jeudi 27 juin 2019

Existe-t-il un débat sur l'oncologie en France ?

Les publications du laboratoire Roche entre 2008 et 2017 (dont oncologie)

Non.

En France l'oncologie est un domaine protégé.

Cadenassé.

99,9 % des oncologues français ne publient pas d'articles réflexifs sur leur spécialité.

Et toute personne, non oncologue, qui se permettrait de réfléchir sur cette spécialité sera renvoyée dans les cordes.

La réflexion sur la pratique de l'oncologie pourrait être :
  1. Scientifique
  2. Médicale
  3. Philosophique
  4. Epistémologique
  5. Ethique
  6. Sociétale
  7. Economique

Les oncologues français (99,9 %) et les hémato-oncologues français (99,9 %) ont des certitudes :
  1. Le dépistage des cancers sauve des vies
  2. La décision partagée fondée sur des données solides est un fantasme 
  3. Le sur diagnostic des cancers est une invention des épidémiologistes
  4. Le sur traitement des cancers n'existe pas
  5. Le rapport bénéfices/risques des procédures anticancéreuses est toujours bon 
  6. Les essais cliniques de non infériorité fondés sur des critères de substitution ne sont pas critiquables.
  7. Le critère du Progression Free Survival est un excellent outil d'évaluation des anti cancéreux 
  8. Les critères de jugement des anti cancéreux que sont la survie globale et la qualité de vie sont accessoires
  9. La médecine de précision/personnalisée est l'avenir de l'oncologie
  10. Le cancer va disparaître à plus ou moins longue échéance
  11. L'industrie pharmaceutique ne les influence pas
  12. Les réunions de concertation pluridisciplinaires d'où sont exclus les patients et les médecins traitants sont indépendants de l'industrie pharmaceutique
  13. Les soins palliatifs, c'est le plus tard possible.
Bien entendu la France est un cas à part (les Français sont des génies).

Dans d'autres pays où les technolâtres technicistes progressistes fascisants (c'est ainsi que certains s'appellent) exercent moins leur pouvoir (celui de nommer les ministres de la santé, les directeurs généraux de la santé, les directeurs d'agences gouvernementales, les chefs de service, les PU-PH, celui de rémunérer les Key Opinions Leaders -- en français les Manipulateurs d'opinion--), où l'industrie pharmaceutique est tout aussi puissante (avec ses boards rémunérateurs qui sont comme des jetons de présence pour les membres des comités exécutifs des grands groupes capitalistes), il existe des oncologues, voire des hématos-oncologues qui publient des articles, qui réfléchissent, qui s'interrogent, qui interrogent le public profane, sur l'oncologie en tant que discipline médicale et sociétale.

Ce discours, mon discours est éminemment complotiste. Ce sont les technolâtres qui le disent. Lire cet article sur les réseaux d'influence de 3 grandes firmes pharmaceutiques : LA

Le fait que le manque de réflexion soit inversement proportionnel au degré de corruption est un hasard.

Voici pour nos oncologues français un article de Vinay Prasad (ICI) qu'ils ont lu d'un derrière distrait (ou non pas lu, le nom même de l'auteur leur donnant des démangeaisons), qu'ils n'ont pas commenté dans le British Medical Journal pour ne pas faire effet Streisand, un article qui ne sera pas non plus commenté à la machine à café de l'Institut Gustave Roussy ou de l'Institut Curie.



Voici quelques morceaux choisis.

Do cancer drugs improve survival or quality of life?

...between 2008 and 2012 the US Food and Drug Administration approved most uses of cancer drugs without evidence of survival or improved quality of life (67%, 36/54).1 Among the 36 such approvals, only five (14%) uses were shown later to improve survival compared with existing treatments or placebo after a median of 4.4 years on the market.

In their study of cancer drugs approved by the European Medicines Agency between 2009 and 2013, 57% (39/68) had no supporting evidence of better survival or quality of life when they entered the market. After a median of 5.9 years on the market, just six of these 39 (15%) agents had been shown to improve survival or quality of life.

