jeudi 27 octobre 2011

Cancer du sein et cancer de la prostate : où se passent les débats sur le dépistage ? Plutôt hors de France.


La lecture de la presse anglo-saxonne présente à la fois un côté excitant et un côté décourageant pour notre cerveau de grenouilles franchouillardes.
Excitant, car les débats fondamentaux de santé publique (le dépistage du cancer du sein, le dépistage du cancer de la prostate) font l'objet de débats entre experts académiques et sont publiés dans les revues savantes alors qu'en France il y a la presse officielle et expertale d'un côté, je dirais même la presse scientifique gouvernementale, et, de l'autre côté, quelques personnes non d'accord que l'on considère comme des activistes qui s'expriment dans des blogs ou dont les travaux ou les propos sont relayés par des associations dissidentes.
Décourageant, car on se dit qu'il n'y a pas moins de personnes intelligentes en France qu'ailleurs capables de mener un débat scientifique, qu'il n'y a pas moins d'experts cortiqués qu'ailleurs, pas moins de médecins qui lisent, pas moins de statisticiens qui calculent, pas moins d'économistes qui réfléchissent... et pourtant, le poids des institutions, des honneurs, des prébendes, du système des nominations, la méritocratie à la française en quelque sorte, rendent ces débats impossibles ou rares, nombre d'experts ayant peur de leur ombre, craignant qu'en s'opposant aux agences gouvernementales, aux instituts divers et variés, aux experts officiels, aux ministres, aux comités, au Haut Conseil, à la Direction Générale de la Santé, ils ne perdent leurs postes, leurs avantages et leurs voitures de fonction. Heureusement pour eux, ces experts franco-français, ils ont l'avantage de la barrière de la langue, ils savent que tout ce qui ne sort pas de la rue de Ségur paraît exotique à la majorité de leurs confrères...

Eh bien, chers amis, deux débats majeurs de santé publique sont actuellement dans la tête de tous ceux qui réfléchissent un tant soit peu au dépistage et au traitement, celui de deux des cancers les plus emblématiques de nos sociétés modernes, celui du sein pour la femme et celui de la prostate pour l'homme.

Je veux vous donner des exemples de ces débats tels que nous les lisons en ce moment.
(Avant ceci je n'oublie pas que certains médecins français "académiques" contribuent de façon déterminante aux débats sur ces dépistages, comme par exemple Alain Braillon, Gérard Dubois, Catherine Hill ou Bernard Junod. Il existe bien entendu d'autres médecins qui participent à ces réflexions mais ils sont non académiques et moins visibles dans le champ médiatique traditionnel à l'exemple de Marc Girard, Dominique Dupagne ou Chritian Lehmann. J'ai hésité à citer ces trois là car je me suis dit que toux ceux que j'avais oubliés allaient faire la tête et m'en vouloir. Qu'ils se manifestent ! Je voudrais souligner aussi et surtout la qualité pédagogique d'un livre que je suis en train de lire "No mammos ?" de Rachel Campergue dont l'auteure est non seulement non académique mais aussi non médecin, livre dont je parlerai bientôt avec enthousiasme.)

Cancer de la prostate.
Je vous ai récemment parlé de la publication états-unienne d'un projet de l'organisme de prévention américain (USPSTF) déconseillant le dépistage du cancer de la prostate par le dosage du PSA (recommandation de grade D) (ICI). Les commentaires sont ouverts jusqu'au 8 novembre. Bien entendu les lobbys se sont mis en branle contre cette recommandation mais il serait minorant de ne parler que de lobbys, il y a aussi des auteurs académiques qui "pensent" et pas forcément le contraire mais d'une autre façon. Le dernier numéro du New England Journal of Medicine a publié pas moins de quatre articles sur le sujet : un premier article (LA) très documenté de la part d'auteurs dont vous pouvez consulter les liens d'intérêts déclarés (ICI) sur tous les points que le projet a oubliés et, surtout, à mon sens, une réflexion très profonde sur la quasi impossibilité d'informer les patients de façon balancée lors d'une consultation en raison de l'incertitude des données et du temps qu'il faudrait pour essayer d'être "juste" : At first glance, these guidelines appear exemplary, because they embrace the idea of patient-centered informed decision making. However, before 2009 — when results from two large screening trials were finally published — an evidence-based discussion of benefits was impossible because no convincing data existed to support screening. To be sure, clinicians could speculate loosely about potential benefit (“We might catch prostate cancer early enough to save your life”) and potential harm (“Screening might result in burdensome interventions with serious complications”). But the idea that physicians could initiate truly informed discussion was wishful thinking, because clinicians and patients had to consider an enormous list of probability estimates and uncertainties: What PSA cutoff is best? What level should trigger repeat PSA testing or biopsy? How often should we repeat either one? What is the patient's pretest probability of cancer? What is the chance that a PSA test plus a biopsy will find cancer, if it's present? If cancer is found, will it be clinically important? Will this patient prefer surgery, radiation therapy, or watchful waiting? What are the probabilities of serious side effects from each treatment, and how will this patient weigh them? Most important, will screening reduce this patient's risk of death from prostate cancer? ; un deuxième article (LA) émanant d'un auteur, Michael Barry, que j'ai connu personnellement en bien pour avoir travaillé avec lui (lien ou conflit d'intérêt ?) et qui insiste sur le fait que les recommandations de l'USPSTF auraient dû être cotées Grade C et non Grade D, soit The USPSTF recommends against routinely providing the service. There may be considerations that support providing the service in an individual patient. There is at least moderate certainty that the net benefit is small. et Suggestions for practice : Offer/provide this service only if other considerations support offering or providing the service in an individual patient. ; un troisième article (ICI) insitant sur le choix individuel du patient et du médecin, une façon en quelque sorte de ne pas dire non brutalement au PSA et de continuer à laisser faire ; un quatrième article (LA) propose un cas clinique : que faire devant ce patient blanc non hispanique venant consulter pour la première fois et demander s'il faut dépister le cancer de la prostate en sachant qu'il n'a aucun antécédent familial et pas de signes urinaires ? L'article est long (on imagine la longueur de la consultation...) et se termine ainsi : Decisions about prostate-cancer screening should be based on the preferences of an informed patient.. Avec cela et un verre d'eau, on est bien avancés.

