Charles Bukowski en 1978 sur le plateau d'Apostrophes |
Je lis dans LeFigaro.fr un entretien de Me Cécile Thibert avec Me Catherine Hill, ex épidémiologiste en chef à l'institut Gustave Roussy (1) : ICI. L'article est intitulé sobrement : "Cancer : "L'environnement joue un rôle très faible comparé au tabac et à l'alcool"
Je remarque sur twitter que les progressistes de tous poils se mettent à sauter sur la table comme des cabris. Les progressistes ? Une définition ? Les personnes qui pensent, par exemple, et ils ont peut-être raison, que le réchauffement climatique sera résolu par une solution technologique avancée (le deux ex machina de la science) qui sauvera l'humanité éternelle sans que l'on aie besoin d'envisager une diminution de la consommation, c'est à dire une diminution des profits capitalistes, sans que l'on aie besoin de modifier les modes de vie, les rapports sociaux et et qui oublient que dans l'histoire de l'anthropocène, c'est la science, le développement du capitalisme, le développement du colonialisme, qui ont été à l'origine de ce réchauffement climatique (et de bien d'autres choses). La lecture du livre de Bonneuil et Fressoz (cf. l'image infra) est décapante et je vous propose de lire une critique argumentée de ce même livre (LA).
Je lis donc l'entretien avec Me Catherine Hill de la première à la dernière ligne et j'apprend deux ou trois trucs que je savais mais que j'avais oubliés.
Je m'énerve en le lisant et, heureusement, je lis la dernière phrase qui me calme et qui, la seconde suivante, m'énerve encore plus. "Les personnes avec des revenus élevés, mieux informées sur les risques, sont davantage épargnées"
Tout ça pour ça !
Voici quelques réflexions sociétales :
- Plus t'es pauvre, plus tu meurs jeune.
- Surtout si tu es un homme.
- Moins ton niveau d'études est élevé plus tu es victime d'accidents du travail et de maladies professionnelles.
- Plus t'es pauvre et moins éduqué et plus ton espérance de vie en bonne santé est courte.
- Plus tu fumes et plus tu bois et plus tu meurs jeune.
- Plus tu nais dans un quartier défavorisé et plus ton risque de mourir avant un an est important (mortalité infantile).
- Plus t'es pauvre plus ton alimentation est riche en sucre, graisses, aliments transformés.
En lisant l'entretien, et nul doute que Me Catherine Hill a écrit des tonnes de littérature pour me contredire sur les conséquences de la pauvreté, du manque d'éducation (sic), des conditions de travail, des conditions de logement, de la précarité de l'emploi, du chômage de longue durée, sur l'espérance de vie à la naissance, la mortalité infantile, l'espérance de vie en bonne santé, la mortalité en couches, et cetera, je me dis que l'épidémiologie hors sol est une variante de la médecine hors sol.
Cet entretien fait passer l'idée, mais je dois être de mauvaise foi, que les conséquences de la mauvaise qualité de l'environnement, on s'en tape, puisqu'il suffit de ne pas boire et de ne pas fumer pour être "en bonne santé".
Il est également remarquable de comprendre que ces constatations privilégient la responsabilité individuelle, facteur indéniable et non négligeable, le choix éclairé du citoyen informé, le fameux homo Neo-liberalus si cher à nos élites qui agit toujours en fonction de ses intérêts, et nient les influences sociétales auxquelles tous les citoyens sont soumis à longueur de journées (le citoyen bombardé par les publicités pour la Junk Food - la bouffe de merde en français- pouvant exercer son libre-arbitre et ne pas emmener ses enfants en bas âge dans les McDo et autres KFC). Cela exonère les politiques de santé publique de toute responsabilité.
Je prends un exemple qui m'est cher.
L'analyse des courbes de mortalité infantile dans les pays développés indique que sa décroissance est devenue asymptotique, que l'on peut retrouver, globalement, des différences entre la France (mauvais élève : 3,3/100 000, sans Mayotte) et le Luxembourg (bon élève : 1,58/1000) mais que, grosso modo, les vraies différences se situent entre les pays à forts revenus et les autres (voir LA).
Eh bien non. Les différences sont territoriales, comme diraient les politico-administratifs : le taux de mortalité infantile est de 4,8 (6,9 selon d'autres sources) dans la Seine-Saint-Denis et de 16 à Mayotte ! Ce qui situe la Seine-Saint-Denis au niveau de Bahrein.
(J'ai déjà développé cela ICI)
Ainsi, comme dit l'autre, il faudrait mettre "un pognon fou" dans ces zones "défavorisées", réfléchir, ne pas dépayser les PMI hors des zones de pauvreté et de chômage, informer les associations et faire passer des messages par leur intermédiaire (et peu importe qu'il s'agisse des Peuls du Val fourré, des Sérères, des Marocains ou des Tamouls)... Car la fameuse Inverse Care Law de 1971 (LA) est toujours aussi vraie : les services de santé et de soins s'implantent toujours dans des régions où on en a le moins besoin.
