mercredi 11 novembre 2009

GRIPPE A/H1N1v : MADAME BACHELOT FAIT MUMUSE AVEC LA SANTE PUBLIQUE

Pendant que la campagne vaccinale anti A/H1N1v bat son plein et qu'en ce onze novembre 2009, veille de l'ouverture des centres de vaccination, les autorités font un forcing médiatique sans précédent pour que le fiasco annoncé ne devienne réalité, la Santé Publique française continue de se morfondre dans ses mauvais chiffres.


On peut certes se glorifier d'une espérance de vie française à la naissance qui nous met dans le peloton de tête des palmarès mondiaux, pour les femmes uniquement (84,3 ans en 2008), mais il n'en reste pas moins que notre société, que tout le monde nous envie selon la formule consacrée, souffre de maux peu glorieux.


La violence de la société française.

Les statistiques des morts violentes dans le monde telles qu'elles sont rapportées par Jean-Claude Chesnais dans L'histoire de la violence et, plus précisément dans Population et sociétés, montrent en 2003 que le taux de mortalité violente en France (75/100 000 habitants) était loin devant celui des Etats-unis où le taux n'est que de 55, ce qui représente respectivement 8 % et 6 % du total des décès. Ces chiffres sont à comparer avec ceux de l'Allemagne (41) et du Royaume-Uni (33).
Il faut bien entendu éclairer cette statistique (et je le fais à partir d'un livre passionnant pour de multiples autres raisons qu'a écrit Paul Yonnet en 2006 : Famille I : Le recul de la mort). La mort violente est une mort "non naturelle", provoquée par une intervention volontaire (soit d'autrui : homicide, soit de soi-même : suicide), ou par une cause extérieure brutale , appelée accident (de transport et domestique). On comprend mieux. En effet le taux d'homicide en France est identique et aussi bas que celui du Royaume-Uni : 0,7 / 100 000. Rappelons que le taux de suicide en France est de 17,5 / 100 000 ! [nous reviendrons un jour sur ce fait qui peut être expliqué par un contre sens fondamental que formule la psychiatrie française d'obédience freudienne sur l'ontologie suicidaire. Bien que nous soyons au pays d'Emile Durckeim !]
La surmortalité française évitable.
La France est aussi très bien placée, si l'on peut plaisanter, pour ce qui est de la mortalité évitable : 42 000 morts par an selon Gérard Dubois in La Recherche. Il est évident que l'on pourrait gloser à l'infini sur les raisons françaises de ce fait. L'autoflagellation étant un sport national dans notre pays, autoflagellation qui n'est parfois qu'une attitude prétexte à ne pas envisager les problèmes et, éventuellement, à tenter de les résoudre.
Nous ne disons pas ici que les Autorités et que les différents intervenants sociétaux "ne font rien".
Il semble même, et l'exemple de H1N1 en est une démonstration éclairante, qu'on pourrait les gratifier du contraire. Ce qui manque en France, et pardon d'être aussi catégorique, mais vous verrez que je reste dans les généralités, c'est aussi très français, n'est-ce pas ?, ce sont des recherches en amont (une épidémiologie et une pharmacoépidémiologie de niveau scientifique acceptable), des politiques de Santé Publique qui ne soient pas les paravents médiatiques de l'immobilisme, des organismes indépendants de contrôle, des moyens adaptés aux politiques de santé et non pas des moyens logistiques et humains s'adaptant aux structures préexistantes incompétentes par nature, des suivis par des organismes indépendants et des rapports finaux qui tiennent compte des données modernes du coût utilité, par exemple.
Vaste chantier.
Et nous n'avons pas parlé des lobbies, des conflits d'intérêts, des incompétences et du politique comme seul axe de santé publique.
A vos critiques.

lundi 2 novembre 2009

GRIPPE A/H1N1v : REFLEXIONS SUR LA GRIPPE SAISONNIERE

Toute la littérature parue sur la grippe A/H1N1v semble éclipser tout ce qui a pu être écrit sur la grippe saisonnière dont on nous dit qu'elle "tue" 3 à 5000 personnes en France.

Pourquoi ces 3 à 5000 personnes semblent n'impressionner personne ?