Cancer du sein.
Là, les choses sont moins avancées chez nous (la France) puisque le dépistage de masse par la mammographie est organisé dans de nombreux départements : voir ce blog : ICI et LA.
Mais voici où nous en sommes, pour l'actualité récente, en Grande-Bretagne, par exemple. Je vous rappelle que le même USPSTF américain, donc, a émis des recommandations de Grade C pour la mammographie avant 50 ans, c'est à dire au cas par cas (ICI), ce qui a provoqué un tollé aux EU où on "recommandait" de la faire systématiquement entre 40 et 50 ans. Revenons à la Grande-Bretagne. Nous avons vu sur ce blog que la présidente du Royal College of General Practitioner, Iona Heath, était opposée pour elle-même à la mammographie comme moyen de dépistage du cancer du sein. Il y a quelques jours une professeure d'obstétrique londonienne, Susan Bewley, a écrit une lettre dans le British Medical Journal destinée, cite la rédactrice en chef du BMJ, au England's cancer tsar, demandant que le programme de dépistage du cancer du sein par mammographie fasse l'objet d'une évaluation indépendante (ICI). Elle commence ainsi son argumentation, détaillée, documentée, justifiée, et on se rend compte que ce qui la choque le plus ce sont les mensonges que le NHS véhicule : Approaching 50, with a family history of the cancer (grandmother, aunt, and sister) and risk factors (late childbearing, low parity, obesity), I had to consider screening mammography for myself. It is natural to fear cancer and its treatments and understandable to think “better safe than sorry”—that the promise of early detection could offer me a much better chance of life and health. I declined screening when it was offered, as the NHS breast screening programme was not telling the whole truth.
Puis, dans un deuxième temps, le tsar en question, Mark Richards, effectivement un tsar et une star : national clinical director for cancer and end of life care, Department of Health, London, répond (LA) en arguant qu'il fait tout son possible pour répondre aux questions de sa collègue : I hope this reassures you that I take the current controversy very seriously. I will do my best to achieve consensus on the evidence, though I realise this may not ultimately be possible. Should the independent review conclude that the balance of harms outweighs the benefits of breast screening, I will have no hesitation in referring the findings to the UK National Screening Committee and then ministers. You also have my assurance that I am fully committed to the public being given information in a format that they find acceptable and understandable and that enables them to make truly informed choices..

Bon, les Anglo-Saxons, selon les froggies, sont des bonimenteurs de première grandeur, cf. les armes de destruction massive en Irak, mais n'est-ce pas, malgré les conventions du genre et les poses affectées de tout le monde, une leçon de démocratie sanitaire ? A bon entendeur, salut.



Une association fait faillite. Histoire de consultation 100.


Madame A, 43 ans, est actuellement en arrêt de travail. D'une part, pour une épicondylite droite déclarée et acceptée comme maladie professionnelle (tableau n°57), d'autre part pour une pathologie de l'épaule gauche déclarée et acceptée comme maladie professionnelle (tableau n°57) qui vient d'être opérée... Cette patiente est auxiliaire de vie dans une association.
Aujourd'hui (c'était hier) elle vient m'annoncer qu'elle va être licenciée. Et elle veut savoir comment cela va se passer sur le plan administratif et financier.
Il s'agit d'un licenciement lié à la faillite de l'association.
Avant même qu'elle ne m'explique les circonstances de cette faillite, je lui dis : "Voulez-vous que je vous en donne les raisons ?" Elle me dit oui en souriant. "Eh bien, voici : le patron roule en BMW, la fille du patron est une salariée fantôme payée comme secrétaire administrative et comptable et elle roule en 308 cc, au début, il y avait beaucoup d'heures supplémentaires payées au tarif fort puis les heures supplémentaires ont été non seulement moins payées mais ont disparu et les auxiliaires de vie en ont eu assez d'être appelées à n'importe quel moment pour boucher des trous..."
Elle me regarde étonnée : "Comment savez-vous autant de choses ? - J'ai l'habitude."
Et je ne lui ai pas dit que les auxiliaires de vie avaient été formées sur un coin de table, qu'elles ne connaissaient rien de la souffrance des aidants comme de la perversité des aidé(e)s, qu'elles étaient exploitées en tant que travailleuses mal payées, en tant que femmes genrifiées, en tant que femmes à double emploi du temps (auxiliaires de vie au travail et "bonnes" chez elles)... Mais je m'arrête là, on va dire que je fais du social.
Je ne fais pas du social : je ne dénonce pas l'exploitation des travailleurs par le méchant patronat, je souligne le fait que les associations ne sont pas toujours les havres de paix que l'on décrit, les havres de dévouement que l'on encense, les havres de sollicitude que l'on met en avant au service des personnes vulnérables, des personnes handicapées ou des personnes démentes, mais aussi des zones d'exploitation des femmes, des femmes non diplômées, des femmes d'origine étrangère (ce qui n'est pas le cas ici), des femmes françaises issues de l'immigration (ce qui n'est pas le cas ici), des zones d'horaires de nuit, des zones d'horaires décalés, des zones d'horaires suspendus, des zones de maladies professionnelles ou d'accidents du travail, des zones d'anxiété et de dépression, des zones de profitabilité, des zones d'emplois fictifs, des zones de subventions détournées, des zones de voitures de fonction luxueuses...
Tout n'est pas toujours aussi noir pour ce qui est du fonctionnement des chefs.
Heureusement.
Mais beaucoup de choses sont noires dans la gestion des employées, le plus souvent des femmes...
Madame A est jeune et il lui sera bien difficile de retrouver un emploi où elle ne devra pas porter, manutentionner, soulever, ce qui sera bien difficile avec ses deux maladies professionnelles qui vont certes guérir un jour ou l'autre mais qui rechuteront si les conditions de travail se reproduisent.
Les associations, comme chacun sait, font un boulot formidable, mais leur précarité n'a d'égale que la précarité des travailleurs qu'elles emploient.
Il est possible d'envisager leur utilité de deux manières : une manière pessimiste qui dit que c'est la fin de l'Etat providence qui délègue au privé ce qu'il ne peut plus faire ; une manière optimiste qui dit que prise en charge des personnes vulnérables peut se faire dans le privé décentralisé. Mais dans les deux cas nous sommes confrontés, me semble-t-il, à deux questions ou deux constats : la question illichienne de la contre productivité du système de santé (ICI) et la question gilliganienne ou trontoienne du care comme outil politique non marxiste et anti néo-libéral (LA).
Nous y reviendrons probablement.
En parlant aussi du bénévolat.

