Le sentiment que j'ai ressenti lors de la lecture du livre de Rachel Campergue fut la honte. La honte que ce soit un non médecin qui ait pu écrire un livre pareil avec autant de pertinence, de légèreté et sans presque la moindre acrimonie. Puis je me suis dit que c'était la fraîcheur intellectuelle de cette femme, que je n'ai jamais vue (mais que l'on peut voir sur Facebook) ni entendue, qui a permis l'écriture de ce livre informé et pertinent qui s'adresse tout autant aux médecins qu'au grand public.
Je crains pourtant que ce ne soit le grand public qui profite le plus de sa lecture dans la mesure où l'irrationnel qui sous tend les préjugés du corps médical à l'égard de la prévention et du dépistage est ancré dans les esprits de mes confrères...
Encore une fois, et mon post précédent avait évoqué la chose (ICI), je suis abasourdi par l'absence de discussions argumentées dans la médico-sphère française alors que le débat est aussi développé ailleurs. Seuls des francs-tireurs tentent de faire entendre leurs voix, des Bernard Junod, des Marc Girard, des Alain Braillon, des Dominique Dupagne, mais ils sont tous hors-jeu de l'université ou de l'expertise spécialisée. La chape de plomb du lobby politico-administrativo-académico-industriel étouffe toute parole dissidente. Notre pays est cadenassé et souffre à l'évidence en ce domaine d'un manque cruel de démocratie. La Revue Prescrire a publié un dossier en 2007 (Rev Prescrire 2007;27(288):758-62) qui n'était pas tendre pour le dépistage organisé, voire même totalement opposé, mais son impact a été faible dans le débat public.
Mais revenons au livre de Rachel Campergue (RC).
Je n'ai pas de statistiques mais ne doutons pas un seul instant qu'au bas pourcentage 95 % des médecins français sont favorables à la mammographie comme outil parfait de dépistage et de diagnostic du cancer du sein avec une pointe à 98 % chez les gynécologues et à 99 % chez les radiologues. Chez les oncologues l'enthousiasme doit être du même tonneau. Quant aux médecins généralistes, je suis certain à 99 % (statistique personnelle non publiée) qu'ils prescrivent ou qu'ils laissent prescrire la mammographie sans délivrer une information éclairée aux femmes qui fréquentent leurs cabinets avant qu'elles ne se rendent dans un cabinet de radiologie. Mais on le verra, délivrer une information éclairée n'est pas simple, dévoreur de temps et, surtout, difficile à formaliser tant les points de vue, les peurs, les croyances, les sous-entendus, les impératifs, les avis d'autorité et la lassitude de de voir toujours, face à la puissance de feu des medias grand public, ramer à contre-courant et passer parfois pour rétrograde et hors du courant dominant de la morale sentimentale qui est, je cite, "Rien n'est trop pour sauver une vie" et son versant pécuniaire "la santé n'a pas de prix".
Petit questionnaire à l'usage des médecins français (voir p 431 du livre) que j'ai adapté de celui qui avait été mis en place dans 4 pays européens pour savoir "Comment les femmes perçoivent les bénéfices de la mammographie de dépistage" et dont le résultat attestait des sur promesses officielles et des attentes irréalistes des femmes. Intitulons-le "Comment les médecins perçoivent les bénéfices de la mammographie de dépistage ?" Je vous propose de répondre.
- Pensez-vous que le dépistage puisse prévenir le cancer du sein ?
- D'après vous, chez les femmes de plus de 50 ans, quelle réduction de mortalité permet le dépistage ?
- A combien estimez-vous le nombre de décès par cancers du sein évités pour mille femmes dépistées régulièrement pendant dix ans ?
Je vous donnerai les réponses tout à l'heure.
No mammo ?
