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lundi 29 mai 2023

Bilan médical du lundi 22 au lundi 29 mai 2023 : le système de santé est en crise et la réponse des soignants : C'est pas moi, c'est les autres. Avec : urgences, gynécologie, essais contrôlés, fluoroquinolones, SCI-HUB, infections nosocomiales, l'oncologie en folie, conflits d'intérêts, angioscanners, RSA, IHU.

 


Le système de santé est en crise.

Tout le monde le reconnaît ou presque.

Tout le monde a des solutions : de l'argent, de l'argent, de l'argent. Et nous ferons le reste.

Cette semaine, plus que les autres semaines, les acteurs de santé répètent à l'envi : c'est pas moi qui dois changer, c'est l'autre.


180. Le problème des urgences ne vient pas des urgences (c'est du deuxième degré).

La crise de la santé publique est unanimement admise dans tous les pays développés (bis repetita).

Un urgentiste nord-américain nous donne son avis dans un fil twitter qui n'a pas manqué d'être applaudi par les urgentistes de ce côté de l'Atlantique.

Voir le fil : ICI.

Ça commence fort : 


C'est pourquoi, en France, sachant que les urgentistes ne pouvaient rien avoir à se reprocher, le Ministre de la Santé est un ancien urgentiste, Frédéric Braun. On voit le massacre.

On n'avancera pas beaucoup si on continue comme ça : 
  1. Il y a une crise de la Santé publique
  2. C'est pas moi c'est l'autre
  3. Le problème des soins primaires ne vient pas des soins primaires
  4. Le problème des soins palliatifs ne vient pas des soins palliatifs
  5. Le problème de la psychiatrie ne vient pas de la psychiatrie.
  6. Ad libitum.
  7. Tout va le mieux dans le meilleur des mondes possible (Leibniz).

181. Le problème du respect des patientes en gynécologie ne vient pas de la gynécologie (c'est du deuxième degré).

Vu sur internet

On n'avancera pas beaucoup si on continue comme ça : 
  1. Il y a une crise de la Santé publique
  2. Le problème sera résolu par les médecins
  3. Les patients, et ici les patientes, n'ont qu'à la fermer
  4. Sinon, qu'elles aillent voir ailleurs.
  5. Les gens qui savent, qui disent la médecine, qui savent mieux que les concitoyennes (pas encore malades) ce qui est bon pour elles, continuent de dire : 3circulez, y a rien à voir".


182. Le problème de l'absence d'essais contrôlés ne vient pas des essais contrôlés (c'est du deuxième degré).

Damien Barraud (@fluidloading) revient sur la (vieille) affaire de la flécaïnamide dans un thread (fil) qui souligne combien les essais bien menés sont nécessaires en médecine. Voir LA.

Damien Barraud, c'est le médecin qui s'est opposé dès le début aux raoulteries et aux autres charlataneries perronno-douste-blazyennes, et qui a dû subir les assauts des hordes de débiles hors-la-loi éructant à Marseille comme à C-News, à France-Soir ou à RMC (ils se reconnaîtront).

Mais Damien Barraud, c'est aussi le médecin qui n'a pas commencé par Raoult et qui ne s'est pas arrêté à Raoult pour dénoncer les essais cliniques frauduleux, les prises en charge médicales non fondées sur les preuves (ils se reconnaîtront aussi) et l'exigence de toujours plus d'éléments de preuves pour décider de traiter.

Ce thread/fil montre combien le bon sens, les idées préconçues, la physiopathologie ou l'étiopathogénie, ne suffisent pas pour emporter l'adhésion sur un traitement qui n'a pas, selon les normes actuelles (bien dégradées) des essais cliniques contrôlés, montré son efficacité sur des critères validés.

Et, fait rare, il y a plus de morts dans le groupe flécaïnamide que dans le groupe placebo !




Phase I pour la transmission du Sars-CoV-19



183. Le problème de la sur prescription de fluoroquinolones n'est pas liée aux prescripteurs de fluoroquinolones (c'est du deuxième degré).

L'ANSM rapporte LA les règles de prescription des fluoroquinolones.

Il est probable, pour que l'ANSM s'en mêle, et pour que l'agence européenne (EMA) mette son grain de sel  (elle qui est d'une passivité déconcertante quand il s'agit de dénoncer les industriels qui la finance), qu'il s'est passé quelque chose.

Eh bien, les défenseurs du système, pour les fluoroquinolones, ont une stratégie un peu différente :

  1. Les fluoroquinolones sont des produits majeurs : il ne faut pas les interdire. On se demande qui aurait eu cette idée folle.
  2. On exagère.
  3. Moi, je les prescris toujours bien.
  4. Il n'est jamais bon de dénoncer les brebis galeuses.
  5. Il n'y a pas tant d'évènements indésirables que cela dus aux fluoroquinolones







184. Le problème de la marchandisation de la connaissance scientifique n'est pas liée aux marchands (c'est du deuxième degré).




Le problème de l'accès aux articles scientifiques est peu abordé sur ce blog mais largement développé par le blog Rédaction Médicale d'Hervé Maisonneuve : ICI.

L'atomisation des titres, le nombre de publications, la cherté des abonnements font que nombre d'étudiants, de thésards, de doctorants et autres rédacteurs d'articles ont beaucoup de mal à se procurer des articles gratuitement.

C'est interdit, donc, ne diffuser pas une méthode pour passer outre : LA.


185. Le problème des infections nosocomiales sera résolu en ne les déclarant pas (c'est du deuxième degré).

Un rapport de Santé publique France (voir LA) relate l'augmentation des infections nosocomiales en 2022 qui serait due au Covid.

Le fait majeur : les établissements de santé ne déclarent pas massivement les infections nosocomiales comme les événements indésirables liés aux médicaments.

Et là, on peut dire : Circulez, y a rien à voir.







186. L'oncologie en folie et le problème ne vient pas des oncologues (c'est du deuxième degré)






Et l'article est  LA


Clara Locher fait feu de tout bois






Et


For 21 years, novel cancer drugs have typically been approved based on one single, often uncontrolled, clinical trial, measuring surrogate endpoints. This leaves cancer patients without solid evidence that novel drugs improve their survival or QoL and there is no indication towards improvement.

C'est LA





187. Les conflits d'intérêts pour les nuls (c'est pas moi c'est les autres)


Le professeur Didier Dreyfus sur Youtube



188. Quand l'extrême-gauche participe au cirque macronien du dépeçage de la Santé publique




189. Quand les recommandations ne sont pas suivies : à propos des angioscanners pour suspicion d'embolie pulmonaire aux urgences


Voir ICI le thread/fil complet de @FreundYonathan qui vous explique que malgré les recommandations le nombre d'angioscanners demandés aux urgences explose sans qu'il n'y ait de diminution de la mortalité !


