L'Evidence Based Medicine est devenue la tarte à la crème de la médecine moderne, glorifiée par beaucoup (dont ceux qui ne la pratiquent pas), incomprise par la majorité (qui, par ignorance ou par paresse croit qu'il s'agit de la seule prise en compte des essais contrôlés dans la décision thérapeutique), dénigrée par la plupart qui n'en connaissent ni l'alpha ni l'omega (mais qui reçoivent la visite médicale et mangent à l'oeil dans des dîners ébats) et parfois pratiquée par eux sans le savoir, donc mal (sans réflexion sur leur pratique) et honnie par ceux qui y voient une intrusion insupportable des patients dans leur univers (ils ne connaissent des patients que leurs "agissements").
J'ai déjà abordé (et je me rends compte en me relisant que ma théorie et ma pratique ont évolué, ce qui, de mon point de vue est plutôt bon signe) le problème de la signification de l'EBM en me fondant sur les textes historiques (voir ICI), une signification difficile à cerner car les Anglo-Saxons ne sont d'accord entre eux ni sur le signifié ni sur le signifiant (en anglais) ce qui explique pourquoi sa traduction en français est approximative ou insatisfaisante (ICI, et LA), j'ai aussi abordé les contre-sens que l'on commet à son endroit (l'EBM confondue avec les essais contrôlés que l'on critique LA, l'EBM comme instrument de normatisation et de normalisation scientifique et économique de l'Art médical -sic), j'ai aussi parlé de ses contradicteurs et de ses ennemis (ICI ou LA).
Pour être positif je ne dirais pas ce que l'EBM n'est pas mais ce qu'elle est. Je ne reviendrai pas sur ses fondateurs, sur ses branches, sur ses interprétations diverses et variées mais je tenterais de proposer un modus operandi pour la médecine générale (les autres médecins se débrouilleront).
Peu importe donc que l'on traduise EBM par Médecine par les preuves (mais on saisit qu'il s'agit d'une synecdoque qui ne rend pas compte de la multiplicité des facteurs), par Médecine fondée sur les faits (LA un article de wikipedia pour le moins "brouillon" et parfois véritablement erroné) ou par Médecine factuelle (dont le signifiant, pour le coup, n'est pas très sexy (ICI)), retenons-en les fondamentaux, les fondamentaux appliqués à la médecine générale, ou l'EBMG (en franglais).
***
La démarche EBM est un questionnement. Un patient consulte et expose des symptômes qui peuvent constituer une situation clinique simple ou complexe pour laquelle il demande une aide ou un avis.
La réponse au questionnement, c'est à dire la décision qui sera prise, sera située en théorie dans la zone d'intersection des trois points de vue de l'EBM que sont l'expérience externe (les données publiées - ou non - de la littérature scientifique si elles existent pondérées de leur niveau de preuves), l'expérience interne (l'expertise clinique individuelle - et collective - fondée sur la compétence et le jugement acquis grâce à la pratique et dont font certes partie l'écoute et la compassion mais aussi et surtout l'expérience interne de l'expérience externe) et l'expérience du patient (c'est à dire ce qu'il ressent, ce qu'il vit, ses conditions de vie en général et, avant tout, ses valeurs et préférences).
On comprend ainsi que le questionnement EBM est le contraire d'une procédure normalisée puisqu'il prend en compte des facteurs très différents émanant de points de vue divers et pertinents et il n'est pas possible et il est difficilement crédible de penser qu'à la sortie de l'entonnoir de la ou des consultations la réponse apportée soit univoque. C'est à la fois l'avantage (la personnalisation des réponses) et l'inconvénient (la subjectivité des interprétations) du ou des résultats de ce questionnement. C'est aussi une réponse adaptée à l'algoritmisation de la décision médicale qui permet, outre les contrôles par les autorités de tutelle publiques ou privées, la délégation des tâches vers des non médecins qui sont les moins à même, non par nature mais par formation, de critiquer les décisions algoritmiques qu'on leur impose. Car la délégation des tâches, mais nous y reviendrons, c'est une façon de médicaliser la vie au delà des médecins, la délégation des tâches ne devrait s'entendre, à mon sens, que comme une prise en charge autonome de la maladie (et non seulement des traitements) de celui qui en souffre.
