mercredi 26 août 2009

LA MEDECINE A UNE VITESSE - HISTOIRES DE CONSULTATION : ONZIEME EPISODE

Pendant les vacances Monsieur A, 76 ans, a fait une rétention aiguë d'urine au décours de la prise d'un vasoconstricteur nasal prescrit par je ne sais qui (je ne veux pas le savoir).
Il se retrouve aux urgences du bon hôpital de Zup City (charmante localité des Yvelines) où, au milieu du mois d'août il n'y a pas d'urologue.
On le sonde, on remplace l'alpha-bloquant qu'il prenait auparavant (j'ai honte : je lui prescrivais un alphabloquant pour une hypertrophie bénigne de prostate avec un score I-PSS qui avait franchement diminué) par un autre alpha-bloquant à doses plus importantes (l'effet placebo ?), on le garde trois jours en observation, on enlève la sonde et il repasse en rétention. Pendant ce temps, l'augmentation des doses d'alpha-bloquant a provoqué une arythmie par fibrillation auriculaire (une complication méconnue des alpha-bloquants) et le cardiologue s'est fendu d'une lettre pour ma pomme (le médecin traitant) en me proposant ses services, au décours de l'intervention, pour instaurer un traitement anticoagulant (le brave homme) et expliquer pourquoi il n'a pas prescrit d'antiarythmiques (c'est déjà mieux).
Comme il n'y a pas d'urologue à l'hôpital public de Zup City on le confie à un urologue du privé qui, je l'avoue, n'est vraiment pas mon copain.
Monsieur A vient donc me voir cet après-midi, un peu pâlichon, il a été opéré il y a dix jours, l'hématurie post opératoire ayant dû jouer son rôle et il est content.
- L'opération s'est bien passée.
" Mais cela m'a coûté cher.
- Combien ?
- Trois cents euro.
- Comment ?
- Deux cents euro pour le chirurgien et cent euro pour la clinique.
- Ce n'est pas normal...
- Oui, mais l'hôpital de Zup City, il est fichu, ils n'ont pas pu me soigner."
Monsieur A est insuffisant respiratoire. Il est en ALD pour l'insuffisance respiratoire et pour un diabète non insulinodépendant traité par de petites doses de glibenclamide et il est devenu... cardiaque. Il n'a pas de mutuelle.
J'ai un compte rendu de l'hôpital (où on souligne le fait que les PSA sont à 12, chose dont je me moque comme de mon premier toucher rectal mais où il est bien noté que le traitement par alphabloquant est poursuivi) mais, bien entendu, pas de compte rendu de l'intervention puisque c'est l'hôpital qui a adressé dans le privé un de mes patients à un urologue que je n'aime pas et à qui je ne confie aucun malade sans que je sois prévenu (et alors qu'à cette période j'étais remplacé).
Monsieur A, retraité maghrébin (il faut bien que je fasse du social), a subi une résection prostatique pour trois cent euro, il est désormais en arythmie et il est toujours insuffisant respiratoire et diabètique non insulinodépendant.
Il est surtout venu pour que je lui refasse son ordonnance, je suis quand même son médecin traitant.
Je m'informe de son prochain rendez-vous chez l'urologue et lui fais prendre un rendez-vous avec moi après qu'il l'aura vu : pour instaurer des antivitamines K ? Je prescris également une prise de sang pour qu'il puisse la montrer à l'urologue.
Et alors là, le malade craque !
Il se rend compte que le paracetamol que je lui ai prescrit pour ses douleurs arthrosiques, ainsi que le zolpidem qu'il prend en petite quantité (je sais, je ne devrais pas prescrire du zolpidem à un homme de 76 ans mais, bon, il dort bien, il n'a pas de troubles de mémoire, il prend un demi comprimé au coucher et il ne s'est encore jamais cassé la figure), a été inscrit en zone deux (hors ALD).
Je n'arrive pas à le calmer et il part fâché.
Il reviendra mais combien paiera-t-il de sa poche lors de la prochaine consultation chez l'urologue et sans se plaindre ?
Quand on parle de médecine à deux vitesses, on se trompe : nous sommes dans la médecine à une vitesse avec des honoraires obligés imposés par le public (qui ne peut assurer les urgences). Ne devrait-on pas regretter le temps où des chirurgiens généralistes effectuaient des résections transurétrales ni plus mal ni mieux que les urologues dont c'est le pain et le beurre ?

