mercredi 3 février 2010

GARDASIL PAR DESSOUS LA JAMBE - HISTOIRES DE CONSULTATION : SEIZIEME EPISODE

Gardasil par dessous la jambe.



La jeune fille timide vient avec son papa dont je suis le médecin traitant.
Elle, je ne la vois jamais : elle est suivie par un pédiatre.
Quand une jeune fille vient avec son papa, il est rare que ce soit elle l'accompagnante.

Le papa est un gars souriant, simplissime, on sent qu'il me fait confiance et qu'il ne se pose pas de questions complexes sur les rapports qu'un patient doit entretenir avec son médecin. Cela me repose.

" C'est pour un vaccin.

- Un rappel de quoi ?

- Non, c'est le truc pour les filles."

Et il sort de sa poche un sac plastique qui contient une boîte de gardasil.

Je ne peux m'empêcher de faire l'étonné. Ce qu'ils remarquent. Ils ne me demandent pas : "Vous n'êtes pas d'accord ?"

"Qui a prescrit ça ?

- La gényco de ma femme.

- Et elle a parlé avec elle ?

- Qui ?

- Ben... Clara.

- Non."

Il regarde sa fille qui n'en sait pas plus.

"C'est ma femme qui a demandé à sa gényco de le lui prescrire. Elle voulait qu'elle le fasse.

- Je comprends. Et tu sais à quoi ça sert ?"

Regard surpris de celle à qui l'on demande à brûle-pourpoint, et sans avoir révisé auparavant, la capitale du Vanuatu. "Non."

Je vois.

Je pose deux ou trois questions et je me rends compte que la jeune Clara, 13 ans, ne sait pas ce qu'est le gardasil, à quoi ça sert et ce que ça évite ou pas. C'est la médecine moderne. Je lui fais la totale.
Elle est aussi intéressée que si je lui avais refait son cours de maths de la veille. La jeune Clara ne sait pas ce qu'est le cancer du col, ne sait pas ce qu'est un papillomavirus, ne sait pas ce qu'est un frottis, n'a jamais entendu parler de contraception... Désespérant.
J'aime la médecine.
Ici se pose la question, une fois les informations fournies, de savoir ce qu'il faut faire : vacciner (comme on ferait un rappel anti diphtéro-polio-tétanique, c'est à dire de façon routinière) ; ne pas vacciner ; demander le consentement éclairé de la jeune fille ; demander le consentement éclairé de la maman (et ici : du papa) ; se conformer à ses propres valeurs et préférences (le docteurdu16 est-il pour ou contre le gardasil ?) ; se conformer aux valeurs et préférences de la jeune fille (?), de la maman (?), de la gynécologue (?), de Big Pharma (!) ?
Qu'auriez-vous fait ?
********************************
Note : c'est la deuxième fois que je parle ici du gardasil et ce n'est pas fameux pour les "prescripteurs".

dimanche 31 janvier 2010

LA MALTRAITANCE A L'HOPITAL : UN EXEMPLE PERSONNEL

A l'occasion de la parution d'un rapport commandité par l'HAS et écrit par Claire Compagnon et Véronique Ghadi, "La maltraitance 'ordinaire' dans les établissements de santé. Etude sur la base de témoignages." que vous pouvez consulter en ligne : ici, je vous propose un témoignage personnel.

Le rapport publié par l'HAS me rappelle le livre écrit par Denis Labayle en 1999 "La vie devant nous" qui dénonçait les conditions dans lesquelles les personnes âgées étaient prises en charge dans les institutions accueillant des personnes âgées des foyers logements aux établissements de long séjour.

Mais aujourd'hui il s'agit de la maltraitance en général.

Je vous laisse lire ce long rapport qui donne froid dans le dos mais le témoignage que je vous livre vous permettra de comprendre que cela n'arrive pas qu'aux autres.

Ensuite, je tenterai, dans un prochain message d'analyser ce que le médecin généraliste en tant que tel, en plus du citoyen lambda qu'il est, peut essayer de changer.

Voici ce témoignage (j'ajoute que Madame G est toujours hospitalisée dans un établissement de moyen séjour où les choses se passent "bien").

Madame G, 86 ans, est donc hospitalisée en gériatrie aiguë dans un hôpital de l'Assistance Publique pour la deuxième fois le 17 novembre 2009.

