Cela commence très fort avec Gerald Kierzek, urgentiste, La nuit aux urgences, le matin sur Europe 1. Il a fait une chronique ce matin 30 septembre 2015 qui pousse très loin l'information déséquilibrée (et je suis poli) : voir ICI.
Comme il n'avait pas le temps de parler des éventuels inconvénients du dépistage, il commence sa chronique par le cancer du sein chez l'homme, problème éminent de santé publique. Puis il y va de tous les poncifs de la propagande de l'Eglise de dépistologie : plus c'est tôt mieux c'est, plus c'est petit mieux c'est, plus ça va et plus les patientes guérissent et plus le bonheur règne.
Merci docteur Kierzek.
Je voulais ajouter ceci : Il n'est pas simple de faire une chronique de deux minutes sur un sujet aussi complexe. Il n'est pas simple sur une radio généraliste d'aller à l'encontre des recommandations officielles, fussent-elles contestables et contestées. L'exercice est sans doute difficile, j'en conviens et je le dis honnêtement, je n'en suis pas capable. Mais ce n'est pas une raison pour 1) alerter sur un cancer très rare (celui de l'homme) et pour 2) dire béatement ce que racontent les officiels. Je comprends, vu le faible taux de mammographies effectuées en suivant le dépistage organisé qu'il ne faille pas désespérer Billancourt... mais quand même.
Voici le script de l'entretien entre Thomas Sotto (TS) le journaliste d'Europe 1 et le docteur Gerald Kierzek (GK) qui s'appelle "Octobre rose : le cancer du sein touche aussi les hommes", qui dure environ 2'11 et dont la première partie sur l'homme dure un peu plus d'une minute...
TS : Demain ce sera le début du mois et
le début du mois d’octobre rose, grande opération de dépistage du cancer du
sein chez les femmes. Bonjour docteur Kierzek.
GK : Bonjour Thomas.
TS : Eh ben nousNous allons commencer par parler d’un
cancer dont on n’entend jamais dire un mot, c’est celui du cancer qui touche
les hommes, car oui ça existe.
TS : Eh ben nous allons commencer par parler d’un
cancer dont on n’entend jamais dire un mot, c’est celui du cancer qui touche
les hommes, car oui ça existe.
GK : eh oui ça existe, le cancer du sein chez
l’homme, certes c’est rares on en
parle beaucoup chez la femme, cela représente 1 % des cancers, les procédures
de dépistage sont très rodées maintenant et malheureusement chez les hommes, eh bien on n’y pense
pas, et pourtant ce cancer du sein peut exister avec les mêmes symptômes sauf
quand on y pense pas y a un retard diagnostique…
TS : Qu’est-ce que ça change chez une femme pour le coup de faire
une mammographie régulièrement ?
GK : Alors ça permet de dépister beaucoup de cas de cancer, 16000
cas de cancer sont ainsi détectés par la mammographie, mammographie qui est systématisée depuis le plan cancer 2004,
c’est une mammographie tous les deux ans chez les femmes qui n’ont pas de
facteurs de risque particuliers, et je pense aux femmes qui n’ont pas de
facteurs de risque familiaux en particulier…
TS : Tous les deux ans à partir de quel âge ?
GK : A partir de 50 ans jusqu’à 74 ans… on fait une mammographie
tous les deux ans, et donc vous recevez, les femmes vont recevoir, un petit
papier de la sécurité sociale qui leur permet d’avoir ce dépistage une double
mammographie, faite chez des radiologues qui sont agréés.
TS : On a appris hier que les femmes qui présentaient un risque
élevé pourraient désormais se faire dépister gratuitement et ce quel que soit
leur âge. En termes de traitement est-ce qu’on arrive aujourd’hui à guérir une
majorité de cas ou pas ou ça reste un cancer très compliqué.