Le livre permet dans une première partie de se rendre compte de ce qui nous attend en France en analysant la situation américaine : des campagnes de sensibilisation pour la mammographie organisées avec des fonds provenant de compagnies soit intéressées dans la vente de mammographes ou de tamoxifène, soit polluant l'environnement avec des pesticides ou des modificateurs hormonaux pouvant entraîner des cancers du sein, soit ne s'intéressant qu'à l'augmentation de leur chiffre d'affaires. Des campagnes de sensibilisation ignorant la différence entre prévention et dépistage, des campagnes de sensibilisation ne parlant jamais des méfaits du dépistage (sur diagnostics), des campagnes de sensibilisation affirmant que la mammographie sauve à coup sûr, des campagnes de sensibilisation ne parlant que de la diminution du risque relatif et jamais de celle du risque absolu, des campagnes de sensibilisation qui récoltent des fonds non pour la recherche mais pour acheter des mammographies qui permettront de faire passer plus de mammographies.
RC montre également combien les campagnes Octobre Rose de l'Institut National du Cancer (INCa) utilisent des mensonges pour "sensibiliser" et des contre-vérités scientifiques pour que les femmes se fassent mammographier.
Le livre analyse également la genèse de la contestation nord-américaine à l'égard des campagnes de dépistage aveugle en montrant combien des "usagères" de la mammographie et du cancer ont refusé l'infantilisation et comment elles ont pu trouver avec difficulté des relais dans le corps médical américain.
Mais surtout RC démystifie toutes ces campagnes, tous ces arguments commerciaux, tout cet excès de sentimentalité qui ont été et sont utilisés pour convaincre les femmes de suivre les programmes de dépistage et, d'autre part, de culpabiliser les autres, celles qui refusent (l'INCa dit même dans ses documents promotionnels que les femmes qui refusent la mammographie ne croient pas en la prévention (sic) : l'INCa, la plus haute instance du cancer en France, confond prévention, c'est à dire faire en sorte que quelque chose n'arrive pas, et dépistage, découvrir quelque chose qui existe déjà : de l'incompétence ou de la filouterie ? Voir ICI pour ceux qui n'y croient pas : un document rose de chez rose).
Voici quelques éléments que j'ai pêchés ici et là dans le livre de RC, éléments que les femmes ne trouveront pas dans les brochures incitant à pratiquer une mammographie tous les deux ans à partir de l'âge de 50 ans et jusqu'à l'âge de 74 ans :
- Il n'existe pas un mais des cancers du sein : des cancers qui grossissent rapidement (parmi eux les fameux cancers de l'intervalle, ceux qui apparaissent entre deux mammographies et qui sont déjà métastasés lorsqu'ils sont découverts), des cancers qui progressent lentement, des cancers qui ne grossissent pas du tout, des cancers qui sont si lents à progresser qu'ils ne donneront jamais de symptômes et des cancers qui régressent spontanément (ces deux dernières catégories pouvant être considérées comme des pseudo-cancers).
- La mammographie ne permet pas un diagnostic précoce car elle découvre des cancers qui étaient en moyenne présents depuis 8 ans !
- Les cancers de l'intervalle ne sont, par définition, pas découverts par la mammographie lors du dépistage et ce sont les plus rapides à se développer et les plus mortels. Attention (je rajoute cela le trois octobre 2013) : un essai récent sur une population norvégienne dit le contraire (ICI)
- La mammographie peut se tromper et passer à côté de 20 % des cancers du sein et ce pourcentage est encore plus fort chez les femmes plus jeunes (25 % entre 40 et 50 ans), ce sont les faux négatifs.
- La mammographie peut se tromper et annoncer un cancer alors qu'il n'en est rien : ce sont les faux positifs. On imagine l'angoisse des femmes que l'on "rappelle" après la mammographie pour leur demander de passer d'autres examens et pour leur dire ensuite, heureusement, qu'elles n'ont pas de cancer... Voici des données terrifiantes : Après avoir subi une dizaine de mammographies, une femme a une chance sur deux (49 % exactement) d'être victime d'un faux positif et une chance sur 5 (19 % exactement) de devoir se soumettre inutilement à une biopsie du fait d'un faux positif.