Le questionnement EBM exige, et c'est son inconvénient majeur, un travail considérable de la part du praticien qui doit, et nous parlons ici de la pratique de la médecine générale par un médecin généraliste (dont on sait que le champ est non bornable), être à jour de son expérience externe, améliorer son expérience interne et pratiquer une relation médecin malade pertinente.
J'insisterai beaucoup sur ce dernier point qui me paraît être une des pierres d'achoppement cruciale de la pratique de l'EBM : la relation médecin malade (ce que l'on appelle souvent l'entretien singulier d'un terme ancien remontant à l'écrivain médecin aujourd'hui oublié Georges Duhamel). En effet, la pratique moderne de la médecine de consultation est soumise, comme depuis la nuit des temps et quelles que soient les latitudes, à l'image construite anthropologiquement et socialement de ce que le patient vient chercher en consultation (et pour quelles raisons) et du type de réponses que le médecin est censé lui apporter (et pour quelles raisons). Le glissement progressif (et seulement apparent) du paternalisme vers le consumérisme sous nos climats n'est pas expliqué seulement par ce qu'on appelle les nouveaux moyens de communication et les réseaux sociaux car il s'est produit dans pays anglo-saxons bien avant leur émergence en raison de l'idéologie libérale liée aux théories de John Rawls dont l'importance est prédominante aux US et en GB. Le médecin généraliste et "son" patient (ou le patient et "son" médecin généraliste) n'ont jamais été seuls pendant la consultation en raison du poids de l'idéologie dominante dans chaque société mais ils sont désormais de plus en plus sous surveillance de l'administration (et de la mutuelle) qui remboursent, de l'administration qui exige, et du patient qui s'informe et qui a des Droits et des exigences. Le praticien pratiquant le questionnement EBM doit gérer l'arrogance médicale (l'asymétrie assumée de la relation) et le consumérisme (céder aux valeurs et préférences du patient pour des raisons "intéressées") tout en respectant sa propre éthique. Il est donc nécessaire qu'il dispose d'outils adaptés.
J'insisterai beaucoup sur ce dernier point qui me paraît être une des pierres d'achoppement cruciale de la pratique de l'EBM : la relation médecin malade (ce que l'on appelle souvent l'entretien singulier d'un terme ancien remontant à l'écrivain médecin aujourd'hui oublié Georges Duhamel). En effet, la pratique moderne de la médecine de consultation est soumise, comme depuis la nuit des temps et quelles que soient les latitudes, à l'image construite anthropologiquement et socialement de ce que le patient vient chercher en consultation (et pour quelles raisons) et du type de réponses que le médecin est censé lui apporter (et pour quelles raisons). Le glissement progressif (et seulement apparent) du paternalisme vers le consumérisme sous nos climats n'est pas expliqué seulement par ce qu'on appelle les nouveaux moyens de communication et les réseaux sociaux car il s'est produit dans pays anglo-saxons bien avant leur émergence en raison de l'idéologie libérale liée aux théories de John Rawls dont l'importance est prédominante aux US et en GB. Le médecin généraliste et "son" patient (ou le patient et "son" médecin généraliste) n'ont jamais été seuls pendant la consultation en raison du poids de l'idéologie dominante dans chaque société mais ils sont désormais de plus en plus sous surveillance de l'administration (et de la mutuelle) qui remboursent, de l'administration qui exige, et du patient qui s'informe et qui a des Droits et des exigences. Le praticien pratiquant le questionnement EBM doit gérer l'arrogance médicale (l'asymétrie assumée de la relation) et le consumérisme (céder aux valeurs et préférences du patient pour des raisons "intéressées") tout en respectant sa propre éthique. Il est donc nécessaire qu'il dispose d'outils adaptés.