The expense and toxicity of cancer drugs means we have an obligation to expose patients to treatment only when they can reasonably expect an improvement in survival or quality of life.

Ceci n'est que le début d'une série d'articles sur l'oncologie.

Illustration tirée de cet article : ICI

vendredi 14 juin 2019

Répondre à Luc Perino.

PLACEBO 1966


La tribune qu'a publiée Luc Perino dans le journal Le Monde, Déremboursons plus que l'homéopathie, pose d'énormes questions et les réponses de l'auteur paraissent pour le moins curieuses et problématiques. Voici La Tribune : LA.

Luc Perino prend prétexte de la tribune des 124 (ICI) demandant le déremboursement de l'homéopathie et d'autres babioles (vous verrez ce que j'en ai pensé LA) pour développer ses idées.

Il tire trois conclusions de la tribune des 124, je cite (en italique) : 
  1. Le remboursement doit être basé sur des preuves rigoureuses d'efficacité
  2. La comparaison à un placebo suffit à l'élaboration de ces preuves
  3. L'effet placebo ne relève pas de la solidarité nationale
Il est possible que les signataires de la tribune soient d'accord avec ces pré-requis...

Luc Perino décline ensuite de façon jusqu'au-boutiste cette argumentation et en tire des conclusions qui ne laissent pas de me surprendre.


La proposition 1. semble faire l'unanimité.
Qui pourrait penser que l'on puisse rembourser des pratiques médicales et non médicales, des pratiques de soins pour simplifier, qui ne soient pas efficaces ? 

Pourtant, ce n'est pas aussi simple que cela.

Considérons qu'à partir d'aujourd'hui ne soient remboursées que les pratiques de soins qui sont efficaces, que fait-on de celles qui sont déjà remboursées et qui n'ont pas encore prouvé leur efficacité  ? On les dérembourse en bloc ? C'est, me direz-vous, ce qui passe avec l'homéopathie. Mais que de difficultés pour cette pratique particulière qui n'entre pas dans le cadre de la science ! Quand on va s'attaquer à des molécules d'usage commercialisées par de grands groupes ce ne sont pas les experts Boiron qui vont monter au créneau. Et nul doute que les patients vont hurler au scandale  en disant : " La sécu ne rembourse plus rien !"

Par ailleurs, au delà des preuves d'efficacité à obtenir, il s'agit de définir a priori les preuves d'efficacité sur lesquelles se fonder pour décider de l'efficacité.

Prenons un simple exemple dans le domaine cardiovasculaire : les molécules qui obtiennent  (ou qui ont obtenu) l'Autorisation de Mise sur le Marché dans l'indication "Traitement de l'hypertension artérielle essentielle", sic, comme si l'hypertension artérielle était une maladie, ont fait la preuve, sans doute versus placebo, qu'elles faisaient baisser significativement la pression artérielle par rapport à un placebo. Mais combien d'entre elles, individuellement, et pas par effet de classe thérapeutique ou par effet de classe pharmacologique, sont capables de produire des essais montrant une baisse significative de la morbi-mortalité ? On peut en effet légitimement considérer que la pression artérielle est un critère de substitution.
Nous savons depuis un certain temps (2003) que l'utilisation des beta-bloquants en première ligne dans le traitement de l'HTA n'était pas fondée en termes de morbi-mortalité (étude LIFE) mais qu'ils faisaient baisser la pression artérielle autant que les sartzas, par exemple. Rappelons-nous également l'étude ALLHAT (en 2002) qui a détruit définitivement les alpha-bloquants dans le traitement de l'hypertension (voir LA).

Faut-il dérembourser toutes les molécules qui n'ont pas satisfait aux critères énoncés ?

Cela ferait du bruit.

Il existe des centaines de domaines, hors HTA, où l'on pourrait s'engager.

