Mademoiselle A, 27 ans, est enceinte de quatre mois. Son compagnon est père d'une fillette de six ans. Je lui demande comment cela se passe avec la "belle fille". Très bien, me répond elle sans hésiter. Je n'en crois pas un mot mais je prends l'air du médecin satisfait d'une réponse qu'il attendait. Nous avons déjà abordé le problème de la vie commune avec un homme plus âgé qu'elle qui a déjà une enfant qu'il verra un week-end sur deux et la moitié des vacances scolaires. Cela fait 27 ans que je connais Mademoiselle A. Une paie, quand même.
Donc la gamine n'est pas jalouse et je ne pose pas la question suivante : "Et toi, tu n'es pas jalouse de la petite ?" Je ne voudrais pas que l'observateur infère avec le milieu qu'il est en train d'étudier. Mais cela me retombera sur le nez quand elle me parlera, dans quelques années, ou dans quelques mois, de cette terrible jalousie qui est tombée sur les deux femmes.
Mademoiselle A a quelque chose d'important à me dire : "C'est la chatte qui est jalouse. - La chatte ? - Elle me colle le ventre, elle s'enroule autour de moi. - Ah... - Mais surtout (continue Mademoiselle A avec un sourire qui précède ce qu'elle va me dire) elle fait une grossesse nerveuse... - Non ? - Si, elle a le ventre qui gonfle depuis trois semaines. Le véto nous a dit qu'elle n'était pas grosse, d'ailleurs, elle est trop vieille. C'est vraiment une grossesse nerveuse, c'est décrit chez les chattes..."
J'imagine la chatte de Mademoiselle A penchée sur l'épaule de sa maîtresse en train de lire Psychopathologie de la vie quotidienne, et se demandant ce qui pourrait être le plus signifiant pour faire connaître sa jalousie...