Le dernier communiqué du Collège National des Généralistes Enseignants (CNGE, ICI) pose plus de questions qu'il n'en résout.
A à quoi cela peut-il bien servir de communiquer de façon aussi ambiguë sur un sujet aussi complexe ? Puis : que vont en conclure les médecins généralistes installés ? Donc : pourquoi avoir publié un tel texte ?
Analysons le texte.
Analysons le texte.
Le titre : Grippe saisonnière : malgré l’efficacité limitée des vaccins, la balance bénéfice/risque reste en faveur d’une vaccination ciblée
Nous y reviendrons quand nous aurons analysé les différents arguments.
Premier paragraphe : En France, la grippe saisonnière est à l’origine d’une surmortalité hivernale, particulièrement chez les personnes âgées de plus de 85 ans et chez les nourrissons de moins de 6 mois ou atteints de comorbidité à risque de complication. La stratégie de lutte contre l’épidémie repose sur les vaccins dont la composition est adaptée chaque année en fonction de la surveillance des caractéristiques virales.
Pas de références. S'agit-il d'un avis d'expert ou d'une évidence scientifique qui ne mérite pas qu'on la commente ? Je rappelle ici que la surmortalité est une donnée floue et que les chiffres officiels de la mortalité liée à la grippe A/H1N1 (mais, dénonçant la non déclaration à longueur de posts, je ne nie pas que le nombre de "vraies" grippes puisse être plus important) pour les saisons 2009 / 2010 et 2010 / 2011 fut respectivement de 312 morts et 151 morts, soit une diminution de 51,6 % d'une année sur l'autre malgré une baisse du nombre de vaccinés (LA). Nous ne nions pas qu'il s'agisse de 312 ou de 151 morts de trop, mais de trop par rapport à quoi ? Rappelons aussi, amis généralistes enseignants qu'un organisme officiel a rapporté ces données pour les années précédentes :
Les données du CepiDC (organisme insermien) indiquent (soyez bien assis et accrochez-vous à votre écran) que, pour les années précédentes (de 2000 à 2008), le nombre de décès dus à la grippe était "estimé" à 437 par an avec une moyenne d'âge à 82 ans (ces chiffres vous étaient cachés, chers amis citoyens débiles et médecins ignares et on préférait vous assener 5000 à 7000 morts annuels) et, pour l'année de la grippe "pandémique" les décès avaient été assumés à 349 avec une moyenne d'âge à 59 ans. Mais non, ils ne vous étaient pas cachés, ces chiffres, ils avaient fait l'objet d'une publication dans le même BEH : Vicente P, Aouba A, Lévy-Bruhl D, Jougla E, Rey G. Spécificité des caractéristiques de la mortalité liée à la grippe lors de la pandémie de grippe A(H1N1) en 2009-2010 en France. Bull Epidémiol Hebd. 2011; (1):1-5.
Les données du CepiDC (organisme insermien) indiquent (soyez bien assis et accrochez-vous à votre écran) que, pour les années précédentes (de 2000 à 2008), le nombre de décès dus à la grippe était "estimé" à 437 par an avec une moyenne d'âge à 82 ans (ces chiffres vous étaient cachés, chers amis citoyens débiles et médecins ignares et on préférait vous assener 5000 à 7000 morts annuels) et, pour l'année de la grippe "pandémique" les décès avaient été assumés à 349 avec une moyenne d'âge à 59 ans. Mais non, ils ne vous étaient pas cachés, ces chiffres, ils avaient fait l'objet d'une publication dans le même BEH : Vicente P, Aouba A, Lévy-Bruhl D, Jougla E, Rey G. Spécificité des caractéristiques de la mortalité liée à la grippe lors de la pandémie de grippe A(H1N1) en 2009-2010 en France. Bull Epidémiol Hebd. 2011; (1):1-5.
Deuxième paragraphe : Depuis la pandémie de grippe A (H1N1), les taux de couverture vaccinale (CV) ont diminué. En 2011, la CV était de 55,2% chez les sujets âgés de plus 65 ans et de 33% chez les patients en ALD1.
Oui, certes, pourquoi pas ? Vous avez raison : depuis la fameuse campagne de vaccination anti grippale pandémique, non seulement le taux de couverture vaccinale n'a jamais été aussi bas (sans d'ailleurs que l'on connaisse le pourcentage exact par tranche d'âges) mais plus encore le nombre de morts n'a cessé de s'éloigner des fameux 5 à 7000 que nous servaient les visiteurs médicaux de Big Pharma, à savoir, l'InVS (Institut de veille sanitaire), le CTV (Comité Technique des vaccinations) et la DGS (Direction Générale de la Santé) réunis.
