Un congrès à Chicago (ASCO 2023)
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Les essais cliniques zombies.
Peu importe qu’il s’agisse d’un nouveau traitement pour le lymphome discuté dans ce pro/con et modéré par Pierre Gers, il s’agit d’un prétexte. Un prétexte métaphorique sur les nouveaux traitements en médecine et sur le contexte plus général des publications tel qu’il est décrit par David Semiov.
Les décisions de prises en charge en oncologie comme en médecine se font depuis l’époque moderne et en théorie sur la base des résultats obtenus dans les essais cliniques. Ces essais cliniques, sont menés dans leur immense majorité par les industriels qui commercialisent les molécules qu’ils testent. Mais le fait que les essais ne soient pas menés par un industriel ne rend pas les essais plus exacts ou plus valides car l’hubris des chercheurs est au moins aussi important que les appétits financiers des firmes.
Florence Maraval parle à François Brébant dans une allée du congrès à la sortie du pro/con : « Dès 2020, un anesthésiste, John Carlisle, avait dénoncé les articles qu’il appelait zombies c’est-à-dire ceux pour lesquels il n’était pas possible de vérifier les données individuelles des patients inclus dans les études. Entre 2017 et 2020, je dis cela de mémoire, vingt-cinq pour cent des articles soumis au journal Anaesthesia étaient, lorsque les données de base étaient accessibles, des études truquées. »
Brébant connaît ces chiffres. Il attend la suite. « Or, ces études truquées ont été publiées et elles servent de base aux recommandations des agences gouvernementales, des sociétés savantes ou des comités Théodule sponsorisés par les fabricants de molécules innovantes. – Vous êtes une gauchiste. – Non. J’essaie de démêler le vrai du faux. – Et ? – Et ? Eh bien, rien. Le système des publications d’articles scientifiques en médecine est soumis à la loi des éditeurs d’articles. Toujours de mémoire, le groupe Elsevier a un chiffre d’affaires annuel d’environ trois milliards de dollars, et une marge bénéficiaire de 40 % ce qui est énorme comparé aux géants de la tech. – Et ? – Et tout le monde est dans le business, l’auteur qui publie, le laboratoire qui promeut, l’éditeur qui profite, mais pas les malades. – Vous y allez fort ! » Gers, les joues en feu à la suite du pro/con qui s’est passé merveilleusement car les deux futurs tsars de l’oncologie états-unienne se sont étripés avec un art consommé de la repartie, arrive à n’en pas perdre une miette malgré les saluts qu’il rend à tous les congressistes qui le félicitent en passant près de lui.
Florence Maraval : « Une gauchiste vous dirait que Richard Smith ou Peter Gøtzsche considèrent que l’industrie pharmaceutique se sert des éditeurs comme Elsevier pour blanchir ses études zombies… et avec l’aide des relecteurs d’articles qui en font assez pour ne pas laisser d’énormes erreurs rédactionnelles et pas assez pour ne pas se mettre à dos les éditeurs le jour où ils voudront publier. » Gers : « Joli ! »
François Brébant se rappelle la période où il était gauchiste avec presque des larmes dans les yeux.
Il n'aura pas les couilles d'être lanceur d’alerte...
(Pour lire Le Congrès depuis le début, c'est LA)
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