Conclusion : 




190. Le tiers des foyers ayant droit au RSA n'en profite pas (salauds de pauvres : c'est du deuxième degré)




Voir l'article de Libération LA


191. Nous n'avons pas parlé de La Tribune parue dans le journal Le Monde contre l'IHU de Marseille

Parce qu'elle nous a fait rire (c'est du premier degré).

C'est ICI.

Pourquoi nous a-t-elle fait rire ?

Juste le titre : "En l'absence de réaction des institutions, les graves manquements constatés pourraient être la norme." 

Hu hu hu : elles le sont (presque) déjà.

Cf. supra : 186.



lundi 25 octobre 2021

La France va mal (suite et pas fin)



Je vous avais parlé de la position peu enviable de la France concernant la consommation de tabac, d'alcool, de cannabis, de benzodiazépines et cetera : voir LA.

La grève des sages-femmes rappelle la (triste) situation de la gynécologie obstétrique en France en termes de résultats sur des données dures de santé publique. 

Sans oublier que le suivi des femmes s'est désormais complètement médicalisé et spécialisé.

Ce n'est pas de l'hospitalocentrisme, c'est du gynécologue-obstétricienno-centrisme

Avec, en France, des résultats très mitigés.

On rappelle qu'aux Pays-Bas, petit pays de 17,4 millions d'habitants connu pour son appartenance au tiers-monde, une femme sur six accouche à la maison (en France : 99 % à l'hôpital). Avec un taux de mortalité infantile de 3,46 pour 1000 naissances (contre 3,8 pour la France) et un taux de mortalité maternelle de 4 pour 100 000 naissances vivantes.

Quelques données sur les sages-femmes (ICI) : 

141 SF pour 100 000 femmes en âge de procréer.



Nbre de gynbos en activité : 5489 en 2020 (LA) : 



Comparaisons internationales


Quelques données supplémentaires sur les SF libérales avec des comparaisons avec d'autres pays : 

Répartition public/privé (LA) (Lena Blanchard) de 2016


Intéressons-nous à quelques indicateurs de santé publique.

La mortalité infantile

La France est à la dix-neuvième place sur les 27 pays de l'Union européenne pour la mortalité infantile (voir ICI) : 3,8 décès pour 1000 naissances (moyenne : 3,4). 

Evolution de la place de la France entre 1999 et 2009 : 


PS du 01/03/2022 : Augmentation significative de la mortalité infantile en France selon l'INSERM : LA et surtout ICI.

La mortalité maternelle en couche

La France est à la vingtième place sur les 27 pays de l'Union européenne pour la mortalité en couches (voir LA) : 4 pour 100 000 naissances. Mais pour index lundi à la seizième (LA)


Ces chiffres sont à prendre avec des pincettes vu le faible nombre de cas.

Le nombre de naissances prématurées 

La France est dixième !


Encore : 

La France est "bien placée" dans le pire pour le tabagisme pendant la grossesse et pour le nombre de mort subites du nourrisson.



Le nombre d'IVG

232 000 IVG en France en 2019, soit le taux le plus élevé depuis 30 ans. Voir LA

La France est au quatrième rang en Europe pour le nombre d'IVG (ratio pour 1000 femmes en âge de procréer) , et au troisième si on enlève la Russie... (voir LA)



Nous ne parlerons pas : 

Du problème de la contraception très pilulo-centrée.

Du nombre insuffisant de femmes qui pratiquent régulièrement le frottis du col utérin tous les 3 ans et les pratiques non recommandables des professionnels de santé dans ce domaine, c'est à dire le nombre de femmes qui pratiquent trop régulièrement les frottis du col utérin.

Du manque d'information des femmes sur le dépistage organisé du cancer du sein

Du nombre de mammographies sauvages (hors recommandations)

Du sur diagnostic et le sur traitement des 1) lésions du col utérin, 2) des lésions mammaires et du cancer in situ.

J'en oublie ? 

La France a médicalisé la procréation, je n'ai pas dit sur médicalisé, depuis la préconception jusqu'au post partum long (en oubliant les points cruciaux), avec des résultats lamentables...


dimanche 7 septembre 2014

Ma gynécologue est partie à la retraite : un problème ? Histoire de consultation 176.


Madame A, 37 ans, accompagne son père, hypertendu diabétique qui a du mal à se déplacer. Ce n'est pas "ma" patiente. Ou plutôt elle vient de loin en loin car "elle n'est jamais malade". D'un point de vue formel, je ne suis pas son médecin traitant alors que je "vois" ses enfants quand le pédiatre est indisponible mais je suis administrativement le médecin traitant de son mari que je connais depuis des lustres (35 ans).
Une fois que la consultation de son père est, presque, terminée...
"Docteurdu16, comment je vais faire parce que ma gynécologue est partie à la retraite ?
- C'est effectivement un problème, les gynécologues partent à la retraite et ceux et celles qui restent sont également proches de la retraite.
- C'est vraiment un problème. 
- Eh bien, vous avez... 37 ans (j'ai affiché son dossier à l'écran qui ne contient pas grand chose sinon un petit rhume et un gros rhume)... quel est votre intérêt d'aller voir une gynécologue ? Faire des frottis. C'est tout. J'ai vaguement vu qu'elle prenait une pilule estro-progestative de deuxième génération...
- Et ma pilule...
- Oui. Donc, on se résume, un frottis tous les trois ans et une prescription de pilule tous les ans. Si vous n'êtes pas malade entre deux, je crois que c'est faisable pour un cabinet de médecine générale."
Je repère un grand sentiment de solitude dans le regard de la patiente de 37 ans.
"Mais, Madame B, me faisait faire un frottis tous les ans et me donnait la pilule pour trois mois."
Oups.
Je tente avec difficulté de ne pas prendre mon air vindicatif, arrogant, excédé, donneur de leçon, défenseur des médecins généralistes, enfin, je prends mon air "naturel".
"Eh bien, je comprends pourquoi les gynécologues se disent débordées... Vous avez besoin, selon ce qui se dit en France et à l'étranger, d'un frottis tous les trois ans, d'ailleurs, j'aimerais que vous me rapportiez le dernier compte rendu de frottis, pour que je voie ce qu'il en est. Le frottis, vous pouvez le faire ici, au cabinet ou dans un laboratoire d'analyses médicales, vous avez le choix, mais aussi celui de trouver une ou un gynécologue. Quant à la prescription de pilule, ici, dans ce cabinet, c'est une fois par an.
- Ah... Et pour les mammographies ?
- Pardon ?
- Ben oui, la gynécologue m'a dit que je devrais bientôt faire une mammographie...
- Heu, y a-t-il des antécédents de cancer du sein dans votre famille ?...
- ... Non, je ne crois pas...
- Donc, en théorie, et sauf exceptions, le dépistage du cancer du sein par mammographie ne commence qu'à la cinquantaine... Et nous en reparlerons... lors d'un autre rendez-vous"

