jeudi 14 septembre 2017

Bracelets d'identité à l'hôpital.















Dédicace spéciale pour Ph Ameline.

BRACELET

J'avais ironisé il y a quelque semaines sur le port des bracelets d'identité pour les nourrissons dans les maternités (un élément du pompeux dispositif d'identitovigilance et de traçabilité intégré dans le processus qualité de tout établissement de soins désirant faire moderne). J'avais écrit en substance : "La pose de bracelets d'identité chez les nourrissons est le témoin évident de l'anonymisation définitive des patients à l'hôpital."

Que n'avais-je écrit ?

Les urgentistes (et les hospitaliers) avaient mis le paquet dans le style : Comment un crétin de généraliste peut-il nous apprendre notre métier ? C'est toujours les gens qui n'y connaissent rien qui parlent. Les bracelets d'identité sont un progrès déterminant pour la sécurité des patients.

Disais-je le contraire ?

Nos amis urgentistes avaient oublié ceci : la pose de bracelets d'identité (il faut d'ailleurs pour qu'il soit posé que le personnel soignant ou non dispose de la carte d'identité du patient, de son passeport ou d'un titre de séjour, ce qui pourrait aboutir finalement à ce que l'on s'assure qu'il ne s'agit pas de faux papiers...) est sans doute un progrès concernant la sécurité des patients (voulez-vous que je vous serve la rhétorique officielle ?, "Cette mesure s’intègre dans un dispositif bien plus large de sécurité par l’identification du patient qui concourt au bon déroulement de la prise en charge de celui-ci. Il constitue une sécurité supplémentaire mais ne se suffit pas à lui seul. Il ne remplace en aucun cas le professionnel dans sa pratique et la relation de confiance établie entre le soignant et le soigné.") mais ce n'est qu'un maigre progrès, un pis aller vis à vis de la dégradation des conditions de soins et de travail dans les hôpitaux. On pose un bracelet d'identité aux patients parce qu'il n'est plus possible aux soignants (débordés, mal payés, démotivés) de connaître les patients, de les identifier vraiment, de leur prodiguer des paroles et des soins personnalisés. L'hôpital taylorisé, industrialisé, T2Aisé est acté (comme disent les technocrates) et revenir en arrière serait un recul. On nous le dit. C'est le progrès.

Vous avez compris ?

Je retrouve le courrier d'un syndicat d'infirmiers du 22 janvier 2008 remis à Roselyne Bachelot alors que l'administration souhaitait généraliser le bracelet à tous les patients de l'hôpital Saint-Louis. J'ai trouvé le truc un peu outré, un peu j'en fais des tonnes, mais, finalement, pas mal du tout. Vous pouvez le lire ICI.

Bon, pour résumer, le bracelet c'est super chouette, ça évite de se tromper, "La petite dame du box 7, elle va mieux ?", "Le pappy dans le couloir, il est réchauffé ?". Cela ne peut plus se passer comme cela. Merci les urgentistes.

Mais réfléchir sur l'aspect éthique (on est là pour sauver des gens, hein) ou sur le bordel organisé dans les hôpitaux... Y a plus personne.



MADAME A

Madame A est puéricultrice dans une maternité. Depuis 20 ans. Elle craque depuis plusieurs mois (elle a aussi des problèmes personnels, comme on dit). La réorganisation de la maternité, la façon de rendre physiologiques les naissances, les tâches accumulées, l'injustice, la façon impersonnelle de traiter les problèmes de personnel, elle craque. Il faudrait qu'elle s'arrête mais "je ne peux pas faire cela à mes collègues".

Je passe sur les détails. Elle me raconte ceci : "Le matin, lorsque je fais la transmission, je pleure parce que je ne me rappelle même pas la tête des nourrissons dont je m'occupe. C'est terrible ce que l'on nous fait faire."

Les urgentistes (et les hospitaliers) ont raison : heureusement qu'il y a le bracelet.

Illustrations : Chatiliez Emile. La vie est un long fleuve tranquille. 1988.

jeudi 31 août 2017

Comment instrumentaliser la communication. A propos de la rougeole.

Crédit Paris-Match

Ce blog a suffisamment évoqué la question vaccinale, et notamment grâce aux articles de CMT, pour que le lecteur éclairé, le lecteur moyen ou le lecteur pressé, ne pensent pas que je puisse être considéré comme un anti vax. Ma pratique est d'ailleurs là pour le démontrer : je vaccine. Mais, pardon pour cette incise, je réfléchis aussi.

Dernière minute : on apprend dans un entretien (voir LA) qu'Agnès Buzyn (voir ICI) impose la vaccination obligatoire pour 11 vaccins au premier janvier 2018. 

Les vaccinolâtres s'inscrivent bien malgré eux dans un double contexte : celui du scientisme (il arrivera bien un jour, prétendent-ils, où le corps humain sera si connu que l'on pourra le soigner comme on soigne une machine défectueuse) et celui de l'idéologie de la médecine en tant que seul facteur de progrès de l'humanité.

Les vaccinolâtres ignorent, ou feignent d'ignorer (car tous les vaccinolâtres ne sont pas des ignorants, il y en a même qui sont de mauvaise foi), que la santé publique (et son amélioration), ne dépendent pas seulement de la médecine stricto sensu. La médecine, notamment depuis la fin de la deuxième guerre mondiale (et avant tout dans les pays développés), a permis de formidables avancées en termes de mortalité infantile et d'espérance de vie à la naissance, (malheureusement l'espérance de vie en bonne santé est en stagnation et l'espérance de vie globale est en régression dans certains sous-groupes populationnels) mais ces avancées n'ont été possibles qu'en raison du développement de l'hygiène publique, des services sociaux et des efforts individuels des citoyens.

Les vaccinolâtres professionnels ont diffusé largement (et les vaccinolâtres amateurs se sont engoufrés dans la brèche pour en rajouter) une figure qui semble, pour ce qui est de la rougeole, mettre fin à toute forme de procès. Il s'agit du nombre de cas rapportés. Pas de décès.


Il existe par ailleurs des chiffres sur les autres maladies : ICI.
Pour disposer de données solides sur la rougeole, vous pouvez lire CMT ICI ou LA, par exemple.

Réfléchissons à plusieurs choses : 
  1. Ce sont des chiffres américains. Rappelons ici que les Etats-unis d'Amérique on des chiffres de mortalité infantile et d'espérance de vie catastrophiques par rapport à ceux des autres pays développés pour un coût colossal et des inégalités criantes.
  2. La courbe commence en 1945. 
  3. L'introduction de la vaccination se situe en 1963 et les chiffres baissent vraiment très peu de temps après.
  4. Cette figure ne tient compte ni des progrés de l'hygiène, ni des progrès de la médecine, ni des programmes sociaux, ni des effets indésirables.