La proposition 2. est plus problématique.
La comparaison à un placebo suffit pour renseigner le point 1. Comme le souligne Luc Perino 90 % des molécules du Vidal n'ont pas satisfait à ce critère (il exagère sans doute), il faudrait donc, pour qu'elles ne soient pas considérées comme des placebos, et donc déremboursées, qu'elles soient soumises à des essais cliniques contrôlés. 

Qui va se lancer dans un truc pareil avec le prix de vente dérisoire  de certaines gouttes nasales et le coût pharamineux des essais cliniques ?

On a vu que la pénurie en France de prednisone, de prednisolone et/ou de betamethasone est probablement liée à leur prix de vente ridiculement bas.

Dans certains cas, quand il existe une ou des molécules qui ont fait la preuve de leur efficacité un essai contre placebo ne se justifie pas : il faut comparer la molécule entrante au produit de référence avec des critères méthodologiques validés. Je n'entrerai pas dans le détail des essais de non infériorité (qui ne sont pas tous critiquables), des essais où les critères d'efficacité sont biaisés dès la conception du protocole, des essais statistiquement significatifs mais cliniquement aberrants, des essais menés sur des critères de substitution, notamment en oncologie où les deux critères majeurs, sauf exceptions, il y en a toujours, devraient être la survie globale et la qualité de vie...

Mais surtout (et Luc Perino en parle) : quid des procédures ou des soins ou des matériels pour lesquels il n'est pas possible de mener un essai contrôlé en utilisant un placebo ? 

Prenons l'exemple de la psychothérapie. Est-il possible de mener un essai versus placebo en double-aveugle (avec un faux psychologue, de faux concepts ?). Les spécialistes vont nous dire qu'en psychologie clinique des essais ont été menés et sont significatifs. Mais pas des essais versus placebo.
Prenons l'exemple de la kinésithérapie. Existe-t-il des essais électrodes actives versus électrodes inactives ? Existe-t-il des essais massages transverses profonds versus faux massages transverses profonds ?

Prenons l'exemple des cures thermales. J'ai lu ici et là des essais qui montrent bla bla bla, mais ce ne sont pas des essais contrôlés en double-aveugle versus placebo.

Prenons l'exemple des prothèses de hanche, des pace-makers : vous voyez l'affaire...

(Je n'ai pas bien compris pourquoi, au bout du compte, Luc Perino finissait pas dire que les seuls essais interprétables devraient se faire placebo versus placebo... Ainsi les homéopathes pourraient-ils mener des essais de non infériorité granules homéopathiques versus placebo "neutre")

La proposition 3. est sans doute originale mais pose des problèmes compliqués.
On comprend que les placebos ne devraient plus être remboursés par l'assurance maladie. Les placebos ou les procédures placebos.

Prenons la proposition au pied de la lettre en poussant le raisonnement jusqu'au bout. Un essai molécule active contre placebo permet de vérifier le supplément d'âme du médicament par rapport à l'effet placebo.

Ainsi, pour pousser le paradoxe jusqu'au bout, si l'on considère que l'effet placebo constaté des molécules actives à visée anti dépressive varie entre 50 à 70 %, la solidarité nationale ne devrait rembourser que 50 à 30 % du prix demandé par le fabricant. C'est à dire la véritable activité de ces molécules.

A contrario il n'est pas besoin de faire un essai versus placebo pour savoir si des verres correcteurs permettent de mieux voir : les verres correcteurs devraient donc être remboursés à 100 %

Mais là où Luc Perino fait l'âne pour avoir du son, c'est quand il dit que les placebos ne devraient être remboursés que par les mutuelles... Oublie-t-il que les mutuelles a) sont devenues obligatoires, b) qu'elles sont des sociétés à but lucratif, c) et que leur tarif dépend de ce qu'elles remboursent ?

Donc : l'assurance maladie ne rembourse que les soins qui ont fait l'objet d'essais contrôlés versus placebo significatifs et les mutuelles le reste (en cessant d'être obligatoires).