jeudi 13 août 2009

CAMPAGNE GENERALISTE POUR L'EPIDEMIE DE H1N1

Pour vos patients vous pouvez avec profit distribuer des masques vénitiens qui ne manqueront pas de les égayer à moins qu'ils ne se soient déjà égayés à la vue de votre tenue non réglementaire (cf. infra) que vous ne manquerez pas de porter quand les BHW (Bachelot, Houssin, Weber) seront déjà dans leurs bunkers respectifs (pour assurer la continuité de l'Etat).








jeudi 6 août 2009

VACANCES

Chers amis,
Pendant les vacances la médecine générale ne perd pas ses droits. Elle impose même de nouveaux devoirs : continuer de s'informer en ne faisant rien.
Un voisin de plage italienne, Luxembourgeois de quarante-deux ans, me parle de ses (petits) problèmes de santé pour lesquels son ORL (luxembourgeois) lui a prescrit des corticoïdes (qu'il n'a pas pris pensant que c'était trop pour ce qu'il avait : il avait raison, il a guéri avant). Il est par ailleurs content de son médecin généraliste (luxembourgeois) qu'il voit une fois par an. "Il est parfait. Il me fait faire une prise de sang tous les ans, il ne m'examine pas... et je suis rassuré de ne pas avoir de cancer..."
Authentique !
J'ai eu le tort, après l'avoir écouté, de mettre les pieds dans le plat.
Je n'aurais pas dû.
Je relis Proust.
Je tombe sur un passage savoureux décrivant la mort de Bergotte (La Pléiade, tome III -- édition de 1954 -- page 182) : " On sait que sa maladie durait depuis longtemps. Non pas celle, évidemment, qu'il avait eue d'abord et qui était naturelle. La nature ne semble guère capable de donner que des maladies assez courtes. Mais la médecine s'est annexé l'art de les prolonger. Les remèdes, la rémission qu'ils procurent, le malaise que leur interruption fait renaître, composent un simulacre de maladie que l'habitude du patient finit par stabiliser, par styliser, de même que les enfants toussent régulièrement par quintes logtemps après qu'ils sont guéris de leur coqueluche. Puis les remèdes agissent moins, on les augmente, ils ne font plus aucun bien, mais ils ont commencé à faire du mal grâce à cette indisposition durable. La nature ne leur aurait pas offert une durée si longue. C'est une grande merveille que la médecine, égalant presque la nature, puisse forcer à garder le lit, à continuer sous peine de mort l'usage d'un médicament. Dès lors, la maladie artificiellement greffée a pris racine, est devenue une maladie secondaire mais vraie, avec cette seule différence que les maladies naturelles guérissent, mais jamais celles que crée la médecine, car elle ignore le secret de la guérison."
Etonnant, non ?
Un de mes amis me laisse un message sur mon portable : ma fille est malade, bla bla bla...
Je ne l'écoute que le lendemain et lui prodigue un ou deux conseils médicamenteux en n'écrivant pas : "Comme dirait House : vu le délai ta fille, quand tu recevras le message, sera soit morte, soit guérie." Et c'est ce qui se passa : elle guérit avant que mes conseils ne soient appliqués.
Et pendant ce temps, en Italie, j'apprends que les Italiens sont les champions du monde du H1N1. Berlusconi vs Sarkozy !
Puis, malaise vagal de Sarkozy qui conduit à des examens complémentaires extravagants : la presse italienne est excitée !
Pendant ce temps des Anglais s'inquiètent du nombre excessif d'IVG, des Japonais déconseillent et le tamiflu et les AINS et les antipyrétiques dans le traitement de la grippe...
A bientôt.