Bon, l'histoire est trop belle pour être vraie mais elle est vraie.
La disparition des gynécologues médicaux est une catastrophe car les frottis ne pourront plus être faits tous les ans, les pilules prescrites tous les trois mois et les mammographies hors procédures organisées tous les je ne sais combien...
Ainsi, le pourcentage de patientes chez qui un frottis n'est pas pratiqué dans les délais normaux est insuffisant, et la faute en incombe autant aux médecins traitants qu'aux gynécologues débordés, mais n'oublions pas non plus les patientes qui subissent des frottis en excès... de zèle. J'en avais déjà parlé ICI et avais développé de nombreux points.

Mais les partisans de gardasil / cervarix ont de bonnes nouvelles à annoncer : le taux de frottis a significativement diminué chez les patientes vaccinées vs non vaccinées en Australie (LA), ce qui signifie que les gynécologues seront moins débordés. C'était donc une plaisanterie sinistre à moins de croire par avance que gardasil / cervarix sont efficaces à 100 % contre le cancer du col.

Vous avez sans doute remarqué que je n'ai pas parlé des déserts médicaux...

PS. Mes chiffres de frottis ne sont pas bons selon les relevés de la CPAM (souvent fantaisistes). Je ne fais plus de frottis depuis longtemps en raison du fait, je l'ai déjà expliqué, que je suis un homme installé dans un "quartier" où les examens gynécologiques faits par des hommes non spécialistes sont très souvent refusés. Et cela m'ennuie d'essuyer des refus au petit bonheur...

(Image : Dubaï : ville et désert depuis presque le haut de la Burj Khalifa, 828 mètres. Photographie docteurdu16)

PS. Par une sorte de coïncidence, de corrélation ou de causalité (je laisse le débat ouvert) un certain nombre de blogs, dont celui du docteur Gécé (LA), de Dix Lunes (LA), de Farfadoc (ICI) et Sous La Blouse (LA) ont diffusé des textes et une affiche (faite par Sous La Blouse) que je reproduis ici qui parlent de la même chose ou presque que cette histoire de consultation 176.



samedi 10 mai 2014

Valeurs et préférences d'une patiente, la conne et la tête de gland.

  
Après qu'un ami twittos me l'a signalé, et on ne dira jamais assez combien les 140 caractères de twitter sont devenus importants pour la diffusion d'informations vraies ou fausses, peu importe, c'est à chacun de voir, je lis le billet de Solène (ICI). Ma lecture est faussée car l'ami twittos a fait un commentaire en proposant l'article.

Merci de lire le billet de Solène.

Maintenant que vous l'avez lu, que vous avez lu les commentaires et qu'éventuellement vous avez lu des tweets de commentaires, nous allons pouvoir en parler.
D'après ce que j'ai compris il y a plusieurs angles d'attaque : je passe sur le côté "tranche de vie", sur le côté "les patients ont bien le droit de dire ce qu'ils pensent", sur le côté "on dit encore du mal des médecins", sur le côté "les malades sont pris pour des demeurés", sur le côté "la critique est bonne mais le ton, le ton...", et cetera. Tout le monde a forcément raison.

Solène, vous avez eu raison d'écrire ce que vous aviez sur le coeur.
Il le fallait certainement pour vous mais aussi pour infomer les autres patients et les médecins qui exercent à l'hôpital ou dans les cliniques, voire dans des cabinets de médecine générale.

Je voulais vous dire ceci : quand je suis sorti de l'hôpital pour m'installer comme médecin généraliste, exactement fin juin 1979, j'en étais à la fois content et mécontent. Mécontent car j'avais raté l'internat de Paris et donc j'étais frustré de ne pas continuer à travailler dans l'Alma Mater au chaud dans les quelques certitudes que m'avaient procurées mes études (il n'était pas question à l'époque de nous inculquer la notion de doute) mais content d'échapper à la hiérarchie, à la vulgarité, au machisme, au népotisme, au je-m'en-foutisme, et, pour tout dire, au mépris du malade, sans compter les propos de salle de garde.

Eh bien, Solène, en lisant votre billet, je constate que, mutadis mutandis, rien n'a changé. Rien du tout.
L'hôpital est resté un machin sans âme, une machine aveugle, un système lourd, une institution faite pour les soignants, pour les administratifs, pour les plombiers, pour les jardiniers, pour les brancardiers, pour big pharma, pas pour les soignés, ces cochons de payants qui ont en plus l'arrogance de ne pas être bien portants et de se plaindre voire de s'organiser en collectifs, mais où, cerise sur le gâteau, les soignants, instruments institutionnels de la déshumanisation des soignés, sont désormais les victimes de leur propre regard déshumanisant puisqu'ils finissent par se manger entre eux avec l'assentiment froid des managers et des partisans de l'assainissement des finances publiques... La gestion privée du public est venue faire un tour par là, mais pire, la gestion des malades comme des animaux en batterie, comme des sujets numérotés, comme des esclaves de la science, comme des facteurs intermédiaires de la bonne conscience sociale, et tout le monde de penser que c'est moderne, que ceux qui sont contre cela sont des vieux réactionnaires de gauche et de droite, que le monde est en marche dans le concert mondialisant de la Grande Révolution Pharmaceutique mondiale passant par des génériques fabriqués en Chine, par des programmes de dépistage du cancer du sein dans des pays où il n'y a pas de quoi manger ou par des campagnes de vaccination dans des pays où il n'y a même pas de savon pour se laver les mains.
Ces grosses structures hospitalières, tout comme l'Education Nationale dont nous parlons souvent sur ce blog, sont des modèles de dysfonctionnement, des modèles d'inutilité fonctionnelle, des modèles de décervélation des acteurs, ce qu'avait si bien décrit Illich en son temps même si ses solutions n'étaient pas à la hauteur de son diagnostic (suppression des hôpitaux et de l'école).
Dans ces machines délirantes qu'avaient décrites par anticipation Gilles Deleuze et Félix Guattari (L'anti Oedipe) il y a donc des hommes et des femmes qui sont entraînés par le mouvement, des hommes et des femmes qui ne sont ni plus beaux ni plus moches que vous et moi, des hommes et des femmes qui se font broyer en broyant parfois les autres, qui participent à un cérémonial sans croyance, à une liturgie de la rentabilité, à un culte sans dieu, à un dogme qui prend l'économie pour la finalité de l'existence, l'homo economicus, des hommes et des femmes qui broient en se broyant et il y en a aussi quelques autres, des hommes et des femmes aussi, qui tentent de jouer en solo la carte de l'indépendance, de l'éloignement, du retrait, de la dissidence, en se comportant comme des humains, toutes choses égales par ailleurs pour ce qui est de la compétence ou de leur efficience, en tentant de protéger leurs patients et en se protégeant eux-mêmes mais qui ne peuvent que rater lamentablement puisque c'est le système qui dirige, un système aveugle, un système dirigé par lui-même, sans théorie du complot, un système 2.0 de l'acceptation passive et de la résignation collective.