  1. A treize heures quinze, au bout de trois jours d'hospitalisation, son fils arrive : elle a le nez dans son plateau, de la nourriture partout (sur sa chemise de nuit -- il n'y a pas de bavoir--, sur ses mains, sur ses bras et, bien entendu, sur son visage) et personne pour l'aider. Son fils la nettoie, demande aux aides-soignantes qui sont en train de manger pourquoi on ne l'a pas aidée : "On ne savait pas qu'elle ne pouvait pas manger toute seule." Conclusion : il y a un manque criant de personnel. Que nenni : il n'y a pas d'attention aux personnes.
  2. A vingt-et-une heure il n'y a pas de couche adaptée à la taille de la patiente. L'infirmière finit par découper une couche XXXL et le fils se débrouille. Conclusion : la baisse des crédits fait qu'il n'y a plus de couches dans un service de gériatrie aiguë. Des sous, des sous ! Que nenni : on avait oublié d'en commander et elles sont arrivées le lendemain matin.
  3. Au bout de quelques jours les aides-soignantes finissent par comprendre qu'une serviette bavoir en papier (il y en a des rouleaux sur le charriot) serait adaptée pour les repas. Mais elles ne savent pas, avant de poser le plateau repas (après, ce serait encore mieux, que passer une éponge serait un geste facile et de bon sens.
  4. Un dimanche matin la patiente est désorientée, ne reconnaît ni son fils ni sa fille. On l'a changée de chambre en pleine nuit. Elle est terrifiée. Elle finit par recouvrer ses esprits mais le mal est fait. Elle a peur des nuits définitivement. Elle changera d'ailleurs encore de chambre une autre fois. Le changement de chambre a été décidé parce qu'elle gênait sa voisine en ne dormant pas, en délirant la nuit.
  5. Un brancardier doit la descendre en chaise roulante pour faire une radiographie des poumons (elle a trente-neuf et elle tousse). Son fils est dans la chambre et le brancardier lui propose de les accompagner. Elle est installée avec adresse et douceur sur la chaise roulante. Le fils : "On ne lui met pas une robe de chambre ? Il ne fait pas froid en bas ? - Ouais, on peut." On peut. On descend dans les entrailles de l'hôpital, on traverse un couloir qui croise à angle droit l'entrée des urgences ouverte à portes battantes sur l'extérieur où, en ce mois de décembre, il fait froid. On arrive dans une salle d'attente déprimante où la secrétaire de permanence nous reçoit avec un joli sourire (elle doit prendre trois prozac par jour pour tenir le coup dans une immense salle mal éclairée, à peine chauffée où un ou deux brancards font la queue). Le brancardier nous dit que cela ne sera pas long et laisse la patiente et son fils dans un vencoulis frigorifiant. le fils de la patiente enlève sa veste pour la lui ajuster sur les genoux. Le brancardier n'avait pas menti : la patiente est appelée, les radiographies sont faites, tendues par la manipulatrice au fils en lui disant qu'il n'est pas nécessaire d'attendre le brancardier, que le fils peut remonter sa mère tout seul. Conclusion : il n'y a pas assez de brancardiers, ils ne sont pas assez payés. Non : ce type n'a pas de mère.
  6. A vingt-et-une heure le fils assiste à la distribution des médicaments et il se rend compte qu'on lui donne un demi lexomil et un tramadol 100 LP. Il interroge, nous avons oublié de dire qu'il était médecin, l'infirmière et lui dit : "Je crois que je sais pourquoi elle est désorientée. C'est le tramadol..." Pour le reste, le fils médecin (c'est moi-même) a déjà décrit l'affaire ici. Conclusion : manque de personnel ! Non : dilution des responsabilités car le fils apprendra que le lexomil avait été prescrit par l'hématologue et le tramadol par personne...
  7. Dernier point. Le fils de la malade pense que la malade dort mal, on a enlevé le tramadol, parce qu'elle déprime. Le fils interroge la psychologue du service et lui demande, après qu'il eut demandé à l'interne de le faire, de faire en sorte qu'un antidépresseur puisse être prescrit. Réponse de la psychologue : "Il faudrait voir cela avec le psychiatre demain mais, ici, nous ne savons pas bien faire cela..." Dans un service de gériatrie aiguë de l'Assistance Publique....
Je suis ici pour parler des point négatifs, je parlerai une autre fois des points positifs. Mais je signale encore que le ménage est fait à la colette et que les lits sont refaits sur l'extrême insistance des patients et de la famille des patients.
Je remercie la dame qui s'est occupée d'elle lors de l'occupation de sa troisième chambre : elle l'aidait pour les repas quand personne de la famille n'était là.

Je ne nie pas qu'il s'agisse d'une histoire de chasse, d'un cas d'espèce mais voilà un témoignage de plus pour l'HAS.

lundi 25 janvier 2010

LE CORPS DES FEMMES EN MEDECINE



Il y a déjà un moment que j'ai lu les deux textes que je vous propose, l'un de Marc Girard et l'autre de Marc Zaffran (Martin Winckler). Les psychanalystes en herbe et les plus confirmés des analystes ne manqueront pas de faire un développement sur le fait que les deux auteurs se prénomment Marc. J'ai été intéressé par la convergence de leurs analyses aux détails près que sont leur ontologie propre, leur positionnement idéologique et leur style.