J'ai déjà écrit ici ce que ces morts saisonnières qui paraissaient hier si "acceptables" aux yeux de tous (une sorte de fatalité) deviennent tout d'un coup inacceptables à nos yeux alors que les 38 morts de la grippe A/H1N1v occupent tout le monde.

Pardonnez ma naïveté mais je me pose désormais les questions suivantes sur la grippe saisonnière :
  1. Est-ce que ces 3 à 5000 morts sont vraiment réelles ?
  2. Dans cette épidémie A/H1N1v on apprend par les réseaux du GROG ou par Sentiweb qu'environ moins de dix pour cent des syndromes grippaux cliniques identifiés en période épidémique étaient dus au fameux virus variant, les autres syndromes (plus de 90 %) étant liés à des adénovirus, des rhinovirus, des picnovirus... Est-ce que cela ne serait pas non plus le cas en cas de grippe saisonnière ? Il est vrai que désormais on en est à un taux de 50 % à quelques jours du pic épidémique.
  3. Les diagnostics par excès de grippe saisonnière devaient donc être légion.
  4. Les laboratoires vaccineurs ont obtenu que la vaccination contre la grippe saisonnière soit devenue une habitude et un "droit" pour les personnes âgées de plus de 65 ans et pour les "grands" malades. Mais n'est-ce pas encore une mystification ?
  5. Depuis le temps que la vaccination contre la grippe saisonnière est recommandée en France, combien d'études de qualité sont apparues pour nous informer d'une baisse de la mortalité et de la morbidité ? Zéro.
  6. Quant aux essais internationaux j'ai déjà montré ici qu'ils n'étaient pas très enthousiasmants.
  7. Ainsi donc n'y aurait-il pas autant de morts dues à la grippe saisonnière. Les chiffres incertains ne seraient pas seulement le témoin de la faillite de notre système d'épidémiovigilance (dont on a vu les performances au moment de la canicule) mais aussi une volonté délibérée des vaccineurs de laisser le doute continuer, ce doute profitant à la vaccination.
Il paraît urgent de s'occuper de la grippe saisonnière, de savoir si les chiffres avancés sont vrais ou non, de s'interroger sur l'efficacité du vaccin et de savoir pourquoi le doute est entretenu sur l'étiologie vraie des syndromes grippaux ?

Qui réagit ?

dimanche 1 novembre 2009

GRIPPE A/H1N1v : LES PHASES II SONT DEVENUES SAUVAGES

Les Autorités mondiales de la vaccinologie ne sont pas d'accord entre elles et, pendant la vaccination de masse, les études continuent (ou n'ont jamais commencé) !

Je précise, pour les non spécialistes des Autorisations de Mise sur le Marché (AMM), que la phase II du développement d'un médicament, qui succède à la phase I et qui précède la phase III (permettez ce truisme qui n'est pas sans importance pour la suite de mon message), consiste, entre autres, à déterminer la biodisponibilité du médicament en question et à en fixer la posologie. Cette Phase II consiste à administrer la substance prétendument active chez des patients volontaires.

Cf. Wikipedia pour un résumé simple.

Or, alors que la campagne de vaccination contre A/H1N1v a commencé chez les professionnels de santé hospitalier en France et qu'elle commencera demain chez les libéraux, les avis d'experts divergent sur le nombre d'injections et sur la séquence d'injections par rapport à la vaccination contre la grippe saisonnière.

Les faits :
  1. l'Organisation Mondiale de la Santé a décidé qu'il n'y aurait qu'une injection de vaccin contre la grippe A/H1N1v et qu'il est possible de la pratiquer le même jour que la vaccination contre la grippe saisonnière.
  2. L'Agence Européenne du médicament recommande deux injections et préconise de les faire précéder (21 jours avant) de la vaccination contre la grippe saisonnière.
Les experts, qui n'en sont pas à une contradiction près, et qui raisonnent en fonction de leurs intérêts nationaux et autres particuliers, pourraient-ils accorder leurs violons ?

Que font Bachelot Houssin Weber ?