Les outils. Je vais en citer certains et vais en oublier d'autres mais, comme on le verra, il n'est pas possible de tous les utiliser... Le plus important est d'en évaluer les avantages et les limites et d'en changer au cours du temps. Pour l'expérience externe : lecture de revues de synthèse critique comme La Revue Prescrire (ICI) et ses fameux et chers tests de lecture, la Collaboration Cochrane (en français LA, in English ICI), Minerva (ICI), disposer de correspondants généralistes ou spécialistes consultables et corvéables à merci (IRL ou par l'intermédiaire des forums de discussion médicaux ou de tweeter), lecture directe de publications dans des revues de référence comme British Medical Journal (LA) et la revue EBM - BMJ (ICI) (1) ou New England Journal of Medicine (ICI) et apprentissage de la lecture critique des articles médicaux, consultation épisodique du BEH (LA) ou d'autres revues française (par exemple LA) ou suisse (ICI), connaissance des Recommandations officielles en langue française (LA), participation à des forums médicaux généralistes, lecture de blogs médicaux, fréquentation de tweeter (je signale @Medskep pour les articles en anglais), connaissance de sites directement accessibles en consultation (onglets CRAT -ICI, ONCOLOR -LA, ANTIBIOCLIC -ICI, et cetera...), participation à des formations (FMC) au mieux non sponsorisées, savoir rechercher (en consultation) une information clinique sur le web généraliste, et cetera. Sans oublier l'environnement sociétal que l'on pourra qualifier de gouffre sans fond : citons Ivan Illich par exemple... Pour l'expérience interne : outre les outils que nous avons cités pour l'expérience externe, participation à un groupe de pairs, participation à un groupe Balint, maîtrise de stage, partage d'expériences avec les spécialistes d'organes hospitaliers et / ou libéraux, consultation partagée chez un collègue, apprentissage de gestes techniques chez un collègue, apprentissage de la recherche rapide sur internet, programmes d'amélioration des pratiques cliniques... Pour l'expérience du patient : connaissance des problèmes posés par la relation médecin patient, d'un point de vue analytique (transfert et contre-transfert) et cognitivo-comportemental pour éviter la sujétion et la dépendance et pour ne pas s'illusionner sur la prétendue impartialité et / ou neutralité du praticien (et du patient). Prise en compte des connaissances profanes du citoyen et du patient sur les maladies (voir ICI) qui permet d'agir en meilleure intelligence. Eviter les écueils des techniques modernes de programmation comme l'Education Thérapeutique ou l'Entretien Motivationnel (par exemple) qui sont le retour brutal du paternalisme dans des relations que l'on voudrait apaisées. Nous reviendrons sur cet aspect majeur de l'EBM en médecine générale, l'EBMG, quand nous traiterons dans des billets suivants de l'inquiétante irruption de l'e-patient mongering.
(Je n'ai pas parlé des liens d'intérêt qui pourraient perturber le bon fonctionnement de l'EBM en médecine générale comme le paiement à la performance, auquel je participe et dont je profite, qui est presque le contraire de la démarche individuelle de réponse donnée au questionnement EBM)
(Je n'ai pas parlé des liens d'intérêt qui pourraient perturber le bon fonctionnement de l'EBM en médecine générale comme le paiement à la performance, auquel je participe et dont je profite, qui est presque le contraire de la démarche individuelle de réponse donnée au questionnement EBM)
En conclusion.
Le questionnement EBM en médecine générale est une chance pour le médecin généraliste car il l'autorise à s'autonomiser par rapport à la connaissance académique qui ne connaît rien à sa pratique.
Le questionnement EBM en médecine générale est une chance pour la médecine générale car cela lui permet de constituer un corpus théorique autonome et collaboratif avec les médecines de spécialité.