Tentant de me désintoxiquer de mon bachelotage actuel qui avait pris une allure grippale (au sens de prendre en grippe), je suis revenu vers mes dadas que sont le respect de l'Humain et le respect du Patient dans la médecine.

En faisant un détour par le corps des femmes.

Je reviendrai dans une autre rubrique sur la lecture de Paul Yonnet et de son livre sur la famille qui m'a rappelé combien le problème de l'avortement (l'interruption volontaire de grossesse) était un problème crucial de la conscience moderne (Yonnet Paul, Famille - Tome I Le recul de la mort. L'avènement de l'individu contemporain, Paris, Gallimard, 2006).

Vous lirez donc ces deux textes. Le premier : La brutalisation du corps féminin dans la médecine moderne par Marc Girard, le second : Les violences faites aux femmes... par les médecins par Marc Zaffran.

J'aurais pu vous faire lire ces articles en aveugle mais l'interprétation contextuelle est indispensable.

Je ne sais si l'un a influencé l'autre et vice versa. Sachez que le texte zaffranien date du 25 novembre 2009 et que le texte girardien date du 25 janvier 2010 (remise à jour d'un texte plus ancien qui n'est pas daté sur le site).

J'ajoute, comme à l'accoutumée, que je ne suis pas d'accord avec tout ce qu'écrivent les deux médecins.

J'ajoute également, mais je n'ai pas écrit d'article à ce sujet, que le corps des hommes est lui aussi brutalisé par les médecins et je ne citerai que deux interventions, la circoncision, pour les jeunes enfants / hommes dans certaines cultures et la chirurgie de la prostate (pour adénome ou pour adénocarcinome) pour les hommes mûrs. Et, dans le passé l'amygdalectomie masculine...

J'attends qu'une femme écrive un article sur la brutalisation du corps masculin...par les médecins.

A vos plumes.

dimanche 24 janvier 2010

ROSELYNE BACHELOT : UNE INTERVIEW TOTALEMENT IMAGINAIRE


Le 24 janvier 2010
Madame Bachelot nous reçoit dans son bureau du Ministère en compagnie d'un homme qu'elle me présente comme son conseiller.