La seule question, Solène, qu'il est loisible de se poser : est-ce que votre témoignage va servir à quelque chose ? Est-ce que l'interne, la conne comme vous l'avez appelée, est-ce que l'étudiant, la tête de gland comme vous l'avez baptisé, auront changé après qu'ils vous auront lu ? Mais vous auront-ils lue ?

Solène, permettez-moi de vous le dire, vous avez eu de la chance, vous avez été reçue par deux médecins, un médecin en formation qui vous a dit avec sa tête de gland, non mais, les médecins, écoutez, cela n'arrive pas tous les jours, prenez-en de la graine, "Bonjour, je suis étudiant en médecine, c’est moi qui vais m’occuper de vous aujourd’hui.", et l'autre, la conne qui vous a dit "Bonjour madame, je suis l’interne.", vous avez donc eu la chance d'être examinés par des médecins polis qui se sont présentés, on vous a même expliqué ce que l'on allait rechercher et ce qu'il était possible de faire comme constatation, vous avez eu de la chance de voir deux médecins et un échographe et un médecin qui a su lire sur l'écran et vous donner le diagnostic...

Certains ont été choqués par le ton (1) de votre billet mais on me dit que c'est le ton actuel, c'est comme cela, tout le monde parle (et écrit) comme cela, de nos jours, donc, vous avez été mal reçue mais vous, dans votre tête, vous les avez aussi mal reçus, les deux médecins, votre empathie n'a pas été à la hauteur de celle que vous attendiez d'eux, mais peut-être le sentaient-ils, non, je ne pardonne pas l'attitude stéréotypée de ces médecins institutionnels, mais, ce qui est amusant, c'est que vos commentaires, ceux que vous écrivez pour réagir aux commentaires de votre billet, eh bien, ils sont polis, bien écrits, sans gros mots...

Vous avez été choquée par le fait que la conne ait fait sortir Monsieur (mon homme) sans vous demander votre avis et sans lui demander le sien mais il me semble que c'est une coutume française que de faire sortir la famille lorsque l'on réalise des actes médicaux. Vous avez sans doute pensé que vous étiez la participante en vrai d'un feuilleton américain (Urgences, Grey Anatomy ou, mon favori, Doctor House) où la famille a le droit ou presque de tout voir. Il est amusant de constater que s'il s'était agi d'un accouchement on aurait intimé l'ordre au Monsieur de rester... (2)

Enfin, il y a le problème de l'annonce : "Bon, il y a une poche, mais elle est vide." Attention, on entre dans le tragique : quoi de plus horrible que d'entendre une phrase pareille alors que vous, Solène, aviez fantasmé grave (vous le dites plus loin : je l’ai vu courir dans le jardin, avoir du chocolat partout autour de la bouche, me regarder faire des gâteaux, sourire, dire ses premiers mots, faire ses premiers pas…) mais comment vouliez-vous que la conne vous l'annonçât ? Comment dire les choses autrement que ce qu'elles sont ? Il est vrai que la conne vous dit : "Ne pleurez pas madame, vous savez on ne l’a même pas vu à l’écho alors c’est comme s’il n’avait même jamais existé !".  Solène, vous étiez enceinte de six semaines. Ce que dit l'interne (arrêtons ces niaiseries, cette interne est aussi un être humain, elle lit peut-être Sandor Maraï ou Anaïs Nin, ou Philip Roth et Maurice Blanchot, elle a aussi un coeur, un uterus, que sais-je?) est frappé sur le coin du bon sens et fait aussi, à l'impossible nul n'est tenu, super post freudien à la mode. L'argument utilisé par l'interne est d'ailleurs fort, nul doute que nous n'hésiterions pas à le réutiliser en d'autres circonstances... Solène, vous trouvez pourtant que ces propos sont stupides. Pas tant que cela. Cette interne est formatée, elle peut, dans la même journée aux urgences, faire des échographies et dire que le bébé bouge, que le coeur du foetus bat, que la poche est vide ou... que le bébé est mort. Elle est confrontée, cette jeune femme que vous ne décrivez pas, aux fausses couches spontanées comme aux demandes d'interruption de grossesse... 

En vous lisant Solène, tous les médecins sont des cons ou des connes, l'externe, l'interne et l'hôpital, ça pue la mort et le désinfectant.
Solène, vous voudriez des médecins empathiques, des médecins qui vous connaissent avant même que de vous avoir vue, des médecins qui ne travailleraient pas dans des structures moches, qui sentent mauvais et... remplis de malades.
Vous avez raison : l'impression que vous avez eue de ces médecins formatés à l'inhumanité institutionnelle, n'est pas usurpée, nous qui avons fréquenté ces structures, qui en sommes sortis, nous y avons été confrontés, et, pour nombre d'entre nous, contraints ou forcés ou de notre propre gré, nous en avons fui. 
Il est clair que ce n'est pas à vous de faire la part entre ce qui revient à l'institution bicéphale elle-même, à la fois l'hôpital et la faculté de médecine, à la formation des médecins, à leur éducation, à leurs conceptions de la vie, à leurs préjugés, à leurs réflexions en amont sur la vie, à leurs lectures, à leurs capacités d'auto analyse, à leur ego, à leurs croyances, à leurs contre transfert, à l'image qu'ils veulent donner d'eux, à l'état de leurs courbes de vie intérieures, à leurs positionnements par rapport à leurs désirs d'enfants ou de grossesse -- pour la conne (i.e. l'interne), leurs conditions de naissance (non, je n'exagère pas, cela peut jouer),...
Ce que je veux vous dire, Solène, c'est que la situation que vous décrivez, et sans nul doute avec beaucoup d'exactitude, elle ne m'étonne pas.