Voilà encore un exemple de précipitation désordonnée et de croyance unilatérale en l'innocuité d ela vaccination et, surtout, à son efficacité.

jeudi 29 octobre 2009

GRIPPE A/H1N1v : URGENCES



On me dit que les urgences des hôpitaux et que les samu sont débordés.
On me dit que les urgences des hôpitaux et que les samu appellent à l'aide.
Il y a trop de monde.
Il y a trop de patients qui pensent avoir (ou qui ont, mais on ne le saura jamais pour la plupart d'entre eux) une grippe porcino-mexicaine et qui appellent à l'aide.
On me dit que les centres de vaccination contre la grippe porcino-mexicaine peinent à recruter des volontaires.
On me dit que les circulaires de fonctionnement des centres de vaccination contre la grippe porcino-mexicaine sont tellement compliquées qu'elles mériteraient une médaille d'or aux Jeux Olympiques de la bureaucratie... Dernière nouvelle : c'est en ligne ! Vous pourrez vous délecter.
On me dit que les médecins généralistes vont être réquisitionnés par l'autorité préfectorale pour pallier le manque de vaccineurs.
On me dit que les médecins généralistes ont été (et continuent d'être) considérés comme de la merdre par le trio BHV (Bachelot - Houssin - Weber).
Que les services d'urgence, que les samu, que les centres de vaccination se débrouillent !
Nous, les médecins généralistes de base, accusés de ne pas assurer les urgences en travaillant en moyenne 60 heures par semaine, avons-nous été consultés lors de la mise en place du plan grippe porcino-mexicaine ?
Nous, les médecins généralistes de base, accusés de ne pas assurer les urgences en travaillant en moyenne 60 heures par semaine, devrions-nous aussi traîner nos guêtres aux urgences, réguler dans les centres 15 et vacciner à nos moments perdus ?
Nous les médecins généralistes de base, accusés de ne pas assurer les urgences en travaillant en moyenne 60 heures par semaine, pourquoi aurions-nous soudain besoin de nous ? Nous sommes des bobologues attitrés, nous sommes des feignants, nous sommes des libéraux, nous sommes des profiteurs, nous sommes des nuls : laissez-nous tranquilles !
Est-ce que Madame Bachelot a déjà vu un médecin généraliste qui travaille en cabinet à plein temps ? Est-ce que Monsieur Houssin a déjà vu un médecin généraliste qui lit autre chose que le Quotidien du Médecin ? Est-ce que Madame Weber a déjà vu un médecin généraliste qui sait ce qu'est une phase II vaccinale et qui n'a pas besoin du cesam pour lire un compte rendu statistique d'étude ?
Vous vous débrouillez !
Vous nous laissez tranquilles !
Vous nous avez méprisés, vous ne nous avez jamais lus, vous avez toujours pensé que nous faisions autre chose que de la médecine noble : Débrouillez-vous !
Vous avez attiré les malades vers les urgences, vous avez tout accepté aux urgences, vous n'avez pas voulu collaborer avec les libéraux dans un cadre institutionnel : Débouillez-vous !
Au lieu de réquisitionner des médecins généralistes, Mesdames et Monsieur BHV, réquisitionnez des spécialistes : douteriez-vous du fait qu'ils sachent vacciner ?
Réquisitionnez des spécialistes nobles, leurs malades peuvent attendre, réquisitionnez des spécialistes qui refusent la CMU, réquisitionnez des spécialistes qui font des dépassements d'honoraires systématiques, réquisitionnez des spécialistes qui demandent des dessous de table, réquisitionnez des spécialistes qui font des conférences pour promouvoir les traitements hormonosubstitutifs de la ménopause, réquisitionnez des spécialistes qui prescrivent des médicaments anti ostéoporose à tire-larigot, réquisitionnez des spécialistes qui prescrivent les nouvelles spécialités non validées, réquisitionnez les spécialistes qui pratiquent un frottis vaginal tous les ans, un ECG tous les trimestres, réquisitionnez les spécialistes qui prescrivent des pilules oestroprogestatives thromboemboligènes...
Il y a du boulot.
Laissez-nous tranquilles !

dimanche 25 octobre 2009

VACCINATION CONTRE LA GRIPPE A/H1N1v : JUSQU'AU BOUT !