GK Non, c’est un cancer quand il est pris très tôt, et c’est
tout l’intérêt du dépistage, plus de 90 % peuvent être soignés par des traitements
qui sont de moins en moins agressifs, de moins en moins avec des séquelles, et
ça c’est important et c’est grâce au dépistage précoce et notamment quand les
tumeurs sont petites, à moins de deux centimètres, eh bien là il y a des
espoirs thérapeutiques, extrêmement importants et là on rappelle que le cancer
du sein, c’est une femme sur 8 qui est concernée.
13 commentaires:
Bonjour et merci pour ce billet et pour avoir été de ceux qui m'ont fait bougé depuis quelques années.
Comme vous le dites, il n'est pas simple d'expliquer la problématique du dépistage ne 2 minutes. Mais depuis qq jours ,c'est un peu plus facile d'en parler en 5 ou 10 minutes : une brochure indépendante permet aux femmes de s'informer facilement et aux médecins d'en discuter plus simplement.
C'est sur cancer-rose.fr
(Mon appréciation n'est pas forcément objective : je fait partie des rédacteurs)
Cela fait longtemps que je suis avec intérêt le blog du Docteurdu16, ainsi que le site du Formindep, de Rachel Campergue, de Marc Girard et, récemment, celui de cancer.rose.
Tout y est très clairement expliqué et je me suis fait, à présent, ma propre opinion.
Mais, ainsi que la brochure indépendante dont parle M. Pabion le précise, la mammographie est un bon outil de diagnostic mais pas de dépistage. Il serait intéressant de lire quelque part à quel moment la mammographie est NEANMOINS nécessaire : par ex. apparition d'une grosseur ou écoulement douteux (très certainement) mais quid en cas de mastose ou de seins fibrokystiques ?
Pour résumer jusqu'où une femme peut-elle aller dans le refus d'une mammographie quand son médecin, rompu au discours général, la classe dans la catégorie de celles qui doivent absolument "y passer" ?
Bonjour,
Je suis très intéressée par les sujets traités dans ce blog, et j'en remercie DOCdu16.
Pour répondre à votre question: je voyais mon médecin traitant à peu près chaque année et les deux ou trois dernières fois la consultation s'est terminée par son "coup de colère" quand je devais avouer que "non, je n'avais pas fait de mammographie cette année".
Je n'y suis pas retournée et d'ailleurs je suis sans médecin traitant.
Bonjour,
Personnellement quand je repars de chez mon gynéco avec l'ordonnance de mammo, je ne la fais pas. Et quand il me demande au rendez-vous suivant le résultat, je lui mens et dis que je l'ai oublié et que tout va bien. Je devrais assumer mon choix mais je n'ai pas envie de lui expliquer mes raisons; je sais qu'il va se ficher de moi; je me dis même qu'il pourrait être capable, lors de la palpation, de me dire qu'il décèle quelque chose qu'il faut contrôler par radiographie. Idem du côté du MG. Ils sont tous bloqués sur un unique protocole : il faut faire une mammo tous les deux ans !!
Pourquoi ne pas placer le débat sur l’intervention de G Kierzek sur un plan déontologique ? Après tout G. Kierzek n’a pas été embauché par cette radio en tant que journaliste, ni pour faire le clown mais en tant que médecin, pour délivrer des informations dont il doit garantir la validité. C’est notamment l’article 13 du code de déontologie qui s’applique ici http://www.legifrance.gouv.fr/affichCode.do;jsessionid=390F605DFA1BFB939A85F4B5D30D7A5C.tpdila07v_3?idSectionTA=LEGISCTA000006103061&cidTexte=LEGITEXT000006072634&dateTexte=20040807 : » Lorsque le médecin participe à une action d'information du public de caractère éducatif et sanitaire, quel qu'en soit le moyen de diffusion, il doit ne faire état que de données confirmées, faire preuve de prudence et avoir le souci des répercussions de ses propos auprès du public. »
L’obligation d’information indépendante et équilibrée s’impose d’autant plus au médecin que ce qu’il dit peut avoir des répercussions sur la vie de milliers de patients.
