eu de mammographie ou en ayant eu une il y a plus de 2 ans contre 39 % pour les femmes parmi le cinquième des personnes les plus modestes en 2019.


Rappel à l'attention des dépistologues : la gratuité des dépistages est un effet d'aubaine pour les riches et une impasse pour les pauvres qui n'ont pas accès aux soins.


Les maladies injustes (et je ne cite qu'un extrait, pour le reste : lire)

  • Lorsqu’ils grandissent, deux fois plus d’enfants d’ouvriers que d’enfants de cadres se retrouvent en surpoids en grande section maternelle. En 2017, 18 % des enfants en classe de troisième sont en surpoids et 5 % sont obèses (3 % chez les enfants de cadre et 8 % chez les enfants d’ouvriers). La part de ces enfants en surpoids ou obèses progresse.


Les examens inutiles en cardiologie avant de pratiquer une activité physique


Un nouveau guide de la HAS vient de paraître sur la prescription de l'activité physique (AP) : LA




"Existe-t-il des antécédents de maladie mentale dans votre famille ?
- J'ai un oncle qui a fait la queue 35 heures pour passer devant le cercueil d'une femme qu'il n'a jamais rencontrée." 

lundi 18 octobre 2010

UN BON MEDECIN QUI NE CONNAIT PAS LES STATISTIQUES : PORTRAITS MEDICAUX (2)

Benjamin Disraëli (1804 - 1881)
Il y a trois sortes de mensonges : les gros mensonges, les mensonges sacrés et les statistiques.
Lies, damned lies, and statistics.

