Un congrès à Chicago (ASCO 2023)
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La course dans le centre des congrès.
A partir de maintenant Pierre Gers se met à courir. Il doit courir pour aller de salle en salle, d’étage en étage, de salle plénière en salles annexes, en foulant la moquette épaisse et criarde qui recouvre le sol, en tentant de ne rien oublier, de noter tous les détails qui tuent, de serrer les mains qu’il faut, de rencontrer les personnes ad hoc. En cancérologie, toutes les disciplines médicales et chirurgicales participent, toutes les sensibilités sont présentes, toutes les tares des sous et des sur spécialistes sont évidentes, les préjugés comme les sous-entendus, les rancunes comme les vengeances et, par-dessus tout, l’envie et la jalousie.
La liste des sujets abordés est impressionnante en ce vendredi 2 juin (à partir de 13 heures) : les cancers héréditaires, construire un partenariat avec les patients, cancer du sein (plusieurs sessions), cancer du poumon, tumeurs hématologiques, leucémies, myélomes, cancers en neurologie, en gastro-entérologie, sarcomes, thyroïde, nouvelles thérapeutiques (et comment les intégrer dans la pratique), biomarqueurs, ORL, pancréas, chirurgie cancéro-gynécologique, parcours des patients atteints de métastases, comment faire une présentation, immunothérapie, lymphomes, sarcomes encore…
Il y a de quoi être étourdi et ce d’autant que tous les sessions ne se valent pas, que certaines sont désespérément inintéressantes, mal fichues ou bien fichues mais présentées par des vedettes dont tout le monde sait soit qu’ils modifient les résultats pour qu’ils soient « parlants », soit qu’ils sont meilleurs en congrès que dans leurs services, que tel chirurgien qui fait la malin avec une vidéo est considéré dans son hôpital comme un médiocre opérateur… A propos des médiocres B. a décidé, il l’attendait lors de la distribution des badges, de coller aux fesses de Gers, « Ça ne te dérange pas ? », que répondre ?, l’envoyer paître ? B. ne le fait pas par malice mais parce qu’il sait que Gers l’emmènera aux bons endroits et qu’il pourra pallier ses défaillances en anglais, le cas échéant. Ce qui est plus amusant : ils rencontrent Florence Maraval, une Marseillaise qui portera toute sa vie sur la conscience les raoulteries de la Cannebière, et qui est la plus charmante des oncologues, c’est-à-dire cortiquée, à jour de la littérature et fan du Choose Wisely qui fait défaut à nombre de ses collègues, à défaut d’être la plus sexy des cancérologues…
- Tu sais où tu vas aller ?
Elle montre à Gers la liste des sessions qu’elle a cochées et surtout les heures de présentation.
- Je vois que l’on est sur la même page.
La course commence.
Et Gers sait que si B. sera un boulet pendant cet après-midi, Florence Maraval sera un plaisir pour écouter, partager, commenter et prendre des notes.
(Pour lire depuis le début : LA)
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