Voici une courbe (les sources sont les mêmes) qui parle de mortalité de la rougeole, toujours aux Etats-Unis d'Amérique).



Cette perspective historique me semble éclairante. D'une part, elle relativise le rôle de la vaccination sur la mortalité de la rougeole, d'autre part, elle souligne l'importance des mesures non médicales sur la mortalité due à la rougeole.

Ainsi, si l'on voulait conclure sur la rougeole dans les pays développés, on pourrait dire que la vaccination contre la rougeole a fini le boulot des progrès de la santé publique en général. Sans plus.

Rappelons qu'en France, selon les chiffres officiels (et compte non tenu des complications non mortelles) la rougeole a été responsable de dix décès en dix ans. Et pas seulement d'enfants. Il est à remarquer, mais on me dira que c'est hors sujet, que 112 enfants de moins de 15 ans sont morts en France dans un accident de la voie publique (LA)...

Dans les pays non développés (on ne sait plus quel est le terme politiquement correct) le tout à l'égout semble au moins aussi important que la vaccination.

Je terminerai par des données que j'ai déjà fournies dans un billet ancien comparant les incidences aux Etats-Unis d'Amérique de 2 maladies, l'une liée à une maladie où un vaccin existe (l'hépatite B) et l'autre liée à une maladie où il n'y a pas de vaccin (hépatite C).



Conclusion : la santé publique est une matière complexe.
Je vous conseille d'écouter Madame Big Pharma Buzyn dans l'entretien que je vous ai cité plus haut. Elle reprend des arguments éculés et faux. C'est d'une tristesse infinie.

jeudi 24 août 2017

L'affaire Levothyrox.


A la demande de l'ANSM (voir ICI) les laboratoires Merck ont changé la formule du médicament Levothyrox.

Voici les justifications de l'ANSM :
"Afin de garantir une stabilité plus importante de la teneur en substance active (lévothyroxine) tout le long de la durée de conservation du médicament, le laboratoire Merck a réalisé, à la demande de l’ANSM, une modification de la formule de Levothyrox. La substance active reste identique. Cette nouvelle formule sera mise à disposition dans les pharmacies à compter de la fin du mois de mars 2017.Ces modifications ne changent ni l’efficacité ni le profil de tolérance du médicament. Toutefois, par mesure de précaution face à toute modification, et bien que la bioéquivalence entre l’ancienne et la nouvelle formule ait été démontrée, l’ANSM préconise, pour certains patients, de réaliser un dosage de TSH quelques semaines après le début de la prise de la nouvelle formule.Par ailleurs, les couleurs des boîtes et des blisters vont être modifiées: une attention particulière des professionnels de santé et des patients devra être portée lors de la phase de transition pour éviter les erreurs.
"
Il est donc prouvé que des excipients sans effets notoires peuvent entraîner des problèmes de bio-équivalence, dans ce cas il existerait une baisse de la teneur en levothyroxine entre le moment où le médicament est commercialisé et la date de péremption.
C'est quand même une drôle de nouvelle !
La rhétorique généricante en prend un coup mais il s'agit, précisent les autorités, d'un domaine où la marge thérapeutique est étroite. Hum.
Mais surtout : la rhétorique généricante a comme leitmotiv que les excipients à effets non notoires, voire notoires, ne produisent rien et sont des lubies des patients... 
Le problème ne date pas d'aujourd'hui puisque des sociétés savantes nord-américaines avaient signalé le problème dès 2003 lors de la générication du Levothyrox outre-Atlantique (il est vrai qu'il faut toujours se méfier des sociétés savantes qui s'opposent aux génériques car elles sont souvent animées des meilleures intententions du monde, je veux dire l'argent de Big Pharma qui veut dissuader les prescripteurs d'utiliser des génériques). Je n'y avais pas attaché une importance particulière à l'époque et pour deux raisons : la première venait de ce que je croyais encore, certes avec des réticences (boîtage, aspect, goût des génériques par rapport au princeps), à la pertinence économique du concept (néo libéral, entre parenthèses, je croyais qu'il était de gôche) et la deuxième parce que je n'avais pas encore pris conscience du désatre que cette générication pouvait produire en termes de consumérisme, de banalisation du médicament, d'arrogance médicale, de mépris du patient/consommateur et de je-m'en-foutisme. 


Pour le reste, le communiqué de l'ANSM est un tissu d'affirmations toutes aussi peu fondées les unes que les autres et que les faits démentent abondamment aujourd'hui puisque les utilisateur.e.s (désolé pour cette épicènie dévastatrice) se plaignent d'effets indésirables et que les autorités conseillent de nouveaux dosages de TSH. Je rappelle simplement une phrase : "Ces modifications ne changent ni l'efficacité, ni le profil de tolérance du médicament" Qu'est-ce que l'ANSM en sait ? Il s'agit d'un discours qui amplifie la possibilité d'effets indésirables puisque comme il ne doit pas y en avoir et qu'il y en a, tout est possible : hystérie collective, complotisme, moqueries à propos des patient.e.s, culpabilisation, arrogance des prescripteur.e.s (ceux qui savent), et cetera.

Quant à ceux qui pensent (il y a quand même des inconscients) que la pharmacovigilance viendra à bout de ce problème, je rappelle que la pharmacovigilance passe à côté de tout et de l'important et ce, d'autant plus désormais, que l'agence européenne (la fameuse directive européenne) a délégué la pharmacovigilance aux industriels.

Je lis un article dans le journal Le Figaro (LA), dont un éminent expert écrit : "Excellente interview d'une patiente-experte dont le point de vue est crédibilisé par son absence de lien $$ avec le fabricant !" et dont la patiente-experte dit que c'est le seul article, je cite, "valable" sur la question (sans doute que l'absence de lien avec le fabricant ne va pas jusqu'à l'absence de lien non financier avec le journal). Il est vrai que l'on y apprend des choses surprenantes. Je vous laisse lire, cela vaut son pesant de cacahuètes.

JP Rivière fait un résumé exact et neutre de ce qui s'est passé (sans parler des génériques) : ICI.
Le pharmacien, dont on connaît les liens d'intérêts avec big pharma, écrit un truc sans intérêt mais parle de l'information des patients et en remet une couche sur l'incompétence des médecins : LA.