Il y a plusieurs solutions. Soit G Kierzek connaît bien le sujet, auquel cas il connaît les débats actuels et sait que les études les plus récentes sont en défaveur du dépistage organisé du cancer du sein et il devait alors soit en parler soit s’abstenir totalement d’aborder le sujet du dépistage.
Soit il ne connaît pas le sujet, ce ne serait pas étonnant, puisqu’il est urgentiste et donc, pas tellement concerné par le DO du cancer du sein, et il s’est donc contenté de réciter les recommandations officielles. Il aurait alors dû le préciser aux auditeurs qui lui font confiance et qui s’imaginent que ce qu’il dit est le fruit d’une réflexion et de connaissances personnelles sur le sujet. S’il ne le fait pas, il trompe son public sur la nature contrôlée de ses affirmations.
Dans tous les cas G Kierzek a commis, à mon sens, une faute déontologique en martelant le poncif plus c’est dépisté tôt meilleur est le pronostic, poncif qui est le credo de l’église de dépistologie mondiale, et qui ressemble comme deux goutes d’eau à un slogan publicitaire, et ce, pour une bonne raison : c’en est un, puisque cette affirmation n’a pas de fondement scientifique.
Les slogans publicitaires et la médecine font très mauvais ménage, puisque les premiers sont simplificateurs tandis que la médecine est complexe.
Ce credo est probablement à l’origine de l’une des plus grandes catastrophes sanitaires de tous les temps dans les pays industrialisés, celle qui a abouti à traiter inutilement des millions de personnes avec des traitements lourds, dégradant leur qualité de vie ou même, les tuant.
La responsabilité de G Kierzek quand il s’exprime sur le suet sur une radio écoutée par un large public est donc grande, comme celle de tout médecin qui s’exprimerait sur le sujet, quelle que soit son appartenance institutionnelle.
Les effets délétères du dépistage du cancer de la prostate par le dosage de PSA, ont été désormais reconnus par la plupart des agences officielles dans les pays industrialisés. Mais, entretemps, avant cette reconnaissance officielle et des recommandations officielles demandant de cesser le dépistage des cancers de la prostate, des centaines de milliers d’hommes en ont souffert, ont pâti des complications de traitements inutile (hémorragies, incontinence, impuissance), ou, pour certains, en sont morts.
C’est important que chacun assume ses responsabilités, surtout quand on voit la pression qui est mise sur les par les patients par des médecins, la plupart des médecins en fait, adeptes de l’église de dépistologie, dont témoignent les commentaires ci-dessus et dont j’ai été moi-même victime le jour où j’ai annoncé à une jeune remplaçante que je n’avais pas l’intention de me faire dépister.
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Sources d'information
En plus de la plaquette, plutôt bien faite, du groupe de cancer-rose http://cancer-rose.fr/wp-content/uploads/2015/09/Cancer-Rose_16p.pdf qui a déjà eu droit à un peu de pub sur une radio publique (heureusement il y a des journalistes qui ne fréquentent pas les soirées Big Pharma et qui pensent encore à faire leur travail), de l’excellent livre de Rachel Campergue,No Mammo ? et des articles de Jean-Claude sur ce blog sur les rubriques dépistage, ou cancer du sein (j’aime en particulier celui-ci, qui donne visuellement une idée des proportions, même si les chiffres exacts diffèrent un peu d’un pays à l’autre en fonction, notamment des pratiques de dépistage propres de chaque pays http://docteurdu16.blogspot.fr/2014/05/les-illusions-du-depistage-bis-repetita.html ), voici quelques éléments d’information complémentaire issus de données françaises et d’articles récents.
