Les faits.
Contrairement à toutes les idées reçues et malgré le nombre colossal de malades diabétiques dans le monde, une seule étude contrôlée existait dans la littérature mondiale montrant des bénéfices à traiter les patients diabétiques : l'UKPDS ou United Kingdom Preventive Diabetes Study (1) ! Et l'étude date de 1998 !
Qu'est-ce qu'on en apprenait au bout de dix ans ?
- Que les nouveaux patients diabétiques traités par sulfamide hypoglycémiant et par insuline avec comme objectifs glycémiques à jeun respectivement 1,08 et 1,26 g/l a permis de réduire non significativement les complications de la microangiopathie (et notamment le recours à la photocoagulation rétinienne : - 25 %) par rapport à un groupe témoin.
- Que chez les patients en surpoids (traités surtout par metformine) il y avait en plus réduction (non significative) des complications de macroangiopathie et de mortalité.
- Enfin, dans les groupes contrôle strict l'HbA1c était en moyenne de 7 % contre 7,9 dans le groupe contrôle.
Un certain nombre de chercheurs se sont posé la question : ne faut-il pas, pour mieux contrôler les complications du diabète, augmenter les exigences et abaisser l'objectif de contrôle de l'HbA1c ?
La réponse est non.
Trois études sont parues récemment :
- ACCORD (Action to Control Cardiovascular Risk in Diabetes : 10251 patients, âge moyen = 62 ans, durée moyenne de la maladie = 10 ans, suivi moyen = 3,5 ans) (2) n'a pas montré de diminution du risque d'infarctus non fatal, d'AVC non fatal ni de mort pour cause cardiovasculaire dans le groupe où la moyenne de l'HbA1c était de 6,4 contre 7,3 % dans l'autre groupe. En réalité l'essai a été arrêté avant son terme en raison d'un excès de mortalité dans le groupe intensif.
- ADVANCE (Action in Diabetes and Vascular Diseases : 11140 patients, âge moyen = 66 ans, durée moyenne de la maladie = 10 ans, suivi moyen = 3,5 ans) (3) a trouvé une petite réduction de tous les événements dans le groupe strict (6,4 % versus 7,3 % dans l'autre groupe) largement due à la réduction (- 21 %) de la néphropathie (nombre de nouveaux cas de microalbuminurie) mais sans effets sur la macroangiopathie.
- VADT (étude chez les militaires vétérans américains : 1791 patients, âge moyen = 60,5, durée moyenne = 5,6 ans) (4) n'a montré aucune différence significative entre le groupe intensif (6,9 %) et le groupe normal (8,4 %).
- Ne diminuent pas les complications cardiovasculaires.
- S'accompagnent d'une augmentation du nombre des accidents hypoglycémiques
- Entraînent une augmentation des coûts : soit en raison du passage à l'insuline (dosages de la glycémie capillaire) ou en raison de la prescription d'un antidiabétique en plus pour atteindre les objectifs
- Pourraient entraîner un excès de mortalité.
Qu'en conclure ?
- Que le mieux est l'ennemi du bien ?
- Que les nouveaux patients (comme dans l'étude UKPDS) doivent être particulièrement suivis, éduqués, traités et qu'il est nécessaire de comprendre que la durée est un élément essentiel de leur maladie et qu'il est peut-être possible, notamment chez les patients en surpoids, de diminuer les complications macroangiopathiques ?
- Que les patients déjà traités depuis des années et qui présentent des HbA1c élevées (> 10 %) sont particulièrement à risques et qu'il est nécessaire de tenter quelque chose ?
- Que chez les patients déjà traités depuis des années, avec des antécédents d'hypoglycémie sévère, et/ou avec une espérance de vie mimitée, et/ou avec des complications macro et microangiopathiques déjà sévères et/ou des comorbidités importantes et/ou des diabètes pour lesquels il paraît difficile de changer et les habitudes de vie et les traitements, il est nécessaire de ne pas se fixer des objectifs trop drastiques ?
FINALEMENT :
- Première étape : conseils d'hygiène de vie + metformine
- Deuxième étape : ajouter sulfamides hypoglycémiants et / ou insuline si nécessaire
- Troisième étape : passer à l'insuline ou intensifier l'insuline
- Quatrième étape : pas d'autres produits car non validés sauf cas exceptionnels.
Références
(1) UKPDS Group. Intensive blood-glucose control with sulphonylureas or insulin compared with conventional treatment and risk complications in patients with type 2 diabetes. Lancet 1998;352:854-65.
(2) Action to Control Cardiovascular Risk in Diabetes Group. Effects of intensive glucose lowering in type 2 diabetes. NEJM 2008;358:2545-59
(3) ADVANCE Collaborative Group. Intensive blood glucose control and vascular outcomes in patients with type 2 diabetes. NEJM 2008;358:2560-72
(4) Duckworth W et al. Glucose control and vascular complications in veterans with type 2 diabetes. NEJM 2009;360:129-39
(5) Holman R et al. 10-year follow-up of intensive glucose control in type 2 diabetes. NEJM 2008;359:1577-89