Le Monde du 24/10/09 : "Neuf Isérois ont déposé plainte contre X..., vendredi 23 octobre à Grenoble, dénonçant la campagne de vaccination contre la grippe H1N1 comme 'une véritable tentative d'empoisonnement'. Cette plainte a été remise au doyen des juges d'instruction de Grenoble..." Et l'avocat des plaignants d'ajouter : "Le but est d'arrêter ce que nous considérons comme un empoisonnement... L'intérêt de cette action est que des gens en France aient une attitude citoyenne et disent publiquement : nous avons compris que la vaccination est une arnaque."
Voici ce que disent les Autorités, selon Le Monde : "... les vaccins H1N1 arrivant sur le marché sont des produits nouveaux pouvant provoquer des effets indésirables inattendus, qui devront faire l'objet d'une surveillance, mais elles estiment que les avantages d'une vaccination l'emportent sur les risques éventuels."
Quelques réflexions :
  1. La propagande vaccinale bat son plein et, toutes choses égales par ailleurs (la pertinence ou non de la vaccination), la population française n'aime pas la propagande.
  2. Le gouvernement de la France vaccinale, Bachelot - Houssin - Weber (BHV), est lancé dans une aventure qui peut être assimilée à un semi remorque sans freins qui dévale une route pentue qui débouche sur une station service...
  3. La plainte de ces citoyens isérois se heurtera à l'avis des experts désignés par la Justice : mais est-il possible en France à un magistrat de nommer comme expert un virologue clinicien qui n'ait pas touché un jour ou l'autre un cent de l'industrie pharmaceutique ?
  4. Est-il possible qu'un seul des experts qui conseille le trio infernal BHV puisse avoir un avis indépendant ?
  5. Madame Bachelot commence à s'impatienter et à comprendre que son plan Grippe part en lambeaux. Elle déclare donc depuis quelques jours, et sur un ton comminatoire, que les professionnels doivent se faire vacciner, que c'est un devoir citoyen, qu'ils sont des enfants gâtés, qu'ils devraient se rappeler le temps où l'on ne vaccinait pas et où les malades mouraient de tuberculose (exemple terriblement mal choisi puisque l'on connaît l'inefficacité manifeste du BCG... qui n'est plus obligatoire en France).
  6. Les experts des différents comités ad hoc, ceux-là mêmes qui ne déclarent pas ou imparfaitement leurs conflits d'intérêts, stigmatisent les officines anti vaccinales qui pulluleraient sur le net. Ils oublient que la majorité des professionnels de santé qui demandent des explications sur le vaccin H1N1 vaccinent dans leurs cabinets les nourrissons, les enfants, les adultes, contre la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite, et aussi contre l'haemophilus et contre le pneumocoque, la rougeole, la rubéole et les oreillons ... Ainsi, laisser penser que les professionnels de santé qui doutent de l'efficacité de la vaccination contre la grippe saisonnière et de l'efficacité et de l'innocuité de la vaccination contre la grippe A-nouveau variant-, sont des illuminés et des millénaristes, est une imposture : cela signifie que le trio BHV et ses suppôts, les experts officiels, ne comprend rien à la mise au point de nouveaux médicaments, confondre le dose ranging de la phase II (combien d'injections) avec la phase IV (après commercialisation), penser que le système de pharmacovigilance français est au point et penser que les médicaments, c'est du tout ou rien. Il y a des antiinflammatoires dangereux qui ont été retirés du marché et cela n'empêche pas que l'on continue d'en prescrire avec un bénéfice / risques acceptable.
  7. Il est même certain que la majorité des médecins qui doutent du vaccin H1N1 vaccinent sans se poser de questions contre l'hépatite B alors que nous avons exprimé ici des doutes sur ses effets indésirables, sclérose en plaque en particulier.
  8. Comment faire confiance à la branche pharmacovigilance de l'AFSSAPS, celle-là même qui est passée à côté de tous les retraits de produits décidés internationalement, celle-là même qui, deux jours avant le retrait mondial du Vioox, trouvait le produit tout à fait sûr ?... Mais il est vrai que les "pharmacovigilants" de l'AFSSAPS dépendent des déclarations d'effets indésirables provenant des professionnels de santé français qui sont particulièrement muets...
  9. Madame Bachelot s'énerve car l'organisation des centres de vaccination par le Ministère de l'intérieur est un fiasco : pas assez de volontaires et il sera nécessaire de réquisitionner... Ces centres de vaccination sont la quintessence de l'esprit administratif jacobin centralisateur français : on décide d'en haut, on met les professionnels de santé devant le fait accompli et sans les impliquer, on pond des circulaires inefficaces et mal rédigées, on charge un Ministère (Intérieur) qui ne sait pas ce qu'est un professionnel de santé avec des préfets dont la compétence sanitaire est pour le moins douteuse et qui ne peuvent qu'appliquer les instructions... Un système qui dépend de la CPAM pour l'envoi des premières convocations aux patients sélectionnés (CPAM dont on connaît depuis des années l'efficacité administrative), une CPAM qui va envoyer des convocations chez des patients dont on ne connaîtra pas le statut vaccinal (il faut théoriquement attendre 21 jours entre les vaccinations grippe saisonnière / grippe A). Quant aux contre-indications, aux traitements concomitants, nul doute que les administratifs, les élèves infirmiers et les étudiants en médecine seront au top pour les prendre en compte.
  10. Je ne sais pas qui sont ces citoyens isérois mais ils vont savoir ce qu'est de s'opposer à la propagande gouvernementale et à son administration !