Docteurdu16 - Bonjour Madame Bachelot. Comment vous sentez-vous ? N'éprouvez-vous pas une sorte de découragement au moment où les centres de vaccination sont en train de fermer ?
Madame Bachelot - Du découragement ? Que nenni ! Je tiens d'abord à vous dire que je suis en pleine forme. Grâce au vaccin anti pandémique je n'ai pas attrapé la grippe, par ailleurs je n'ai pas eu d'effets indésirables, contrairement à ce que tous mes ennemis espéraient je n'ai pas plus de Guillain-Barré, donc, tout va bien, tout ce que j'avais annoncé s'est réalisé.
Docteurdu 16 - Pourtant il me semble que les objectifs que vous vous étiez fixés, à savoir vacciner la population entière, ne sont pas atteints, pas même celui de vacciner les personnes à risque...
Madame Bachelot - Vous avez raison. J'ai été victime de l'obscurantisme moyenâgeux qui règne dans ce pays. Tout était prêt, tout roulait et il a fallu qu' un spécialiste du paludisme à la retraite et qu'un chirurgien urologue opérant chaque 29 février fassent des déclarations à la presse pour que les anti vaccinalistes sectaires, ceux qui ne font pas vacciner leurs enfants contre la poliomyélite ou qui refusent de considérer combien la vaccination a fait reculer la mortalité en France, s'engouffrent dans la brèche...
Docteurdu16 - Mais les affirmations péremptoires et alarmistes des experts...
Madame Bachelot - ... Je vous arrête tout de suite, ce ne sont pas des experts, ce sont des médecins qui font partie de mon équipe...
Docteurdu16 - Pas des médecins généralistes en tout cas, il semble quand même que vous les ayez un peu négligés...
Madame Bachelot - Parlons-en de ces généralistes. Ce sont des enfants gâtés, des cons...
Le conseiller - Hum, hum, Madame Bachelot...
Madame Bachelot - Qu'est-ce que j'ai dit ? Que les médecins généralistes étaient des cons ? Je retire. Vous me demandiez donc pourquoi nous n'avons pas impliqué les médecins généralistes dans la campagne de vaccination ? Mais parce que ce sont des cons !
Le conseiller - Madame Bachelot, nous avions dit...
Docteurdu16 - Vous confirmez, Madame Bachelot, que les généralistes sont des cons...
Madame Bachelot - Mais non, mais non, ce ne sont pas des cons, ils sont capables de faire une piqûre dans un bras ou dans une cuisse, j'en suis certaine, mais nous avons jugé, au début de la campagne, qu'il serait plus facile, logistiquement, que la vaccination soit faite en dehors de leur activité quotidienne qui promettait d'être importante. Mais ils ont fait de l'obstruction.
Docteurdu16 - Là encore les experts se sont trompés avec leurs prévisions alarmistes !
Madame Bachelot - C'est une façon de voir les choses. Ils ne se sont pas trompés. Ils ont fait des hypothèses et ces hypothèses ne se sont pas confirmées. C'est cela la glorieuse incertitude de la science... Que n'auraient dit les professeurs à la retraite si la grippe avait été mortelle ?
Docteurdu16 - Mais n'était-il pas possible de prévoir qu'elle ne serait pas mortelle à la lumière des premiers chiffres mexicains ?
Madame Bachelot - Nous avions une hypothèse haute et une hypothèse basse. Il était de mon devoir de considérer l'hypothèse haute.
Docteurdu16 - N'eût-il pas mieux valu se concentrer sur les personnes à risques ?
Madame Bachelot - Mais c'est ce que nous avons fait ! Mais je reviens à ceci : n'oubliez pas qu'il est possible qu'une seconde vague grippale se répande sur la France...
Docteurdu16 - Les experts semblent dire le contraire...
Madame Bachelot - Voyez que vous aussi vous citez des experts... Eh bien, moi, je préfère avoir suivi l'avis des médecins que l'on considère maintenant comme alarmistes et n'avoir aucun mort sur les bras plutôt que de me tromper avec les experts qui n'annoncent pas de deuxième vague qui, elle, fera des morts...
Docteurdu16 - Tout a donc été parfait ?
Madame Bachelot - Tout n'a pas été parfait. Rien n'est jamais parfait. Moi, je suis debout dans mes crocs, j'ai fait ce que j'avais à faire et il est vrai que je n'ai pas été aidée.
Docteurdu16 - Que voulez-vous dire ?
Madame Bachelot - Tout simplement que le Ministère de l'Intérieur n'a pas été à la hauteur...
Le conseiller - Madame Bachelot ! Vous savez combien les services préfectoraux ont été diligents...
Madame Bachelot - Je rectifie : ce génie d'Hortefeux a été parfait. L'organisation était nickel. Pas un bouton ne manquait, pas un pli de pantalon, pas un étudiant infirmier...
Le conseiller - Madame Bachelot veut dire que...
Madame Bachelot - Je sais très bien ce que j'ai à dire. L'organisation aurait pu être meilleure. Un point c'est tout. D'ailleurs, même Nicolas...
Le conseiller - Madame Bachelot...
Docteurdu16 - Vous dites que Nicolas Sarkozy...
Le conseiller - Elle n'a rien dit de tout cela...
Docteurdu16 - Vous confirmez que Nicolas Sarkozy...