(Installation du Haut Conseil à la vie associative le 28 juin 2011)

mardi 25 octobre 2011

Pour en finir une dernière fois avec le dosage du PSA pour dépister le cancer de la prostate.


Un organisme américain, USPSTF (United States Preventive Services Task Force), vient de publier un draft (projet) recommandant de ne pas doser le PSA pour dépister le cancer de la prostate chez l'homme.
Il s'agit d'une recommandation de grade D qui signifie : l'USPSTF recommande de ne pas pratiquer ce dosage. Il existe une certitude modérée à haute (vous lirez le tableau 2 du draft qui rappelle quels sont les niveaux de certitude) que ce dosage n'apporte pas un net bénéfice ou que les inconvénients l'emportent sur les avantages. L'USPSTF déconseille l'utilisation du dosage.
Vous pouvez ICI le trouver afin de vous en faire une idée et LA faire des commentaires si vous le souhaitez (on aimerait tant qu'en France ce genre de procédures soit ouvert mais ne rêvons pas : quelques années encore... ou jamais).
Je vais essayer de vous le résumer en m'aidant d'un document américain (Medscape) qui m'a facilité la tâche.

Voici, de façon préliminaire, ce qu'entend l'USPSTF par "sur diagnostic" (overdiagnosis) ou "pseudo maladie" (pseudodisease) :
  1. "Des preuves indiquent que les programmes de dépistage du cancer de la prostate par dosage du PSA entraînent la détection de nombreuses cancers de la prostate asymptomatiques.
  2. D'autres preuves convaincantes indiquent que la majorité des hommes chez qui sont découverts des cancers asymptomatiques de la prostate par dosage du PSA ont une tumeur qui répond aux critères histologiques du cancer de la prostate.
  3. Mais la tumeur, soit ne progressera pas, soit sera si indolente ou lente à se développer qu'elle n'affectera pas l'espérance de vie, soit n'entraînera pas d'effets délétères sur sa santé, et ainsi le patient mourra-t-il d'une autre cause.
  4. Le paragraphe 3 est la définition du sur diagnostic ou de la pseudo maladie"
A partir de cette définition on peut dire ceci : le taux de sur diagnostic augmente avec le nombre de biopsies ; une étude montre que, sans tenir compte du PSA, on trouve un cancer chez 25 % des patients à qui l'on pratique une biopsie ; le nombre de sur diagnostics augmente avec l'âge.

Les questions posées par le USPSTF étaient les suivantes :
  1. Est-ce que le dosage du PSA en situation de dépistage diminue la mortalité spécifique due au cancer de la prostate et / ou la mortalité toutes causes ?
  2. Quels sont les inconvénients du dosage du PSA en situation de dépistage ?
  3. Quels sont les bénéfices du traitement dans les stades précoces ou en situation de dépistage des cancers de la prostate ?
  4. Quels sont les inconvénients du traitement dans les stades précoces ou en situation de dépistage des cancers de la prostate ?
Nous avons vu que l'USPSTF décourageait le dépistage.

Je voudrais rajouter quelques éléments intéressants mais, si j'avais eu le temps, je vous aurais tout traduit :
  1. Le risque de faux positif après un dosage du PSA positif est de 12 à 13 %
  2. L'étude européenne ERSPC (dont je vous avais parlé en mal ICI) montre une diminution de la mortalité spécifique après analyse en sous-groupe chez les hommes entre 55 et 69 ans
  3. Le nombre de malades à traiter pour obtenir un effet indésirable (voir ICI les notions de Nombres de Malades à Traiter et le Nombre de Malades à Ne pas Traiter) est globalement de 5 pour l'incontinence urinaire et, pour les troubles de la fonction érectile respectivement de 3 pour la prostatectomie et de 7 pour la radiothérapie.
  4. La prostatectomie est associée à un risque mortel de 0,5 % et à un risque cardiovasculaire de 0,6 à 3 %
L'AUA (l'équivalent américain de l'AFU) a fortement réagi.
We are concerned that the Task Force's recommendation will ultimately do more harm than good to the many men at risk for prostate cancer, both here in the United States and around the world."
Ainsi que d'autres organisations comme ZERO, The project to end prastate cancer, une association fortement sponsorisée par Big Pharma et l'AUA.
"The decision of no confidence on the PSA test by the US government condemns tens of thousands of men to die,"
Mais il fallait s'y attendre.
Ce n'était donc qu'un draft mais nul doute que ce projet deviendra définitif.

(Karl R POPPER - 1902 - 1994)


mercredi 19 octobre 2011

Une histoire complexe de médecine générale - Histoire de consultation 99.