Mais Luc Perino ne dit pas cela : "Osons séparer franchement le financement des soins entre le domaine régalien et le domaine marchand. Réservons au financement public les soins de proximité, la traumatologie, les urgences médicales et chirurgicales, la protection maternelle et infantile, l’obstétrique, la périnatalité et les agonies terminales. Et laissons au domaine privé toute la pharmacologie, placebo ou non, d’exception ou de routine, de pointe ou non."

Et là il dit n'importe quoi.

Quand il affirme que "Les autorités sanitaires n'ont plus les moyens de s'opposer aux lobbys", c'est terrible. Quand il écrit que "Les patients sont devenus les marionnettes de l'industrie et leurs associations sont les suppôts naïfs de l'industrie" il y va fort.

Tout au plus pourrait-on insinuer que la médecine à deux vitesses serait vraiment instituée : les procédures validées pour tout, le charlatanisme pour les riches.

La publication récente d'un article remettant en cause 396 traitements à partir de 3000 publications d'essais randomisés dans les Big 3 de l'édition mondiale à savoir JAMA, NEJM et Lancet arrive à point nommé : ICI.

En réalité si on voulait tirer des conclusions en mixant la tribune de Luc Perino à celle des 124, cela pourrait conduire à ceci :

  1. On remet en question le remboursement par la branche maladie de toutes les molécules, de toutes les procédures (de chirurgie, de psychothérapie non médicamenteuse, de kinésithérapie, de soins), de tous les matériels, de tous les programmes de prévention, de dépistage et autres qui n'ont pas fait la preuve de leur efficacité versus placebo
  2. On refuse toute nouvelle procédure qui n'a pas fait la preuve de son efficacité sur des critères pré-établis reposant sur le principe général des essais contrôlés.
  3. On supprime le ticket modérateur pour toutes les procédures validées dans un système où l'assurance maladie est le payeur unique.
  4. On renvoie aux assureurs le remboursement des soins non encore validés selon les critères préalablement établis et on supprime les mutuelles obligatoires.

Chiche ?

PS. Article paru le 21 juin 2019 dans le JIM : ICI.



jeudi 6 juin 2019

In memoriam.

Relire les articles solides, pédagogiques et documentés de Jean-Philippe Rivière sur le site Vidal et sur le site Doctissimo sera notre conseil hommage : il écrivait bien.




Pour le voir "en vrai".

C'était un médecin à l'esprit fin, à l'intellect rapide, cultivé, il avait une très forte capacité de synthèse, c'était un grand vulgarisateur au sens noble : il rendait les choses faciles. Sa passion pour l'Inde et pour le jazz (et pour Jan Garbarek) ne le rendait pas moins sympathique.

samedi 1 juin 2019

Orwell est partout, Huxley est nulle part.





1984 est le roman à la mode.

Tout le monde cite Orwell dont le roman est paru en 1947.

Il suffit de regarder autour de soi pour constater que les mensonges d'Etat font flores, que les mensonges journalistiques sont légion, que les mensonges politiques s'accumulent.

La novlangue montrée du doigt par Orwell est dénoncée par tous. Et ce qui rend la novlangue, novlangue d'elle-même, c'est que tout le monde, en parcourant le spectre des idées depuis l'extrême-droite jusqu'à l'extrême-gauche, la dénonce chez les autres.

La novlangue, c'est les autres.

1984 est cité par tous comme une prophétie politique. Une prophétie politique en train de se réaliser.

Les pourfendeurs de la novlangue oublient qui était Orwell, ses idées, ses combats, ses adversaires. L'extrême-droite, la droite, la gauche, l'extrême-gauche s'en remettent à lui en omettant de dire que face à lui ils seraient balayés.

Il est vrai que la société de surveillance imaginée par Orwell est à l'oeuvre un peu partout dans ce monde globalisé où de l'est à l'ouest, du nord au sud, l'horizon est dégagé pour le capitalisme néo-libéral triomphant qui est devenu la civilisation-monde.