Troisième paragraphe : Les avis et les conseils des médecins généralistes ont un impact décisif sur la couverture vaccinale2. Les vaccins grippaux (trivalents inactivés) semblent dénués d’effets indésirables graves, mais leur efficacité est limitée. Selon 2 méta-analyses récentes, les vaccins adaptés aux souches circulantes ont une efficacité estimée à 15 % (IC95 = 9-22) sur les syndromes grippaux et à 73 % (IC95 = 54-84) sur les grippes confirmées3, diminuant à 59% (IC95 = 51-67) avec des critères de définition plus stricts4.
Ces données sont effectivement fondamentales. Un article récent (15 octobre 2012) d'un des auteurs cités en référence par le CNGE, Osterholmz MT (ICI), est clair : les données d'un des articles pris en compte par le CDC américain pour recommander la vaccination sont fausses et truquées. Osterholm (voir LA) ajoute même que les données rapportées par les analyses Cochrane surestiment les effets de la vaccination alors même que Cochrane avait déjà indiqué que les études qu'ils avaient méta analysées étaient "à haut risque de biais". Un article du BMJ va même plus loin (ICI), en insistant sur le manque d'efficacité des mesures de vaccination des professionnels de santé. Ce que souligne Tom Jefferson à propos des mesures coercitives mises en place en Colombie Britannique (LA) : "It is not my place to judge the policies currently underway in British Columbia, but coercion and forcing public ridicule on human beings (for example by forcing them to wear distinctive badges or clothing) is usually the practice of tyrants.".
Ces données sont effectivement fondamentales. Un article récent (15 octobre 2012) d'un des auteurs cités en référence par le CNGE, Osterholmz MT (ICI), est clair : les données d'un des articles pris en compte par le CDC américain pour recommander la vaccination sont fausses et truquées. Osterholm (voir LA) ajoute même que les données rapportées par les analyses Cochrane surestiment les effets de la vaccination alors même que Cochrane avait déjà indiqué que les études qu'ils avaient méta analysées étaient "à haut risque de biais". Un article du BMJ va même plus loin (ICI), en insistant sur le manque d'efficacité des mesures de vaccination des professionnels de santé. Ce que souligne Tom Jefferson à propos des mesures coercitives mises en place en Colombie Britannique (LA) : "It is not my place to judge the policies currently underway in British Columbia, but coercion and forcing public ridicule on human beings (for example by forcing them to wear distinctive badges or clothing) is usually the practice of tyrants.".
Quatrième paragraphe : Les données d’efficacité chez les personnes âgées de plus de 65 ans manquent ou sont biaisées. Les études observationnelles récentes montrent que la vaccination a un effet sur la mortalité grippale très inférieur à ceux précédemment décrits5,6.
Eh oui, la politique vaccinale du gouvernement français (Madame Marisol Touraine n'y est pour rien puisqu'elle suit les politiques déjà mises en oeuvre par les gouvernements précédents sur des recommandations expertales pour le moins douteuses et sujettes à caution, des experts à vie appartenant au lobby santéal académico-industriel qu'elle souhaite a priori conserver) est fondée sur des données incertaines, controversées, truquées, corrompues par des études industrielles sans contrepartie.
Cinquième paragraphe : Les études d’efficacité sont quasi inexistantes chez les enfants de moins 2 ans7.
Dont acte.
Sixième paragraphe : Même si la vaccination a une efficacité limitée, sa balance bénéfice/risque semble favorable chez les personnes (y compris les enfants de plus de 6 mois) ayant des facteurs de risque de grippe grave (maladies respiratoires chroniques dont l’asthme, maladies cardiaques sévères, affections neuromusculaires graves, déficits immunitaires). La liste précise des personnes à risque de complication de la grippe a été actualisée : femmes enceintes, obésité sévère, troubles du rythme graves, maladie coronaire, antécédent d’accident vasculaire cérébral8..
Alors là, le CNGE se fout véritablement de notre tête (et je suis poli). Car, si son communiqué comporte cinq premiers paragraphes sans intérêt puisque sans objet par rapport à sa Recommandation finale, ces 5 premiers paragraphes étant des prolégomènes de remplissage pour masquer l'inanité du sixième, ce sixième paragraphe est un pur avis d'expert sans preuves aucunes alors qu'il devrait constituer le fond de la Recommandation.