Monsieur A, 51 ans, vient me consulter pour la première fois. Il a besoin d'une prolongation, commence-t-il par me dire, ce n'est jamais un bon début selon moi, mais, bon, il ne faut pas être borné ou rigide, je l'écoute.
(Situation 1 de médecine générale : le malade dit la vérité, à savoir qu'il n'est pas malade, pour obtenir un arrêt de travail ; en général il continue en disant : J'aurais pu faire semblant d'avoir la grippe mais voyez comme je suis honnête, accordez-moi l'affaire puisque je ne vous reverrai jamais)
Il a mal au coude droit et il a mal à l'épaule droite. Jusque là, je baille.
Puis il avance : il ne peut plus travailler tant il a mal et, hier, sur chaîne, il a pété les plombs, ce qui l'a conduit à l'infirmerie puis dans le bureau du médecin du travail.
Je lui demande où est son médecin traitant : J'avais un médecin traitant à M, mais comme j'ai divorcé et que je suis allé m'installer à N, je ne savais plus où aller, et d'ailleurs, le docteur D, il ne me comprenait pas.
(Situation 2 de médecine générale : le malade qui change de médecin parce qu'il n'en est pas content)
"C'est Madame B qui m'a dit de venir chez vous."
(Situation 3 de médecine générale : la recommandation par un (e) patient(e) de la patientèle)
Puis il me tend la lettre du médecin du travail adressé au médecin traitant (que je ne suis pas).
Et je lis la lettre (manuscrite).
Le médecin du travail de cette grande entreprise me raconte l'histoire suivante : Monsieur A devrait être arrêté car il présente une tendinopathie de l'épaule liée à un travail répétitif sur chaîne ; elle ajoute que Monsieur A, qu'elle connaît bien, a traversé de gros problèmes familiaux et financiers, ce qui fait qu'il est sur les nerfs, ce qui explique qu'il a craqué hier, et que, donc, il vaudrait mieux que je l'arrête. Une bonne quinzaine, ajoute-t-elle.
Le malade est donc venu pour obtenir un arrêt de travail qui a été prescrit par le médecin du travail.
Allons plus loin : le malade m'explique qu'il travaille sur une machine dont les ergonomes (il a prononcé le mot sans hésiter) ont estimé en février, me dit-il, qu'elle devait être modifiée. Et elle sera modifiée le 24 octobre. Il me demande donc un arrêt jusqu'au 23 inclus.
(Situation 4 de médecine générale : c'est un tiers qui demande un arrêt de travail au médecin généraliste, ce même tiers qui affirme par ailleurs que les médecins généralistes exagèrent avec les arrêts de travail)
Monsieur A n'a mal, selon lui, que lorsqu'il travaille. Il me montre sa position avec la fameuse machine et la position qu'il aura avec la nouvelle.
Mais le malade n'est pas content car il trouve que la médecin du travail charrie en prétendant que son pétage de plomb est lié à ses problèmes extra professionnels. Il dit simplement que c'est l'usine qui est à l'origine de tout cela, pas son divorce, pas ses difficultés financières.

Arrêtons-nous sur ce point de vue car il entraîne des questions pratiques en cascade.
  1. Est-il possible de croire un patient sur sa bonne tête parce que ses arguments sont plausibles ?
  2. Faut-il considérer que le pétage de plomb est une réaction normale à une situation anormale ou qu'il s'agit d'une réaction anormale à un banal conflit du travail ?
  3. Le médecin du travail est-il un simple agent patronal (il est payé par le patron) ou peut-il avoir une attitude neutre ?
  4. Faut-il que le médecin du travail soit au courant des problèmes conjugaux et financiers de ce patient et en fassent état dans un courrier, ce qui n'augure pas bien du secret professionnel ?
  5. Quelle est la signification de la prescription d'un arrêt de travail ?
Ces questions entraînent des questions théoriques :
  1. La neutralité demandée au médecin généraliste dans sa relation médecin malade est-elle une donnée médicale, juridique, éthique ou analytique (freudienne) ?
  2. Quel est le véritable statut du médecin généraliste : libéral, "salarié" de la CPAM, avocat de son patient, client de son patient ?
  3. Faut-il médicaliser les conflits du travail ?
  4. Faut-il que le médecin généraliste prescrive des médicaments dont l'origine de la prescription provient des conditions de travail ?
  5. Le médecin généraliste doit-il intérioriser et les injonctions de la CPAM et les injonctions du monde du travail qui vont souvent de pair ?
Ainsi, en toute logique, Monsieur A devrait reprendre son travail le 24 octobre mais il n'est pas certain que la médecin du travail accepte.
Une autre chose me paraît surprenante : ni le médecin traitant ni la médecin du travail n'ont fait une déclaration de maladie professionnelle (tableau 57).
Je ne sais pas si je reverrai ce patient.
Mais cela vaudrait le coup...

(Crédit : AlloCiné)

dimanche 16 octobre 2011

La mortalité (151 décès pour 2010-2011) due à la grippe diminue encore : il faut encore plus vacciner !


Comme le dit Philippe Nicot, médecin généraliste, sur le forum Lecteurs Prescrire, ICI, 187 inscrits, à propos de la grippe.
Plus on compte les morts et moins on en trouve.
J'ajouterai ceci à la phrase de mon éminent collègue : "Et moins on avait vacciné."

Et, pour paraphraser ce bon Corneille :
Nous partîmes sept mille ; et par un prompt renfort
Nous nous vîmes deux cents en arrivant au port.

Il faut s'expliquer. Le Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire, que l'on aimerait être un bulletin de référence, et qui n'est, malheureusement, qu'un organe de propagande du gouvernement, i.e. de la DGS (Direction Générale de la Santé), de Big Pharma et de ses visiteurs médicaux, vient de publier le bilan de la grippe 2010 - 2011 (ICI).

Qu'y apprend-on ?
Que la grippe a provoqué 800 cas graves dont 151 décès.
Cent cinquante et un décès !
Tout le monde vous dira que c'est trop.
C'est trop !

Mais nous sommes loin des déclarations de guerre des virologues et autres virothérapeutes (cela existe ?), sans compter les épidémiologistes, dont le fameux Antoine Flaw Flahault, je vous indique les coordonnées de son blog (LA), il faut être généreux, qui parlaient sans sourciller des 5 à 7000 morts par an dus à la grippe.

L'an passé, la grippe A/H1N1, malgré tous les tripatouillages statistiques et autres tripatouillages clinico-épidémiologiques, avait provoqué 312 morts ! Je prends donc ma calculette et fais des calculs : il y a eu, en comptant mieux, 51,6 % de décès en moins.

Je ne veux pas forcer le trait. Je suis conscient du fait que le nombre de décès annuels de la grippe dépend bien entendu de la virulence, de la pénétration et d'autres facteurs qui rendent, je l'ai déjà signalé ICI, les études contrôlées difficiles quand il s'agit de comparer mortalité et morbidité d'une année sur l'autre, sans compter le taux de vaccination des populations.