Madame Bachelot - Oui je confirme que le Président est derrière moi, qu'il est content de ce qui a été fait et qu'il se rappellera qui nous a mis des bâtons dans les roues.
Docteurdu16 - Ce sont peut-être les médecins généralistes qui se rappelleront...
Madame Bachelot - Ah ah ah ! Les médecins généralistes.
Le conseiller - Hum, hum, hum...
Docteurdu16 - Si c'était à refaire...
Madame Bachelot - Si c'était à refaire mais, comprenez-le, toutes choses égales par ailleurs, nous le referions. C'était à l'instant t la seule façon de procéder. Je pense que même les médecins généralistes seraient capables de s'y mettre.
Docteurdu16 - Vous voulez dire que vous les consulteriez...
Madame Bachelot - Mais nous l'avons fait. Mais si nous les avions écoutés ils en seraient encore à discuter de la date de la prochaine réunion préliminaire à la réunion préliminaire pour définir la couleur des bons de convocation à la vaccination dans leurs cabinets.
Docteurdu16 - Vous n'exagérez pas un peu ?
Madame Bachelot - A peine. Bon, vous avez encore des questions mais c'est pas tout ça j'ai deux ou trois crocs à essayer...
Docteurdu16 - Parlons donc des enseignements que vous allez tirer de ce fiasco.
Madame Bachelot - Le mot fiasco est bien exagéré. Il y a eu plus de 200 morts, ce qui est trop, mais, heureusement, il n'y a pas eu les milliers qui étaient prévus.
Docteurdu16 - Pas grâce à la vaccination.
Madame Bachelot - Qu'est-ce que vous en savez ?
Docteurdu16 - Alors... Pas d'enseignements. Pourquoi n'avoir pas convoqué MSF ou autres organisations pour faire de la bonne logistique en France ?
Madame Bachelot - Ils étaient contre la vaccination.
Docteurdu16 - Vous en êtes certaine ?
Madame Bachelot - Oui, ouiiiiiiiiii. Ou plutôt, ils disaient que ce n'était pas possible de vacciner tout le monde.
Docteurdu16 - Pourquoi ne pas les avoir écoutés avant de vous lancer dans une campagne de masse qui semblait vouée à l'échec ?
Madame Bachelot - Par volontarisme. La politique veut que l'on soit volontaire et mon éthique me disait de ne laisser personne sur le bord de la route. Je ne voulais pas d'une loterie mortelle.
Docteurdu16 - Mais c'est ce qui s'est passé puisque seulement une fraction des personnes dites à risques ont été vaccinées et que seules, je ne connais pas les derniers chiffres précisément, 35 personnes sans facteurs de risques sont mortes.
Madame Bachelot - Eh bien, c'est ce que je voulais éviter.
Docteurdu16 - C'est donc raté !
Madame Bachelot - Ce n'est pas raté. C'est une bonne répétition pour la prochaine pandémie.
Docteurdu16 - Donc, vous allez changer quelques mesures...
Madame Bachelot- Nous y travaillons.
Docteurdu16 - Je prends l'exemple de l'expertise. Ne pensez-vous pas qu'il faudrait réévaluer son fonctionnement, le rendre plus clair, préciser quels sont les possibles conflits d'intérêts. Est-il possible de changer queque chose ?
Madame Bachelot - Je suis toujours étonnée par ce genre de réflexions. Les experts sont les experts. Ils sont reconnus par leurs pairs. Ils publient, ils vont dans des congrès...
Docteurdu16 - Ils sont rémunérés par l'industrie vacinale.
Madame Bachelot - Mais bien entendu qu'ils sont rémunérés par l'industrie. Ce sont les meilleurs, ils travaillent sur les vaccins et ce sont les laboratoires qui mènent les études. C'est normal qu'ils soient rémunérés.
Docteurdu16 - Il y a bien des experts indépendants...
Madame Bachelot - Vous voulez parler de virologues comme Gentilini ou Debré ? Laissez-moi rire. Nous avons les meilleurs et, d'ailleurs, ils sont reconnus au niveau mondial. L'Institut Pasteur, ce n'est pas rien...
Docteurdu16 - Et les conflits d'intérêts, donc ?
Madame Bachelot - Nous faisons en sorte qu'ils soient déclarés. Mais cela ne change rien aux chiffres. Le nombre de morts ne change pas selon que l'on a reçu une invitation pour parler au Novotel de Bagnolet ou que l'on est restés chez soi à regarder Les Feux de l'Amour.
Docteurdu16 - Cela change quand même la façon dont les rapports sont rédigés ou les décès dus aux vaccins sont signalés...
Madame Bachelot - Les vaccins commercialisés en France sont les plus sûrs du monde... Les experts français sont honnêtes. Parlons des experts indépendants qui étaient encore plus alarmistes que les autres, qui touchent de l'argent de l'Etat ou dont la femme fait partie de comités officiels sur le médicament. Pourquoi vous entêtez-vous à semer le doute ? Je crois que nous allons en arrêter là. Vous commencez à déraper.
Docteurdu16 - Je ne dérape pas, je pose des questions. Je note que vous ne regrettez rien, que vous ne changerez rien et que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes...
Madame Bachelot - Là vous dérapez vraiment. Il ne me reste plus qu'à aller prier les Dieux de la Sainte Science qu'une deuxième vague mortelle de AH1N1 va venir frapper notre beau pays et qu'on sache enfin de quels crocs je me chausse !
Le conseiller - Madame Bachelot !