L'épidémiologie est fortement influencée par les conditions socio-économiques des populations : au niveau mondial, au niveau continental, au niveau national, au niveau loco-régional. Et il en est ainsi des interventions médico-sociales.
On pourra toujours dire que le Poulard sénégalais arrivant du Fouta (et ici à Mantes la majorité des Sénégalais sont originaires de Podor ou de Matam) aura la chance, en ayant des enfants en France plutôt que le long du fleuve Sénégal, que la mortalité infantile passe de (et encore n'ai-je pas les chiffres particuliers de cette région éloignée de Dakar) 44,3 à 6,6 !
Bon, nous sommes loin de l'entretien dans Le Figaro. Bonnes réflexions.
(1) Je pourrais en faire des tonnes sur l'institut Gustave Roussy qui est un exemple désastreux de la politique publique (et ici privée) en matière de cancérologie en France. Je vous prie de regarder LA les propos pour le moins prudents et favorables de Catherine Hill pour le dépistage organisé du cancer du sein entre 50 et 74 ans où elle évoque, sans doute pour se dédouaner, des études auxquelles elle ne "croit pas", à propos du sur diagnostic et du sur traitement, mais sa conclusion est décapante : elle dit en substance qu'il vaut mieux ne pas boire et ne pas fumer que de passer une mammographie.
8 commentaires:
Permettez-moi de vous signaler un certain décalage entre ce que vous écrivez et les propos de Catherine Hill, qui sont eux-mêmes largement discutables.
En effet, il s'agit ici non pas de la santé en générale, mais du cancer, ce qui n'est pas du tout la même chose.
Et là, on peut voir en quoi ce que dit Catherine Hill est discutable, le carcinogène démontré affectant la plus grande partie de la population étant les rayons X. Rappelons d'abord que l'incidence de la plupart des cancers, même après ajustement par l'âge, est corrélée à l'indice de développement humain dans la plupart des pays. Plus précisément, John Gofman a montré que la MORTALITE par cancer est liée à la densité en médecins dans les différents districts des Etats-Unis, relation qu'il a attribué fort justement à l'utilisation des rayons X dans l'imagerie médicale. C'est également vrai pour la mammographie, et n'importe qui peut constater sur les registres de n'importe quel pays que des dizaines d'années de dépistage ayant permis d'enlever des milliers de cancers se traduisent par une incidence plus élevée de cancer du sein chez les personnes âgées.
https://www.bmj.com/content/366/bmj.l4506/rr-2
Mais la capacité d'un certain nombre d'épidémiologistes (dont Catherine Hill) à garder la tête dans le sable est sans limite.
C'est drôle, vous critiquez le capitalisme comme responsable de tous les maux, et évidemment, constatant des inégalités de santé des populations défavorisés, vous pensez régler le problème avec l'argent.
Cela n'a pour moi aucun sens, l'argent comme l'énergie disponible n'est qu'un moyen dont l'usage dépend de la fin qu'on lui destine.
Quel genre de politique de santé publique proposez vous ?
Ce qui caractérise l'anthropocène c'est précisément une explosion de la quantité d'énergie disponible par individu, et par conséquent également de l'argent disponible.
Que nous utilisions cette énergie-argent pour acheter des biens et services qui n'ont que peu de rapport avec la santé et le bonheur n'est pas lié au capitalisme mais à certains aspects de la nature humaine.
@dsl
Votre réponse est un peu malhonnête.
1 - Le mot anthropocène qui laisse entendre que c'est l'homme en tant qu'individu qui est responsable et non un système. Dans ce système, effectivement, une poignée d'hommes sont responsables. Ils peuvent l'être parce que le système (créer par une poignée d'homme également) le permet. Les révoltes dans le monde réprimée à égalité par les forces de l'ordre établi montrent bien que ce que le système veut l'homme "de base" ne le veut pas forcément. Parlez plutôt de capitalocène.
2 - C'est toujours les même arguments : les gens achètent gnagna plutôt que... Lorsque vous habitez dans une tribu bantou, vous parlez bantou. Et ce n'est pas de votre faute si cela est un frein à la compréhension de la morale nietzschéenne. Vous accusez l'homme d'acheter alors qu'il est dans une société ou il ne peut pas faire autrement : tout se numérise et les services publics s'éloigne et on va accuser l'individu d'acheter un smartphone (bientôt plus de service en ligne sans) une nouvelle voiture (l'ancienne sera bientôt interdite dans les grandes villes) etc. Ecoutez le thinkerview de bruno Gaccio ou il explique comment construire un programme télé afin d'éveiller des pulsions d'achats : c'est théorisé et mis en pratique, pour de vrai, depuis une pelle d'années.