Big brother is watching you.

Nul doute que Georges Orwell, s'il publiait son livre aujourd'hui, serait traité de complotiste.

Le capitalisme néo-libéral est désormais considéré comme le régime naturel qui doit régner sur la planète.

"Il est plus facile d'imaginer la fin du monde que d'imaginer la fin du capitalisme" a dit Slavoj Zizek.

Et dans ces Jeux olympiques du capitalisme néo-libéral, le modèle le plus orwellien, c'est la Chine.

La Chine  a réussi en peu de temps à allier le totalitarisme stalino-communiste au néolibéralisme le plus débridé : Big brother, la novlangue, le parti unique et le règne du profit.

On a en revanche bien oublié Le meilleur des mondes (The brave new world) qui est paru en 1932.

Aldous Huxley est peu mis en avant mais il a pourtant proposé une prophétie biologique qui est presque déjà réalisée.

Les trois grandes idées de Huxley dans son roman sont : l'administration à tous d'un remède unique pour être heureux, le fameux soma ; la fin de la reproduction sexuée (et de la viviparité) ; un système de classes/castes sociales fondé sur la génétique.

Il y a bien d'autres choses dans ce roman où la réflexion philosophique est plus forte que la qualité narrative.

Dans ce monde complètement unifié il existe un gouvernement mondial (le rêve actuel des experts climatologues de l'anthropocène), l'enseignement est assuré aux enfants pendant leur sommeil, les sexes sont égaux, la sexualité est libre, la consommation est le but principal de la vie, les bébés sont produits à la chaîne selon les principes du fordisme, et cetera..

Les analogies de cette prophétie avec la médecine d'aujourd'hui sont légion : on promet à tous un monde sans douleurs, un monde sans cancers, on fait miroiter le trans humanisme (une existence augmentée) et tout cela est rendu possible en consommant du soin, en dépistant, en prévenant, en traitant, en chronicisant, et cetera. Avec le totalitarisme orwellien en prime : le partage des data.

Le roman d'Huxley a été rattrapé par la réalité : le néolibéralisme a mis à son agenda la lutte contre l'entropie (la néguentropie), un programme effarant que l'on retrouve dans un rapport de l'OCDE publié en 2009, La Bioéconomie à l'horizon 2030. Quel programme d'action ?, qui propose, pour échapper au deuxième principe de la thermodynamique, d'utiliser le corps humain ou plutôt les êtres vivants comme énergie renouvelable (voir ICI) !

Ainsi, Huxley a-t-il été plus prophétique que Orwell.

Norbert Bensaïd, cité par Jean Daniel dans Les miens (2009) disait ceci : "Le totalitarisme n'aura pas créé un homme nouveau. Le biologisme, oui... Les peuples sont prêts, comme l'avait annoncé le Grand Inquisiteur de Dostoïevski, à échanger leur liberté contre une promesse de bonheur et de sécurité."




dimanche 19 mai 2019

En raison de l'obligation vaccinale je suis pour la délégation des tâches : j'aurai le temps de faire autre chose.


L'obligation vaccinale chez les nourrissons (j'étais contre) conduit à cette évidence : à quoi sers-je en tant que médecin généraliste ?

Je suis donc pour la délégation des tâches, je veux dire la vaccination des nourrissons et des autres, en pharmacie, en PMI, en crèche, à l'école, au collège, au lycée, à l'université, sur les lieux de travail, dans les centres de médecine du travail, dans les ehpad, dans les foyers-logements, dans les maintiens à domicile, dans les CPAM.

Pourquoi pas ? 

De toute façon la vaccination en général est sans risques (tout le monde le dit, donc tout le monde a raison).

On pourrait ainsi élargir la dévolution à la vaccination des citoyens par les masseurs kinésithérapeutes, les orthophonistes, les assistantes maternelles, les aides-ménagères, les préparateurs en pharmacie, les orthoptistes, les psychomotriciens : cinq minutes de formation devraient suffire en ligne. 

