Combien de fois ne nous sommes-nous pas sentis impuissants, nous, médecins généralistes, quand nous étions confrontés à l'enthousiasme d'un patient qui désirait arrêter de fumer et qui pensait qu'une simple pilule ferait l'affaire ?
Il existe un tel écart entre les résultats obtenus dans les essais contrôlés et les commentaires dithyrambiques de la presse grand public sur les résultats obtenus par les nouvelles molécules miracle que les médecins généralistes ne peuvent que ressentir un malaise et un futur sentiment d'incompétence quand l'échec arrivera.
Car les médecins généralistes informés et avisés savent qu'à un an seuls un ou deux patients sur les dix qu'ils auront pris en charge auront arrêté de fumer.
Quant à ceux qu'ils auront envoyés dans un centre anti tabac pour consulter un spécialiste, un tabacologue distingué, ils ne bénéficieront pas de meilleures statistiques.
Qu'est-ce qui se passe ?
Le tabac est d'abord une drogue dure.
Ensuite le tabac tue. Et il tue plus que l'héroïne et la cocaïne associées.
Le cancer du poumon est une saloperie : grosso modo 28000 nouveaux cas par an en France et 27000 morts. Le taux de survie à 5 ans est de 5 %
Et nous ne parlerons pas ici des autres atteintes cardiovasculaires et pulmonaires qui tuent encore plus chaque année en France.
Mais le tabac est aussi une donnée sociétale.
Quant à ceux qu'ils auront envoyés dans un centre anti tabac pour consulter un spécialiste, un tabacologue distingué, ils ne bénéficieront pas de meilleures statistiques.
Qu'est-ce qui se passe ?
Le tabac est d'abord une drogue dure.
Ensuite le tabac tue. Et il tue plus que l'héroïne et la cocaïne associées.
Le cancer du poumon est une saloperie : grosso modo 28000 nouveaux cas par an en France et 27000 morts. Le taux de survie à 5 ans est de 5 %
Et nous ne parlerons pas ici des autres atteintes cardiovasculaires et pulmonaires qui tuent encore plus chaque année en France.
Mais le tabac est aussi une donnée sociétale.
Pendant des décennies les industriels du tabac, alias Big Tobacco, ont menti, payé, prévariqué, truqué, publié des fausses études cliniques, fustigé les essais cas-témoins demandant des essais contrôlés en double-aveugle, afin de ne pas reconnaître que le tabac pouvait rendre malade.
Ils ont aussi financé des campagnes de presse qui soutenaient que fumer était un droit fondamental, une partie inaliénable de la liberté individuelle et que chaque individu avait bien le droit de mourir de ce qu'il voulait.
Cette attitude existe encore de nos jours où la liberté de fumer dans les lieux publics est mise au même niveau que celle de pouvoir rouler à toute vitesse sur les routes, et sur les autoroutes, à ne pas limiter la vente d'alcool à certaines heures et, plus généralement, à refuser que l'Etat se même des affaires des citoyens.
Ce point de vue anti étatiste est, en France, plutôt classé à droite, plutôt dans la droite franchouillarde, ou, pour faire plus académique : ce sont des libéraux de droite.
Mais il existe une critique de gauche qui n'a pas eu besoin de Big Tobacco pour se développer.
Cette critique de gauche assimile la lutte contre le tabagisme à l'hygiénisme réactionnaire anglosaxon ; ces braves gens oublient que l'hygiénisme n'est pas seulement une invention anglosaxonne (la fin du dix-neuvième siècle français a été riche en publications hygiénistes, l'école française ayant eu sa part du gâteau) mais n'hésitent pas à utiliser un argument chauvin que les libéraux de droite pourraient utiliser avec profit, l'antianglosaxonisme primaire. Les appellerait-on des libéraux de gauche (ils préfèreraient libertaires) ?
Il n'est pas rare de rencontrer des libéraux de droite qui sont contre le cannabis et pour l'alcool mais ausi des libéraux de gauche qui sont pour le cannabis pour la seule raison que l'alcool et le tabac sont des drogues légales.
Mais là où les libéraux de gauche sont forts c'est qu'ils arrivent à être des opposants des campagnes anti tabac grand public, alors même que certains médecins de gauche sont capables, dans le secret de leur cabinet, de s'atteler à la tâche compliquée d'aider un patient à arrêter le tabac, parce que, premièrement, c'est Big Pharma qui mène la danse (avec des médicaments, on l'a vu, assez peu efficaces), et, deuxièmement, parce que la lutte contre le tabac est une mauvaise manoeuvre anti sociale puisque cela stigmatise les populations défavorisées (voir ce blog sur la situation américaine) : « Le poids des maladies tabaco-dépendantes tombe de façon disproportionnée sur ceux qui ont le statut socio-économique le plus bas. Les cigarettiers font essentiellement leur proie des pauvres, des moins éduqués, et de ceux qui souffrent de pathologie mentale ou d’addiction médicamenteuse, et, parmi les populations les plus vulnérables, les jeunes. Le tabac est le seul produit commercialisé qui ne présente aucun bénéfice et qui entraîne sans équivoque le plus de risques pour la santé humaine. »
Et ainsi, le doute s'installant, il devient encore plus difficile de traiter le tabagisme comme il se devrait, c'est à dire avec le consentement éclairé des patients.