- La seconde lecture de la mammographie par un autre radiologue ne se fait qu'en cas de résultat normal, pas en cas de résultat anormal : on ne recherche que les faux négatifs, pas les faux positifs (ceux qui conduisent aux examens complémentaires anxiogènes dont la biopsie qui peut être dangereuse)
- La mammographie est d'interprétation d'autant plus difficile que la femme est jeune (importance du tissu glandulaire) et qu'elle prend des estrogènes qui sont un facteur de risque du cancer du sein et d'autant plus difficile que la femme est ménopausée prenant des traitements hormonaux substitutifs (heureusement arrêtés aujourd'hui)
- On ne lit pas une mammographie, on l'interprète et il faut se rappeler que la variabilité inter radiologue peut atteindre (dans la lecture d'une radiographie du poumon, ce qui est a priori plus facile) 20 % et que la variation intra individuelle (on demande à un radiologue de relire des clichés qu'il a déjà interprétés) de 5 à 10 %
- L'interprétation erronée d'une mammographie dans le cas d'un faux positif (cf. le point 5) conduit les femmes à être "rappelées" (pour biopsie) : le taux de rappel peut varier, chez les "meilleurs" radiologues, de 2 à 3 % et atteindre 20 % chez les autres ! Certains estiment que le taux "idéal" de rappel serait de 4 à 5 % alors qu'il est de 10 à 11 % en pratique : sur 2000 femmes invitées à la mammographie pendant dix ans 200 feront face à un faux positif ! Anecdotiquement (mais pas tant que cela) le taux de rappel augmente quand le radiologue a déjà eu un procès.
- Quant à la lecture (i.e. l'interprétation) des biopsies elle laisse encore une fois rêveur : Un essai a montré que la lecture de 24 spécimens de cancers du sein par 6 anatomo-pathologistes différents a entraîné un désaccord pour 8 spécimens (33 %). Quand on connaît les conséquences d'une biopsie positive...
- La biopsie positive ne fait pas la différence entre ce qui n'évoluera jamais et ce qui évoluera de façon défavorable (sauf dans les rares cas de cancers indifférenciés) et c'est cette définition statique qui est source d'erreurs fatales... Et encore n'avons-nous pas encore parlé des fameux cancers canalaires in situ...
- Sans compter que nombre de cancers REGRESSENT spontanément comme cela a été montré dans la fameuse étude de Zahl de 2008 : une comparaison entre femmes dépistées et non dépistées montre que les femmes suivies régulièrement pendant 5 ans ont 22 % de cancers invasifs de plus que celles qui ne l'avaient pas été... Et encore les cancers canalaires in situ n'avaient-ils pas été pris en compte...
- L'exposition des seins aux rayons X n'est pas anodine. L'historique de l'utilisation des rayons X en médecine laisse pantois (pp 331-382). Mais je choisis un exemple décapant : dans les familles à cancers du sein (mutation des gènes BRCA1 et BRCA2) une étude montre que le suivi mammographique depuis l'âge de 24 - 29 ans de ces femmes à risque entraînait 26 cas de cancers supplémentaires (radio induits) pour 100 000 ; ce chiffre n'était plus (!) que de 20 / 100 000 et de 13 / 100 000 si le dépistage était commencé respectivement entre 30 et 34 ans et entre 35 et 39 ans !
- Il n'y a pas de sein standard pour les doses de rayon administrés par examen ! Ou plutôt si, cette dose a été définie ainsi : pour un sein constitué à parts égales de tissu glandulaire et de tissu graisseux et pour une épaisseur comprimée (sic) de 4,2 cm. Je laisse aux femmes le soin de vérifier...