Il est possible de poser ces questions.
  1. Fallait-il vraiment changer la formule ? 
  2. Etait-ce une demande des patient.e.s ?
  3. Etait-il judicieux de changer la formule d'un médicament qui serait prescrit, selon l'Agence, à 3 millions de personnes en France, sans informer au préalable de façon utile, appropriée, et convaincante, les prescripteurs et les utilisateurs ?
  4. Etait-il impossible de prévoir que des effets indésirables, fussent-ils mineurs, puissent apparaître avec 3 millions de patients et dans une pathologie où non seulement la marge thérapeutique est étroite mais où (cf.point 9.) les variations intraindividuelles sont très fortes avec le même médicament dans le même boîtage ? Imaginons qu'une diarrhée apparaisse chez 1 % des patients, cela signifie donc 30 000 patients se plaignant de diarrhée... Où l'Agence avait-elle la tête ? Existe-t-il des services de pharmacovigilance suffisamment armés pour traiter un tel afflux de données ? 
  5. Existait-il des données solides sur les effets indésirables rapportés avec l'ancienne formule ?
  6. Existait-il des publications sur les effets secondaires du mannitol et de l'acide citrique à doses non significatives ?
  7. Est-ce raisonnable d'attribuer des effets indésirables à un éventuel mécanisme d'action (je parle pour la patiente experte...) ?
  8. Est-il sensé d'affirmer (je parle pour une des associations de patients) que le médicament Levothyrox est devenu "dangereux" ? La pétition pour le retour à l'ancienne formule est un modèle de désinformation (voir LA) qui pourrait faire croire que les rédacteurs de l'ANSM et ceux de la pétition proviennent du même moule idéologique.
  9. Faut-il remettre en cause l'idée consensuelle (ou presque) selon laquelle les génériques ne peuvent entraîner d'effets indésirables significatifs ? Car, dans le cas de Levothyrox, la nouvelle formule est stricto sensu un princeps générique du princeps.
  10. Pourquoi, à cette occasion, ne pas avoir rappelé que la prise, l'horaire de prise, la possible interférence avec le bol alimentaire, sont des facteurs déterminants pour l'absorption et donc la bio-disponibilité de la molécule ? Et que ces modifications de prises et de bol alimentaire peuvent entraîner des variations de TSH tout en continuant de prendre le même médicament du même lot ? Les endocrinologues le savent. Les médecins généralistes le savent également.
  11. Pourquoi ne pas informer sur le fait que les indications cliniques de prescriptions rendent compte de situations extrêmement différentes ? Une substitution post thyroïdectomie chirugicale pour cancer (le sur diagnostic, le surtraitement, voir LA) n'est pas de même nature que la prescription de levothyrox au cours de l'équilibration d'un Basedow ou lors d'une dysthyroïdie liée à l'amiodarone...
  12. Quid des génériques de Levothyrox dont on sait qu'ils posent des problèmes de biodisponibilité depuis la générication aux Etats-unis d'Amérique en 2003 (cf. supra) ? On rappelle que le générique Teva a été en France retiré du marché pour des problèmes de stabilité.
  13. Pourquoi, à cette occasion, ne pas s'interroger sur le sur diagnostic et sur le sur traitement par Levothyrox ? 
  14. Pourquoi parler du rôle délétère des medias alors que les medias ne sont là qu'en bout de processus et qu'il est normal qu'ils n'en sachant pas plus que les experts de l'ANSM ?

Les experts de l'Agence auraient dû se rappeler, mais lisent-ils autre chose que la littérature qui leur brosse le poil dans le bon sens ?, qu'il y avait eu un précédent que j'ai décrit abondamment en 2010 sur ce blog : LA. Un certain nombre des faits qui sont décrits aujourd'hui était déjà expliqué (pardon pour cette auto-citation). Le texte du billet de 2010, non modifié, est en italique.

Les faits et leurs commentaires dans le BMJ.

  1. Jusqu'à 2007 les 70000 Néo-Zélandais qui avaient besoin d'un traitement hormono-substitutif par la thyroxine se voyaient prescrire de l'Eltroxin commercialisé par les laboratoires GlaxoSmithKline (GSK) et cela faisait trente ans que cela durait. GSK décide en 2007 de transférer l'usine de fabrication d'Eltroxin du Canada vers l'Allemagne. A cette occasion le contenu des excipients change et l'aspect de la nouvelle formulation n'est plus la même pour le gravage, la taille et la couleur. Selon certains rapports, disent les auteurs néo-zélandais, le goût et la vitesse de dissolution sur la langue changent aussi. Quant au principe actif, la thyroxine, il reste inchangé et continue à être fabriqué en Autriche (nous vivons une époque formidable !). La nouvelle formulation est donc désormais délivrée aux patients à partir de 2007 2008 et le taux de signalement d'effets indésirables est multiplié par 2000. Il est à signaler qu'il n'y a pas d'autre formulation proposable aux patients. On passe, disent les auteurs, de 14 notifications en 30 ans à 1400 en 18 mois. Qu'est-il arrivé ? 

  2. Les effets indésirablesLeur fréquence : les premiers effets indésirables ont été rapportés en octobre 2007, il y en avait 294 en juillet 2008 et le pic (492) a été atteint en septembre 2008 pour décroître ensuite : 177 en octobre et 21 en novembre. Il est à noter que dans les autres pays où la substitution s'était faite il avait été noté une augmentation des effets indésirables mais sans commune mesure avec ce qui se passait en Nouvelle-Zélande. Leur nature : à peu près la moitié d'entre eux (prise de poids, fatigue, myalgies, arthralgies et dépression) peuvent être rapportés à l'hypothyroïdie mais pour d'autres fréquemment rapportés, cela n'est pas le cas : conjonctivite, douleurs oculaires, maux de tête, prurit, éruptions cutanées, vision anormale ou trouble, nausées, troubles digestifs.
  3. Analyse des causesFacteurs intrinsèques. L'Agence néo-zélandaise (Medsafe) a fait procéder à de nouvelles analyses de bioéquivalence qui ont conclu à une conformité acceptable de la nouvelle formulation et au fait que les excipients contenus étaient bien ceux annoncés par la firme. Les auteurs disent ceci : 5 % des effets pouvaient en théorie être attribuables à la nouvelle formulation. Pas plus. Facteurs externes. a) La substitution de formule s'est produite à un moment où l'on accusait l'Agence néo-zélandaise gérant le budget de la santé (Pharmac) de casser les coûts. b) Des bruits sur le Web prétendaient que la nouvelle formulation était fabriquée en Inde, qu'elle contenait des OGM, et du glutamate. Le rôle d'un "champion". Un pharmacien d'une petite ville de Nouvelle-Zélande s'est fait l'avocat des patients souffrant d'effets indésirables liés à la nouvelle formulation, a été largement interrogé par les medias et a cherché à trouver un produit de substitution pour les soulager. les auteurs soulignent le rôle néfaste qu'un tel champion, professionnel de santé d'une petite ville s'opposant à Big Pharma, peut avoir in fine. Le rôle des médias. Les auteurs insistent sur la couverture journalistique de l'affaire, font des analyses géopgraphiques sur relations entre le nombre d'effets indésirables dans une région de Nouvelle-Zélande et le nombre d'articles de journaux publiés localement. Ils citent une comédie musicale à succès parlant de malfaçons de médicaments en Inde. Ils citent le web et ses rumeurs, ses fausses informations mais, paradoxalement, ne font aucune mention du quantitatif, ce qui ruinerait leurs inférences locorégionales. Le facteur patient. Les auteurs parlent de labilité émotionnelle chez les patients hypothyroïdiens et donnent des informations très mécanicistes et assez peu respectueuses des plaintes des patients.
  4. Les conclusions des auteurs : méfions-nous à l'avenir des changements de formulation et de l'introduction des génériques qui peuvent induire des peurs chez les patients qui sont coûteuses pour les gouvernements et pour les patients impliqués.
J'avais fait des commentaires sur cet article et j'avais souligné, déjà, le mépris pour les patients.