Il existerait un antitabagisme de droite qui serait l'allié de Big Pharma contre lequel, pour des raisons de conflits d'intérêts, il faudrait s'opposer et un antitabagisme de gauche, libertaire en quelque sorte, qui refuserait Big Pharma tout en favorisant Big Tobacco (mais comme disent les marxistes : il faut savoir distinguer la contradiction principale et la contradiction secondaire).
Ainsi, en suivant les libéraux de gauche, le champ libre serait laissé à Big Tobacco dans les pays du Tiers-Monde (c'est là où il y a le plus de déshérités) et il faudrait combattre Big Pharma dans ceux où l'ultralibéralisme (de droite) règne.
Comprenne qui pourra.
Ces controverses francofrançaises sur le combat contre le tabagisme, comme seuls les Français en ont le secret, font aussi le jeu des gourous, des sectes, des acupuncteurs, des auriculothérapeutes, des mésothérapeutes, des homéopathes, des naturopathes de tous poils, des freudiens de toutes obédiences, des tenants de la théorie du cerveau reptilien, des tenants de la théorie qui veut qui peut, et cetera et rend les non fumeurs médecins suspects de se mêler de choses qu'ils ne comprennent pas...
Il est donc possible que prescrire des gommes ou des patchs ou des antidépresseurs recyclés dans la lutte contre le tabac soit le fait de médecins réactionnaires... et vendus à Big Pharma. mais je n'y crois pas une seconde.
Nous sommes désemparés devant un fléau qui tue beaucoup.
Cette attitude existe encore de nos jours où la liberté de fumer dans les lieux publics est mise au même niveau que celle de pouvoir rouler à toute vitesse sur les routes, et sur les autoroutes, à ne pas limiter la vente d'alcool à certaines heures et, plus généralement, à refuser que l'Etat se même des affaires des citoyens.
Ce point de vue anti étatiste est, en France, plutôt classé à droite, plutôt dans la droite franchouillarde, ou, pour faire plus académique : ce sont des libéraux de droite.
Mais il existe une critique de gauche qui n'a pas eu besoin de Big Tobacco pour se développer.
Cette critique de gauche assimile la lutte contre le tabagisme à l'hygiénisme réactionnaire anglosaxon ; ces braves gens oublient que l'hygiénisme n'est pas seulement une invention anglosaxonne (la fin du dix-neuvième siècle français a été riche en publications hygiénistes, l'école française ayant eu sa part du gâteau) mais n'hésitent pas à utiliser un argument chauvin que les libéraux de droite pourraient utiliser avec profit, l'antianglosaxonisme primaire. Les appellerait-on des libéraux de gauche (ils préfèreraient libertaires) ?
Il n'est pas rare de rencontrer des libéraux de droite qui sont contre le cannabis et pour l'alcool mais ausi des libéraux de gauche qui sont pour le cannabis pour la seule raison que l'alcool et le tabac sont des drogues légales.
Mais là où les libéraux de gauche sont forts c'est qu'ils arrivent à être des opposants des campagnes anti tabac grand public, alors même que certains médecins de gauche sont capables, dans le secret de leur cabinet, de s'atteler à la tâche compliquée d'aider un patient à arrêter le tabac, parce que, premièrement, c'est Big Pharma qui mène la danse (avec des médicaments, on l'a vu, assez peu efficaces), et, deuxièmement, parce que la lutte contre le tabac est une mauvaise manoeuvre anti sociale puisque cela stigmatise les populations défavorisées (voir ce blog sur la situation américaine) : « Le poids des maladies tabaco-dépendantes tombe de façon disproportionnée sur ceux qui ont le statut socio-économique le plus bas. Les cigarettiers font essentiellement leur proie des pauvres, des moins éduqués, et de ceux qui souffrent de pathologie mentale ou d’addiction médicamenteuse, et, parmi les populations les plus vulnérables, les jeunes. Le tabac est le seul produit commercialisé qui ne présente aucun bénéfice et qui entraîne sans équivoque le plus de risques pour la santé humaine. »
Et ainsi, le doute s'installant, il devient encore plus difficile de traiter le tabagisme comme il se devrait, c'est à dire avec le consentement éclairé des patients.
Il existerait un antitabagisme de droite qui serait l'allié de Big Pharma contre lequel, pour des raisons de conflits d'intérêts, il faudrait s'opposer et un antitabagisme de gauche, libertaire en quelque sorte, qui refuserait Big Pharma tout en favorisant Big Tobacco (mais comme disent les marxistes : il faut savoir distinguer la contradiction principale et la contradiction secondaire).
Ainsi, en suivant les libéraux de gauche, le champ libre serait laissé à Big Tobacco dans les pays du Tiers-Monde (c'est là où il y a le plus de déshérités) et il faudrait combattre Big Pharma dans ceux où l'ultralibéralisme (de droite) règne.
Comprenne qui pourra.
Ces controverses francofrançaises sur le combat contre le tabagisme, comme seuls les Français en ont le secret, font aussi le jeu des gourous, des sectes, des acupuncteurs, des auriculothérapeutes, des mésothérapeutes, des homéopathes, des naturopathes de tous poils, des freudiens de toutes obédiences, des tenants de la théorie du cerveau reptilien, des tenants de la théorie qui veut qui peut, et cetera et rend les non fumeurs médecins suspects de se mêler de choses qu'ils ne comprennent pas...
Il est donc possible que prescrire des gommes ou des patchs ou des antidépresseurs recyclés dans la lutte contre le tabac soit le fait de médecins réactionnaires... et vendus à Big Pharma. mais je n'y crois pas une seconde.
Nous sommes désemparés devant un fléau qui tue beaucoup.