- Terminons enfin, à trop vouloir prouver on finit par lasser, même si nous n'avons pas rapporté la question des biopsies disséminatrices de cellules et de l'écrasement des seins lors des mammographies répétées, sur le problème des carcinomes in situ qui "n'existaient pas auparavant" et qui sont devenus les vedettes de la mammographie de dépistage (environ 50 % des cancers diagnostiqués). Une enquête rétrospective a montré que sur tous les carcinomes in situ manqués seuls 11 % étaient devenus de véritables cancers du sein alors que la règle actuelle est de proposer mastectomie ou tumorectomie + radiothérapie... Sans compter les erreurs diagnostiques : un anatomo-pathologiste américain a revu entre 2007 et 2008 597 spécimens de cancers du sein et fut en désaccord avec la première interprétation pour 147 d'entre eux dont 27 diagnostics de carcinome in situ.
Je m'arrête là pour que vous ayez encore envie de lire ce livre qui aborde tellement d'autres sujets passionnants dont, surtout, les mensonges avérés de l'INCa pour promouvoir le dépistage. Mais surtout ce livre est agréable à lire, aborde nombre de sujets divertissants et désolants... Lisez.
Répondons enfin aux interrogations du début.
- Pensez-vous que le dépistage puisse prévenir le cancer du sein ? Réponse : Non. Il ne faut pas confondre dépistage et prévention (par exemple la suppression du Traitement Hormonal de la Ménopause est un geste de prévention du cancer du sein...)
- D'après vous, chez les femmes de plus de 50 ans, quelle réduction de mortalité permet le dépistage ? Réponse : 15 % selon Gotzsche et Nielsen, ce qui correspond à une vie sauvée pour 2000 femmes examinées pendant 10 ans. Mais surtout : pas d'effet sur la mortalité globale ! Il n'est pas prouvé que les femmes qui suivent le dépistage vivent plus longtemps que celles qui ne le suivent pas.
- A combien estimez-vous le nombre de décès par cancers du sein évités pour mille femmes dépistées régulièrement pendant dix ans ? Réponse : 0,5.
Il ne vous reste plus qu'à lire le livre de Rachel Campergue pour connaître l'origine de ces chiffres, pour apprendre quelle a été l'histoire des pionniers du doute et pourquoi l'INCa ment.
Bonne lecture.
20 commentaires:
Bonjour,
je suis tout à fait d'accord avec vous sur les abus de mammographie aux USA chez les femmes de moins de 50 ans; j'ai d'ailleurs écrit un post à ce sujet: voir les liens mammogram 1 et mammogram 2 du post:
http://philippehavinh.wordpress.com/2011/07/29/cancer-screening-or-not-screening/
Mais attention ce n'est pas à cause de ces abus qu'il faut rejeter la mammo au delà de 50 ans. Des auteurs ont répondu à ce sujet dans le Lancet à l'auteur Gotzsche que vous citez pour appuyer votre post:
http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0140673602080200
Pour ces auteurs la mammographie systématique de dépistage réduit la mortalité par cancer du sein de 21% dans le groupe dépisté (statistiquement significatif, essais randomisés) et la différence apparaît à partir de 50 ans (pas de différence avant)
La mortalité toute cause ne peut être analysée car elle est biaisée par le lead-time qui correspond au temps de suivi suplémentaire des femmes dépistées par rapport aux non dépistées (temps entre le dépistage mammographique et la manifestation clinique) Les femmes dépistées ont un temps de suivi plus long (1,9 ans en moyenne) et ont donc pendant ce lead time un risque supplémentaire de mourir d'une autre cause. Donc la mortalité toute cause est un mauvais "end point" dans ce type d'étude randomisée:
http://www.jms.rsmjournals.com/content/9/4/159.abstract
Bien cordialement.
@ Ha-Vinh
Je connais les commentaires qui ont été faits après la publication de l'article Cochrane Nordique. Ils sont peu convaincants.
Je m'étonne par ailleurs que vous parliez de diminution relative de la mortalité par cancer du sein, aucun épidémiologiste ne pourrait le faire dans un article "sérieux", alors qu'il faut parler de diminution de la mortalité absolue, sinon on ne sait plus de quoi l'on parle.