Fin de l'entretien.
PS - Vous pourrez consulter sur ce blog différents points abordés dans l'interview totalement imaginaire)

mardi 19 janvier 2010

L'OTIPAX NE DOIT PLUS ETRE UTILISE

Dans notre série "Que fait la pharmacovigilance française ?" nous posons le problème mineur de l'Otipax car il est bien évident qu'il est des chantiers plus urgents dans notre beau pays.

L'otipax est une aberration absolue.

Car non seulement l'Otipax ne sert à rien mais, plus encore, son rapport bénéfices / risques est dans les paquerettes.

La particularité de ce produit est non seulement de n'avoir aucun intérêt médical mais, plus encore, d'être en vente libre.

Reprenons par le début :

Prescrire des gouttes auriculaires ne se justifie plus que dans des cas très particuliers : antibiothérapie locale probabiliste ou non.

Prescrire des gouttes auriculaires ne peut se faire qu'après avoir vu l'état du tympan.

Il vaut mieux, en général, s'abstenir de prescrire des gouttes auriculaires sauf dans le cas sus décrit.

Qui peut produire un seul argument pour prescrire de l'Otipax qui contient un anesthésique local (lidocaïne) et un analgésique antipyrétique (sic) la phénazone ?

Dernier point : l'Otipax est en vente libre. C'est à dire que tout pharmacien, au dessus de son comptoir, peut vendre de l'Otipax sans avoir vu le tympan ; c'est à dire que tout parent peut acheter de l'Otipax pour en mettre dans l'oreille de son enfant. Sans avoir regardé le tympan.


Cesser la commercialisation de l'Otipax me paraît une mesure appropriée et j'engage les patients / malades à le refuser tant en pharmacie que chez le médecin.

dimanche 17 janvier 2010

LA CRISE A/H1N1v N'EST PAS FINIE

Alors que chacun s'accorde à reconnaître, sauf il est vrai Roselyne Glaxo soutenue en cela par Nicolas S qui entame une manœuvre de diversion à l'encontre de la médecine libérale, que la campagne de vaccination anti grippe A/H1N1v est un fiasco retentissant, rien ne change et rien ne semble devoir changer.


Rien ne change sur le plan des preuves.

Personne ne sait si le vaccin anti A/H1N1v est efficace. Les propos incantatoires et les prêches magiques ne font rien à l'affaire : nous ne savons rien sur l'efficacité de ce vaccin. Quant à sa tolérance elle semble meilleure dans les analyses post-marketing (menées par les mêmes équipes qui déclaraient a priori qu'il était obligatoirement sûr) que dans les essais menant à l'AMM (simplifiée), notamment pour le Pandemrix.

Personne ne sait si les antiviraux sont efficaces. Les rapports australiens, néozélandais, américains et autres anglo-gallois ont beau répéter à longueur de lignes qu'il eût mieux valu prescrire le tamiflu dans les 48 premières heures des symptômes, il s'agit d'impressions tirées d'analyses post hoc, à partir d'études statistiques dites multivariées dont la robustesse est peu évidente... Tant que nous ne disposerons pas d'essais contrôlés il sera assez difficile de se faire une idée.Mais il est probable que nous n'en aurons jamais. L'éthique sera avancée pour les interdire : faisons confiance aux experts.

Enfin, last but not least, l'affirmation selon laquelle les vaccins dits pandémiques seraient aussi efficaces que les vaccins saisonniers laissent rêveurs quand on connaît, justement, l'efficacité très relative de ces vaccins saisonniers sur les populations théoriquement à risques.


Rien ne change sur le plan du recueil des données.

Le fiasco organisationnel ne saurait masquer le fiasco de l'épidémiologie en France mais aussi partout dans le monde. Il n'est pas possible de compter les morts effectivement dus à la grippe saisonnière ! J'avais avancé que cela pouvait être une particularité française mais les chiffres anglo-gallois me font mentir comme vous le pourrez lire dans le courrier des lecteurs du BMJ .


Rien ne change sur le plan de l'analyse des données.

La controverse sur l'efficacité de la vaccination anti grippe saisonnière est au centre de la réflexion que nous devons avoir sur la grippe A/H1N1v. Le consensus expertal est total pour dire que les nouveaux vaccins sont efficaces. Il est même des papiers, prétendument indépendants, qui proposent des analyses coût-efficacité assumant cette efficacité à 100 % !Quelques outlaws arrivent à émerger et notamment Tom Jefferson dans le cadre de la Collaboration Cochrane. Les données de la Collaboration Cochrane ne sont pas des textes sacrés. Il est possible et il est nécessaire de les critiquer, de les évaluer et d'en faire l'analyse. Mais dans le cas de la grippe saisonnière il est soit clair que le vaccin est peu efficace, soit clair que les études manquent pour en décider. Après tant d'années ! Certains mettent en avant des revues dites indépendantes comme La Revue Prescrire qui affirme que la vaccination contre la grippe saisonnière est bénéfique en termes de mortalité et de morbidité. Comment comparer des méta analyses consultables (Cochrane) et des avis d'experts rédigés sur un coin de table Boulevard Voltaire ? La Revue Prescrire dispose-t-elle d'une méthode inconnue des autres chercheurs pour décider du rapport bénéfices / risques tiré d'essais cliniques divers et variés ? Si c'était le cas une publication s'imposerait !


RIEN NE CHANGE !

