La réponse est non !
- Sur les 854 diagnostics de mastoïdite seuls 36 % des enfants avaient eu un diagnostic d'OMA dans les trois mois précédents.
- Pendant les 16 ans de suivi l'incidence de la mastoïdite est restée stable (moyenne : 1,2 pour 10 000 enfants-année) alors que celle des OMA diagnostiquées a baissé de 34 % et la proportion d'enfants traités par antibiotiques a baissé de 77 à 58 %.
- Le risque de développer une mastoïdite était de 53 % inférieur chez les enfants ayant reçu des antibiotiques par rapport aux enfants n'en ayant pas reçu (1,8 vs 3,8 pour 10 000 épisodes)
- Cependant les auteurs indiquent qu'il faut traiter 4831 enfants ayant une OMA pour éviter une mastoïdite ; que la mastoïdite n'est plus aussi grave qu'auparavant ; et qu'il faut tenir compte de l'écologie globale : la résistance aux antibiotiques.
Quelques commentaires
- Les mastoïdites sont rares. Les OMA sont moins fréquentes. Le nombre de patients à traiter pour éviter une complication est considérable (à comparer au 238 patients naïfs à traiter par statine pour éviter un événement cardio-vasulaire fatal ou non). Sans parler des résistances aux antibiotiques dont la France est la championne d'Europe avec une corrélation très forte entre résistance et prescription.
- Les limitations de cet essai : les critères de diagnostic de l'OMA ont pu changer avec les années (dans un sens plus restrictif) ; les recommandations françaises font la différence entre enfants entre 3 et 24 mois et enfants plus âgés ; il n'a pas été fait de segmentation par âge.
- Les préjugés ont la vie dure et les données de l'EBM connues depuis de très nombreuses années ont du mal à faire leur chemin. Quelques exemples :
- On sait depuis un essai randomisé néerlandais (pays d'Europe où l'on prescrit le moins d'antibiotiques et notamment dans l'OMA) datant de 1981 (!!!) (2) et comparant en aveugle antibiothérapie seule, placebo seul, myringotomie + antibiotiques et myringotomie + placebo, qu'à trois mois il n'y avait aucune différence entre les groupes sur le critère audiogramme. Et pourtant la France était championne des paracentèses et de l'antibiothérapie systématique dans les OMA (ou prétendues OMA).
- On sait, au moins depuis 2002 (et une étude française, publiée en anglais, mais on comprend pourquoi : ) (3), que l'amoclav ne prévenait pas les OMA en cas de prescription "préventive" dans les affections virales du haut appareil. Et pourtant nombre de médecins affirmaient (affirment toujours) que c'est parce que l'on prescrit des antibiotiques dans les rhinopharyngites qu'on voit moins d'OMA (et de mastoïdites).
- On sait depuis la nuit des temps (les références me manquent, peut-être la Revue de Médecine de Byg Pharma...) que les gouttes auriculaires sont inutiles dans l'OMA (voire dangereuses) et pourtant elles continuent d'être commercialisées, prescrites et inutiles...
On peut gloser à l'infini sur la responsabilité de Byg Pharma mais on peut aussi s'interroger, indépendamment de considérations conflictuelles d'intérêts, sur les ORL français qui ont eu tant de mal à changer et sur les médecins généralistes qui ont continué (qui continuent pour certains) de croire à la bonne parole de ces champions de la paracentèse (fric) et de l'antibiothérapie (incompétence).
Les évidences (au sens français) ont souvent du mal à s'imposer et l'augmentation des résistances est un fait moins explicite que l'augmentation du nombre de cancers du sein après THS...
Références.
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