Ne croyez pas par ailleurs que je sois toujours opposé à vos commentaires, c'est le contraire, c'est vous qui êtes toujours opposé à mes posts.
Ce qui m'inquiète rudement.
Ce qui m'embête le plus, c'est l'absence en France de débats contradictoires entre experts. Les experts français sont trop attachés à leurs postes gouvernementaux pour tenter de penser autrement.
Bien à vous et merci de participer à ces débats. Je crois qu'il serait utile que vous puissiez publier ici un article résumant vos propos sur le dépistage des cancers de la prostate et du sein. Ce serait éclairant.
Bien confraternellement.
Bonjour,
J’apprécie votre rigueur scientifique mais la réponse à la question 2 me parait trop évidente : "Il n'est pas prouvé que les femmes qui suivent le dépistage vivent plus longtemps que celles qui le suivent." :)
@pastisman Bravo : j'avais dû boire trop de ricard : je corrige au jaune.
@Ha-Vinh
la mortalité toute cause est peut-être difficile à analyser, mais c'est pourtant un critère incontournable pour un dépistage. N'oublions pas que ce dépistage systématique s'adresse à des gens qui vont bien, qui sont asymptomatiques. Il est donc primordial de montrer que cette action de dépistage n'augmente pas la mortalité toute cause. La mortalité par cancer du sein ne peut être dans ce cas ( mais même raisonnement pour la prostate) qu'un critère secondaire, passant après la mortalité totale.
On ne peut donc reprocher à ceux qui veulent établir une balance bénéfice-risque exacte de prendre en compte tous les paramètres qui pourraient influencer la mortalité totale.
Donc la mortalité totale est peut-être biaisée dans cette étude, mais ne parler que de la baisse de mortalité spécifique par cancer du sein dans le cadre d'un dépistage n'a pas de valeur, si on ne peut l'adosser sur une mortalité totale.
@ pr mangemanche: L'inconvénient de la mortalité toute cause est que pour mettre en évidence une différence dûe au dépistage il faudrait des effectifs beaucoup plus nombreux dans chacun des 2 groupes randomisés (dépistés et non dépistés). Car l'effet du dépistage sur la mortalité cancer du sein sera noyé dans l'ensemble des autres causes de mortalité entraînant une diminution du rapport signal/bruit. Dans l'étude suédoise des deux contés, dans les 10 ans qui ont suivi la période d'étude, les décés dûs aux cancers du sein survenus durant la période d'étude ne représentent que 3% à 4% des décès toutes causes. Pour mettre en évidence une différence significative sur la mortalité toute cause dans l'ensemble de la population incluse il aurait fallu que les effectifs inclus passent de 120 000 femmes à 2 600 000 femmes!
source:
http://www.jms.rsmjournals.com/content/9/4/159.abstract
Evidemment la mortalité totale nécessite des effectifs d'étude bien plus considérables. Et alors ?
Il faut bien pourtant arriver à démontrer un bénéfice sur la mortalité totale pour convaincre absolument le praticien ( ou le patient ) que je suis. Tant que le bénéfice sur la mortalité totale n'est pas documenté, il persiste un doute sur l'utilité de ce dépistage...
Que penserait-on d'un médicament qui démontre la baisse de mortalité cardio-vasculaire par exemple, mais qui augmente la mortalité totale ? ( souvenez-vous de la cerivastatine ...)
Encore une fois, le cadre n'est pas le curatif, le cadre d'une maladie avérée et mortelle, mais le dépistage qui concerne a priori des gens asymptomatiques, qui vont bien, une population dans laquelle on recherche une minorité qui pourrait avoir ultérieurement un problème. Pour cette population en grande majorité saine, je veux pouvoir m'assurer que mon action de dépistage repose sur une baisse de mortalité démontrée sur tout l'effectif concerné et pas seulement sur la minorité classée positive par le dépistage par exemple.
Je ne peux pas faire l'économie d'une quantification de la mortalité totale.