Le discours actuel tel qu'on peut l'analyser sur le net ou à l'intérieur de forums de discussion inter médecins est assez inquiétant.
Les médecins n'ont pas compris.
Ils discutent encore des modalités de la vaccination anti grippale en affirmant "On vous l'avait bien dit !" mais rien sur le fond. Les syndicats organisent des débats, envoient des questionnaires pour savoir ce que les médecins pensent (la démocratie participative) et pour affirmer qu'ils avaient été les premiers et que l'on va voir ce que l'on va voir, avec les médecins généralistes, ça va rouler... des mécaniques ? Il en est cependant certains qui disent qu'il est désormais trop tard et qu'il n'est pas question de se laisser imposer des mesures impératives après s'être fait prendre pour des incapables...
Nous n'en sommes plus là !
Il faut demander des comptes !
Demander des comptes à Roselyne Glaxo !
Demander des comptes aux experts qui ont fait preuve d'autant de légèreté et d'autant d'aplomb sans émettre l'once d'une autocritique !
Dans le milieu fermé et corrompu de l'expertise française vaccinale on serre les coudes. On serre les coudes pour garder ses postes dans les différents comités Théodule qui décident de ce qu'il faut ou ne pas faire, de comment il faut vacciner, de comment il faut faire des enquêtes autour d'un cas, de comment il faut toujours en faire plus pour vacciner encore plus de monde !
Les experts se sont trompés, ils ont trompé le gouvernement et le gouvernement a marché d'un seul pas en ne se posant pas de questions puisque les scientifiques étaient avec lui.

Cela ressemble tellement à la crise financière que nous en sommes baba.

Madame Roselyne Glaxo, après avoir privatisé les profits, nationalise les pertes !

Il faut remettre à plat le système expertal français. Il faut que la médecine générale participe, par l'intermédiaire de ses sociétés savantes, à ce processus décisionnel et non que des médecins généralistes croupions participent à des commissions pour faire banquette ou tapisserie. Les sociétés savantes de médecine générale ont réagi. Mais tard. Elles n'ont toujours pas réagi sur le chapitre vaccinal. Je vais essayer d'analyser ce point.

Pourquoi nous n'avons pas été entendus.
Premier point : il est difficile, dans le pays de Pasteur, de mettre en doute le dixième de la moitié d'une assertion sur l'efficacité de toutes les vaccinations. Rappelons quand même combien Pasteur, non médecin, a été critiqué par les mêmes médecins qui invoquent sa mémoire à tout bout de débat.
Deuxième point : certains opposants, tels Marc Girard (et Marc me pardonnera ces critiques), ont plus insisté sur la dangerosité du vaccin anti grippal que sur l'inutilité de la vacination de masse.
Troisième point : dans le bruit de fond anti gouvernemental anti Bachelot il était difficile de faire la part entre la faiblesse du dossier vaccinal, l'utilité éventuelle de vacciner les personnes à risque et la bêtise de vouloir vacciner tout le monde.
Quatrième point : encore maintenant il n'existe aucune donnée scientifique sur l'efficacité potentielle du vaccin anti pandémique et ainsi était-il difficile d'aller à l'encontre des discours flamboyants de Bachelot, Houssin et consorts.
Cinquième point : il existe des opposants à toute vaccination et il était facile d'être assimilés à ceux-là par les tenants du tout vaccinal.
Sixième point : les experts officiels, semi officiels et non officiels ont pratiqué la politique du doute qui ne pouvait que profiter à la peur généralisée.

Que faire désormais ?
Il faut poser les questions sans crainte et ne pas se réfugier derrière les positions expertales et / ou les positions tardives des sociétés savantes, des journaux dits indépendants. Poser des questions à nos gouvernants. Poser des questions aux experts. Poser des questions aux universitaires. Poser des questions aux médecins généralistes. Poser des questions aux spécialistes hospitaliers ou non.

Voici, pour résumer, les questions en chantier sur la grippe :
  1. Quelle est l'efficacité de la vacination contre la grippe saisonnière ? En annexe : comment les morts sont-ils comptés ?
  2. Parfaire les dossiers d'AMM sur la grippe pandémique et notamment éclaircir le nombre excessif de décès (non attribués au vaccin) dans les essais cliniques, notamment pour Pandemrix.
  3. Faire de la pharmacogilance vaccinale qui dépasse les quelques jours d'observation retenus dans les dossiers.
  4. Mettre en place des essais sur le Syndrome de Détresse respiratoire Aigu
  5. Avoir des données d'efficacité sur le vaccin anti grippe A/H1N1v à partir d'essais indépendants
  6. Revoir la notion de personnes à risques à la lumière des chiffres des différents pays afin de mieux cibler ces populations et, surtout, ne pas raconter n'importe quoi sur ces groupes à risques qui s'avèrent ne pas être si à risques que cela : les enfants et les nourrissons en particulier
  7. Réanalyser les rapports bénéfices / risques du Tamiflu et mener des essais de qualité indépendants

La crise A/H1N1v n'est pas finie : elle ne fait que commencer.



mardi 12 janvier 2010

LE TRAMADOL EST UNE MOLECULE DANGEREUSEMENT TROP PRESCRITE

Au moment où va être effective la disparition du dextropropoxyphène-paracetamol sans ou avec caféine (DIANTALVIC et autre PROPOFAN) sous toutes ces formes (voir ce blog) en raison de décès et d'addiction essentiellement en Grande-Bretagne et dans les pays du Nord de l'Europe, je voulais souligner la dangerosité du tramadol, en général et essentiellement chez les personnes âgées.