3 - Vous balayez d'un revers de la main facile le rôle de l'éducation, de la morale, tout ce qui fait société et qui s'impose à l'individu pour faire croire qu'il est libre de ses choix. Mème les théories économiques (pourtant assez mathématisée) qui partent de ce principe de liberté sont fausses (lire l’imposture économique)
4 - Vous parlez d'énergie ou d'argent disponible par individu. C'est totalement faux. En moyenne c'est vrai, mais vous n'avez pas la même quantité disponible qu'un nourrisson dans la Thiérache. Et c'est parce que vous en avez plus que la moyenne que lui en a moins et que lui meurt plus facilement.
5 -Effectivement, là ou je vous rejoins, énergie et argent ne sont que des moyens. C'est la répartition de ces moyens qui va décider du résultat. Ainsi par exemple choisir de cramer des milliards (au moins des centaines de millions) pour paris 2024 permet de comprendre pourquoi des gens (et des enfants) crèvent dans les rues de cette même 'capitale'.
5b - Comment expliquer que des inspecteurs d'académie visitant des familles faisant instructions en famille font des informations préoccupante pour des raisons futiles (régimes alimentaires..) et que l'appareil d'état se met en branle pour faire chier ces familles et en même temps laisse crever des enfants dans la rue en se concentrant pour être certain que cela ne change pas ?
6 - Ainsi les choix en terme de santé ont été fait pour faire remonter l'argent dans l'oligarchie. On autorise des injections à 5000 euros (l'étude se faisant in vivo) et on dérembourse des granules à 2 euros. On promeut la mamo pour toutes, la vaccination universelle (l'hépatite B pour les bébés pour les protéger dans leur vie sexuelle)... et on laisse crever des gens dans des couloirs d’hôpitaux sur des brancards.
en résumé, il faut moins d'argent en moyenne : immensément moins pour les 1% les plus riches, beaucoup moins pour les 10% les plus riches et un peu plus pour les 10% les moins riches. Une redistribution plus importante. L'état vient de faire main basse sur des milliards de la sécu, marrant comme cela ne vous dérange pas dans votre démonstration très voltairienne.
herve_02
Pour ceux qui ont envie de rire un peu, vous avez vu la dernière déclaration de notre ministre de la santé ? enfin ministre santé et buzin dans la même phrase c'est déjà en soit une blague.
Donc elle affirme que les pompiers qui sont malades après être intervenu chez lubryzol l'étaient peut être déjà avant. Sérieusement. Et ce n'est pas dans le gorafi.
Alors oui, nous n'avons pas la preuve qu'ils n'avaient rien avant, c'est vrai. D'ailleurs lorsqu'un verre tombe par terre et se casse on n'a pas la preuve qu'il n'était pas cassé avant d'être tombé. De la même manière lors d'un accident de voiture si on retrouve une personne morte dans le véhicule accidenté, on n'a pas la preuve qu'il était vivant et conscient avant l'impact. Pourtant...
Ce que les gouvernements successifs ont fait de la santé est déprimant. Ce n'est qu'arguties pour éviter de regarde la vérité en face : la médecine fait globalement plus de mal que de bien à l'individu sous couvert de divers trucs dont le on rase gratis demain.
herve_02
@ herve_02
https://jeanyvesnau.com/2019/09/29/homeopathie-jusquen-2018-agnes-buzyn-croyait-quil-sagissait-de-principes-actifs/
@anonyme
Je ne lis plus jean yves nau - ce n'est que la propagande de bas étage mitigé de 1/2 vérités et une petite pincée de mensonges. Ce titre en est l'exemple parfait. comme dirait Girard on croirait un blaireau de base qui la ramène sans maîtriser grand chose.
Ensuite, pour votre gouverne, dans l’homéopathie, il y a des principes actifs. Le principe actif ne disparaît qu'après un certain nombre de dilution de mémoire 7CH (et je ne sais pas pour les D ) mais calculable et à la porté d'un lycéen (mâle ou femelle) scientifique. comme les D sont des dilutions aux 10ème, cela va probablement plus loin que 7. Donc il y a du principe actif dans l'homéopathie (une bonne partie).
Dire le contraire est mensonger, preuve en est que les autorités sanitaires (keuff keuff keuff) décident régulièrement de faire disparaître des souches (les interdire). Si c'est juste du placebo et qu'il n'y a aucun principe actif et que ce n'est que du sucre. Pourquoi demander à supprimer ces souches ? quelles bases scientifiques ou médicales (allez soyons cool) peuvent justifier de supprimer un médicament qui n'est rien que du sucre sans principe actif. Au pire, on le met en supermarché au rayon sucre. puisque ce n'est que cela.
J'espère de tout cœur que ce déremboursement se traduira par la vente en grande surface aux rayons sucres de toute l’homéopathie.
herve_02
Awesome article! Thank you for this article.
Cool
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