Je pourrais donc prendre plus de temps à examiner les nourrissons lors des examens obligatoires, plus de temps à examiner les enfants, les adolescents, les jeunes adultes, les moyens adultes et les seniors et le cinquième âge.

Je pourrais surtout dégager du temps pour voir des enfants malades.

Ainsi se rendrait-on compte que la médecine du travail manque de moyens, que les PMI pareil, que l'Education nationale itou, et cetera, et cetera.

On pourrait également demander aux fabricants de vaccins de financer toutes ces structures (on me dit dans l'oreillette que c'est de la santé publique, donc c'est du ressort de l'Etat : Madame Buzyn et consorts le savent).

mardi 30 avril 2019

Vaccination généralisée contre le papillomavirus humain : il est urgent d'attendre.


***

Des décisions de Santé publique engageant des millions de citoyens en bonne santé et ici des millions d'enfants et de jeunes gens filles et garçons en bonne santé pourraient se prendre sans que la preuve d'efficacité du critère principal (la diminution du nombre de cancers du col de l'utérus) ne soit démontrée et sans que le rapport bénéfices-risques du vaccin ne soit avérée.

Pour ce faire le complexe médico-industriel pilonne l'opinion. 

"L'appel des 50" que vous trouverez ICI participe à ce pilonnage marketing qui utilise tous les rouages de l'Etat et de la société civile pour avancer.

Rien n'est oublié.

Nous sommes au milieu d'un processus qui manie tous les concepts de l'idéologie moderne du tout médical : la médecine est capable, nous disent ses thuriféraires, de tout régler, de tout résoudre, de promettre un monde irréel sans douleurs physiques, sans cancer, sans souffrances morales, un monde où la prise de médicaments (sous forme de comprimés/gélules ou d'injections vaccinales ou non) résoudrait les problèmes sociaux, économiques, culturels et politiques.

Et pendant que les 50 "appellent", des instances gouvernementales expérimentent sur des populations entières. L'expérience (ICI) qui devrait être engagée en octobre 2019 dans un département d'outre-mer -- la Guyane-- sur les bases de déclarations d'intention qui font frémir tant le protocole est bancal, tant les pré-requis scientifiques sont minces, tant les objectifs à trois ans sont minables, je cite Clara de Bort, directrice de l'ARS de Guyane: "Nous espérons en tirer des enseignements pour lever les freins à la vaccination" (voir LA), tant les moyens mis en oeuvre sont ceux de la pression sur les familles avec vaccination en milieu scolaire. Or, le problème de la Guyane est celui de la pauvreté, du déficit d'informations en santé publique, de la faiblesse du tissu socio-médical, du taux élevé de grossesses précoces, et cetera.

Nous avons ici un exemple grandeur nature de l'autoritarisme administrativo-gouvernemental de l'Etat français en matière de santé publique : manque de données scientifiques, décisions prises à la va-vite, prises en otage de populations captives, utilisation des écoles (l'expérience malheureuse de la vaccination contre l'hépatite B n'a pas suffi), mise en avant de l'autorité expertale, déficit d'informations, participation forcée... et corruption (la lecture des sommes versées aux 50 est effarante).

Tout ceci, cet appel, ces expérimentations, ne sont que de la poudre aux yeux : les décisions de généralisation, voire de l'obligation de la vaccination anti papillomavirus étendue aux garçons, sont dans les tuyaux de la politique d'Agnès Buzyn qui se moque de la démocratie tout comme de la décision partagée.

***
C'est pourquoi nous proposons un certain nombre d'éléments afin que chacun puisse se faire une idée des enjeux et des faits. Il s'agit d'une démarche scientifique et d'une réflexion sociétale, pas d'un texte anti vaccin.

Voici la liste des signataires.