Le questionnement EBM en médecine générale est une chance pour les médecine de spécialité car il leur permet de se confronter à de solides données concernant un malade pris dans sa globalité.
Enfin, le questionnement EBM en médecine générale est une chance pour le patient qui s'adresse à un médecin informé et qui a réfléchi à sa pratique et peut s'en inspirer pour constituer son propre corpus.
Notes :
(1) Merci à @Sous_la_blouse
(Illustration : Jean Pic de la Mirandole (1463 - 1494))
Le questionnement EBM en médecine générale est une chance pour le médecin généraliste car il l'autorise à s'autonomiser par rapport à la connaissance académique qui ne connaît rien à sa pratique.
Le questionnement EBM en médecine générale est une chance pour la médecine générale car cela lui permet de constituer un corpus théorique autonome et collaboratif avec les médecines de spécialité.
Le questionnement EBM en médecine générale est une chance pour les médecine de spécialité car il leur permet de se confronter à de solides données concernant un malade pris dans sa globalité.
Enfin, le questionnement EBM en médecine générale est une chance pour le patient qui s'adresse à un médecin informé et qui a réfléchi à sa pratique et peut s'en inspirer pour constituer son propre corpus.
Notes :
(1) Merci à @Sous_la_blouse
(Illustration : Jean Pic de la Mirandole (1463 - 1494))
12 commentaires:
Merci pour ton article. Il pourrait être illustré par http://commons.wikimedia.org/wiki/File:EBMfr.jpg
La médecine idéale se situe au croisement de ces 3 cercles ! :)
Billet bien éclairant. Et qui soulève rétrospectivement bien des questionnements sur la manière dont la médecine est enseignée.
J'ai le souvenir d'un bachotage permanent, où il s'agissait d'emmagasiner un maximum de connaissances non hiérarchisées, les maladies très rares étant mises sur le même plan que les maladies très fréquentes, sans mise en perspective, sans réflexion sur la profession, sur la relation avec le patient, sur l'éthique, sur la santé publique et sur la manière même dont les maladies étaient présentées, sous une forme purement descriptive. Comme si ce qui nous était appris constituait des vérités gravées dans le marbre et non pas le résultat d'une série d'approximations, de choix contestables et de conventions.
A aucun moment il ne nous était demandé de comprendre, de réfléchir, mais simplement de stocker de l'information jusqu'à l'épuisement sans construire de réflexion.
Quand la capacité à comprendre la littérature scientifique n'a pas été stimulée, qu'une vision plate, linéaire, conformiste et routinière de la médecine fait obstacle à la construction d'une expérience interne pertinente et que la certitude de savoir empêche toute prise en compte du point de vue du patient, ça finit par donner ça http://grangeblanche.com/2013/06/08/la-perte-des-fondamentaux/
Merci, c'est un point de vue et une réflexion de grande qualité dont la lecture bénéficierait sans nul doute à beaucoup de nos confrère, mais aussi aux formateurs et aux décideurs institutionnels et politiques...
Une question : pensez-vous que les "2e" et "3e" piliers de l'EBM constituent le "maillon manquant" qui permet de faire le lien entre les données issues de la littérature et le patient individuel, celui qu'on a en face de soi ?
Autrement dit, à la question "cette recommandation s'applique-t-elle à mon patient ?" la réponse est-elle à chercher dans une meilleure connaissance du "1er" pilier de l'EBM, ou ailleurs ?
Merci pour votre réponse
amicalement
@Goro Merci pour ces commentaires.
Il n'y a pas de maillon manquant il y a une incompréhension fondamentale pour la majorité des médecins, dans tous les coins de la médecine (il est vrai que pratiquer l'EBM pour un radiologue ou pour un virologue est pour le moins impossible), l'EBM c'est la littérature, nos (in)compétences et le patient. Quand j'étais à l'hôpital, il y a fort longtemps, j'ai toujours pensé en voyant la machine (ne pas) fonctionner, que le gêneur était le patient...