Une note d'espoir ? Il est possible d'apprendre à annoncer, non parce qu'il existe des procédures désormais institutionnalisées, protocolisées, les fameuses consultations d'annonce, dont on me dit qu'elles vont être étendues à nombre de situations cliniques banales, l'annonce d'un cor au pied, mais parce que les jeunes médecins que vous avez vus, celui que j'étais avant ma sortie de l'hôpital (et j'ai honte de dire combien je ne savais rien à cette époque et, plus encore, que je ne savais pas qu'il pouvait y avoir des problèmes de ce type), ils vont apprendre, ils vont s'aguerrir, ils vont apprendre les vraies choses de la vie (et de la mort), tout seuls, en lisant des livres ou grâce au compagnonnage.

Voilà, Solène, je suis tellement content que les patient(e)s s'expriment, surtout quand ils disent du mal de l'institution hospitalière (je plaisante), qu'ils continuent à le faire pour, comme on dit aujourd'hui dans le langage énarchien convenu, bouger les lignes. Qu'ils parlent, qu'ils écrivent. Je ne sais si cela changera d'un iota la situation actuelle (dont mes collègues hospitaliers ne cessent de me dire qu'elle se dégrade de plus en plus) mais au moins les réactions passionnées que nous avons lues ici ou là pourraient faire avancer les choses dans le sens de la compréhension mutuelle (non, je ne suis pas converti au sentimentalisme ou au lyrisme). Que le corps médical (pas d'infirmières, pas d'aide-soignants, pas de secrétaires dans ce billet : Solène, voudriez-vous les exonérer de ce fiasco total ?) ne s'illusionne pas trop sur son rôle réel et sur sa perception en général dans le public et que les patients n'en demandent pas trop au système de santé qui, tel la plus belle fille du monde (mais personne, à part Patrick Pelloux, ne croit que les urgences françaises sont les plus belles du monde), ne peut que donner que ce qu'il a, c'est à dire de la sueur, des larmes, des joies aussi mais également des odeurs d'antiseptique et de choux farcis.

J'espère avoir compris une infime partie de vos valeurs et de vos préférences.





Notes

(1) Solène, vous faites sans doute partie des jeunes femmes qui pensent que la meilleure façon de s'émanciper du patriarcat et du machisme ambiant, c'est de parler comme un charretier, comme un mec qui regarde le foot à la télé en buvant des bières et en grignotant une pizza en se grattant les poils de torse (ou d'ailleurs), d'écrire putain à tous les coins de phrase, de traiter les gens de con, de conne ou de connasse à tout bout de clavier (je rappelle ici que putain, con et conne son dérivé ou connasse son super dérivé (au masculin : connard), sont des insultes qui désignent à la vindicte publique des femmes ou des organes de femmes, mais passons...). Ainsi Solène, voulez-vous nous épater en écrivant de façon ordurière pour dire avec emphase "Moi, on ne me la fait pas... je suis émancipée... J'ai le droit de parler comme je veux, je peux échapper aux convenances, faire un pas de côté pour m'extraire de la bien-pensance qui assigne aux femmes, fussent-elles féministes et libérées, une attitude correcte..." Dont acte. Chomski a écrit quelque part qu'utiliser les mots de l'adversaire c'est lui donner une légitimité qu'il ne mérite pas. J'ajouterai ceci : si être émancipée (et chacun a les droit de faire ce qu'il veut, veut, comme dit la chanson) c'est, pour une femme, se mettre dans la peau des hommes que je déteste (les beaufs, les kékés, les jackie), c'est à dire écrire comme ils parlent, je jette l'éponge.

(2) La conne (alias l'interne) a exigé sans demander, ce qui peut paraître un abus de pouvoir. Mais on peut envisager ceci : le corps d'une femme a une signification complexe, et même dans l'esprit de la conne (certes influencé de façon pavlovienne par l'institution bicéphale, le corps de la femme, fût-il sur médicalisé ou, comme dirait Marc Girard, simplement médicalisé), n'est pas un objet, pas plus que son uterus n'est pas une couveuse naturelle, est une machine à fantasmes et le Monsieur pourrait en avoir une idée différente que celui de l'idée médicalisée... S'agit-il de pudeur de la part de la conne ou d'impudeur de la part de Solène ? Le thème de l'homme qui doit assister à l'accouchement pour montrer son implication a déjà été discuté de nombreuses fois sur des blogs (dont ICI) ou sur des forums. Dans le cas précis il s'agit d'un acte médical avec une sonde dans le vagin et il est possible que la conne (voyez Solène comment parler vrai rend parfois le discours ridicule) n'assume pas ce qu'elle va peut-être découvrir et pense ne pas pouvoir se dépatouiller avec ce qu'il faudra dire ou, plutôt comment réagir (en tant que médecin conne, en tant que femme, en tant que futur mère ou déjà mère, et cetera) avec les réactions de la patiente et de son compagnon, ami, futur père ou futur ex père, quand la mauvaise nouvelle sera annoncée. De façon plus générale les actes médicaux ou les consultations sont le plus souvent, mais pas à l'hôpital, il faut en convenir, des actes singuliers et le déshabillage dans une salle d'examen est un acte violent qui n'a rien à voir avec le déshabillage dans une salle de bain ou dans une chambre à coucher cela devient, sans préparation, un acte collectif avec la patiente, la médecin (la conne) et l'étudiant médecin (le connard ou la tête de gland). Le médecin devrait théoriquement, et des affaires récentes nous ont montré le contraire, faire la part entre le corps médical de la patiente, son corps érotique et son corps sexuel (pour les différences, on me dit dans l'oreillette qu'une thèse est en cours de rédaction...), et itou pour le Monsieur. Imagine-t-on, donc, Monsieur venant se faire examiner les roucous, se faire mettre un doigt dans l'anus ou une sonde d'échographie pour évaluer sa prostate, pendant que Madame, sur injonction de la bien pensance machiste, doit assister à l'examen, pour être là ? Solène, qui est une femme libérée, n'imagine même pas que Monsieur (mon homme) puisse être gêné de voir sa femme, petite amie, compagne, maîtresse, copine,  en position gynécologique, une sonde dans le vagin et angoissée à l'idée que le saignement soit signe de mort foetale...


jeudi 12 décembre 2013

Le frottis cervical, nouvel indicateur pour le paiement à la performance mais toujours pas de dépistage organisé du cancer du col.