Jean-Baptiste Blanc, Rémy Boussageon, Philippe De Chazournes, Sylvie
Erpeldinger, Sylvain Fèvre, Marie Flori, Marc Gourmelon, Jean-Claude Grange,
Christian Lehmann, Claudina Michal-Teitelbaum, Joël Pélerin, Armel Sevestre,
Bertrand Stalnikiewicz, Amine Umlil, Martin Winckler

Bien entendu, cela va sans dire, et cela va mieux en le disant, conformément à l'article L. 1451-1 du code de la santé publique, les signataires ont déclaré ne pas recevoir la visite médicale et n'avoir aucun lien d'intérêts en ce qui concerne les vaccins anti HPV ou avec toute entreprise du domaine de la santé.






  Bonne lecture, bonne réflexion, bons commentaires.

Un article paru dans la presse grand public et qui traite du sujet. Paris-Match.




mardi 9 avril 2019

Doctolib et ostéopathie : les nouvelles représentations collectives de la santé.





Doctolib et l'ostéopathie, c'est les GAFAM et la magie noire.

Les citoyens de "ma" patientèle" (il ne s'agit pas d'un sondage, seulement d'une impression personnelle, à partir d'entretiens non sociologiques non programmés) et de mon entourage familial et communautaire (idem pour les limites méthodologiques) réagissent désormais (l'étude post hoc par sous-groupes d'âge montre une différence significative entre les moins de 25 ans et les 26-60 ans) à la douleur, à la maladie, aux désagréments de la vie quotidienne par le double réflexe Doctolib et ostéopathie.





Doctolib a gagné comme Kleenex avait gagné, comme Frigidaire avait gagné, comme McDo a gagné (comme Coca Cola, Sopalin, et cetera). Il est évident que la servitude volontaire des médecins a été un facteur majeur de succès.

Pour l'ostéopathie, il est possible de dire qu'il s'agit d'une mode comme il y a eu celle de l'acupuncture et comme il y a encore celle de l'homéopathie.

Le réflexe internet est sans doute un facteur essentiel (tout degré de geekitude mis à part) : la difficulté croissante de consulter rapidement chez "son" médecin traitant en raison des délais, et, parfois, la difficulté de joindre un secrétariat téléphonique (temps d'attente et/ou plate-forme téléphonique anonyme) qui, en outre, pose des questions sur la pathologie, rend la prise de rendez-vous en ligne attractive (ce que d'ailleurs nombre de médecins ont compris) et, par une sorte de tour de passe-passe dont la modernité a le secret, Doctolib donne l'illusion au patient qu'il prend le pouvoir sur son agenda.

On fait ses courses sur internet, on prend ses rendez-vous médicaux de la même façon.

Il s'agit avant tout d'une demande symptomatique : j'ai de la fièvre, j'ai mal, j'éprouve des douleurs, je me sens mal, je ne peux attendre, je ne hiérarchise pas ma demande ou ce que je risque ou ce que je ne risque pas. Si mon médecin traitant n'est pas libre je générique ma demande de soins. Le patient pressent que tous les médecins ne se valent pas (il prend d'ailleurs avis auprès de son meilleur ami, de son boulanger, de son garagiste ou de son copain ingénieur et il commence à mettre des avis sur Google) mais il sait mieux que le médecin génériqué ce dont il a besoin : être soulagé. Le médecin reste donc un sachant mais il devient de plus en plus un prestataire. Car la demande est aussi administrative : besoin d'un arrêt de travail (et nous n'entrerons pas ici dans le jugement justifié/non justifié), besoin d'un certificat, besoin d'une dispense, besoin de semelles orthopédiques...

Et le réflexe Doctolib va bien au delà : les patients ont été convaincus par la taylorisation fordienne du corps humain en organes et en système d'organes. La spécialisation de la médecine est acquise dans les têtes et dans les coeurs des citoyens. 