En regardant mes chiffres d'effets indésirables pour l'année 2008 (non publié) je remarque qu'une classe pharmacologique (les antiinflammatoires non stéroïdiens) et une molécule (le tramadol) sont en tête des effets. Alors que je prescris extrêmement peu de tramadol.

Une de mes patientes, 86 ans, est hospitalisée dans un service de gériatrie aiguë (sic) de l'Assistance Publique. Au quatrième jour elle a des difficultés à parler, elle confond le jour et la nuit, elle a des trous de mémoire, elle est désorientée, a du mal à reconnaître ses proches.
On peut, à juste titre, invoquer l'hospitalisme, la difficulté du déracinement, le fait de dormir à deux dans une chambre et... la maladie elle-même qui l'a conduite à l'hôpital. Son fils, médecin, assiste à 21 heures à la distribution des médicaments et se rend compte que la patiente, sa mère, reçoit un demi lexomil et un tramadol à longue durée d'action dosé à 100 mg.

Damned !

L'infirmière confirme, en regardant l'ordinateur (les pancartes ont disparu du lit des malades) que les troubles ont commencé depuis la prescription conjointe de bromazepam / lexomil et de tramadol. Le fils, médecin, arrive à négocier le fait que l'on ne lui donne pas de tramadol le soir même et se fait engueuler le lendemain matin par une autre infirmière lui affirmant que puisque la patiente a toujours des troubles ce matin cela ne pouvait être le tramadol et qu'il faut faire confiance aux médecins (sic).

Le fils, médecin, finit par parler à l'interne à 15 heures qui fait l'étonnée et qui finit par avouer qu'elle ne savait pas pourquoi on avait prescrit du tramadol car la patiente ne souffrait de rien !

Le fils, médecin, fait remarquer à l'interne et à la chef de clinique venue à la rescousse pour sauver le corps médical universitaire, que les généralistes qui le veulent bien, pas ce médecin qui refuse, ont signé un contrat de Paiement à la Performance (CAPI) pour ne pas prescrire, entre autres de benzodiazépines à demi vie longue chez les personnes âgées !

Mais revenons à nos moutons.

Quel est l'intérêt de prescrire du tramadol ?

J'engage les confrères et les patients à déclarer leurs effets indésirables et notamment ceux dus au tramadol et, plus généralement, à refuser qu'on leur en prescrive pour des douleurs banales.

J'ajoute que trouver des profils de pharmacovigilance du tramadol sur Internet tient du parcours du combattant. Bien entendu l'AFSSAPS ne dit rien, ne fait rien, ne publie rien. La pharmacovigilance française est dans un tel état de déliquescence, comme le fiasco grippal nous l'a appris (Fiches de Pharmacovigilance rédigées par le cabinet de Roselyne Glaxo), qu'il ne faut s'étonner de rien. Sur le site de l'EMEA, pas grand chose, sinon que l'intérêt du tramadol dans les douleurs neuropathiques est nul, mais il n'y a pas d'AMM européenne pour ce produit. Deux agences se distinguent par leur transparence. L'Agence britannique et l'Agence néerlandaise (MEB).
J'ai recherché sur le site néerlandais de pharmacovigilance (l'AREB-- Merci Potard Déchaîné) ce qui pouvait avoir trait à la patiente de 86 ans.
Et j'ai trouvé ceci dont on peut lire la conclusion : "18 notifications d'hallucinations ont été reçues par Lareb. Ces rapports sont retrouvés de façon disproportionnée dans les bases de données du WHO et de Lareb. Les rapports retrouvés dans la littérature sont convergents. La plupart de ces rapports concernent des patients âgés prenant des substances psychotropes associées. Bien que ces facteurs puissent être confondants, en pratique le tramadol est utilisé chez ce type de patients. Les hallucinations surviennent généralement dans la semaine de l'initiation et disparaissent généralement après l'arrêt du traitement."

Ce cas d'espèce ne doit pas nous faire oublier la dangerosité potentielle du tramadol, notamment les formes à libération prolongée en raison de la durée des effets.
Il faut donc peser avec attention la prescription de ce genre de molécule, seule ou associée, préférer la codéine et savoir qu'il existe des effets croisésentre codéine et tramadol.
Le tramadol est commercialisé en France sous plusieurs noms de marque : contramal, topalgic, zamudol, ixprim, zaldiar et autres...