C’est entre 1980 et 2005 qu’a eu principalement lieu la montée en puissance des dépistages du cancer du sein et de la prostate en France, après quoi est survenue une stabilisation voire une diminution du dépistage, s’accompagnant aussitôt d’une diminution du nombre de cas diagnsotiqués ( « A partir de 2005, une baisse brutale de l’incidence est observée Elle correspond à la conjonction de deux phénomènes : l’un épidémiologique, qui est lié au fait qu’après plusieurs années de détection par le dosage du PSA, une partie des cancers prévalents sont diagnostiqués ; l’autre sociale, qui résulte de la prise de conscience d’un risque de "sur-diagnostic" par les soignants et la population, ce qui incite à la prudence vis-à-vis du dépistage2. » http://www.invs.sante.fr/Espace-presse/Communiques-de-presse/2013/Evolution-de-l-incidence-et-de-la-mortalite-par-cancer-en-France-entre-1980-et-2012 ).
Pour une information plus fouillée particulièrement destinées aux médecins qui veulent en savoir plus, on peut conseiller les articles de Bernard Junod, en particulier celui-ci http://www.biomedcentral.com/1471-2407/11/401
et aussi le très intéressant cours de sénologie de Bernard Duperray sur le site du Formindep http://www.formindep.org/Cours-de-senologie-de-Bernard.html (téléchargeable)...
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Pourquoi le dépistage par mammographie du cancer du sein n’est pas un objectif souhaitable de santé publique
Le dépistage organisé, c'est-à-dire l’invitation au dépistage des femmes de 50 à 69 ans, dans un premier temps, du cancer du sein a d’abord été expérimenté à partir de 1989 dans 13 départements puis a été étendu jusqu’à 74 ans et ensuite généralisé en 2004 à toute la population. Une partie importante du dépistage par mammographie en France a donc été individuel, on dit aussi opportuniste, c'est-à-dire fait à la demande des femmes ou des médecins jusqu’à 2004.
Or, en matière de dépistage, le hasard fait paticulièrement mal les choses. Les femmes se faisant dépister à n’importe quel âge, notamment à partir de 40 ans, âge auquel le bénéfice espéré est particulièrement faible, au hasard d’une visite chez le médecin ou de la lecture d’un article de Marie-Claire, les risques de surdiagnostic, c'est-à-dire de diagnostic d’un cancer ou supposé tel qui n’aurait jamais eu des conséquences sur la vie d’une femme sont alors maximalisés. C’est ce qui explique sûrement que les performances du dépistage soient particulièrement mauvaises en France, comparées à celle d’autres pays européens, où elles ne sont pourtant pas extraordinaires. C’est ce qu’a montré l’étude de Philippe Autier, chercheur au Centre international de Recherche sur le Cancer (CIRC) qui a montré que sur une période entre 1989 et 2006 et parmi 30 pays européens, c’était en France que la réduction de la mortalité ajustée pour l’âge était la plus faible avec 11% de réduction sur cette période http://www.bmj.com/content/343/bmj.d4411 .
Avant la généralisation du dépistage organisé, les mammographies opportunistes ou spontanées ou individuelles, généralement prescrites par les gynécologues, représentaient un peu moins de la moitié des mammographies de dépistage, tandis qu’elles représentent actuellement moins de 20%.
Entre 1980 et 2005 les cas de cancer ont fortement augmenté, tandis que la mortalité par cancer diminuait. Pour le cancer du sein, leur nombre a augmenté de 21 000 à 49 000. Cette augmentation est en partie due au vieillissement de la population. Mais le risque de cancer du sein, représenté par le taux d’incidence standardisé a lui aussi presque doublé, passant de 56,8 à 101,5 pour 100 000 entre 1980 et 2005. Le taux standardisé de cancer c'est-à-dire le risque de cancer pour la femme pendant cette période est passé de 176,4 à 248,8 tandis que le risque de cancer du sein passait de 55,3 à 97,8. L’augmentation du risque de cancer du sein a ainsi contribué pour 59% à l’augmentation totale du risque de cancer et est le principal contributeur à l’augmentation du risque de diagnostic de cancer chez la femme pendant cette période. Il en va de même pour le cancer de la prostate, qui est devenu le premier cancer chez l’homme après l’instauration d’un dépistage par le dosage de la PSA. Le cancer de la prostate a contribué pour 90% à l’augmentation du risque du cancer chez l’homme.