Une des "conclusions" du BEH est qu'il faut plus vacciner : toujours PLUS.

Voici quelques faits discordants :
  1. L'analyse des décès montre un surcroît de décès chez les nourrissons de moins de un an mais il n'est pas précisé s'il s'agissait de nourrissons à risque.
  2. Je cite : Les formes graves observées en 2010-2011 sont marquées par une proportion plus élevée de syndromes de détresse respiratoire aiguë (SDRA) et de recours à l’oxygénation extracorporelle (ECMO) mais une létalité équivalente. Elles sont globalement survenues plus fréquemment qu’en 2009 chez des personnes sans facteurs de risque et chez des personnes obèses, et moins souvent chez des personnes atteintes de maladies chroniques ciblées par la vaccination grippale saisonnière. . Il est quand même excitant de savoir que ce sont les personnes qui ne sont pas ciblées par la vaccination, les personnes sans facteurs de risque qui sont, relativement, plus touchées par les décès.
  3. Pas un mot chiffré ou documenté sur le pourcentage de personnes vaccinées dans la population générale (il était de l'ordre de 7 % lors de la campagne précédente) pas pour plus que pour les personnes à risques visées par la campagne de vaccination, ce qui est quand même un point manquant majeur dans cet article écrit par les membres éminents de l'InVS (il y a un Comité de Lecture ? Je me propose, avis aux auteurs)
  4. Les données du CepiDC (organisme insermien) indiquent (soyez bien assis et accrochez-vous à votre écran) que, pour les années précédentes (de 2000 à 2008), le nombre de décès dus à la grippe était "estimé" à 437 par an avec une moyenne d'âge à 82 ans (ces chiffres vous étaient cachés, chers amis citoyens débiles et médecins ignares et on préférait vous assener 5000 à 7000 morts annuels) et, pour l'année de la grippe "pandémique" les décès avaient été assumés à 349 avec une moyenne d'âge à 59 ans. Mais non, ils ne vous étaient pas cachés, ces chiffres, ils avaient fait l'objet d'une publication dans le même BEH : Vicente P, Aouba A, Lévy-Bruhl D, Jougla E, Rey G. Spécificité des caractéristiques de la mortalité liée à la grippe lors de la pandémie de grippe A(H1N1) en 2009-2010 en France. Bull Epidémiol Hebd. 2011; (1):1-5.
Que dire de plus ?
151 décès dans une population peu vaccinée.
Faut-il vous faire un dessin ?

(Illustration : Pierre Corneille - 1606 - 1684)

jeudi 13 octobre 2011

Gardasil : des précisions supplémentaires de CMT sur la vaccination.

QUELQUES ELEMENTS D’INFORMATION POUR LES PARENTS SUR LE VACCIN GARDASIL ET LES VACCINS CONTRE LE PAPILLOMAVIRUS EN GENERAL

Auteur : Docteur CMT.

Je suis en train de faire un travail de recherche au sujet des vaccins contre le papillomavirus. Travail que j’aurais espéré terminer plus tôt. Mais cela se prolonge un peu à la fois parce qu’il s’agit d’un travail difficile et parce que je suis un peu maniaque dans la recherche d’information.

C’est pourquoi, ayant réuni une masse critique d’information, j’ai voulu en faire profiter les parents qui passeront par là et dont plusieurs centaines ou milliers doivent être quotidiennement sollicités pour faire vacciner leur fille contre le papillomavirus humain.

Je remercie Jean-Claude Grange de m’avoir proposé de publier ce post sur son blog pour qu’il soit plus accessible.

(Les références s’adressent plus particulièrement aux médecins)

Un premier conseil, toujours valable, pour les parents serait de ne jamais prendre une décision dans la précipitation ou sous l’empire de la peur pour quelque chose de non urgent comme l’est ce vaccin. D’essayer de prendre du recul et de s’informer.

CE VACCIN EST DIFFERENT DE CEUX QUE NOUS AVONS CONNUS JUSQU'A MAINTENANT

Il s’agit du vaccin le plus cher jamais recommandé à titre systématique. Mais c’est un détail qui ne concerne pas directement les parents puisque la Sécurité Sociale le rembourse suite à la décision des autorités.

Il s’agit du premier vaccin pour lequel les premiers bénéfices ne peuvent être espérés avant une quinzaine d’années dans le meilleur des cas. Cela pour deux raisons.

D’une part, 15 ans est le délai minimum estimé par l’IARC (Agence Internationale de recherche sur le cancer) entre l’infection par le papillomavirus et le cancer invasif.

D’autre part l’infection par papillomavirus est, certes une IST fréquente (Infection sexuellement transmissible), mais est totalement asymptomatique (ne provoque pas de symptômes si on laisse de côté les verrues, et condylomes eux-mêmes non symptomatiques) en dehors d’une évolution vers le cancer. Il existe d’autres vaccins qui peuvent protéger contre certains cancers, comme le vaccin contre l’hépatite B. Mais il ne s’agit pas, dans ce cas, du principal argument de vente du vaccin, car le virus de l’hépatite B peut aussi provoquer des infections aiguës symptomatiques et des infections chroniques symptomatiques.

Rappelons que les Jeunes femmes qu’on va vacciner ne sont pas encore infectées et qu’il faut donc augmenter le délai minimum de 15 ans pour un éventuel bénéfice à titre individuel.

C’est un aspect du problème, mais, à titre individuel la question légitime que peuvent se poser les parents une fois qu’ils ont compris qu’il n’y avait pas d’urgence est : est-ce que ma fille a plus de chances de tirer bénéfice du vaccin ou d’encourir des risques à cause de lui ?

C’est une question complexe et un début de réponse réside dans l’écoute attentive du message publicitaire délivré par le laboratoire fabriquant le Gardasil : http://www.dailymotion.com/video/x54jx0_gardasil-la-publicite-diffusee-a-la_news

Il est dit dans cette publicité : « Le vaccin Gardasil peut prévenir 70% des cancers du col de l’utérus ». Tout le malentendu, délibérément entretenu, se trouve là. Car il n’est pas dit : « le vaccin Gardasil a démontré qu’il prévenait 70% des cancers du col de l’utérus » car dans ce cas n’importe quelle association de consommateurs aurait pu assigner Sanofi-MSD, le fabriquant du vaccin, en justice pour publicité mensongère.