Bonne soirée.
@ docteur du 16.
Plus je consulte votre blog plus je perçois la convergence de nos points de vue sur la médecine générale. La formulation que vous faite à l'aide du concept EBM que vous faite permet de penser ce que nous faisons.
Je suis particulièrement sensible à votre analyse des intrusions externe venant interagir dans la rencontre avec la personne qui consulte. Ces intrusions ont sans doute toujours existé: en particuliers le contrôle religieux ou celui du parti dans les régimes totalitaires. Il n'est pas étonnant que les idéologies consuméristes et néo libérales s'invitent dans cet espace.
Je ne suis pas d'accord comme je l'ai déjà exprimé avec votre avis sur l'entretien motivationnel.
Je vous en reparle plus tard.
@ docteur du 16.
l'entretien motivationnel (E.M.) répond aux critères de l'E.B.M. En particuliers sur le respect des valeurs et des croyances du patient. L'E.M. n'a rien à voir avec l'éducation thérapeutique. L'E.M. est une modalité d'entretien qui est validée (expérience externe). L'E.M., nécessite une expertise interne de l’expérience externe par une pratique et une critique de cette pratique. Je ne vois rien d'incompatible dans l'E.M. avec l'E.B.M.
L'E.M. n'est qu'un élément de la pratique dans un cadre donné. Ce cadre correspond au désir d'une personne à faire évoluer un comportement pour améliorer sa santé. L'E.M. n'est qu'un support à cette réflexion.
Contrairement aux idées reçues, il ne s'agit pas du tout d'expliquer ce que devrait faire la personne pour faire évoluer son comportement ou de la "coacher".
L'E.M. n'est pas non plus une normalisation d'un échange. L'E.M. est basé sur une observation et sur une réflexion des éléments qui dans un entretien entravent ou facilitent une évolution de comportement vers une meilleure santé voulue par le patient.
Encore une fois, l'E.B.M. telle que vous la décrivez correspond bien à l'exercice que je tente de faire de la médecine générale et je ne comprend pas bien votre position vis à vis de l'E.M.
@ Dr Bill
Certes, certes.
Je ne confonds pas le contenu et le contenant.
L'entretien motivationnel et l'éducation thérapeutique sont des auberges espagnoles.
Je ne doute pas un instant qu'une pratique réfléchie de l'EM puisse être positive. Mais les écueils sont nombreux comme le coaching que vous citez ou une manifestation "moderne" du paternalisme médical, persuadez le malade de ce qu'il DOIT faire. Ce qui m'inquiète, c'est que l'EM est pratiqué dans le marketing, dans la gestion des équipes de vente, et cetera et qu'en médecine cela a l'air tellement simple que n'importe qui peut le faire, n'importe qui qui ne serait pas au courant et de la gestion des problèmes tranférentiels et contre transférentiels, par exemple.
Quant à l'éducation thérapeutique, cela peut être, entre de bonnes mains, un projet de vie (et non un projet thérapeutique). Or c'est utilisé pour imposer des traitements aux patients, pour leur bien. Quand il ne s'agit pas de leur imposer des stages de motivation.
Mais j'ai promis d'écrire un billet là dessus. Je vais le faire.
Merci, pour ces commentaires.
Bien à vous.
Encore un article qui soulève des problèmes de fond.
A Frédéric,
Je n’ai jamais frappé personne mais je trouve juste que s’il ne faut pas mentir aux enfants, nous disent les psychologues, il ne faut pas mentir non plus aux patients. C’est infantilisant et dégradant. Et ce n’est jamais pour le bien du patient mais uniquement pour convenance personnelle.
Ne pas mentir ne signifie pas tout dire sans ménagement.