Il n’en va pas de même pour l’évolution de la mortalité. La réduction de la mortalité pour le cancer du sein pendant une période plus étendue entre 1980 et 2012 a été plus lente pour ces cancers que la moyenne de la réduction de l’ensemble des cancers. Pour l’ensemble des cancers de la femme le risque de décès est passé de 100,4 pour 100 000 à 73,2 pour 100 000 soit une réduction de 27% ou un taux annuel de réduction de 1%. Pour le cancer du sein la mortalité a diminué de 19,2 à 15,7 soit une diminution de 18% ou d’un taux annuel de 0,6%. ...
SUITE
Enfin, sur quoi est basé le diagnostic de cancer du sein ? Sur un examen dit « de référence » l’examen histologique fait après biopsie. Or, une autre étude, publiée dans le JAMA en mars 2015, a montré que les désaccords entre anatomopathologistes sont fréquents http://jama.jamanetwork.com/article.aspx?articleid=2203798.
Dans cette étude plusieurs milliers d’échantillons (quelques 2000 par catégorie diagnostique) qui avaient été d’abord classés par des anatomopathologistes en routine ont été soumis à un panel d’experts qui devaient tomber d’accord sur un diagnostic par consensus. Le panel d’experts était en désaccord avec les anatomopathologistes dans 25% des cas.Le plus remarquable étant tout de même que 13% des coupes bénignes étaient classées comme cancers par les anatomopathologistes . Le risque de mauvais classement augmentant avec la densité des seins (femmes plus jeunes) et avec la faible pratique des anatomopathologistes.
Au total l’implémentation du dépistage par mammographie a eu pour effet d’augmenter le nombre de femmes vivant avec un diagnostic de cancer et subissant des traitements agressifs pendant des mois ou des années sans qu’il y ait une diminution proportionnelle de la mortalité par cancer. Les cancers qui ont le plus diminué, pendant cette période sont ceux dus au tabac et à l’alcool chez les hommes.
Et la diminution de la mortalité pour le cancer du sein est probablement en totalité ou en grande partie attribuable à l’amélioration des techniques de traitement.
Si votre médecin/gynécologue vous embête vous pouvez aussi tester ses connaissances
Et ceci par une question très simple. Demandez lui quelles sont les chances que vous ayez un cancer si votre mammographie montre un résultat positif. Je pense que les fanatiques de la mammographie n’ont aucune idée de la réponse à cette question et auront tendance à répondre « 90% » ce qui est très très loin de la réalité, comme nous allons le voir.
Cette réponse dépend de trois paramètres. En premier lieu la sensibilité de la mammographie, c'est-à-dire sa capacité à détecter correctement les malades. Une sensibilité de 90% signifie que la mammographie détecte correctement 90 malades sur 100. 10 patientes sur 100 seront donc des fausses négatives.
En deuxième lieu la réponse dépend de la spécificité de la mammographie c'est-à-dire de sa capacité à classer correctement les personnes non atteintes de cancer. Si cette spécificité est 90% sur 100 personnes saines testées 90 seront considérées comme non atteintes mais 10 seront considérées comme atteintes et seront des faux positifs.
En troisième lieu la réponse dépend de la fréquence de la maladie. Or, le cancer du sein reste une maladie rare. Admettons que sa fréquence soit de 1 pour 1000 femmes dépistées.
Si la mammographie a une sensibilité de 90% et une spécificité de 90% et que la fréquence du cancer du sein est de 1 pour 1000, alors, pour 100 000 femmes dépistées il y aura, chaque années, 100 femmes avec un cancer du sein (ou supposé tel). Parmi ces 100 femmes la mammographie en dépistera correctement 90 et en oubliera 10 (faux négatifs). Mais parmi les 99900 femmes non atteintes la mammographie en classera correctement 90% c'est-à-dire 89 910 comme saines mais en classera 9990 (10% des patientes non atteintes) comme malades (faux positifs).