Je voudrais souligner ici le grand mépris de cet article pour les patients qui sont au mieux considérés comme des victimes et, au pire, comme des crétins. 
Cette affaire est symptomatique, me semble-t-il, du rationnalisme considéré comme une science.
On remarque ici que la globalisation des marchés est une donnée qui ne semble choquer personne. Le principe actif est fabriqué en Autriche, les comprimés sont fabriqués en Allemagne et l'on ne nous dit pas d'où vient l'encre, combien de pétrole est dépensé pour les acheminements et si les travailleurs sont des immigrés ou s'ils sont fabriqués sur place, et cetera... C'est la rationnalisation du monde au moindre coût (apparent). 
Quant à la modification des excipients, il n'est pas inconsidéré de ne pas la prendre à la légère, bien que son influence puisse être extrêment minime. Mais elle peut être à la base d'une remise à plat des conditions de prescriptions. 
D'autre part, nos universitaires néo-zélandais n'ont jamais entendu parler, ni de l'effet placebo, ni de l'effet nocebo. 
Car, inférer à partir d'études de bioéquivalence, qu'il n'est possible d'expliquer que 5 % d'effets indésirables puisque la bioéquivalence est de 5 % est assez renversant. On rappelle à ces auteurs que l'effet placebo, en moyenne, quelle que soit la pathologie, est assumé à 30 % Le fait est têtu. C'est à dire que la prescription d'une molécule active, ici la thyroxine, si elle entraîne une amélioration moyenne de 70 % des symptômes, 30 % de l'amélioration est liée à l'effet placebo. 
Et ainsi, dans notre affaire, les patients, toutes choses égales par ailleurs, ont pu voir leur capital placebo partir en fumée en raison de leur incompréhension sur le changement de formulation, ses raisons exactes, sans compter les rumeurs et les canulars et l'ambiance générale de défiance qui pouvait régner en Nouvelle-Zélande.
Nous ne disposons pas de chiffres aussi précis sur l'effet nocebo mais il n'est pas improbable de croire qu'il peut expliquer la flambée d'effets indésirables constatés après le changement de formulation, sans tenir compte des autres facteurs rapportés par les auteurs. N'oublions pas que le changement d'aspect, de goût, de vitesse de dissolution, sont des facteurs étudiés avec attention par l'industrie pharmaceutique pour mieux faire vendre ses produits et les faire mieux accepter. Il doit bien y avoir une raison. 
Les auteurs ont aussi oublié l'effet mimétique (ils ont décrit ses moyens mais pas son mécanisme) et nous leur conseillons, sur la Mimesis et le Désir Mimétique, de lire René Girard
Les auteurs ont aussi minimisé l'effet du web qui semble être un facteur déterminant dans la propagation des bruits et rumeurs, facteur désormais plus important que celui des medias traditionnels. 
Mais cet exemple d'école, tout autant que ce que je rapportais sur les Antennes Relais, rend la réflexion sur la générication de la médecine encore plus nécessaire. Nous ne pouvons faire l'économie d'un débat autre qu'idéologique sur les génériques, sur les procédures drastiques non appliquées, mais, plus généralement, sur l'inhumanisation des rapports médecins malades. 
Le malade n'est pas au centre des préoccupations du système de soins. Cet article en est le reflet.
A l'heure de la prescription en dci mise en place à la va-vite, comme tout ce que fait le gouvernement en matière de santé publique, pourquoi ne pas s'interroger sur la thyroxine néo-zélandaise ? 
Nous remercions les auteurs pour ce papier mais l'instruction n'est pas close.

Il est donc attristant de constater que des excipients sans effets notoires puissent provoquer des effets indésirables que les autorités pharmacovigilantes vont rapidement classer, comme ils classent les effets indésirables non sévères et non rapportables à un mécanisme d'action (classement vertical) et cette situation va entraîner une réaction en chaîne : 
  1. Comme les effets indésirables sont "impossibles", ils n'existent pas. 
  2. Comme les effets indésirables n'existent pas ils sont d'origine fantasmatique et hystérique (cela tombe bien la majorité des patients prenant Levothyrox sont des patientes).
  3. Les patient.e.s sont coupables.
  4. Les patients.e.s sont des nul.le.s
  5. Les prescripteurs (médecins) ont toujours raison même quand ils ne connaissent pas le sujet et, surtout, quand ils le connaissent.
  6. Les agences gouvernementales ont toujours raison et ne remettent jamais en cause leurs affirmations.
  7. Les associations de patients ne sont pas infaillibles, ne représentent parfois qu'elles-mêmes, et se tirent la bourre entre elles. 
Il serait donc temps que :
  1. Les autorités sachent que la médecine étant devenue consumériste il faut se mettre à l'heure du consumérisme.
  2. Les prescripteurs sachent que les patients ne sont pas des veaux et qu'il ne suffit pas de dire, "le principe actif est le même" pour que l'efficacité soit la même quel.le que soit le/la patient.e
  3. Les patients sachent qu'il n'existe pas de corrélation directe entre un taux de TSH et le bien-être d'un individu fût-il malade.
PS du 12 septembre 2017 : lire absolument le billet de Dominique Dupagne sur la bio-équivalence : ICI.

mercredi 26 juillet 2017

Vinay Prasad sur les débats qui animent twitter


Vinay Prasad fait un travail magnifique d'éclaircissement sur un certain nombre de faits qui agitent les sphères de l'oncologie, du dépistage, des traitements, du coût des traitements. Je ne le connais pas personnellement mais je lis ce qu'il écrit (il écrit beaucoup). Il nous enthousiasme sur le niveau de réflexion que des médecins, dans leur propre spécialité, ici l'hématologie et l'oncologie, peuvent atteindre  dans un système de santé aussi étranger au nôtre que celui des Etats-unis et nous déprime quant à l'absence de médecins critiques dans notre propre pays. @VinayPrasad82 pour le suivre sur twitter.