COMMENT SE FAIT-IL QUE LE VACCIN AIT ETE APPROUVE PAR LES AUTORITES SANITAIRES peuvent se demander à juste titre les parents, s’il n’a pas démontré d’efficacité sur le cancer ?

C’est une très bonne question parce que c’est là que réside tout le malentendu. La FDA (Food and Drug Administration) américaine, équivalente de notre AFSSAPS, chargée de l’homologation des produits de santé, est la seule agence nationale d’homologation qui ait effectué un travail sérieux avant la mise sur le marché du vaccin.

Mais quelle était la question posée pour obtenir cette homologation ? Tout le malentendu repose sur cette question. La FDA ne pouvait pas répondre à la question de savoir si le vaccin était efficace sur la prévention du cancer du col, car il aurait fallu pour cela faire des études sur 20 ans. Or, les études avant homologation n’ont duré que trois ans.

La FDA a donc répondu à la question : est-ce que le vaccin est efficace pour prévenir des infections par des HPV oncogènes (provoquant des cancers) contenus dans le vaccin, à savoir les HPV 16 et 18, dont il était admis qu’ils représentaient environ 70% en moyenne des papillomavirus trouvés dans les cancers du col de par le monde.

Et c’est la seule question à laquelle les études ont pu répondre positivement. Le vaccin prévient efficacement les infections par ces virus.

L’affirmation faite par le laboratoire et admise par la plupart des professionnels de santé n’est pas celle-là mais est la suivante : le vaccin est efficace pour prévenir les infections contre les HPV 16 et 18 et donc prévient les cancers du col.

Les essais cliniques du laboratoire passés en revue par la FDA ne démontrent pas cela néanmoins. Ils démontrent que, lorsqu’on se place dans des conditions proches de celles de la réalité de la vaccination après mise sur le marché du vaccin (jeunes femmes vaccinées n’ayant pas toutes fait les 3 doses de vaccin, une proportion des jeunes femmes vaccinées qui sont déjà infectées par le papillomavirus) on observe une diminution de l’ordre de 15 à 20% de l’ensemble des LESIONS PRECANCEREUSES (CIN I à III, CIN étant utilisé pour néoplasie cervicale intraépithéliale) et non des cancers invasifs qui sont ceux qui posent problème, due à une diminution de l’infection par les génotypes présents dans le vaccin sur lesquelles le vaccin semble efficace à plus de 99%.

Mais en revanche on observe aussi une augmentation des lésions précancéreuses dues à d’autres virus oncogènes non contenus dans le vaccin. (cf exposé Spinosa sur Méd Océan, colloque du 3 octobre 2011 à l’Assemblée nationale http://www.medocean.re/2011/09/le-gardasil-a-l%E2%80%99assemblee-nationale/ ou rapport FDA peu accessible http://www.fda.gov/downloads/biologicsbloodvaccines/vaccines/approvedproducts/ucm111287.pdf ).

Il y a en effet 96 papillomavirus humains dont l’ADN a été séquencé. Parmi eux 45 peuvent infecter la sphère ano-génitale et 12 ont un haut potentiel cancérigène et 8 un faible potentiel oncogène. Parmi ces douze, seuls deux, les HPV 16 et 18, ont été inclus dans le vaccin car ils sont, en moyenne, ceux qui sont les plus fréquemment retrouvés dans les cancers du col.

Il faut aussi savoir que les lésions précancéreuses, classifiées selon leur aspect histologique après biopsie de CIN1 à CIN3, n’évoluent que dans 1,7% des cas globalement vers un carcinome invasif, et dans 12% des cas si on ne considère que les CIN3, les lésions pré-cancéreuses les plus évoluées. Il est important de le savoir parce que toutes les lésions qui précédent le cancer invasif sont curables dans près de 100% des cas (Re Mc Credie, 2008, http://www.thelancet.com/journals/lanonc/article/PIIS1470-2045%2808%2970103-7/abstract) dans la mesure où elles sont dépistées à temps (Ostor, 1993 http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/8463044)


Cette augmentation de lésions précancéreuses dues à d’autres souches que celles contenues dans le vaccin s’appelle PHENOMENE DE SUBSTITUTION. On peut le définir en disant que, lorsque plusieurs germes de la même famille sont en cause dans une infection ou à une maladie, si on introduit un vaccin qui ne combat que quelques uns de ces germes, ceux qui ne sont pas inclus dans le vaccin vont avoir tendance à occuper la place laissée libre par les germes vaccinaux. Le vaccin se comporte comme un agent extérieur qui exerce une pression de sélection. A savoir qu’il contribue à sélectionner les germes qui ne sont pas dans le vaccin. Et c’est un phénomène qui s’aggrave avec le temps et en fonction de la proportion de la population vaccinée. Et l’on ignore quelles sont les conditions qui déterminent ce phénomène dans un cas précis.

Ce phénomène a déjà été observé pour un autre vaccin, le Prevenar et cela est reconnu. C’est un cas de figure proche de celui du Gardasil et du papillomavirus. Le Prevenar est un vaccin qui combat les infections contre le pneumocoque. Une bactérie qui provoque très majoritairement des infections bénignes mais parfois des infections graves , en particulier chez le nourrisson de moins de deux ans. Il existe une centaine de variétés ou souches de pneumocoque différentes. Au début de la généralisation de la vaccination par Prevenar le vaccin, appelé alors Prevenar 7, contenait 7 souches de pneumocoque, qui provoquaient environ les deux tiers (65%) des infections graves chez le nourrisson de moins de deux ans en France. Au bout de quatre ans seulement après le début d’une campagne de vaccination systématique à partir de 2003, le vaccin ne couvrait plus que 15% des infections graves du nourrisson de moins de deux ans par pneumocoque. La raison en était que le vaccin avait provoqué le remplacement des souches contenues dans le vaccin par d’autres, notamment une, la 19a, particulièrement résistante aux antibiotiques et particulièrement meurtrière. Si bien que, globalement en 2009, d’après l’INVS : les méningites à pneumocoque étaient de 7,7 pour 100 000 enfants de moins de deux ans, c'est-à-dire, en fait, au même niveau que juste avant que la vaccination ne débute. L’incidence des infections graves à pneumocoque avait augmenté chez les enfants de 2 à 4 ans, et aussi dans la population des 5 à 64 ans. http://www.invs.sante.fr/surveillance/epibac/donnees.htm

Je ne m’étends pas là-dessus car il ne s’agit pour moi que de montrer que le phénomène de substitution peut rendre un vaccin contre-productif.

