Monsieur S, 56 ans, est un supporter acharné de l'OM. Nul doute qu'il ne s'agit pas d'une catégorie de patients cataloguée par le census braunien mais toujours est-il que ce patient que je connais depuis mon installation, dont je suis le médecin de sa famille depuis mon installation, mais pas son médecin depuis mon installation parce qu'il travaille à la SNCF et qu'il a l'habitude d'aller voir les médecins SNCF (je passe sur ce détail anecdotique sans faire aucun commentaire sur les médecins SNCF, nous sommes à la veille d'un jour de lutte sociale et il faut aussi que les médecins serrent les rangs pour obtenir le plus vite possible des augmentations d'honoraires, donc : tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil, dont les médecins SNCF, dont acte), donc, ce monsieur, charmant au demeurant, qui a désormais choisi que je sois son médecin traitant depuis qu'il n'est plus contraint d'aller consulter un médecin agréé (je n'ai pas dit agrégé bien que je connaisse de nombreux médecins agrégés, voire chefs de service, qui sont médecins SNCF, dans un grand élan social, n'en doutons pas), supporter acharné de l'OM (personne n'est parfait et nul ne me reprochera de ne pas pratiquer l'empathie et encore moins la sympathie puisque je suis supporter, pas acharné du tout, du Paris Saint-Germain -- chacun ses faiblesses et c'est mieux que de prescrire du pipi de chat hors AMM à un malade qui est tout juste un patient), est malade.
Pour l'heure, rien de politiquement incorrect. Il a même une angine et, comme c'est un malin et que, bien que supporter de l'OM acharné (et il ne sait pas encore que l'OL va battre ce soir son équipe préférée lors d'un match d'un ennui profond), il ait un poil d'humour, il me lance, rigolard : "Les antibiotiques, docteur, c'est pas automatique." Je lui lance une réplique à ma façon (le genre mec qui comprend mais à qui on ne la fait pas...) puis il ajoute : "J'ai surtout une grande nouvelle à vous annoncer : je suis à la retraite depuis le premier janvier !"
Je le regarde avec sérieux et tristesse : Je crains, cher ami, que vous ne deviez changer de médecin traitant. Si vous ne pouvez conduire un train à cinquante-six ans, moi, au même âge que vous, je ne suis pas non plus capable de vous soigner..."
Il a eu beaucoup moins d'humour que pour les antibiotiques mais il a fini par rire jaune et après être sorti du cabinet, avec une ordonnance sans antibiotique, il m'a serré la main avec chaleur.
Le reverrai-je un jour ce joyeux retraité ?
Pour l'heure, rien de politiquement incorrect. Il a même une angine et, comme c'est un malin et que, bien que supporter de l'OM acharné (et il ne sait pas encore que l'OL va battre ce soir son équipe préférée lors d'un match d'un ennui profond), il ait un poil d'humour, il me lance, rigolard : "Les antibiotiques, docteur, c'est pas automatique." Je lui lance une réplique à ma façon (le genre mec qui comprend mais à qui on ne la fait pas...) puis il ajoute : "J'ai surtout une grande nouvelle à vous annoncer : je suis à la retraite depuis le premier janvier !"
Je le regarde avec sérieux et tristesse : Je crains, cher ami, que vous ne deviez changer de médecin traitant. Si vous ne pouvez conduire un train à cinquante-six ans, moi, au même âge que vous, je ne suis pas non plus capable de vous soigner..."
Il a eu beaucoup moins d'humour que pour les antibiotiques mais il a fini par rire jaune et après être sorti du cabinet, avec une ordonnance sans antibiotique, il m'a serré la main avec chaleur.
Le reverrai-je un jour ce joyeux retraité ?