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mercredi 29 décembre 2010

LE PROFESSEUR PHILIPPE EVEN NE MANQUE PAS DE CULOT !

Saint Paul sur le Chemin de Damas (Gustave Doré)

Hier, dans l'émission C dans l'air que vous pouvez voir ou revoir ici, le professeur Philippe Even s'est montré d'une étrange virulence, s'est dévoilé comme le champion de la vérité, s'est révélé le champion de la transparence, s'est présenté comme le redresseur de torts, s'est élevé au rang de pourfendeur des copains et des coquins...
Quelle mouche l'a donc piqué sinon de se mettre en avant, sinon de faire le malin, sinon d'être le nouveau chevalier blanc d'une cause qu'il aurait ignorée toute sa vie ? Il a aussi dit quelques âneries (il n'a pas eu le temps de relire ses fiches), nous y reviendrons peut-être si nous en avons le temps... Mais il en a dit tellement auparavant...
On remarque d'abord que son discours, d'abord prudent il y a quelques semaines, y compris dans la même émission, s'est "gauchi", comme si, lassé de l'anonymat de la retraite dorée d'un ponte de l'Université française, il avait envie, au soir de sa vie, de briller à nouveau sous les sunlights et de reprendre la casquette du "grand" chercheur qu'il ne fut pas.
Monsieur le professeur Even feint d'oublier deux ou trois choses : il fut un mandarin de la pire espèce et les témoignages concordent pour dire combien il était autoritaire, cassant et incontrôlable quand il était chef de service ; il fut un membre éminent de l'Agence du médicament (l'ancêtre de l'Afssaps) et jamais il ne rua dans les brancards sinon pour étaler son mauvais caractère ; il toucha l'argent de Big Pharma pendant des années sans qu'il ne levât un sourcil ; il prescrivit du kenacort à tire-larigot alors que les justifications scientifiques étaient peu évidentes ; il tint le 29 octobre 1985 une conférence de presse avec Georgina Dufoix, la fameuse, pour annoncer, dans les locaux du Ministère des Affaires Sociales, qu'il avait découvert le traitement du sida avant les Américains (les malades décédèrent malheureusement dans les jours suivants) : ici ; et l'on aimerait qu'il nous produisît son bulletin d'abonnement à Prescrire...

Cela dit, chacun peut rencontrer Dieu sur le chemin de Damas.

Nous ne pouvons que nous incliner quand la vérité descend sur les innocents. Et ainsi le grand professeur Philippe Even, ex, ex, ex, analyse désormais en expert les dysfonctionnements de l'appareil d'Etat.
Il parle, à propos de l'Afssaps d'incompétence, de corruption active et de corruption passive. C'est Saint-Jean Bouche d'Or : je me rappelle lorsque le président de la commission d'AMM avait une maîtresse qui travaillait dans l'industrie (Big Pharma) et quand son successeur avait sa femme qui travaillait dans un autre laboratoire...
Il propose, comme une boutade, la nomination d'Irène Frachon, la pneumologue brestoise, comme directeur de l'Afssaps, mais son combat pour ses malades ne la rend pas, voir ses déclarations, plus compétente en pharmaco-épidémiologie qu'un directeur général de l'Afssaps. Irène Frachon s'est effectivement battue mais dire qu'elle a eu le soutien du service de pneumologie de l'Hôpital Antoine Béclère de Clamart est une vaste fumisterie : il semblerait même qu'au début on lui ait mis des bâtons dans les roues. En revanche, le professeur Even a raison de dire qu'elle ne s'est pas arrêtée en chemin comme d'autre qu'il a cité pendant l'émission et qui n'était pas étranger à certaine revue qui ne se trompe jamais.
Il regrette que les directeurs de l'Afssaps soient des hauts fonctionnaires non médecins, c'est comme cela que cela se passe en France, dit-il, mais on n'a pas été très frappés par la compétence des médecins professeurs mis à la tête de la Direction Générale de la Santé, jadis Lucien Abenhaïm, aujourd'hui Didier Houssin... ou du Ministère de la Santé (JF Mattéi, l'homme des chemisettes caniculaires).
Il parle de l'insuffisance de formation des médecins en pharmacologie clinique (20 heures de thérapeutique en six ans d'études -sic). Pourquoi n'a-t-il rien fait quand il était doyen de la Faculté de Médecine de Necker Enfants Malades (pendant douze ans !) ?
Il parle de l'incompétence de la pharmacovigilance française qui serait passée à côté du vioxx (30 000 décès aux EU d'Amérique) mais pourquoi ne parle-t-il pas du fait que les médecins français, et depuis longtemps, sont les champions du monde de la non déclaration d'événements indésirables ?
Il parle du fait que la Revue Prescrire ne se serait jamais trompée... Outre le fait que c'est obligatoirement faux, pourquoi ne nous dit-il pas en quelle année il s'est abonné ?
Il dit que la mortalité a considérablement baissé en France ces dernières années grâce à l'industrie pharmaceutique alors que tout le monde sait que c'est faux et que les grandes baisses de morbi-mortalité en infectiologie comme dans le domaine cardiovasculaire sont liées aux conditions d'hygiène plus qu'à l'introduction de nouvelles molécules.
Il prétend que le diagnostic des maladies ne pose plus aucun problème grâce à la multiplicité des examens complémentaires alors que, justement, le problème central de la médecine moderne c'est la détermination des diagnostics, c'est à dire d'éviter le risque de sur diagnostics (cancer du sein), de faire le diagnostic à bon escient (cancer de la prostate) et de ne pas faire du disease mongering (faire de patients non encore malades des malades en puissance et à traiter).
Non, notre ami le bon professeur Even, parle trop et à contre-temps.
Il sait tout mais trop tard. Ce n'est pas un professeur de pneumologie mais un anatomo-pathologiste : il fait le diagnostic post mortem alors que c'était avant qu'il fallait sauver le malade.
Comme le disait Warhol, chacun peut avoir son quart d'heure de gloire, espérons que Philippe Even qui n'a plus rien à perdre, continuera en si bon chemin : il ne sert à rien d'espérer pour entreprendre ni de réussir pour persévérer.
A moins qu'il n'ait déjà atteint depuis longtemps son niveau d'incompétence maximale.