J’ai parlé du rapport de la FDA aux Etats Unis. Qu’en est-il de l’avis des autorités en FRANCE ?

En France c’est encore plus simple. Il n’y a pas eu de débat ni même d’avis scientifique avant la mise sur le marché du Gardasil. Il y avait bien un GROUPE DE TRAVAIL (http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/1.pdf ) qui devait rendre un avis scientifiquement fondé. Mais il n’en a pas eu le temps car XAVIER BERTRAND ministre de la santé de l’époque et encore aujourd’hui a mis en place une procédure accélérée de mise sur le marché au nom de l’URGENCE ( ?!) et en a annoncé le remboursement par la Sécurité Sociale en février 2007. Le vaccin a reçu une Autorisation de Mise sur le Marché en novembre 2006 .

Le rapport du groupe de travail est paru en mars 2007 et a émis un avis nuancé visant à privilégier la mise en place rapide du dépistage organisé en priorité. En effet le cancer du col est le quinzième cancer pour la mortalité et la mortalité, pour ce cancer diminue plus vite que l’incidence, signe de l’efficacité du dépistage. En France, la mortalité qu’il provoque est en constante diminution depuis l’introduction du dépistage. Ainsi, la mortalité cumulée (risque total cumulé pour une femme de mourir par cancer du col pendant toute sa vie) a été divisée par six en 40 ans passant de 3,6 % pour les femmes nées en 1910 à 0,6% pour les femmes nées en 1950 d’après l’INVS. Plus de 95% des décès surviennent après 40 ans. Actuellement, la mortalité estimée est de 800 cas (dernières estimations) pour 220 000 décès féminins par an en France alors qu’elle était de 1215 en 2000, soit une diminution de 30% en 10 ans.

Le groupe de travail s’est appuyé aussi sur une MODELISATION pour évaluer le rapport coût/efficacité du vaccin et des autres modes de prévention.

Cette modélisation basée sur des hypothèses qui apparaissent maintenant excessivement optimistes ne parvenait à démontrer un bénéfice significatif par rapport au dépistage organisé (bénéfice de 16% de cancers en moins) qu’au bout de 70 années. Et cela à TROIS CONDITIONS : 1) que le vaccin soit efficace de manière constante pour prévenir 70% des cancers du col ; 2) que 80% des jeunes femmes soient vaccinées de manière constante pendant 70 ans ; 3) que le vaccin ne nécessite aucun rappel.

Pourquoi faut-il attendre 70 ans ? Simplement parce que l’on sait que l’on a déjà un moyen efficace, très efficace, de faire diminuer la mortalité par cancer du col : c’est le dépistage. Il serait encore plus efficace s’il était organisé, c'est-à-dire si toutes les femmes de 25 à 65 ans étaient invitées tous les trois ans à se faire dépister. Il faut donc, pour que le vaccin ait un intérêt qu’il montre un bénéfice SUPPLEMENTAIRE par rapport à ce dont on dispose déjà et qui est très performant.

SI LES BENEFICES SONT HYPOTHETIQUES IL SEMBLE LEGITIME DE SE POSER LA QUESTION DES RISQUES PROPRES AU VACCIN

Je ne peux pas m’étendre ici mais seulement dire que si la déclaration des maladies infectieuses en France était gérée de la même manière que la déclaration des effets secondaires des médicaments et vaccins, c'est-à-dire laissée à l’initiative des médecins, on n’aurait pas en France DE MENINGITE A MENINGOCOQUE , DE COQUELUCHE , DE ROUGEOLE, etc. Ou plutôt on en aurait mais on ne serait guère inquiets parce qu’on n’en aurait pas connaissance. Mais il se trouve que ces maladies sont soumises à une DECLARATION OBLIGATOIRE et à une surveillance étroite par des réseaux de médecins et d’hôpitaux spécialement dédiés.

Le système de déclaration des effets secondaires est un SYSTEME PASSIF comme aux Etats Unis.

Ce qui conduit à une sous notification chronique des effets secondaires car seule une petite partie de ces effets sont notifiés aux autorités sanitaires. Les étapes suivantes, après déclaration, ne peuvent conduire qu’à une élimination de la plupart des effets secondaires déclarés qui seront considérés comme non pertinents du fait de l’exigence de plus en plus systématique de l’établissement d’un lien de causalité entre le produit de santé et l’effet secondaire observé par les agences de surveillance. Ce lien de cause à effet, même s’il existe, est excessivement difficile, pour ne pas dire quasi impossible à établir dans la plupart des cas.

Malgré toutes ces insuffisances du système de pharmacovigilance il a été retenu, aux Etats Unis en 2009 après quelques 23 millions de doses, 12 424 effets indésirables dont 772 effets indésirables graves (voulant dire hospitalisations, risques de décès ou séquelles) et 32 décès avec une proportion anormalement importante de phlébites et de syncopes. Cette proportion anormalement importante de cas notifiés par rapport au total des jeunes femmes vaccinées, faisant suspecter une relation causale http://www.profitableharm.com/pdf/JAMA%20Aug%2019%202009%20Slade%20et%20al%5B1%5D.pdf.