Cher BHV, nous demandons simplement que le prétendu Principe de Précaution, qui ne s'applique pas à lui-même, ne conduise pas à des décisions marquées par la partialité, les intérêts particuliers et le mépris des procédures. Que le Comité Technique des vaccinations, propos repris par la grande revue Prescrire, conseille quand même de vacciner des femmes enceintes avec un vaccin adjuvé me paraît ahurissant. Que l'on propose la vaccination des enfants sains de moins de deux ans alors que dans la grippe saisonnière le vaccin, chez ces mêmes enfants, n'est pas plus efficace qu'un placebo : cf. Cochrane...

Conflit d'intérêt : j'ai assisté la semaine dernière à une réunion sur la grippe A organisée par l'Association des Professionnels de Santé du Val Fourré avec buffet payé par GSK

jeudi 22 octobre 2009

ENTITLEMENT : LES MEDECINS SE PLAIGNENT TOUT LE TEMPS SANS SE RENDRE COMPTE DE LEUR CHANCE

Une médecin canadienne, professeur d'Université à Vancouver, Erica Frank, Department of Health Care and Epidemiology and Department of Family Practice, raconte dans le British Medical Journal (article disponible sur abonnement) combien le sens de l'entitlement des médecins la dérange. Et moi je conçois combien il est difficile de traduire en français le mot Entitlement.

Voici les faits.

Premier épisode. Cela se passe dans un taxi après une journée de travail au congrès de l'American Medical Association. Elle est assise avec des collègues qui se plaignent, comme ils le font souvent, de leurs conditions de travail et de leurs honoraires et du fait, ajoute-t-elle, comme le répètent souvent les médecins américains, qu'ils ne se sentent ni estimés ni récompensés à leur juste valeur. Au bout de dix minutes de trajet elle leur dit : "Comment pouvez-vous vous plaindre de cette façon devant un chauffeur de taxi ?" Silence inconfortable.

Deuxième épisode. Cela concerne une amie intime d'Erica Frank qu'elle décrit ainsi : ce médecin consulte dans un grand hôpital auprès d'une clientèle provenant de milieux défavorisés. Mon amie est issue d'une famille aisée, a reçu la meilleure formation médicale, elle est agréable, compétente et jolie. "Ce matin, lui dis-je en parlant avec elle, j'ai vu un employé de péage et j'ai pensé combien j'étais contente de ne pas faire ce métier et combien ce travail devait être déplaisant : respirer un air pollué, avoir des relations superficielles, instantanées et probablement souvent négatives et sans remerciement, avec des gens, n'avoir aucun contrôle sur son activité qui pourrait très bien être remplacée par une machine, n'avoir aucune possibilité d'avancement, être mal payé, et cetera, et cetera... Et mon amie m'a dit : "Tu ne comprends pas. Cette personne n'est même pas de ma Classe !" Et le mot classe avait une majuscule ! Je savais que mon amie, poursuit Erica Frank, avait passé la plupart de sa carrière à traiter les démunis, souvent au prix d'un sacrifice personnel et qu'elle avait entraîné d'autres à le faire. Elle l'avait fait par compassion et avec sérieux et il était difficile pour moi de rapprocher cela de sa réflexion.

