mardi 18 juillet 2023

Un congrès à Chicago (ASCO ou American Society of Clinical Oncology) : Fallahi versus Williams : dégâts collatéraux. 31

 

Un congrès à Chicago (ASCO 2023)

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Fallahi versus Williams : dégâts collatéraux.


Au Sports Bar près de McCormick les conversations vont bon train. L’intervention d’Afshâr Fallahi est au centre de toutes les propos. Des oncologues français se sont réunis pour boire un coup alors qu’il est deux heures du matin à Paris et n’en reviennent pas. Qui aurait pu, en France, interpeler le tsar de la cancérologie dans un congrès ? Les écrans sont remplis d’images des play-off de la NBA. Guthi, un Indien qui a appris le français à Pondichéry avant d’émigrer : « Ici, le monde de l’oncologie est fragmenté et les places ne sont pas acquises. Il est possible de voir émerger des jeunes loups qui veulent bousculer les mecs en place. Il y a plus de 13 000 oncologues et partout dans le pays ! Se faire remarquer attire l’attention de tous, des universitaires comme des industriels qui aiment les rebelles, ce qu’ils appellent la fameuse disruption qui mène à Steve Jobs, il leur arrive donc de tenter le coup en pensant qu’ils pourraient émettre une idée ou deux qui pourraient aboutir à un blockbuster… » 

Pour des membres de l’industrie comme Brébant, cette intervention musclée d’Afshâr Fallahi est un signal fort et une alerte maximale : il est nécessaire de rendre les présentations encore plus blindées et parfaites même s’il n’est plus possible de modifier les protocoles, pour être prêts à affronter de telles attaques. Si le jeune oncologue a osé réagir contre un des pontes de la cancérologie états-unienne dont les pots-de-vin industriels se mesurent en centaines de milliers de dollars annuels, d’autres sont capables de le faire plus facilement lors de présentations faites par des Européens. 

Milstein est inquiet. Il a passé un coup de fil à Gers comme aux représentants de la Firme afin d’organiser une réunion de plus pour bien se caler. Il a la trouille de se planter et surtout d’avoir à affronter une salle hostile avec des questions compliquées pour lesquelles il aura du mal à répondre, certes pour des raisons scientifiques mais aussi à cause de la langue. Une des solutions, mais elle est difficilement envisageable, serait que Pierre Gers se charge de l’affaire… Milstein ne pourrait s’y résoudre. Les représentants de la Firme pensent qu’Afshâr Fallahi s’est plus tiré une balle dans le pied qu’il n’a fait du mal à la molécule présentée : le boulot des firmes est justement de passer outre et de communiquer du lourd à la valetaille qui n’est pas au courant des intrigues de couloir. Des conférences, des dîners, des voyages, des cadeaux et de la visite médicale rapprochée permettront aux prescripteurs d’oublier Afshâr Fallahi et de le faire passer pour un vulgaire empêcheur de tourner en rond. Ce sera donc Milstein qui présentera et la Firme se fait fort de le préparer jusqu’au dernier moment à être le brillant patron qu’il se pense être. Finalement Afshâr Fallahi permet à l’industrie de remettre à leurs places les patrons qui pensaient être intouchables et pouvoir se passer de la force de frappe marketing des industriels. 

Quant à François Brébant, il rêve qu’un cancérologue français puisse avoir en public les couilles d’Afshâr Fallahi. Ce serait un merveilleux sujet de papier, pense-t-il, pour Bouloux et Durand… Mais les journalistes grand public n’ont justement pas de couilles.


(Pour lire depuis le début : LA)


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