- Le CNGE recommande donc la vaccination qui a "une efficacité limitée" (on aimerait que l'adjectif qualificatif "limitée" ait une valeur, comment dire, scientifique et non une valeur subjective, dans le genre un grand nombre de malades, un certain nombre de patients, la plupart des gens... bien que des chiffres peu clairs aient été fournis au paragraphe 3) et "une balance bénéfice/risque favorable" (mêmes réflexions que précédemment avec ceci en plus : cela me rappelle la phrase enfantine zéro plus zéro égale la tête à toto quand numérateur et dénominateur sont inconnus...)
- Recommande la vaccination "chez les personnes (y compris les enfants de plus de 6 mois) ayant des facteurs de risque grave" alors que le paragraphe 5 du communiqué du CNGE dit qu'il n'y a pas d'études d'efficacité en dessous de 2 ans... Je propose également la lecture de cet article roboratif ou inquiétant, c'est selon, sur les liens entre vaccinations chez l'enfant et le taux de mortalité (ICI)
- Recommande la vaccination chez les patients (pas les personnes) souffrant de "maladies respiratoires chroniques dont l’asthme, maladies cardiaques sévères, affections neuromusculaires graves, déficits immunitaires". Où sont les références sinon l'avis d'expert du CTV ?
- Recommande la vaccination (actualisation) de personnes (?) "à risque de complication de la grippe"
- "Femmes enceintes" : Rappelons, et c'est toujours trop, que 3 femmes enceintes sont décédées en France de la grippe en 2010 / 2011 ; et que la vaccination a été peu évaluée (de façon quantitative et qualitative) par des essais cliniques avant et jamais pendant A/H1N1 (Rev Prescrire 2012;32:838-42). J'ajoute, expérience interne, qu'une FCS post vaccinale m'a été signalée et n'a pas été prise en compte par le CRPV local. Le CNGE aurait pu lire cet article fondamental : LA. Mais surtout cet article "décoiffant" (désolé d'utiliser des épithètes aussi peu bien-pensants) : LA. Une étude du BMJ rapporte cependant l'innocuité de la vaccination anti grippale chez la femme enceinte mais le temps d'observation post vaccinal est... de 2 semaines... (LA), ce qui, dans le cas du Pandemrix était notoirement insuffisant.
- "Obésité sévère" : la Revue Prescrire (2012;32:838-42) indique d'une part que des essais (le plus souvent états-uniens) rapportent que l'obésité morbide est un facteur de risque de grippe grave (mais nous conviendrons que l'obésité morbide est une donnée très différente quantitativement et qualitativement aux Etats-Unis et en France) et d'autre part que l'efficacité du vaccin anti grippale est "incertaine".
- "troubles du rythme grave, maladie coronaire, antécédent d'accident vasculaire cérébral" : pas de données de bonne qualité disponibles. Le CNGE eût été inspiré de lire cet article de Gervas J (LA) avant d'écrire son article.
La conclusion du CNGE n'a donc aucun rapport ni avec le titre de sa recommandation, ni avec son contenu.
Permettez donc à un médecin généraliste, non spécialiste en médecine générale (je demanderai mon "accréditation" quand je pourrais coter CS x 2 chaque fois que je ne me concerterai pas avec un médecin spécialiste et que je n'adresserai pas de patients ou quand le médecin spécialiste me réadressera le patient pour assurer le suivi global de ce patient), non généraliste enseignant de suggérer les questions suivantes au CNGE.
- Les Médecins spécialistes en médecine générale doivent-ils se faire vacciner contre la grippe ?
- Les Médecins spécialistes en médecine générale doivent-ils conseiller aux personnes de plus de 65 ans sans facteurs de risque de se faire vacciner contre la grippe ?
- Les Médecins spécialistes en médecine générale doivent-ils conseiller aux femmes enceintes de se faire vacciner contre la grippe ?
- Les Médecins spécialistes en médecine générale doivent-ils conseiller à l'entourage des femmes enceintes de se faire vacciner contre la grippe ?
- Les Médecins spécialistes en médecine générale doivent-ils vacciner les enfants asthmatiques ? les patients asthmatiques ? les patients porteurs d'un trouble du rythme quel que soit leur âge ? et cetera ?
- Les Médecins spécialistes en médecine générale doivent-ils vacciner les patients obèses ?
Les réponses d'un Médecin généraliste non spécialiste en médecine générale (Collège Unique d'un Généraliste non Enseignant - CUGNE) :
- Non.
- Non, mais vacciner les patients qui le demandent
- Non, mais vacciner les femmes enceintes qui le demandent.
- Ne sait pas.
- Non, mais en discuter avec chaque patient et vacciner si le malade le désire.
- Non.
Bonnes séances de vaccination à tous.
(Laurence Sterne - 1713 - 1768. Un des romanciers les plus importants de la littérature mondiale et son chef-d'oeuvre)