Voici la traduction d'un tweet qui m'avait bien plu. 

Le dépistage des cancers n'a jamais démontré sauver des vies, ce qui signifie améliorer la mortalité globale, et a des conséquences néfastes majeures incluant des faux positifs et des sur diagnostics et nous devons le juger par des preuves provenant d'essais randomisés. Voir ICI pour l'article original (sur abonnement) et LA pour un commentaire. [1]


Le coût des médicaments est hors de contrôle, il n'est pas régi par les forces traditionnelles du marché, il est mauvais pour les patients et la société, et des réformes sont nécessaires (LA).

La FDA états-unienne a assoupli les standards d'autorisation de mise sur le marché fondée sur des critères de substitution (ce qui, en soi, n'est pas la fin du monde) mais en les couplant avec l'abandon des études marketing post commercialisation, ce qui est mauvais pour les patients (ICI). [2]

Le financement de la recherche est majoritairement non fondé sur les preuves et arrose de façon disproportionnée les mêmes fausses  idées et les mêmes personnes (LA). [3]

L'oncologie de précision et les autres "traitements personnalisés" paraissent magnifiques mais manquent de données robustes issues d'essais randomisés.  Le seul essai dont nous disposons est négatif ( LA). [4]

Les nouvelles molécules sont souvent annoncées comme des miracles mais la réalité est typiquement qu'il y a un certain nombre de réserves majeures, de distorsions dans le protocole, des biais et des manipulations derrière tout cela (ICILA, et encore LA). [5]

Les conflits d'intérêts sont vraiment un problème. 


Notes.

[1] Rappelons qu'en France les résistances sont fortes et que l'INCa a exercé des pressions intolérables pour que l'on n'abandonne pas en rase campagne le dépistage organisé du cancer du sein.
[2] les études post marketing (après commercialisation) ne paraissent pas devoir être très conclusives puisqu'elles sont menées dans l'immense majorité des cas par l'industrie pharmaceutique voir ICI ; mais, pire encore, quand les études post commercialisation montrent des résultas négatifs, les produits ne sont pas retirés du marché.
[3] Les recherches sont menées en fonction des marchés porteurs (nombre de patients putatifs élevé) et/ou dans des marchés de niche où le faible nombre de patients traités sera dans un premier compensé par des prix très élevés et dans un second par une extension des indications (alias saucissonnage). Voir à ce sujet l'excellente communication de Marc-André Gagnon lors des Pilules Prescrire 2015 : ICI.
[4] L'oncologie de précision est pourtant considéré comme l'avenir de l'oncologie par tous les experts mais les experts sont surtout payés par l'industrie pour des opérations promotionnelles justifiant a priori une efficacité non démontrée et l'obtention de prix faramineux.
[5] Big Onco organise une messe annuelle sous le patronage de l'ASCO durant laquelle elle fait du pré marketing à base d'abstracts aux résultats rarement confirmés, de communications tronquées et truquées à laquelle est convié le gratin des oncologues et le gratin des journalistes internationaux.

jeudi 29 juin 2017

La médecine consuméro-ubériste est là. Avec quelques réflexions annexes. Histoire de consultation 200.


Madame A, 50 ans, elle en paraît beaucoup plus, consulte avec sa dernière fille de 13 ans qui l'accompagne pour la traduction.

Madame A est arrivée en France il y a plus 20 ans et parle trois mots de français. Elle est originaire de l'Anatolie profonde.

Madame A, merci de ne pas être choqué par ma taxinomie, fait partie d'un groupe de femmes fréquentant le cabinet dont la frustration intersectionnelle s'exprime par une hypochondrie tenace qui est devenue un mode de vie et qui se nourrit de la compétition affective existant entre ses enfants (celui ou celle qui s'occupera le plus de sa mère), du désintérêt marital, de l'isolement affectif, de l'isolement familial et linguistique, de l'incompréhension du monde dans lequel elle est plongée (changement de culture), et cetera.

J'ai déjà évoqué de nombreuses fois ces cas pour lesquels je n'ai pas de solution. La barrière linguistique et culturelle étant infranchissable pour tenter d'initier un dialogue. Je suis par ailleurs étonné par le fait que ces cas touchent tout autant des femmes maghrébines que turques mais plus rarement des femmes de l'Afrique sub saharienne (musulmanes) dont l'expression du mal être est différente (dépression "vraie" voire "délire").

Le dialogue entamé se fait par l'intermédiaire d'un tiers, rarement le mari, presque toujours les enfants, filles ou garçons, plutôt filles, ce qui est encore plus malaisé : comment faire comprendre aux enfants, surtout quand ils ont treize ans, que le mal être de leur mère pourrait remettre en cause les structures familiales d'appartenance, qu'il s'agit d'une hypochondrie de compensation, d'une manifestation d'angoisse existentielle, et que cela ne peut conduire qu'à des catastrophes médicales. Mais dans le cas des filles, cette jeune fille de 13 ans qui fréquente l'école de la République, il existe un autre problème (je ne généralise pas mais cette situation est tellement fréquente) qui est la jalousie de la mère à l'égard des filles qui ne sont plus soumises à toutes les contraintes qu'elles ont connues : mariage froc, perte de sa propre famille, exil. 

Il est aussi intéressant de constater que dans ces cas de non communication linguistique, la seule réponse possible est la prescription de médicaments ou d'examens complémentaires. Et ainsi, par une sorte de rapprochement paradoxal, ce sont les populations les plus aisées et les populations les moins intégrées qui demandent le plus de "médecine". C'est le consumérisme, idiot ! Les populations les moins intégrées ne peuvent comprendre le discours déprescripteur voulant mettre un terme à l'emballement mimétique familial (comme si on leur faisait comprendre une fois de plus en leur refusant de la médecine qu'ils appartenaient aux classes défavorisées) et les populations des groupes socio-professionnels aisés et cultivés n'en ont que faire, ils ont déjà leur opinion, des conseils d'un médecin généraliste puisque les examens complémentaires et les médicaments sont l'expression du progrès.

Je voudrais, en passant, souligner la complexité culturo-anthropo-religieuse de la Turquie, loin des clichés résumant le pays au kémalisme, à l'islam ou à la grosse minorité kurde. En Turquie il existe une diversité religieuse et intellectuelle très forte.