Les chances que vous soyez réellement malade si votre mammographie est positive sont alors de 90/ 9990 +90= c'est-à-dire de l’ordre de 1%.
A noter que les chiffres que je présente ne sont pas très éloignés des performances réelles de la mammographie http://opac.invs.sante.fr/doc_num.php?explnum_id=8463 .
OUBLI Il semble que j'aie oublié une partie, et pas la moins importante, après le commentaire de 18h07
Au total, beaucoup de « survivants » du cancer du sein et de la prostate sont venus s’ajouter aux survivants de différents cancers. Pour une partie importante de ces survivants on a lieu de penser qu’ils ont surtout survécu à des traitements inutiles et agressifs. En 2012 383 000 parmi les femmes à qui on avait diagnostiqué un cancer pendant les dix années précédentes représentant 47% des « survivantes » de tous les cancers avaient eu un diagnostic de cancer du sein. (Estimation nationale de l’incidence et de la mortalité par cancer entre 1980 et 2012)
Des études récentes permettent d’expliquer ces variations.
Comme cela est indiqué le dépistage par mammographie sert à dépister des cancers petits précocement.
Or, une étude canadienne, menée par Miller http://www.bmj.com/content/348/bmj.g366 avait pour but de comparer sur deux groupes d’environ 45000 femmes chacun de 40 à 59 ans randomisées, c'est-à-dire distribuées au hasard parmi les deux groupes, les effets soit d’une mammographie et un examen clinique annuels pendant cinq ans comparée à un examen par palpation unique pour les femmes de 40 à 49 ans, et comparée à un examen clinique par palpation annuel pour les femmes de 50 à 59 ans. Au bout des cinq premières années (période pendant laquelle les deux groupes de femmes eurent soit une mammographie soit un examen clinique) il y eut 27% de diagnostics supplémentaires de cancer invasif dans le groupe de femmes dépistées par mammographie (666 vs 524 dans le groupe non dépisté soit 142 cancers supplémentaires dans le groupe mammographie) mais aucune différence significative dans la mortalité (180 décès dans le groupe mammographie et 171 dans l’autre groupe). Après 15 ans de suivi et alors que les femmes des deux groupes n’avaient plus de suivis différents après les cinq premières années il persistait encore une différence de 106 cancers supplémentaires dans le groupe initialement suivi par mammographie qui a donc été considérées comme des surdiagnostics soit 22% de surdiagnostics concernant les cancers invasifs. Au bout de 25 ans de suivi, aucune différence dans la mortalité entre les deux groupes initiaux n’était notée.
...
SUITE ET FIN
Au total les femmes du groupe mammographie se sont vues diagnostiquer des cancers plus petits et plus souvent non palpables, ont « survecu » plus longtemps après le diagnostic de cancer mais, en réalité la mortalité dans les deux groupes était identique. Si on ne tient compte que des cancers non palpables c'est-à-dire ceux particulièrement ciblés par la mammographie le surdiagnostic des cancers invasifs pouvait être estimé non à 22% mais à 50%. Ce qui veut dire que la moitié des cancers non palpables correspondaient en réalité à un surdiagnostic et n’auraient jamais gêné les femmes au cours de leur vie si la mammographie ne les avait pas détectés
Une autre étude récente va dans le même sens. L’étude de Harding, aux Etats-Unis, publiée dans le JAMA en juillet 2015 comparait différentes régions des Etats-Unis selon le pourcentage de femmes qui s’y prêtaient au dépistage http://archinte.jamanetwork.com/article.aspx?articleid=2363025 . Il a été montré que pour une augmentation de 10 points (10% de femmes supplémentaires) se prêtant au dépistage on diagnostiquait 16% de cancers en plus en moyenne et que cette augmentation correspondait à 25% d’augmentation des diagnostics de petits cancers sans que , pour autant, une diminution de la mortalité par cancer du sein y soit associée.