Le docteur B est un bon médecin généraliste qui fait correctement son travail. Il ne reçoit que sur rendez-vous et ne fait jamais, sauf urgence du siècle, de dérogation. Il lui arrive de faire des visites, environ cinq ou six par semaine, mais il s'agit de visites programmées chez des personnes âgées ou invalides qui ne peuvent se déplacer (que chez leur spécialiste). Il est un bon médecin généraliste qui ne se contente pas de faire de la bobologie et de croire qu'il n'en fait pas. Il est dévoué avec ses patients, n'hésita pas à passer du temps quand il faut passer du temps, il fait le suivi des nourrissons, il fait le suivi des femmes enceintes, il débarrasse les patients de leurs verrues, il fait de la petite chirurgie, il infiltre les épaules, les genoux, les canaux carpiens, les épicondyles, il lui arrive même de faire des électrocardiogrammes, il fait des frottis vaginaux. Compte tenu du prix de la consultation, de son appartenance au secteur I sans dépassement d'honoraires, on peut dire qu'il donne de sa personne et qu'il n'est pas avare de son temps. Il se rend dans des séances de formation médicale continue sponsorisée pour les repas par l'industrie pharmaceutique, il reçoit un laboratoire pharmaceutique par semaine à son cabinet et il lui arrive de déjeuner à l'oeil dans un restaurant de sa ville invité par une charmante déléguée médicale. L'observation de ses prescriptions indique qu'il prescrit peu d'antibiotiques dans les affections virales, qu'il prescrit modérément dans nombre de maladies, que le nombre de lignes sur les ordonnances de personnes âgées est un peu au dessus de la moyenne nationale mais que cela n'a rien d'exceptionnel, il prescrit des arrêts de travail avec mesure et tact compte tenu de la zone dans laquelle il exerce, il ne prend plus de gardes depuis des lustres parce qu'il trouve que ses journées sont assez remplies comme cela, il adresse les patients en loco-régional parce qu'il trouve que les spécialistes de sa ville sont compétents, il s'informe en lisant la presse sponsorisée... Que dire de plus ? C'est un bon médecin au sens classique du terme : il écoute, il entend, il ne fait pas que de la médecine, il fait aussi du social, mais comment pourrait-il faire autrement dans le type de ville où il exerce ?
Mais il y a un hic : il croit beaucoup trop en la médecine.
Je ne sais pas trop comment exprimer cela.
En gros, pour simplifier, allons, simplifions, il pense que les progrès enregistrés dans les pays industrialisés comme la baisse de la mortalité infantile ou l'augmentation de l'espérance de vie sont liés exclusivement à l'action de la médecine et des médecins.
Il ne croit pas aux paradoxes tels que 'La mortalité cardiovasculaire a diminué avant l'arrivée des anti hypertenseurs efficaces' ou 'La mortalité par rhumatisme articulaire aigu a diminué avant l'arrivée de la pénicilline' ; il ne doute jamais de l'efficacité des vaccins, quelle que soit le domaine. Toute attitude dubitative sur le rôle imparfait de la médecine lui paraît ressortir de la théorie du complot.
Mais surtout : il est persuadé que la médecine préventive peut presque tout.
Non seulement il en est persuadé mais il y croit et l'applique dans sa vie de tous les jours : il donne des conseils hygiéno-diététiques aux jeunes mamans, aux diabétiques, aux hypertendus, aux dyslipidémiques, il déconseille l'excès d'alcool et le tabagisme et, pourtant, si on le traitait d'hygiéniste, il ne saurait même pas de quoi on pourrait l'accuser.
Il est deux choses qu'il ne comprend absolument pas : que le dosage du PSA puisse ne pas être efficace ; que le dépistage du cancer du sein puisse entraîner des désavantages.
Le docteur B se fie à son bon sens : il faut tout faire pour sauver une vie ! Et d'ailleurs, est-ce tout faire que de prescrire un PSA ? Est-ce tout faire que de prescrire une simple mammographie ?
Vous aurez beau lui donner tous les arguments du monde, lui fournir toutes les preuves contraires, il ne se fiera qu'à son sens clinique et au sourire d'une vie sauvée.
Mais alors, vous aurez tout faux si vous lui sortez des statistiques. Les statistiques l'emmerdent. Les études cliniques avec des statistiques, des petits p, des risques relatifs, tout cela l'emmerde. Les tests cliniques avec des spécificités, des sensibilités, des valeurs prédictives positives, des valeurs prédictives négatives, l'emmerdent.
Il n'a jamais lu de sa vie une étude clinique dans le texte. Il n'a jamais cru que les études cliniques pouvaient perturber sa vision personnelle de la réalité clinique.
Il ne comprend rien aux statistiques. Un point c'est tout. Et bien qu'il ne connaisse pas la phrase de Disraëli ou la phrase que l'on a attribuée à Disraëli, n'est-ce pas Mark Twain qui l'a popularisée ?, le fait de lui apprendre contentera son sentiment épidermique contre les stats.
Le docteur B croit trop en la médecine et à ses pouvoirs magiques qu'il ne considère pas comme magiques mais comme logiques.
Ce médecin est un sentimental : il croit à la sentimentalité du diagnostic qui sauve une vie.
Ce médecin, le bon docteur B, qui, on l'a vu, est un bon médecin praticien, veut faire le bonheur des malades malgré eux. Ou alors : en niant tout attitude paternaliste, il dira qu'on ne peut pas faire d'omelettes sans casser des oeufs et que pour sauver une vie il est possible soit de rendre un homme non malade impuissant, soit d'amputer le sein d'une femme non cancéreuse...
Comme il ne comprend pas les statistiques il ne sait pas que ce sont plusieurs hommes qui seront rendus impuissants par le sauvetage d'une vie (48 exactement) (voir ici) et plusieurs femmes qui seront opérées à tort pour le sauvetage d'une autre vie (10 femmes exactement) (voir ici).
Le docteur B est plus fort que les statistiques qui se trompent forcément et qui ne peuvent s'opposer au fait que sauver une vie est, finalement, l'objectif final de la médecine.
On rappelle que les statistiques actuelles (au dix-huit octobre 2010) déconseillent le dépistage du cancer de la prostate par le dosage du PSA et indiquent que le dépistage du cancer du sein entre 50 et 75 ans par la pratique d'une mammographie tous les deux ans est loin d'avoir un rapport bénéfices / risques favorable.

mercredi 14 août 2013

Refondation de la médecine générale. Réflexion 4. L'enseignement de la médecine ne prépare à rien et encore moins à la médecine générale.