Et notre Erica d'ajouter, désemparée : "Est-ce que c'est cela ce sens apparent d'entitlement ? Est-ce que c'est spécifiquement nord-américain ? Est-ce que c'est dû à un excès de travail ?"

Il faut lui dire, à Erica, qu'il n'y a pas que les médecins nord-américains qui sont comme cela, et que l'entitlement existe aussi par ici et sur de nombreux forums médicaux qui ne sont pas heureusement lus par les chauffeurs de taxi ou les employés des péages. Seuls les médecins ont le droit d'y écrire et de les lire.

Et elle ajoute :"Peu importe la raison, mais le phénomène d'entitlement semble même atteindre nos désirs de bien-être. En dépit du fait que les médecins bénéficient d'une espérance de vie supérieure à la moyenne et exercent un métier stimulant et rentable, ils sont plongés dans la 'woe are we' attitude [ce qui pourrait se traduire en français par une attitude pleurnicharde] comme s'ils n'en avaient jamais assez." Et aussi : "Nous avons besoin, nous les médecins, de sentir que nous avons le droit d'être respectés, satisfaits et comblés durant toute notre vie parce que nous avons travaillé si dur et que nous le méritons. Ce besoin est fondamental dans les aspirations humaines mais pourquoi le mériterions-nous plus que d'autres, notamment plus que ceux exerçant des métiers ingrats ou ennuyeux pour assurer une existence modeste à leur famille ?"

Comment traduire entitlement selon vous ? Littéralement c'est un droit mais, dans cet exemple, la conviction que tout nous est dû.

Voici la définition en anglais d'entitlement trouvée dans Wikipedia : Entitlement is a guarantee of access to benefits because of rights or by agreement through laws. It also refers, in a more casual sense, to someone's belief that one is deserving of some particular reward or benefit."

[Grand merci à AP pour la traduction de entitlement et woe are we attitude]


vendredi 16 octobre 2009

LA GRIPPE A VUE SUR LE TERRAIN - HISTOIRES DE CONSULTATION : QUINZIEME EPISODE

Monsieur D, 64 ans, a consulté un médecin de garde car il n'a pu me joindre mercredi en huit. Il se sentait "grippé" et présentait sans nul doute un syndrome grippal gouvernemental : fièvre > 38°, toux, courbatures.
Ce patient, à part le fait qu'il est hypertendu, n'a aucun antécédent majeur.
Le docteur de garde l'a "bien" examiné et lui a dit, tout de go, qu'il avait la grippe A.
Je parle bien entendu sous le contrôle du patient. Ce qui est une précaution élémentaire.
Quid du devenir de ce patient étiqueté grippe A ?
Prescription de tamiflu pendant cinq jours, de paracétamol et de biocalyptol. Prescription d'un prélèvement au laboratoire pour "savoir si c'est bien la grippe A". Prescription de masques chirugicaux et conseils vis à vis de la famille.
Le malade revient me voir le mercredi suivant, apparemment guéri et apyrétique. Il me raconte l'affaire dont le point le plus piquant est que lorsqu'il est allé chercher les résultats de l'examen au laboratoire (sans masque), il était déjà apyrétique et "bien portant" et, cerise sur le gâteau, le test était négatif.

Qu'est-ce qui a cloché dans cette affaire ?
  1. Il n'est pas possible, cliniquement, de dire à un malade qu'il a la grippe A
  2. Les prélèvements analysés par un laboratoire de ville ne peuvent faire le diagnostic de grippe A car les kits testent un composé de virus dont le H1N1 de la grippe A.
  3. Les laboratoires de ville qui font cela sont des escrocs et les vendeurs de tels kits sont des escrocs également.
  4. Le tamiflu a guéri un malade hors Autorisation de Mise sur le Marché puisque le patient / malade n'avait pas la grippe !
  5. Il s'agit, à n'en pas douter d'un épisode de la Stratégie de Knock dans sa version "Etendre le champ de la maladie à des gens presque bien portants"
  6. Mon confrère a dû péter les plombs
En résumé, chers patients qui n'êtes pas encore malades ou chers malades qui êtes encore des patients, ouvrez les yeux et les oreilles sur ce que vous racontent les médecins.