Revenons à notre consultation.

Madame A, qui est une ancienne patiente de mon ex associée, a toujours mal à la tête.

Elle a mal à la tête de façon constante.

Interrogatoire compliqué, comme on l'a vu, pression artérielle normale, examen clinique (difficile) dans le même métal, et donc : "Ma mère voudrait qu'on lui fasse un scanner." Son dossier est rempli de prises de sang, d'examens chez les spécialistes, et cetera.

Je lui dis qu'elle n'en a pas besoin et que je ne le prescrirai pas.

Cela se passe mal. La patiente n'est pas contente, la fille aussi mais un peu moins. Fin de la première partie.

La suite.

Une semaine après, Madame A revient en consultation avec sa fille de 13 ans et son mari (que je vois pour la première fois en 10 ans).
Je reconnais la pochette semi cartonnée des urgences.

Avant hier elle est allée aux urgences. Elle avait vomi dans la matinée.

Le compte rendu des urgences, automatisé (on indique bien qu'on lui a mis un bracelet d'identification), est désespérant de "gravité". Quoi qu'il en soit : ELLE A EU "SON" SCANNER.

A votre avis, le scanner, il est :
  1. Normal
  2. Normal
  3. Normal
Je sais, je sais, on n'a rien résolu. Mais je parie un jeton de caddie Auchan contre une Rolls Royce Silver Shadow que la prochaine fois qu'elle viendra au cabinet elle demandera, par le truchement de sa charmante fille, une IRM.



jeudi 22 juin 2017

Déprescription annonciatrice. Histoire de consultation 199.

Jérôme Bosch. Le jardin des délices (1503-1504)

Madame A, tout de blanc vêtue, le deuil d'une femme d'origine marocaine, vient chercher son dossier.

Madame A vient aussi me remercier encore une fois (je rougis mais je suis sans empathie vis à vis de moi-même, c'est plus prudent) pour le suivi à domicile que nous avons mené auprès de son mari mourant  (surtout l'association de soins palliatifs Odyssée que j'avais proposée à la famille, j'étais le médecin traitant) et jusqu'à ce qu'il décède à domicile.

Madame A est venue chercher son dossier car elle était la patiente de mon associée qui est partie.

Madame A, 67 ans, ne peut être suivie par un médecin homme. Est-ce parce qu'elle est musulmane et qu'elle porte le voile et un peu plus ? Sans doute. Mais il y a des femmes non musulmanes qui ne veulent pas être suivies par un médecin homme. Enfin, ce n'est pas le sujet.

J'ai fait entrer la patiente dans mon bureau, entre deux rendez-vous, pour ne pas que tout se passe dans le couloir, je lui demande comment elle va, comment cela se passe, et cetera. Elle sourit et fait bonne figure.

Je sens qu'elle veut me dire un truc.
" Vous savez, il y a quelque chose qui m'a choqué..."
Cela commence mal.
"Enfin, nous avons été choquées, ma fille et moi.
- Allez..."
Elle réfléchit.
" Le jour où vous avez arrêté le médicament pour le cholestérol, nous avons compris que c'était fini.... Cela a été dur."

Le patient souffrait non seulement d'un cancer mais était hypertendu et diabétique non id.

Il m'avait paru judicieux, l'ambiance était assez compliquée, une alimentation orale difficile, un envahissement abdominal, une pression artérielle peu vaillante, de simplifier le traitement, de déprescrire.

Je n'étais pas aidé par l'oncologue qui parlait encore de rétablissement de la continuité trois mois avant le décès, par le chirurgien qui abondait, par la famille qui y croyait encore.

Je me rappelle cette séance d'exorcisme au domicile du patient, hors de la présence du patient, avec sa femme, deux des filles et un fils. Je disais en substance : "Ne croyez ni l'oncologue, ni le chirurgien, votre mari, votre papa, il va mourir et le seul rôle que j'ai à jouer c'est qu'il souffre le moins possible, qu'il soit assez conscient pour comprendre combien vous l'entourez et combien vous l'aimez, et cetera, et cetera. Une des filles : "Mais pourtant, docteur, on nous avait dit..."

Est-ce qu'il est si difficile, oui, c'est très difficile, de dire que c'est foutu ?

Est-ce si difficile de ne pas proposer un traitement de troisième/quatrième ligne, compassionnel, quand on est oncologue, chirurgien ou marchand de frites ?

Voici le rôle du bobologue : annoncer à des patients et à des familles que la mort arrive et qu'il ne sert à rien de tenter de se distraire l'esprit. 

dimanche 18 juin 2017

Madame Agnès Buzyn et les vaccins : deux poids, deux mesures. De qui se moque-t-elle ?

Balthus (1908-2001). Jeune fille à la chemise blanche. 1955


Dans une déclaration au journal Le Parisien (ICI) Madame Agnès Buzyn trouve inacceptable que la rougeole ait tué 10 enfants depuis 2008 en France.

Qui peut penser que cela serait acceptable ? A part la société philanthropique des morbillivirus, association de défense des minorités et au nom de l'intersectionnalité.

Elle ajoute même "On a le même problème avec la méningite. Il n'est pas supportable qu'un ado de 15 ans puisse en mourir parce qu'il n'est pas vacciné" en ne disant pas que le vaccin en question ne protège pas contre toutes les méningites dont meurent majoritairement les adolescents.

Bon. Et elle en profite pour parler d'un problème de Santé publique qui justifie selon elle l'obligation vaccinale. Ne polémiquons pas sur le fait qu'il est peu certain que la vaccination obligatoire permette qu'aucun enfant ne meure de la rougeole.

Pardonnons lui de ne pas être une spécialiste en vaccinologie et qu'elle soit influencée par des experts qui, selon elle, ne peuvent être bons que s'ils sont payés par l'industrie pharmaceutique. 

Mais Madame Agnès Buzyn, hémato-oncologue, voir ICI ma notice biographique prémonitoire, dont voici un court résumé biographique (source wikipedia) "À partir de 2008, elle occupe des postes importants au sein d'institutions publiques liées à la santé et au nucléaire : présidente du conseil d'administration de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (2008-2013), membre du Comité de l'énergie atomique du Commissariat à l'énergie atomique (2009-2015), membre du conseil d'administration (2009), vice-présidente (2010) puis présidente de l'Institut national du cancer (depuis 2011), présidente du collège de la Haute Autorité de santé (depuis 2016)." qui montre combien la médecine académique s'attribue dans un mouvement endogame centripète les meilleurs postes (on rappelle que son mari est directeur de l'INSERM) ne s'est jamais occupé ou n'a jamais considéré dans des déclarations publiques que des milliers d'amputations de seins de femmes étaient injustifiées.