(Je me rends compte en regardant les commentaires des billets précédents que cela part dans tous les sens.
Tant mieux.)
Je suis en vacances en famille et ma nièce prépare l'ECN (Examen Classant National). Elle a emporté 34 kilos de bouquins.
Je jette un regard distrait sur la pile des livres.
Je l'interroge sur les spécialités les plus recherchées, ce qui me rend rêveur : orthopédie en premier...
Elle fait une prépa qui coûte une fortune à ses parents.
Les cours ne sont pas sur internet car il faut bien faire du business avec les conférences, les ventes de polycopiés, de livres.
Cela me rappelle l'internat, les confs, les sous-colles, les polycopiés, les années d'il y a longtemps.
J'attrape le bouquin de Dermatologie écrit par le Collège des Enseignants. Je réfléchis et je sélectionne deux sujets qui m'intéressent a priori parce que c'est une interrogation assez fréquente en médecine générale. Erysipèle et Mélanome cutané.
Cela me rappelle encore plus furieusement les questions d'internat de ma jeunesse (cela devait être en 1976). Comme c'est "moderne" il est écrit en début de question : "Objectif pédagogique" et l'objectif pédagogique est creux et sans intérêt. Je parle du point de vue d'un médecin généraliste. Mais du point de vue d'un spécialiste, c'est pas mieux.
Erysipèle : c'est une longue bouillie verbale où les arguments de fréquence sont oubliés, où tout est placé sur le même plan, les tableaux graves comme les tableaux légers. Enfin, c'est 34 ans de pratique de l'érysipèle en médecine générale qui me le fait dire. C'est non seulement une bouillie mais un catalogue sans queue ni tête, une sorte d'accumulation à la Arman (désolé, ce n'est pas dans le programme) et j'imagine l'impétrant qui n'a jamais vu un érysipèle de sa vie et qui, lorsqu'il en verra un pour la première fois à l'EHPAD du coin, envisagera d'emblée l'amputation.
Mélanome. C'est du lourd : tout médecin doit savoir diagnostiquer un mélanome à temps... et cetera. Bon, c'est encore un catalogue, c'est plutôt bien structuré, il y a des digressions académiques sur un peu tout et n'importe quoi et sur cette masse de mots, on finit par découvrir celui de dermoscope. En passant. Les dermatologues ne doivent pas utiliser de dermoscope, les dermatologues ne doivent pas s'être formés à la dermoscopie, les médecins qui ont rédigé le truc ont dû recopier les questions d'externat de Claude Bernard. C'est nul.
J'attrape un bouquin d'Urologie moins épais signé par un certain H. Goncalves qui serait un médecin qui a été bien classé à l'ECN. Les tumeurs de la prostate occupent les pages 37 à 49. J'ai l'impression que je connais deux ou trois trucs sur le cancer de la prostate (voir ICI ou LA). Cette question est un florilège de khonneries. Je souligne.
Vous voulez des exemples ? En italique, c'est écrit dans le marbre.
 Dosage du PSA : 
Dépistage individuel  recommandé par l’AFU (pas de mentions d’autres recommandations contraires)
But du dépistage : diminution de la mortalité
Pour tous les hommes entre  50 et 75 ans si espérance de vie supérieure à 10 ans
Normal, n’élimine pas le cancer, à renouveler de façon annuelle
Anormal (TR ou PSA) implique la réalisation de biopsies prostatiques.
Et après il y a des gens qui accusent les médecins généralistes de doser le PSA ! Nul doute que l'AFU sélectionne les urologues avec bienveillance... 
J'ai eu beau chercher le mot sur diagnostic, je n'ai pas trouvé.

On se résume : le peu que j'ai consulté des documents de préparation à l'ECN sont de la daube en cubi. Et j'imagine ce que j'aurais découvert en regardant Cancer du sein ou Vaccination contre le papillomavirus.

J'apprends aussi qu'à la Pitié-Salpétrière il existe en fin d'études 10, j'ai bien dit 10, maîtres de stages en médecine générale. Que certains stages, comme en 1972 quand j'ai commencé médecine sont de la daube en conserve (avariée) et que l'on apprend ni la médecine ni la médecine générale.
Passons sur le fait que la majorité des profs utilisent des diapositives issues directement de Big Pharma (ils n'enlèvent même pas la marque...).

La médecine générale n'est donc pas une spécialité.
Je le savais.

La médecine universitaire est sclérosée (les mêmes questions d'internat qu'il y a plus de 30 ans), pourrie (sponsorisée par Big Pharma), malhonnête, anti scientifique et ne prépare à rien sinon à la recréation et la reproduction des "élites" dont la caractéristique principale est l'illettrisme médical (ICI).

Bon. On refonde quand ?

(Illustration : Accumulation - Arman (Pierre Fernandez) : 1928 - 2005)

dimanche 31 mars 2013

Chasse aux faux médecins dans toute la France.



La découverte d'un faux architecte à Mantes-La-Jolie vient d'être relatée par la presse (ICI).

Je me suis dit qu'il serait urgent de découvrir de faux médecins, non des médecins qui n'auraient pas passé leur thèse, non des médecins qui n'auraient pas suivi le cursus, non des faux médecins qui finissent, à la fin, par tuer leur famille (LA), non, seulement des faux médecins qui font des cours aux étudiants en médecine en n'énonçant pas tout à fait des données étayées par la science.