Hier, je vois Madame A, 40 ans,  patiente épisodique dont je suis le médecin traitant, qui me demande en fin de consultation (elle avait mal au genou et mon diagnostic : tendinite de la patte d'oie) si je peux  lui prescrire "sa" pilule parce que "sa" gynéco ne lui prescrit que pour six mois et qu'elle ne la voit que tous les ans.
"Vous la voyez tous les ans ?
- Oui.
- Et pourquoi donc ?
- Ben, pour me faire un frottis."
Oups.
Je m'enquiers du nom de la gynécologue et je me rends compte que, comme toutes les gynécos de mon coin (et d'un peu plus loin), elle est débordée ce qui signifie qu'elle donne des rendez-vous à trois, voire à quatre mois. Elle prend un supplément d'honoraires. Conséquent.
Je rappelle ici que la fréquence du frottis cervical selon ce qu'on peut lire ICI ou LA, c'est tous les trois ans à partir de 25 et encore moins après 65 ans.
Je rappelle donc à ma patiente quelle est la fréquence souhaitée des frottis et que l'on peut prescrire la pilule pour un an "Ma gynécologue ne veut pas", telle fut sa réaction.
C'est alors qu'elle me donne le nom de sa pilule : QLAIRA. Pilule que je ne connais ni des lèvres ni des dents. Je jette un oeil dans mon Vidal expert à 20 euro par mois (contre 0 avant le ROSP ou paiement à la performance), c'est une pilule contenant de l'estradiol naturel dont la Revue Prescrire (LA) me dit qu'on ne sait pas grand chose.
J'explique à la patiente, tout en regardant Internet, que je ne connais pas cette pilule. "C'est naturel… c'est plus écolo."
Mouais.
Je prescris donc Qlaira.
Silence sur la ligne.
J'ai prescrit.
Pendant que la patiente me parle de ses enfants, de son mari et de ses parents (tous patients du cabinet), je retourne quelques concepts dans ma tête.
En résumé :

  1. Je pèse le pour et le contre de cette pilule dont je ne connaissais pas grand chose
  2. Je me tâte pour ne pas prescrire au nom des sacro saints principes du paternalisme adapté au monde moderne : les patients ne connaissent rien et je suis le porte-parole de la science triomphante
  3. Je me rappelle que ne pas prescrire la pilule, c'est faire prendre des risque de grossesse non désirée à la femme
  4. Je pense à mon surmoi me disant que si des lecteurs de Prescrire étaient cachés derrière mon épaule (certains lecteurs de Prescrire, je veux dire) je me ferais plaquer au mur et renvoyer dans l'enfer des mauvais médecins suppôts de big pharma.
Je me dis in petto que ce n'est pas la première fois que je constate une fréquence anormale des frottis chez les génécoloques de mon coin et d'ailleurs (nombre des femmes inscrites au cabinet travaillent à La Défense ou près de la Gare Saint-Lazare et se font suivre là-bas) : les gynobs médicales ou les gynobs chirurgicaux (vous avez saisi la différence du genre des adjectifs ?) vont jusqu'à 2 anspour l'intervalle, mais 3, leur avis professionnel les contre-indique. En jetant un oeil sur les forums comme LA, on ne peut être que saisi par l'intelligence collective de la médecine 2.0 citoyenne : que d'énormités !

A ce propos je me fais des réflexions fines.
Le frottis vaginal comme outil de dépistage du cancer du col utérin est devenu un indicateur dans le ROSP (paiement à la performance des médecins généralistes ; mes taux ne sont pas fameux mais je ne sais vraiment pas si tous les frottis sont bien comptabilisés).
Mais le cancer du col de l'uterus ne fait pas l'objet d'un dépistage organisé comme celui du cancer du sein (dont vous êtes au courant, si vous lisez ce blog, des incertitudes et des méfaits). A ce propos le CNGOF (Collège National des Gynéco-ostétriciens Français) (ICI) est un franc partisan de la mammographie : voir LA.

Pourquoi n'y a-t-il pas de dépistage organisé du cancer du col utérin ?
Ah, j'oubliais le CNGOF, est à fond pour l'utilisation du Gardasil, vaccin censé prévenir les lésions pré cancéreuses du cancer du col utérin (page 4 dans ce document LA) et en profite pour citer Prescrire qui "fait le pari" de la vaccination. Prescrire utilisé par le CNOGF.
Pourquoi n'y a-t-il pas de dépistage organisé du cancer du col utérin ?
Mes explications sont les suivantes : 
Les médecins généralistes ne pratiquent pas assez de frottis (je n'en pratique jamais à mon cabinet n'ayant pas, à l'origine, été formé par la Faculté, mais ce n'est pas une excuse, mais mon associée les pratique) pour de multiples raisons qui tiennent, pour certains médecins de ma génération, au tout spécialiste qui régnait lors de notre installation, à une nomenclature vieillotte et sous valorisée et au manque de temps de consultation.  Les spécialistes pensent aussi, et ce sont les décideurs, ce sont eux qui influent sur les décisions ministérielles que les MG sont incapables de le faire et que les laboratoires d'analyse médicales sont dans le même métal.
Les gynéco-obstétriciens n'y sont pas favorables en raison (ce sont des hypothèses, j'imagine, farfelues) du fait qu'ils sont déjà débordés (et on l'a vu, en ne respectant pas, pour certains, la périodicité recommandée pour la pratique des frottis) et, je m'attends à une réplique par scuds irakiens (j'enfile mon masque à gaz et vais me réfugier à la cave), parce que les gynéco-obstétriciens verraient débarquer dans leur cabinet des citoyennes en bonne santé réclamant le tarif opposable de la sécurité sociale…

Post scriptum.

J'ai dénoncé nombre de positions historiques des gynéco-obstétriciens (ICI) qui relativisent leurs communiqués de presse actuels (en sachant qu'un ou une gynéco-obstétricien est un humain comme les autres et peut avoir raison en disant qu'il fait beau alors qu'il fait beau).
Je ne suis pas d'accord avec leur syndicat sur
  1. Les étriers.
  2. Le dépistage organisé du cancer du sein par mammographie
  3. La prescription des pilules de troisième et quatrième génération (bien qu'ils conviennent désormais que les prescriptions doivent être faites en deuxième intention)
  4. La prescription de Diane 35
  5. Le choix pro pilule versus autres moyens de contraception.
  6. La négation des troubles sexuels liés à la prise d'une contraception hormonale (nous y reviendrons à partir de cet abtract : ICI, je ne peux vous fournir l'article intégral en raison des droits)
  7. La vaccination par Gardasil (ou Cervarix)
  8. Leur engagement total dans la PMA ou la GPA.
  9. Leurs pratiques obstétricales de base : médicalisation de la pré conception, de la conception, de la grossesse, de l'accouchement, et ce qu'elle inclue sur la césarisation, la péridurale...