Vous pourrez consulter sur ce blog comme sur celui de JB Blanc, de Sylvain Fèvre, de Marc Girard, ou du Formindep par exemple, tous les billets que nous avons consacrés à ce sujet montrant combien le sur diagnostic et le sur traitement des cancers du sein ou prétendus tels est un vrai problème de Santé publique.

Madame Agnès Buzyn ne dit mot.

Pourtant, elle a initié la concertation citoyenne (ce mot est horriblement sans sens commun) sur la cancer du sein dont les conclusions ont été défigurées et contestées. Voir l'article de JP Rivière : LA

Un article récent, danois, mené sur 30 ans, est particulièrement préoccupant : il montre que chez les femmes éligibles au dépistage organisé le sur diagnostic est de 24,8 % (une sur quatre !, hein, pas 8 femmes depuis 2008 !) et chez les femmes plus jeunes de 48,3 % Vous avez lu ? Voir LA.

Il ne s'agit pas d'une entreprise de diversion. 

Si je parle du sein ce n'est pas pour ne pas parler de la rougeole.

Pour la rougeole et le reste, je rappelle la série de billets de CMT : LA.

Si je parle de cela c'est pour dire que notre Ministre ne place pas les priorités au bon endroit.

Mais elle est aidée en cela par tous les bons apôtres de la vaccinolatrie qui font une grande économie de leur cerveau en répétant partout les argumentaires (alias les éléments de langage) colportés par l'industrie vaccinale et ses obligés corrompus.

Répondre à ces corrompus a déjà été fait par CMT.

Mais aucune de ces personnes ne sait lire.

Voici un florilège.


Le Conseil de l'Ordre des médecins, celui qui vient d'adouber le professeur Aubier malgré ses liens d'intérêts avec la firme Total, a lui publié un webzine (ICI) dont le niveau suppose que sa cible marketing est un élève du cours moyen première année.

Nous avons aussi Les Décodeurs qui se sont fait la spécialité d'écrire plus de sottises qu'il n'est permis et dont la compétence est celle du professeur Joyeux (LA).

Article dans Atlantico où un ultra libéral, Claude Le Pen, est favorable à l'obligation. ICI Quant à Stéphane Gayet, il dit une bêtise par phrase, on voit sa bio LA.

Enfin, un complotiste de l'anti complotisme, un certain Acermendax (Thomas C Durand), a publié une vidéo sur le net et vous pourrez en lire le texte (ICI) qui est arrogante, paternaliste, méprisante, mensongère et mal informée. Il est terrible que pour épondre à cette maman qui pose des questions pas si idiotes que cela mais qui  affirme des choses délirantes il faille que l'auteur mente. Nous hésitons entre la bêtise, la malhonnêteté ou la simple incompétence. Cela me rappelle tellement ce texte de Marc Girard : ICI. Je rajoute ceci : lire les commentaires de CMT qui montrent que le anti hoax fait partie d'une association de scientifiques pro OGM !

L'objectif prioritaire de Santé publique de Madame Buzyn est celui-ci : 10 enfants sont morts de la rougeole depuis 2008 !

En 2008, le CépiDc de l'Inserm a recensé 3 095 morts d'enfants de moins d'un an en France, soit un taux de mortalité de 374,9 pour 100 0005. 50,3 % de ces morts étaient dues à des affections dont l'origine est la période périnatale, ce qui représente 1 557 enfants. 20,7 %, soit 640, étaient dues à des malformations congénitales. 14,6 %, soit 452, étaient dues à une mort subite du nourrisson ou à une cause inconnue.

PS du 21 juin 2017.
J'étais passé à côté d'un texte savoureux, une Tribune du journal Le Monde auquel je continue à être  abonné pour des raisons que j'ai fini par ignorer, signée par quelques pontes vaccinolâtres dont l'insurpassable Professeur Fisher et le non moins respectable Robert Cohen, pour défendre l'obligation vaccinale (ICI) mais mon ami Marc Girard ne l'avait pas laissée passer, la Tribune : ses commentaires valent leur pesant de cacahuètes : LA.
Sans oublier Dominique Dupagne : LA.
Bonnes lectures.


lundi 12 juin 2017

CMT (conclusion) : Est-il légitime de rendre obligatoires onze vaccins chez le nourrisson ?

Voici la conclusion de cette saga sur les vaccins.

Vous pouvez reprende ICI dès le début.


Conclusion

Il faut donc se rendre à l’évidence et admettre que l’on ne sait pas tout au sujet des agents infectieux et que les bénéfices d’une vaccination généralisée restent pour le moins incertains et imprévisibles, tandis que ses risques sont importants relativement aux bénéfices attendus et sont largement sous-estimés en raison de l’organisation de la pharmacovigilance et de l’affectation des moyens.

La mortalité des moins de 15 ans a diminué d’environ 40% pendant les 15 dernières années en France. On ne peut pas en dire autant de celle liée aux maladies à prévention vaccinale, nous avons vu pourquoi.

La rougeole, maladie considérée comme bénigne il y a cinquante ans en Europe et aux Etats-Unis, est aujourd’hui utilisée comme épouvantail, sur la base de faits dramatisés et tronqués, pour imposer l’idée qu’il n’y aurait point de salut hors de l’obligation vaccinale.

D’autre part, la campagne mettant en avant une supposée défiance des populations vis-à-vis des vaccins est sans fondement dans la réalité et simplement destinée à préparer le terrain pour cette obligation.

L’idée d’une obligation vaccinale étendue progresse en Europe. Ainsi, le 20 mai 2017, l’Italie a rendu obligatoires 12 vaccins pour les nourrissons.[1] En excluant de cette obligation le vaccin contre la pneumocoque mais en y incluant le vaccin contre la varicelle, que le CSHPF avait refusé de généraliser en France il y a quelques années en raison de son très faible intérêt et le vaccin contre le méningocoque du groupe B, qui présente des effets indésirables redoutables, comme nous l’avons vu.
L’obligation vaccinale est extrêmement favorable aux laboratoires pharmaceutiques, qui bénéficient alors de marchés captifs, sans aucune obligation en contrepartie, pas même celle d’approvisionner régulièrement ces marchés en vaccins. En cas d’obligation, les laboratoires pharmaceutiques ne seraient   même pas tenus d’indemniser les victimes d’accidents, et celles-ci seraient indemnisées au coup par coup par l’Etat, comme c’est le cas actuellement, avec les difficultés que ceux qui ont été victimes d’effets indésirables graves connaissent bien.

