dimanche 15 mars 2009

CANCER DU SEIN : LES DEGATS DU DEPISTAGE




Ce sujet est sensible
: étant donné la pression médiatique issue de la pression médicale et relayée par la pression politique, il est difficile de dire que le dépistage généralisé du cancer du sein tel qu'il est pratiqué en France et dans la plupart des pays occidentaux est non seulement peu productif, ne diminuant pas la mortalité globale des femmes, mais qu'il est dangereux.


Ce sujet est sensible : dire que le dépistage généralisé du cancer du sein peut et doit être remis en questions, une majorité de cancérologues ne le comprend pas. Les cancérologues ne comprennent pas l'épidémiologie et la santé publique, la majorité des cancérologues ont une vision sentimentale, j'ajouterais : romantique, de la médecine. Et, surtout, une vision paternaliste.

Une vision sentimentale : la majorité des cancérologues ne parle que des femmes qu'ils ont "sauvées" et jamais des femmes qui ont été soumises au dépistage, qui ont stressé avant l'annonce des résultats, qui ont eu droit à des propos alarmants (du radiologue, du médecin traitant, du cancérologue, du chirurgien) alors qu'elles n'avaient rien du tout, qui ont été soumises à des biopsies répétées alors qu'elles n'avaient rien du tout, qui ont été amputées et radiothérapées alors que leurs lésions n'étaient pas du tout "sérieuses" ou n'auraient jamais évolué vers une complication mortelle...

Une vision paternaliste : une majorité de cancérologues savent mieux que leurs patientes ce qui est bon pour elles ; d'ailleurs, ils ne leur demandent pas leur avis, ils agissent, ils classent des images radiologiques comme cancéreuses, ils biopsient, ils amputent, ils font peratiquer la radiothérapie, donnent des chimiothérapies...

Un sujet sensible : tout le monde connaît dans son entourage une femme qui a eu un cancer du sein et qui a été diagnostiquée, sauvée ou qui aurait vécu moins longtemps si elle n'avait pas été traitée... Le grand public n'est pas obligé de comprendre des données épidémiologiques puisque même les médecins ne les comprennent pas ! Et encore plus : les spécialistes de ces cancers. Et l'idée du grand public est : il faut diagnostiquer les cancers pour les traiter et, avec les progrès de la médecine, il est clair que les choses iront mieux.

Un sujet sensible : la France n'est pas un pays démocratique. Où sont les controverses émanant des médecins sur la nocivité potentielle et réelle des campagnes généralisées de dépistage sans précautions, sans protocoles, sans contrôles, sans publication des résultats ? Où sont les articles anticonformistes que l'on trouve cette semaine dans le British Medical Journal critiquant la façon dont les campagnes sont menées, voire comment sont rédigées les brochures destinées aux patientes ? En France les arguments d'autorité ont valeurs de preuves. Et circulez, il n' y a rien à voir !

Je voulais vous parler plus particulièrement ce jour des cancers canalaires in situ. Qu'en faire ?

Quelques précisions
(cf. British Medical Journal) :
  1. le cancer canalaire in situ représente jusqu'au cinquième des cancers du sein dépistés mais seulement 2 à 5 % des tumeurs symptomatiques détectées avant le dépistage national par mammographie en Grande-Bretagne ;
  2. sa découverte dans 15 à 39 % des autopsies de routine suggère que nombre de tumeurs non invasives découvertes à la mammographie et enlevées secondairement n'auraient eu aucune incidence sur la mortalité des femmes ;
  3. Cette progression non obligatoire (et notamment dans les cancers de bas grade) pose un grave dilemme pour la gestion de ce type de tumeurs : une fois que le cancer a été détecté un traitement doit être proposé qui signifie une mastectomie dans 30 % des cas et une radiothérapie en cas de procédure conservant le sein ;
  4. De nombreuses patientes se voient donc proposer un traitement agressif pour des tumeurs de bas grade qui n'auraient jamais été mortelles...
  5. Cette pseudo maladie entraîne un surdiagnostic qui augmente artificiellement les chiffres du dépistage en comptabilisant des tumeurs bénignes.
Voici le témoignage d'une femme paru également dans le British Medical Journal. Il n'a pas valeur de preuve, il n'a pas valeur scientifique, il ne doit pas influencer le choix des décideurs et des donneurs d'argent, il existe, c'est tout, c'est un témoignage qui joue sur la corde sensible et qui est dans le même registre que celui des tenants du dépistage à tout crin qui parlent des vies sauvées mais pas des vies inutilement gâchées.

"Il y a quatre ans j'ai accepté mon premier rendez-vous pour un dépistage mammographique du cancer du sein et un cancer canalaire in situ a été diagnostiqué.
"En bref, la réalité de ce diagnostic a été celle de deux larges incisions, d'une mutilation partielle (excusez-moi, une mastectomie), d'une reconstruction, de cinq semaines de radiothérapie (une ballade de soixante miles et j'ai dû payer le parking), d'une infection chronique au niveau du site donneur, de quatre lambeaux de cellulite à ce même endroit, d'une reconstruction du mamelon, de sept anesthésies générales, et de plus d'un an d'arrêt de travail. Encore actuellement je ne suis capable que de travailler à mi-temps...
"En contraste, ce qui est arrivé à une amie avec une tumeur propre : tumorectomie, trois semaines de radiothérapie et un retour à plein temps au travail au bout de six mois. Et sans avoir à affronter la phrase : 'Je crois que vous devriez subir une mastectomie...'
"J'espère que mon cas a été considéré comme un effet positif du dépistage. Cependant mon expérience m'indique le contraire...

Je vous l'ai dit, ce témoignage n'a pas valeur de preuve mais il doit être pris en compte quand les medias évoquent les "triomphes" du dépistage (que les chiffres de Santé Publique démentent).

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