(Pablo Picasso 1881 - 1973 : Grand nu au fauteuil rouge, 1929)

jeudi 14 mars 2013

Gardasil pour toutes (et bientot pour tous) : Médecine par téléphone, médecine de couloir. Histoire de consultation 145.


George Papanicolaou was a Greek physician and anatomist in the United States (1883 - 1962).  Papanicolaou is the discoverer of "Pap Smear" or "Papanicolaou Smear", a life saving test, saving millions of lives of women around the world by early detecting the cancer of the cervix of uterus and other premalignant conditions of the female genital tract.
Sur le site ICI Tribute to George Papanicolaou

La secrétaire remplaçante me tend un papier : Madame A, 37 ans, voudrait que je prescrive le vaccin Gardasil pour sa fille de 13 ans.
Dans l'après-midi (HelloDoc déconne toujours autant et me rend nerveux malgré le fait que je revienne, rosé, de vacances) Madame A m'attend dans le couloir.
Je connais Madame A depuis l'âge de 5 ans et je l'appelle par son prénom.
Je lui dis ceci : "Pourquoi veux-tu que ta fille soit vaccinée par le Gardasil ?" Elle : "C'est ma gynécologue, en voyant l'âge de B, qui me l'a conseillé."
Je la regarde avec étonnement. "Ta gynécologue ?" Madame A est "ma" patiente (je suis son médecin traitant) mais elle n'est jamais malade. Elle vient consulter pour ses enfants. Rarement pour elle.
"Qui est ta gynécologue ? - Madame C. "
Je n'ai pas à faire la moue ou autre chose : toutes les gynécologues et tous les gynécologues (de mon coin) sont fabriqués dans le même métal, ils suivent les recommandations de Big Pharma avec un zèle sans partage. Il ont été dans tous les bons coups de Big Pharma (ICI). Ils continuent à être dans tous les bons coups de Big Pharma.
"Hum. Je crois, mais tu vas prendre rendez-vous avec ta fille, que je ne vais pas la vacciner. Je suis opposé à cette vaccination. Cela ne sert pas à grand chose. - Mais, ma gynécologue... - Madame C, si je me rappelle bien (et malgré la lenteur d'HelloDoc et son incroyable complexité mon cerveau lent et complexe se rappelle deux ou trois trucs concernant la patiente), elle t'a prescrit une pilule de troisième génération qu'elle a dû te changer en fonction des événements récents... - Exact. - Et, si je continue à bien me rappeler, je t'avais dit qu'elle aurait pu te prescrire autre chose. - Exact encore. - On va donc se voir avec B. Je vais lui expliquer tout cela. - J'ai déjà un rendez-vous avec vous samedi prochain. - C'est parfait."
Madame A est debout devant moi dans le couloir du cabinet, entre le secrétariat et la salle d'attente. J'ai parlé bas. Elle finit par me dire :"Je vois avec la secrétaire pour le rendez-vous. Merci de m'avoir conseillée."
Je fais entrer la malade suivante dans le cabinet qui n'a pas fini de s'asseoir qu'elle me dit : "Je vous ai entendu. Il faudra que l'on parle de ma fille car l'infirmière du collège a recommandé aux enfants de se faire vacciner contre le cancer du col."

Leçons ?
Demander des ordonnances par téléphone peut être dangereux.
Parler dans un couloir peut être efficace.
Le manque de confidentialité peut avoir des effets collatéraux.
La médecine scolaire est aussi le bras armé de Big Pharma.
Tout comme les PMI sont généralement le bras armé de Infovac (LA).

Et, bien entendu, si vous voulez un point complet sur Gardasil : lire CMT ICI.
Ou la video réalisée par l'URML de La réunion sur Gardasil : LA.


lundi 17 décembre 2012

Faut-il revoir les règles de prescription de la pilule estro-progestative ?


Une affaire récente rapportée par le journal Le Monde (ICI) indique qu'il existe des événements indésirables graves liés à la prise de la pilule estro/progestative (E / P).
Non, non, je ne plaisante pas, l'innocuité de la pilule n'est pas totale.
Vous allez me dire : tout le monde le sait. Et je vous répondrai : Tout le monde le sait mais personne ne le dit vraiment.
Le pape non académique de la contraception, je veux dire le docteur Marc Zaffran (MZ), a des avis arrêtés sur la question et vous pouvez les consulter ICI.  Je cite toutefois le titre : "Pour prendre la pilule, examen gynécologique, examen des seins et prise de sang ne sont pas nécessaires..." et il ajoute, sans doute par provocation, "... et le Conseil National de l'Ordre des médecins est d'accord."
Je dois dire que cette position, qui n'est pas nouvelle, a dû rendre service à nombre de médecins feignants et... féministes, dans la mesure où cela leur permettait de banaliser la prescription contraceptive hormonale afin de ne pas rendre les femmes coupables de la moindre chose parce qu'on les aurait examinées ou parce qu'on leur aurait posé des questions indiscrètes, ce qui, pour prescrire un  produit sans danger, pouvait à l'évidence, paraître très intrusif.
MZ ajoute, et il cite l'OMS, que la seule chose à faire avant de prescrire la pilule est de mesurer la pression artérielle. Des données de médecine générale (ICI) indiquent que la prévalence de l'HTA féminine est de 1,23 % entre 16 et 39 ans (et probablement beaucoup moins à l'âge de la primoprescription de la pilule). D'autres données (LA) indiquent chez la femme une prévalence de 4,1 % entre 18 et 34 ans mais avec des critères d'HTA plus larges.
Bon, ben le problème est réglé : la pilule, c'est sûr. 
C'est d'ailleurs ce que pense Joëlle Brunerie Kauffmann dans des propos rapportés par Libération le 11/04/99 (un autre siècle, sans doute) et que je cite en deuxième main à partir d'un texte de Marc Girard (LA) : "Les pilules n'ont aucun effet secondaire." Elle veut probablement dire, mais rien n'est moins sûr, aucun effet secondaire grave en respectant les contre-indications... Non, elle veut dire aucun effet indésirable du tout. Dans des entretiens accordés sur France-Culture, ICI, elle ne change rien même si, poussée par la journaliste hagiographe qui l'interroge, elle dit que, bien sûr, les problèmes de libido, bien exagérés, ça peut exister mais que ce n'est rien par rapport à la vie sexuelle épanouie que procure la contraception (sous entendu : et que nos mères ignoraient, la vie sexuelle épanouie). Je veux bien.
Les propos rassurants de MZ et les propos lénifiants de JBK vont dans le sens de la fameuse chanson d'Antoine (que les moins de 50 ans ne peuvent pas connaître), Les Elucubrations.
Oh, Yeah !
J'ai reçu une lettre de la Présidence
Me demandant, Antoine, vous avez du bon sens,
Comment faire pour enrichir le pays ?
Mettez la pilule en vente dans les Monoprix.
(Voir la video à partir de 3' pour le couplet.)
Mais je m'égare. Pourquoi, puisque la pilule ne présente AUCUN risque, ne la vend-on pas dans les grandes surfaces ? Il suffirait de remplir auparavant un questionnaire sur Internet et se faire prendre la PA sur son smartphone.