Pour la plupart des vaccins que j’ai analysés ici, ceux contre la coqueluche, contre le pneumocoque, contre l’hépatite B, contre le méningocoque, les rapports bénéfice–risque et coût-efficacité d’une vaccination généralisée est manifestement et fortement défavorable, en tout cas en France. Seuls les scenarii éternellement optimistes du Comité technique de vaccination et des experts, s’employant à surestimer les bénéfices et à ignorer les risques, peuvent faire croire le contraire.

Pourquoi ce fait reste-t-il largement ignoré dans un débat public polarisé entre anti-vaccinalistes et vaccinolâtres ? Parce que ces deux mouvances ont en commun un positionnement essentiellement idéologique et dogmatique qui les empêche de prendre en considération les faits établis scientifiquement dans leur complexité.

L’époque actuelle, héritière de la révolution industrielle, est marquée par sa technolâtrie et l’illusion que la technique permettra à l’Homme d’acquérir la maîtrise absolue de son environnement et de son corps. La mythification  des vaccins en est une manifestation parmi d’autres.

La désinhibition modernisatrice, ce concept élaboré par Jean-Baptiste Fressoz, qui englobe et permet d’expliquer une grande partie des défis du monde moderne, avec ses catastrophes annoncées est aussi à l’œuvre, à une échelle plus modeste, pour les vaccins. On le voit à travers l’exemple des vaccins contre le rotavirus, où des effets indésirables létaux, qui imposaient le retrait du vaccin au début des années 2000, prêtaient à discussion et à controverse quelques années plus tard et n’empêchent plus désormais les experts de recommander chaudement la généralisation de ce vaccin.

La préférence pour le présent, qu’on peut énoncer en langage courant en disant qu’"un tiens vaut mieux que deux tu l’auras", est jugée légitime et parfaitement intégrée dans le domaine de la finance mais est inversée lorsqu’il s’agit de vaccins. Parce que, à gravité égale, les conséquences d’un effet indésirable grave survenant immédiatement chez un individu sain sont systématiquement minimisées par les experts, tandis que les conséquences des maladies, lointaines et hypothétiques pour les vaccinés, sont dramatisées à l’extrême, comme le montre le cas de la rougeole.

On n’ose même plus aborder les questions éthiques et morales, alors que les leaders d’opinion, les  experts, en communion parfaite avec les laboratoires pharmaceutiques s’emploient, avec un franc succès, à faire du lobbying, afin de banaliser la vaccination qui reste pourtant un acte médical.

Un acte médical dont la dangerosité augmente et le rapport bénéfice-risque devient de plus en plus aléatoire, au fur et à mesure que les procédures de mise sur le marché se font toujours plus « simplifiées » et « accélérées » et que la dégradation  du système de surveillance tend à rendre les effets indésirables de moins en moins visibles.

Les critères définissant le succès ou l’échec d’un vaccin généralisé demeurent particulièrement flous  et ne permettent pas d’envisager la suspension des recommandations en cas d’échec. Quels sont les critères d’efficacité et comment les évalue-t-on ? Quel  est l’écart entre les risques que le vaccin fait encourir aux nourrissons et les bénéfices observés qui serait intolérable ? Personne ne le sait et dans les faits, cet écart se réduit avec le temps et les nouveaux vaccins. Le rapport bénéfice risque peut même être négatif, sans que cela entraîne de décision d’arrêt de la vaccination de masse. Ce flou autorise toutes les dérives désinhibitrices, qui ne manquent pas de se produire et tous les échecs sont attribués à une cause unique : le défaut de couverture vaccinale. Les experts, pour leur part, ne sont jamais responsabilisés ou sanctionnés pour leurs erreurs, jouissant du soutien constant des laboratoires et de l’oreille attentive des ministres. Ils peuvent donc continuer à agir en toute irresponsabilité.

Les critères d’efficacité lorsque des vaccins sont généralisés peuvent aussi changer au gré des déconvenues. Un jour, le vaccin contre le pneumocoque est présenté comme étant destiné à lutter contre les infections invasives à pneumocoque. Le lendemain on s’aperçoit qu’il en augmente la fréquence alors on décide que son véritable intérêt est de réduire la résistance aux antibiotiques.

Dans notre histoire pas si lointaine, ce que la raison n’avait pas pu accomplir, la désinhibition au risque, la naissance du corps expertal le réussit. Mais les experts se sont laissés fasciner par l’objet technique et par leur propre autorité et ont oublié que la technique n’était pas la finalité mais seulement un moyen. Désormais, aux biais idéologiques, viennent se greffer les nombreux conflits d’intérêts savamment entretenus par une industrie pharmaceutique particulièrement rompue aux techniques d’influence et de manipulation. Et alors les corps, y compris, et surtout ceux des enfants peuvent se voir transformer en de simples outils de valorisation marchande.

Les experts d’aujourd’hui, comme ceux d’autrefois, s’emploient, de par leur entre-soi, de par les rapports financièrement, politiquement et académiquement fructueux qu’ils entretiennent avec l’industrie pharmaceutique à organiser leur propre aveuglement et, par suite, l’ignorance des populations.

Les bénéfices des vaccins sont rares parce que le risque infectieux est devenu rare. Ils sont fragiles et transitoires parce que le monde vivant est complexe. La technolâtrie implique une vision simpliste du monde et dans le même temps la négation constante  des risques  que la technique comporte alors que ceux-ci ne sont pas « accidentels » mais lui  sont consubstantiels.

Lorsque ces vérités commencent à apparaître aux yeux d’une population plus éduquée, et que celle-ci commence à s’interroger légitimement, la brutalité de l’autorité expertale éclate et on cherche à imposer par la contrainte ce qu’on ne peut pas obtenir par la persuasion dans un mouvement à la fois autoritaire et  marqué par l’arbitraire.

La raison n’est pas la « défiance » ou la « baisse de la couverture vaccinale ».

La raison de cette contrainte est à chercher ailleurs : dans l’urgence, toujours plus impérieuse, des profits, et dans l’absence d’arguments rationnels, factuels et scientifiques, capables d’emporter notre conviction.

Seule  la notion d’urgence sanitaire, la garantie d’un bénéfice majeur de santé publique, pourraient justifier la contrainte que l’Etat prétend exercer sur les parents en s’octroyant le droit de contourner l’autorité parentale qui leur est garantie par la loi.

Je pense avoir montré qu’il n’y a ni urgence, ni bénéfice majeur de santé publique à attendre de l’obligation vaccinale généralisée à onze vaccins pour les nourrissons.

 





[1] http://www.bbc.com/news/world-europe-39983799