Cette situation me renvoie à l’accompagnement vers l’acceptation du handicap de leur enfant par les parents. C’est aussi un deuil à faire, le deuil de l’enfant idéal. Et ce n’est pas une mince affaire dans cette société où seule la performance est valorisée. Où seuls les meilleurs, les plus beaux, les plus rapides, les plus malins vont sortir la tête de l’eau, nous fait-on croire, et conquérir leur place au soleil.
Ce que ces deux situations ont en commun : une réalité s’impose à nous, celle de la mort, celle du handicap, et on ne pourra tricher que jusqu’à un certain point avec cette réalité.
Une autre situation, assez différente, est celle de la protection de l’enfance. Mais il existe des similitudes en ce que les professionnels ont obligation de lire le rapport d’évaluation après une information préoccupante aux parents. Ni les parents n’ont envie d’entendre ce qu’on a à leur dire, ni les professionnels n’ont envie de le leur dire. Mais c’est l’effort que cela demande à chacun qui est structurant.
En apprenant les règles de rédaction d’un rapport social, j’ai appris, à ma grande surprise, combien il pouvait être structurant et constructif pour chacun de s’astreindre à cet exercice désagréable. Pour que ça le soit, il est nécessaire que les professionnels restent très professionnels et qu’ils ne mettent rien de personnel dans leur travail. Ni jugement de valeur, ni préjugés. Les faits, uniquement les faits, en référence à la loi et à la protection de l’enfant.
Quand on a du mal à aborder certains sujets avec le patient, c’est vers soi-même qu’il faut se tourner et non en vouloir au patient ou essayer de tricher. C’est en partie de la technique et du savoir faire, en partie de l’introspection. Et je ne me flatte pas de maîtriser le sujet.
Un autre aspect est celui de la multiplication des essais cliniques concernant des thérapies anti cancéreuses. J’en ai parlé plusieurs fois dans les commentaires. En 2010UN PATIENT SUR 12 ATTEINT DE CANCER S’EST VU INCLURE DANS UN ESSAI CLINIQUE http://www.laprovence.com/article/actualites/1655053/cancer-les-essais-cliniques-en-augmentation-en-france-inca.html . Pourtant, les progrès dans le traitement des cancers sont minimes ou inexistants. Peter Götzche a été très clair à ce sujet dans son intervention à la pilule d’or 2013 de Prescrire. Les essais cliniques sont un des outils de la stratégie d’influence des Pharmas sur les médecins. http://www.prescrire.org/Fr/109/440/48258/2312/ReportDetails.aspx
Dans cette intervention il parlait des 1600 médecins embauchés comme « investigateurs » pour des essais cliniques au Danemark, pourtant l’un des pays les moins corrompus du monde. Il expliquait que ces essais étaient en fait des opérations marketing.
Stratégie qui a d’ailleurs attient son vrai but en France, qui n’était pas de sauver des patients comme on pouvait s’en douter, puisque tandis que les dépenses de ville diminuent, les dépenses pour « les pathologies lourdes » vues à l’hôpital augmentent. C’est un beau terrain de jeu pour les Pharmas, car les molécules, soi-disant innovantes, ne craignent pas la concurrence des génériques. http://www.mutualite.fr/L-actualite/Medicament/Medicament-baisse-inedite-des-depenses-en-2012
Les groupes Balint ça existe encore ?
Oui, les groupes Balint existent encore. Balint est enseigné dans certaines facs.
Saviez-vous, qu'à l'en croire Léon Chertok,avait joué un rôle notable dans le développement des groupes Balint en France ? Il évoque cela dans ses mémoires, où il pointe d'ailleurs un désintérêt des étudiants en médecine à l'égard d'une approche qui les met en difficulté à l'aube de leur carrière. Les mémoires de Chertok sont par ailleurs une mine d'informations sur l'histoire politique, et intellectuelle...
vous relire quelques années plus tard est un pur plaisir intellectuel à tenter de mettre en oeuvre chaque jour,
tony lambert, MG, tlmg62@gmail.com
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