Ce résumé s’adressant aux parents il me semble important de dire que , malgré ce qui a été colporté, il existe une étude au moins montrant que parmi des étudiantes débutant leur vie sexuelle le PRESERVATIF utilisé systématiquement avec les partenaires nouveaux comme anciens s’est avéré un moyen plutôt efficace de réduire les infections par le HPV avec une réduction de 70% des risques d’infection par rapport aux jeunes femmes qui n’utilisent que rarement le préservatif. Les jeunes femmes de 20 à 25 ans étant les plus susceptibles d’être infectées, il me semblait important de le signaler. http://www.nejm.org/doi/full/10.1056/NEJMoa053284

Le problème fondamental dans le cas des vaccins contre le HPV, c’est qu’en accordant avec une certaine légèreté une autorisation de mise sur le marché à un vaccin qui n’a pas démontré d’efficacité, les autorités ont inversé la charge de la preuve. Alors que, en principe, c’est au laboratoire fabriquant d’apporter la preuve de son produit, étant donné que le Gardasil et le Cervarix disposent désormais d’une Autorisation de Mise sur le Marché, c’est aux médecins qui se soucient de la santé des jeunes filles vaccinées d’apporter la preuve que ce vaccin n’est pas efficace.

C’est pourquoi je soutiens l’initiative originale de Med’Océan, association de médecins réunionnais et de Philippe de Chazournes qui a saisi la Haute Autorité de Santé (HAS) et le Haut Conseil de Santé Publique (HCSP) en vue de remettre en cause le remboursement et l’AMM des vaccins contre le papillomavirus humain. (document présenté par Med’ Océan au représentant de la HAS pour saisine http://www.medocean.re/wp-content/uploads/Aide-%C3%A0-la-Saisine-HPV-2011-VO.pdf

mardi 11 octobre 2011

Santé Publique : Ras le bol du lobby médico-politico-administrativo-industriel !


Hier soir je reçois un courrier émanant de l'ARB - Hôpital Robert Debré, une grande enveloppe, et qu'est-ce que j'y trouve ? Une affiche du Réseau Bronchiolite Ile-de-France annonçant que "Le standard est ouvert". Voir ICI.
Pour quoi faire ? Je croyais que le problème de la kinésithérapie dans la bronchiolite était réglé depuis longtemps : voir ICI.

Il y a quelques jours je vois un communiqué de presse émanant de l'ARS de l'Ile-de-France qui incite les femmes à adhérer au dépistage organisé du cancer du sein en répondant à l'invitation de pratiquer des mammographies.
Aucun avertissement sur le risque de sur diagnostics. Voir ICI.
Mais il est vrai que l'intérêt du dépistage organisé du cancer du sein ne fait l'objet d'aucune "vraie" discussion dans l'espace public français, la parole médiatique étant occupée par David Elia sur Europe 1 (ICI) ; et David Khayat sur France info : le formindep s'en est ému et invite, dans une lettre ouverte, le grand professeur à s'expliquer (ICI).

Pour ce qui est du cancer du colon, où le rapport bénéfices / risques du dépistage par la recherche de sang dans les selles (hemoccult) semble meilleur que dans les exemples précités, les campagnes de publicité ne parlent jamais non plus de surdiagnostics. Il ne faut pas dire la vérité, cela risque de décourager les bonnes volontés. Rappelons que la Revue Prescrire (ICI) parle d'un bénéfice limité du dépistage.

Pour ce qui est de la campagne de vaccination contre la grippe chez les personnes âgées de plus de 65 ans et chez des malades ou des terrains "ciblés", peu de publicité, les autorités ayant été échaudées par toutes les maladresses accumulées lors de la campagne A/H1N1, donc, de la prudence, de la confidentialité, mais le personnel étatique n'a pas changé. Le professeur Daniel Floret, l'homme du Pandemrix, vaccin narcoleptique, est toujours là.
Je reçois par la poste un mailing (courrier en anglais) émanant de Sanofi Pasteur MSD avec une brochurette (luxueuse) de 16 pages intitulée "La grippe saisonnière et sa vaccination. Nouvelles recommandations vaccinales. Questions-Réponses" qui est préfacée par le professeur Bruno Lina. Vous connaissez tous Monsieur Lina qui a affirmé maintes et maintes fois que le fait d'être corrompu par plusieurs firmes annule la corruption en raison de la concurrence de ces firmes... (c'est la doctrine Lina)
(Pour ceux qui ont le temps : la brochurette de propagande, pour quelqu'un d'informé, n'est pas piquée des hannetons. Le nombre de morts annuels (2500) a été révisé à la baisse (on parlait de 5 à 7000 auparavant) mais ne cite pas les "vrais" chiffres (312 l'année de la grande grippe Bachelot N1), pas un mot sur les effets indésirables, un mot en passant sur l'efficacité et on y note qu'elle est évaluée entre 50 et 90 % et qu'elle est plus importante chez les adultes de moins de 60 ans que chez les plus âgés (c'est un scoop !). Enfin, le professeur Bruno Lina, dans son édito (sic ; éditorial fait trop ringard) qu'il a dû écrire lui-même (il n'a pas besoin de ghost writer pour être un bon visiteur médical), veut "combattre", je cite "contre les idées fausses sur la vaccination grippale"... Il parle du rôle fondamental des médecins généralistes (quel hypocrite !) et c'est tout.)

Quant à la prostate...
Les campagnes de l'Association Française d'Urologie pour le dépistage individuel du cancer de la prostate sont développées dans l'espace public sans que le président de la HAS n'ait émis la moindre protestation alors que les recommandations sont claires : ICI.


Quant à la mesure de la glycémie capillaire chez les diabétiques de type II, elle fait l'objet de campagnes indécentes sur les radios de France et de Navarre (voir ICI), pour un bénéfice non démontré.

A quoi cela peut-il bien servir de travailler dans des conditions environnementales aussi défavorables ?
Pourquoi ne sommes-nous pas aidés par nos "maîtres" ?
Pourquoi nos "maîtres" nous ont-ils abandonnés en rase campagne, serait-ce parce que nos maîtres, la majorité d'entre eux, cela va de soi, sont des experts autoproclamés qui ne s'intéressent ni à la médecine ni à la Santé Publique.

Je suis écoeuré....