Le cas de cette jeune femme est une rareté, une exceptionnalité, me direz-vous. Mais comment savoir vraiment ?
Au delà du type de pilule prescrit et nous ne saurions trop conseiller de ne prescrire ou de ne se faire prescrire que des pilules de deuxième génération, laissant pour l'exception celles de troisième et pour les cas d'espèce (des actions Bayer) celles de la quatrième, il est nécessaire de revenir aux contre-indications formelles et/ ou relatives de la pilule E / P que vous trouverez LA, notamment page 17 d'un document de l'HAS. 

Néanmoins, il est possible d’indiquer qu’un âge35 ans ou une obésité ou une consommation excessive de cigarettes (15/j) ou un antécédent de migraine sans signe neurologique focal ne constituent pas individuellement (en l’absence de cumul des facteurs de risque) une CI à une contraception œstroprogestative.

En revanche, constituent une CI à la contraception œstroprogestative :. l’association des facteurs précédents entre eux (notamment « âge 35 ans + consommation de cigarettes ») ;
. la présence, même isolée, d’un facteur de risque parmi les suivants :
  • –  migraine avec signes neurologiques focaux11, ou lorsqu’elle apparaît ou
    s’aggrave sous traitement (antécédent ou épisode en cours),
  • –  HT A (antécédent12 ou épisode en cours),
  • –  diabète avec complications vasculaires éventuellement associées
    (rétinopathie, néphropathie, neuropathie, etc.),
  • –  dyslipidémie. 


C'est quand même assez flou pour la prescription d'un non médicament (la pilule E / P ne "guérit" rien) qui est administré à des millions de femmes en bonne santé.

Mais préoccupons-nous d'un problème particulier, celle de cette jeune femme qui a fait un AVC en présentant une mutation liée à la thrombophilie.

Un document de l'HAS (LA) définit la fréquence et souligne que ce n'est pas remboursé.

La thrombophilie désigne les anomalies de l’hémostase prédisposant aux thromboses ou la tendance clinique aux thromboses (thromboses veineuses profondes et embolies pulmonaires). Ces anomalies peuvent être liées à la présence de certaines mutations, telles que FV Leiden et FII 20210G>A. La prévalence de la mutation FV Leiden dans la population est en moyenne de 3 à 5 %, celle de la mutation FII 20210G>A est estimée entre 2 et 4 %. Trois actes de biologie permettent de les reconnaître et contribuent au classement des patients par niveaux de risque de thrombose. 


Faut-il changer les choses ? Car le risque d'événements indésirables graves semble ainsi plus important que dans le cas d'une élévation modérée de la pression artérielle. Mais la prise de la PA est gratuite... 

Ainsi, nos experts signalent les risques dont la recherche est remboursée par l'Assurance Maladie mais pas ceux, aussi, voire plus fréquents, dont la recherche est trop onéreuse mais dont les conséquences sont gravissimes.

A moins, bien entendu, que les experts, dont le célèbre Israël Nisand (IN), comme lors d'un entretien sur Europe 1 (ICI) (à partir de 5'30), ne reprennent les arguments suivants (qui rappellent étrangement ceux utilisés par les vaccinologues et les pharmacovigilants pour grippe et Guillain-Barré, à savoir que la vaccination anti grippale protègerait de la maladie de Guillain-Barré...) qui sont aussi ceux de l'Académie Canadienne de gynéco-obstétrique (voir LA à la page 1200) en 2010 (où l'on voit que ce que je disais à propos des gynécologues français (ICI), peut être étendu au Nouveau Monde, Nouveau Monde qui a réagi avant pour le distilbène et / ou le THS - Traitement hormonal Substitutif de la ménopause) :

Les contraceptifs hormonaux entraînent la hausse du risque de TEV au-delà du taux de fond (de 5/10 000 femmes-années chez les non-utilisatrices8 à 9–10/10 000 femmes-années chez les utilisatrices9).
Pour replacer les risques de TEV chez les utilisatrices de CO dans leur contexte, il est important de ne pas perdre de vue que le risque de TEV pendant la grossesse peut atteindre 29/10 0009,10 et que, pendant la période péripartum, on a signalé que ce risque pouvait atteindre pas moins de 300–400/10 0006,7. Faisant partie des modes de contraception les plus vastement utilisés et les plus efficaces, les CO entraînent la baisse des taux de grossesse non souhaitée et abaissent en fait le taux global de TEV au sein de la population, par comparaison avec les taux constatés au sein des populations n’ayant pas accès à une contraception efficace11


Je suis sur les fesses.
Et ce document canadien, en sa conclusion, ne fait aucune différence entre les différents types de pilules, ce qui montre que son objet est non seulement d'innocenter le risque thrombo-embolique de la pilule mais de favoriser la modernité des pilules de nouvelles générations dont on voit maintenant quelles font plus de mal que de bien.
Que faire en pratique ? Continuer de clamer avec MZ, JBK et IN que la pilule est sans effets indésirables ou qu'il vaut mieux prendre la pilule que d'être enceinte ?
Il est vrai que l' HAS dans un document déjà cité (LA) ne conseille pas de bilan de la coagulation avant la prise d'un contraceptif E / P, donc, comme dit l'autre, si on fait de la médecine défensive (juridique), le prescripteur se retrouve blanc bleu dans l'affaire. Et c'est bien la première fois que faire de la médecine défensive signifie pratiquer moins d'examens complémentaires (LA).

Je n'ai bien entendu abordé, à propos d'un cas, que les éventuels problèmes posés par la contraception E / P chez la toute jeune fille. Je n'ai pas encore parlé du reste. Cela viendra peut-être. Rappelons quand même, en passant, que le tabagisme multiplie par dix le risque thrombo-embolique.

(Antoine - Les élucubrations - 1966)

PS - Sylvain Mimoun, qui ne déclare pas ses liens d'intérêt, vient au secours des pilules de troisième génération ICI. Peut-on le comparer à Bruno Lina ?
PS 2 (du 20/12/12) - Les recommandations du Vidal en ligne sur la contraception posent beaucoup de questions. Voir LA.