Que techniquement la constitution d'effectifs suffisants soit complexe, longue et coûteuse, je m'en doute un peu. Qui devrait faire cette évaluation de mortalité totale ? les fabricants de mammographes ?les autorités sanitaires ? Qui a intérêt à une baisse de cette mortalité totale ? Tout le monde? Alors payons et organisons une étude conséquente pour cette question qui est majeure et éthique, particulièrement en Santé Publique : Primum non nocere : encore faut-il prouver que nous ne nuisons pas ...
symptomatique : lire la réponse du Professeur David Khayat au Formindep; à vous donner envie d'être vraiment comminatoire !!
@pr mangemanche: si vous prenez comme end point la mortalité totale vos résultats dépendront du taux de mortatlité pour autre cause que le cancer du sein. Ainsi pour un même effet sur la mortalité par cancer du sein, dans une population jeune vous aurez un effet plus fort sur la mortalité totale que dans une population âgée et vous croirez à tord que le dépistage est plus efficace chez les jeunes.
Par ailleurs admettons qu'il n'y ait pas d'effet sur la mortalité totale, le rôle du soignant n'est pas seulement d'éviter aux gens de mourir (diminuer la mortalité) mais aussi de leur permettre de vivre en bonne santé (diminuer la morbidité).
Si une personne du groupe dépistage meurt d'un accident de voiture à 56 ans en étant en bonne santé jusque là parce qu'on lui a évité le cancer du sein et qu'une personne du groupe non dépisté meurt de son cancer du sein à 57 ans après 5 années de traitements palliatif de métastatses, une étude qui ne regarderai que la mortalité toute cause concluerait à une inefficacité du dépistage.
Bien sûr la mortalité totale des résultats dépendra du taux de mortalité pour autre cause que le cancer du sein. C'est bien ça qu'on veut aussi évaluer : la mortalité induite par le dépistage qui ne se traduit pas directement pas une mortalité par cancer du sein, mais qui pourrait se manifester par des atteintes secondaires d'autres organes : autres cancers radio-induits par les mammographies répétées, infection ou septicémie induite par les biopsies, cardio-toxicité des chimio-thérapies, chocs allergiques lors de l'anesthésie pour chirurgie, ou même taux de suicide après l'annonce d'un diagnostic positif, etc...
Si les groupes sont bien appariés et l'échantillon dimensionné pour avoir la puissance statistique suffisante, il devrait y avoir autant d'accidents de la route mortels dans les deux groupes, autant d'accidents domestiques, autant de pathologies "naturelles" mortelles non induites par le dépistage.
Si la mortalité totale est inférieure dans le groupe dépisté, on peut en déduire que les bénéfices l'emportent sur les risques à l'échelle d'une population. Sinon, le bénéfice du dépistage reste à prouver, et on peut craindre une attitude nocive à le proposant à grande échelle.
Par ailleurs diminuer la morbidité est un autre objectif louable, mais je ne suis pas sûr que le dépistage et la prise en charge de tous les cancers du sein actuellement permette à toutes les femmes concernées de se sentir "vivre en bonne santé". L'ambiance est plutôt à la culpabilisation, à l'émotionnel de masse, à " toute femme bien portante est une malade qui s'ignore", et l'échange d'arguments un tant soit peu scientifiques, posés et rationnels manque au débat. Sauf ici bien sûr. Et je suis très heureux d'y trouver des contradicteurs aux arguments référencés.
La mortalité de la population Française par cancer de la prostate a diminué depuis 1990 année où le PSA est apparu. La mortalité de la population Française par cancer du sein a diminué depuis 1990 année où les mammographies de dépistage se sont généralisées. Vous pouvez consulter l'évolution depuis 1950 jusqu'à 2006 de la mortalité standardisée pour toutes les localisations de cancer ici:
http://philippehavinh.wordpress.com/2011/11/06/cancer-mortality/
Mon post se réfère aux travaux effectués par Catherine Hill qui est une référence dans l'épidémiologie des cancers.