L’étude de Narod, publiée dans le JAMA en août 2015 http://oncology.jamanetwork.com/article.aspx?articleid=2427491 , et suivant les registres américains pour quelques 100 000 femmes diagnostiquées avec un cancer in situ, montre que le risque de décès par cancer du sein à 20 ans pour ces femmes n’est guère différent du risque de décès par cancer du sein dans la population générale, de l’ordre de 3%. La radiothérapie ne semble pas présenter d’intérêt pour ces femmes. C’est important dès lors que l’utilisation du dépistage par mmamographie a fait passer la proportion de carncinomes in situ (non considérés comme des cancers aux Etats Unis) de 3% à 20-25%. 50 000 à 60 000 car cinomes in situ sont traités chirurgicalement chaque année aux Etats-Unis.
Honte sur moi !
J’ai oublié de citer celles qui sont les vraies héroïnes de l’histoire, les anti-Gerald Kierzek, les anti- david Khayat, celles qui, touchées par le cancer du sein n’ont pas perdu leur capacité à réfléchir et à se révolter. Source d’information mais aussi de réflexion. Et en plus très au fait de toute l’actualité concernant les cancers du sein. Voici, parmi d’autres, que je ne connais pas forcément :
https://martinebronner.wordpress.com/
http://fuckmycancer.fr/
http://lacrabahuteuse.fr/
Je précise les chiffres officiels de la valeur prédictive positive en première intention des mammographies de dépistage, c'est-à-dire les chances qu’un cancer soit finalement diagnostiqué lrosqu'une mammographie de dépistage est positive : elles sont de l’ordre de 7-8%. Ce qui signifie donc que 92-93% des femmes ayant une mammographie positive subiront les affres de l’attente, tandis que 20 à 25% parmi elles devront subir aussi une biopsie. Parmi les 7 à 8% dont le diagnostic de cancer sera confirmé il y a aussi, bien entendu, les surdiagnostics, et aussi les diagnostics erronés (les quelques 13% de biopsies qui seront classées comme cancers alors qu’elles auraient dû être considérées comme bénignes).
Je n’ai pas évoqué non plus les effets collatéraux de cette avalanche de diagnostics de cancer (du sein et de la prostate en particulier) : saturation des hôpitaux et du système de santé qui empêche de traiter correctement les vrais malades, explosion des coûts qui est ensuite renvoyée au système hospitalier sous forme de reproche avec une exhortation à faire des économies. Mais c’est aussi une chance pour certains, qui bénéficient des retombées commerciales de tout ça.
Je n’ai pas évoqué non plus le grand paradoxe du dépistage : meilleurs sont les traitements, moins il y a de chances que le dépistage apporte de bénéfices.
Le changement, en tous cas, ne viendra pas par le haut : trop d’intérêts commerciaux étroitement intriqués.
J’espère que chacun va affiner ses arguments, parce que la route est longue : pour l’instant ce sont les femmes les plus éduquées qui se font le plus dépister. Cela signifie que l’information circule encore à sens unique.
Mais P_____ réveillez vous, un cri d'indignation quand je vois que l'on peut transformer un lieu de travail en l'occurrence une clinique en un immense lieu festif à l'occasion de octobre la rose. Et on ne lésine pas sur les moyens: ballons, tenues pour les soignants roses,réfectoire rose. Et là pas autant agressé que les femmes visées par trop de rose mais néanmoins en dehors de cette mascarade à laquelle on s'étonne de la non adhésion d'un confrère perdu venu s'installer dans un endroit comme plein d'autres du bout du monde en France où attendent avec résignation 40000 personnes un médecin traitant et de nombreux spécialistes qu'il faut aller trouver à 150 km et non pas un acteur de talk show.
37es Journées de la Société Française de Sénologie et de Pathologie Mammaire
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