"J'ai mal au genou" signifie : IRM et rhumatologie. J'appelle un rhumatologue et/ou un radiologue.
"J'ai des boutons" signifie : dermatologie. J'appelle un dermatologue.
"J'ai des douleurs dans la poitrine" signifie cardiologie. J'appelle un cardiologue.
"Je tousse..."
Et cetera.

Pourquoi perdre du temps à consulter un médecin généraliste alors que doctoliber (néologisme non protégé par des droits) un spécialiste permet de consulter loco dolenti ? Il y a bien entendu l'obstacle du courrier au spécialiste pour être "bien" remboursé. Mais nul doute que cet obstacle va bientôt disparaître.

On le pressent, l'immédiateté est le lien de Doctolib avec l'ostéopathie.



Car le réflexe ostéopathie est plus complexe à analyser. Il s'inscrit dans la perspective historique de la médecine manuelle, de l'imposition des mains, du reiki, des barbiers aux rebouteux, des croyances populaires ("Il m'a fait craquer les vertèbres") et sur un discours magique (remettre les organes à leur place, les correspondances surnaturelles entre le foie et la troisième vertèbre cervicale) et des échecs de la médecine traditionnelle. Ce dernier point mérite des développements.

Les patients aiment qu'on les touche et qu'on les manipule. Ce qui est de moins en moins vrai en médecine générale (je suis à couvert pour ne pas recevoir de projectiles).



Je rajoute encore un mot pour me faire battre : les kinésithérapeutes ne sont plus ce qu'ils étaient. Chez eux aussi la médecine manuelle a été remplacée (par les électrodes).


Les ostéopathes promettent le soulagement immédiat des douleurs et ont aussi un avantage : ils ne prescrivent pas. Ils éloignent le patient de la médecine prescriptive, ce qui est très à la mode.

Et ainsi Doctolib annuaire-t-il les médecins,  les ostéopathes et, accessoirement, les homéopathes.

Le point commun entre Doctolib et l'ostéopathie est donc la pratique consumériste. Je prends rendez-vous rapidement et je suis soulagé rapidement. Pas d'efforts à faire. Il semble admis que des cervicalgies chroniques ou des lombalgies chroniques demandent des traitements chroniques et des mesures personnelles pour tenter de les éviter (kinésithérapie, autokinésithérapie, ergonomie du travail...).

Ce qui est le plus étonnant dans tout cela c'est que les médecins se soient convertis à Doctolib. La raison principale est sans doute financière : Doctolib remplace une secrétaire dont le salaire et les charges sociales sont incompressibles, sans compter le moment où il serait nécessaire de s'en séparer. 


Est-il possible de résister ? (question conservatrice)
Pourquoi faudrait-il résister ? (question progressiste)

Une profession disparaît quand elle n'a pas su s'adapter dit mon concierge historien ou sociologue.

Ainsi, de façon approximative, il est possible de dire que Doctolib et l'ostéopathie résument la modernité : le consumérisme donne tous les droits au consommateur, dont celui de se tromper, et lui permet de faire le choix de la prestation. Le consumérisme permet de s'affranchir des données dures, une procédure marche ou ne marche pas, et offre au consommateur le loisir (payant) de tout tester (les mutuelles offrent des séances d'ostéopathie gratuites pour attirer le chaland). Ne croyez pas qu'il s'agisse d'une simple liberté individuelle. La FDA américaine, haut lieu de la financiarisation néo-libérale de la santé, autorise désormais la commercialisation de molécules qui n'ont pas vraiment fait la preuve de leur efficacité pour que le malade fasse lui-même sa propre expérience au prix de prix pharamineux et d'effets indésirables souvent graves.

La médecine est une marchandise comme une autre, une source de profit comme une autre, et nous aurions pu espérer que l'Assurance maladie dont l'objectif essentiel est la mutualisation de la Santé dans une perspective éthique de justice sociale ferait le boulot. Eh bien non : l'Assurance maladie a aussi des objectifs consuméristes fixés par le gouvernement (satisfaire le consommateur de soins). 



Les nouvelles représentations collectives de la Santé sont là.