@ Ha-Vihn. J'ai posté un commentaire sur votre site. Pour ici : nous connaissons ces données. Mais je ferais plusieurs réflexions : 1) Quand vous regardez l'ensemble des courbes de mortalité elles diminuent presque toutes à partir des années 90 (même dans le cas de cancers non dépistés) ; 2) Quand on sait que seules 49 % des femmes en âge de le faire ont eu "droit" à un dépistage organisé du cancer du sein, il est assez osé de dire que le dépistage a commencé dans les années 90 ; 3) Parler des chiffres bruts sans aborder a) la qualité des données (certificats de décès), b) l'augmentation considérable de l'incidence (ce qui signifierait une baisse dramatique de la mortalité), c) les risques du dépistage est assez osé.
Dernier point majeur : vous ne pouvez vous accaparer Catherine Hill sachant qu'elle est contre le dépistage du cancer de la prostate par dosage du PSA. Voir ici : http://artp.calliscope.com/2009/index.html
A vous lire.
Intéressant tout ça.
Simple MG de base, je n'étais pourtant pas vraiment convaincu de l'utilité de ce dépistage.
Mais à bien lire le texte de l'article on voit que l'auteur est absolument opposé au THS après ménopause.
Ou peut-on trouver des données fiables sur le retentissement du THS quant à la morbidité et la mortalité des patientes traitées, et en particulier pour les cancers du sein ?
En effet je suis plutôt favorable à ce type de traitement, mais peut-être par défaut d'information.
Merci par avance.
@ Ignorantin
Je vous propose de lire ce rapport américain : http://www.cancer.gov/cancertopics/factsheet/Risk/menopausal-hormones et notamment le point 5. Quant aux chiffres de nouveaux diagnostics de cancers après suppression du THS il a été globalement réduit de dix pour cent et beaucoup plus pour les cancers hormonodépendants. Une autre notion peu argumentée est celle de la pilule osetroprogestative : au Japon, et depuis qu'elle a été introduite, le nombre de cancers du sein qui était très faible par rapport aux standards nord-américains et européens, a flambé.
Le THS est parfois utile chez de rares femmes mais il est source de cancers et source de sur diagnostics (en raison de la modification du tissu mammaire chez la femme ménopausée.
Je vous ai répondu rapidement pendant une pause mais, si vous le souhaitez, je vous fournirais une bibliographie plus riche.
Seins écrasés par de multiples mammos ??? Comme ces "seins repassés" en Afrique : http://www.afrik.com/article9920.html ?
OK merci d'avoir répondu..
Ce rapport laisse la porte ouverte à de nombreuses interprétations.
Je vais continuer à me documenter.
Il était prévisible qu'un traitement hormonal augmente le risque de cancers hormonodépendants.
Il serait quand même souhaitable de prendre aussi en compte la qualité de vie des femmes souffrant des symptômes de carence œstrogénique.
J'arrête là car je dois être à la limite du hors sujet
@ Ignorantin.
Pas du tout, pas du tout : la qualité de vie des femmes ménopausées est importante et je suis embêté avec les femmes qui souffrent beaucoup non seulement des bouffées de chaleur mais encore des troubles hormonaux associés (prise de poids, baisse de la libido, et cetera) ; chaque fois que je leur parle du risque avéré de cancer du sein, elle prenne leur décision qui est dans l'immense majorité des cas : non.
Et voilà que sort cette semaine le premier magazine Rose ou le cancer au féminin ou bien encore le cancer sur papier glacé! L'objectif de cette revue serait de se battre pour le respect des femmes atteintes d'un cancer.
Comment peut-on à ce point se fourvoyer?
Le respect de la personne se construit dans la relation Humaine, devenue complètement accessoire, dans une société consumériste qui préfère s'enrichir du malheur des individus plutôt que de grandir dans le soutien, l'accompagnement désintéressé de ceux qui souffrent.
http://wp.me/pEMm4-2b5
Rectification, sortie du magazine Rose à l'automne 2011.
Bel animal!
http://www.underwatercam.tv/
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