Nous avons rencontré de faux médecins.
On me dit que, lors de leurs cours, des Médecins Académiques :

  1. ne parlent pas d'EBM mais d'Evidence Biaise Médecine
  2. parlent de la Revue Prescrire comme d'un repaire d'ayatollahs 
  3. affirment que l'épidémiologie ne fait pas partie de la médecine
  4. se moquent comme d'une guigne des recommandations de l'HAS sur le dépistage du cancer de la prostate, des recommandations américaines de l'USPTF (qu'ils assimilent à l'impérialisme anglo-saxon) sur le même sujet et prétendent, eux, faire de la vraie médecine en dépistant à tout va
  5. pérorent sur le fait que le vaccin prévenar diminuent les infections invasives à pneumocoque chez les nourrissons et les enfants
  6. assènent que les coxibs ont un intérêt en rhumatologie et sont vraiment sélectifs
  7. prétendent ne jamais avoir de leur vie prescrit de la coumadine et conseillent désormais les nouveaux anticoagulants par voie orale
  8. prétendent que le dépistage du cancer du sein par mammographie chez les femmes de 50 à 74 ans est un bienfait unique pour les femmes
  9. disent que le sur diagnostic est une notion a posteriori qui n'a aucun intérêt en médecine
  10. pensent que l'ostéoporose est un problème majeur qu'il faut dépister systématiquement et traiter obligatoirement
  11. ne conseillent jamais de prescrire des diurétiques thiazidiques en première intention dans le traitement de l'HTA
  12. affirment que la contraception estro-progestative est sans danger et qu'il vaut mieux, pour les femmes, un AVC qu'une grossesse
  13. pensent que les recommandations de GOLD sur la BPCO sont indemnes de toute pollution industrielle
  14. prétendent que les narcolepsies après vaccination par pandemrix sont fortuites
  15. se vantent d'avoir écrit des articles dont ils n'ont été que des écrivains fantômes et pour lesquels les vrais rédacteurs sont industriels
  16. promeuvent la contraception obligatoire et involontaire et / ou la vaccination obligatoire et / ou involontaire
  17. confondent l'éducation thérapeutique avec le conditionnement des patients à prendre leurs traitements
  18. font du corticoïdes bashing dans le traitement de l'asthme pour promouvoir les nouveaux anti IgE (très très chers)
  19. vantent le lyrica comme le nec plus ultra de l'antalgie et le font prescrire dans les ongles incarnés malgré les études frauduleuses qui ont conduit à son AMM
  20. disent que plus ils profitent des largesses de Big Pharma et plus ils sont indépendants des industriels
  21. exaltent les "nouveaux" antidiabétiques oraux jusqu'à la veille de leur retrait du marché
  22. revendiquent les effets thérapeutiques des anti Alzheimer en prétextant une prise en charge médicamenteuse "structurante"
  23. ad libitum
Mais les faux médecins ne sont pas seulement des académiques.
Les académiques ont une responsabilité particulière puisque ce sont eux qui enseignent la médecine et qui font passer ces messages falsifiés.
Mais ce sont eux aussi qui apparaissent sur les plateaux de télévision ou dans les émissions de radios et qui forment le peuple des citoyens, des futurs malades ou des déjà malades à ces idées fausses.

Je ne dirais rien de mes frères médecins généralistes qui ont eux-aussi tendance, comme moi, à imiter leurs "maîtres". Mais la liste serait longue...

Mais il est une autre façon de débusquer les "faux" médecins.
A l'envers.
Des faux médecins seraient des médecins qui, par rapport aux "vrais" formatés pour passer l'ECN :

  1. déprescrivent les anti alzheimer
  2. ne prescrivent pas de PSA comme "outil" de dépistage du cancer de la prostate
  3. déprescrivent l'atorvastatine
  4. déprescrivent les gliptines
  5. n'ont jamais prescrit de diane 35
  6. ad libitum

Mais je voudrais aussi dire ceci : je suis un vrai médecin :

  1. Il m'arrive de prescrire un dosage du PSA après (longue) discussion avec le patient
  2. Je vaccine des patients contre la grippe saisonnière après (longue) discussion avec le ou la patiente
  3. Il m'arrive de prescrire du rhinofluimucil contre les avis de la Revue Prescrire
  4. Il m'arrive de "renouveler" des gliptines à des patients diabétiques de type 2 en certaines occasions
  5. Je prescris parfois du tramadol
  6. ad libitum