Un rapport de l'IGAS datant d'octobre 2015 traite du sujet des directives anticipées (ICI). Quelqu'un a attiré mon attention sur le sujet sur twitter. C'est pourquoi je vous en parle.
L’article 8 de la proposition de loi "créant de nouveaux droits en faveur des malades et des
personnes en fin de vie" prévoit que toute personne majeure peut rédiger des directives anticipées
pour le cas où elle serait un jour hors d’état d’exprimer sa volonté et que ces directives sont
conservées sur un registre national ».
Je ne suis pas un spécialiste du sujet (et, comme dirait l'autre, cela va se voir) mais j'ai déjà écrit ICI sur le sujet.
L'IGAS propose que les directives anticipées soient incluses dans le Dossier Médical Partagé.
Pour ce qui est de la gestion du registre, après expertise des différents opérateurs possibles la
mission considère, qu’après un complément d’analyse juridique, technique et médicale qui pourrait
être confié conjointement à la CNAMTS et à l’ASIP-Santé, que le futur Dossier Médical Partagé
(DMP) prévu dans le projet de loi de modernisation du système de santé devienne le lieu de
conservation des directives anticipées. Son déploiement dans un délai de 18 mois à 2 ans est tout à
fait compatible avec la loi, qui précise que le registre n’est qu’un des moyens de conservation.
Le Dossier Médical Partagé est un vieux serpent de mer bureaucratique (je ne suis toujours pas spécialiste de ce truc) pour lequel je suis très sceptique pour une raison anecdotique qui s'appelle le droit à l'oubli et pour une raison essentielle qui se nomme la déliquescence professionnelle et sociétale du secret médical.
Le DMP ne devrait comporter que quelques informations, à savoir les intolérances aux médicaments, éventuellement le traitement en cours. Rien d'autre. C'est déjà pas mal. Et peut-être déjà trop.
Pour les directives anticipées, voici quelques remarques générales qui pourront passer pour des truismes mais enfiler les perles de l'évidence peut avoir un certain intérêt :
- Mes directives anticipées : je désigne une personne de confiance (voir ICI), une personne qui me connaît, une personne avec qui j'ai discuté cent fois de ce problème, pour moi, pour les autres, pour des patients, pour des amis, une personne qui connaît mes incertitudes, mes certitudes, mes hésitations, mes partis-pris, mes faiblesses, mes lâchetés... Et cetera. Elle se reconnaîtra.
- A qui appartient la fin de vie, la mort et... la vie après la mort ? Il y a grosso modo deux conceptions mais avec d'énormes divisions de la conscience.
- La première conception est celle-ci : il faut coûte que coûte respecter les dernières volontés de celui qui va mourir. C'est la conception kundérienne : la fin de vie, la mort et la vie après la mort appartiennent à celui qui va mourir et ceux qui ne respectent pas ses volontés sont des traîtres. Pour mieux connaître ce point de vue, lire Les testaments trahis, un essai de Milan Kundera qui en dit plus que de nombreux traités spécialisés et qui, à mon sens, est un des plus grands livres du vingtième siècle. Pour alimenter ce point de vue et pour en dénoncer son non respect Kundera parle, entre autres, de Max Brod, l'ami de Kafka, qui, contrairement à ce que lui avait demandé son ami, n'a pas détruit une grande partie de son oeuvre, qu'il a au contraire publiée (ce qui a fait la postérité du Praguois) et qui l'a encore plus trahi en rendant Kafka semblable aux personnages de ses romans, c'est à dire en mentant sur la vraie personnalité de son ami.
- La deuxième conception (mais il est possible qu'il y ait autant de positions intermédiaires que d'individus -- encore que Kundera ait écrit : il y a moins d'idées que d'hommes) et aussi la moins populaire et la moins avouable : les gens qui vont mourir, les morts, la postérité des morts, appartiennent aux vivants, c'est à dire à ceux qui survivent (j'avais traité le sujet LA), c'est donc à eux de décider. Je rappelle Montaigne : "Les Essais (I,3), citant Saint Augustin (Cité de Dieu, I,12) : "Le service des funérailles, le choix de la sépulture, la pompe des obsèques sont plus une consolation pour les vivants qu'un secours pour les morts.""
Alphonse Allais |
En réalité, le problème de la fin de vie est éminemment un problème sociétal (je sais, quand on a dit cela, on a tout et rien dit, mais, ne vous inquiétez pas, je ne vais pas proposer une réflexion citoyenne...) et se rattache à de nombreux thèmes qui courent dans ce blog : hédonisme, droit de ne pas souffrir, immortalité, sur traitement, valeurs et préférences des patients. J'ai oublié quelque chose ?
Et les paradoxes ne manquent pas.
Il est impossible à mon sens de parler de directives anticipées sans aborder le problème de l'acharnement thérapeutique voulu par certaines familles (traitements de troisième ligne sans aucun intérêt pratique) qui seront ensuite les premières (ou non) à prôner le "débranchement".
Impossible de parler des directives anticipées sans s'occuper de ce qui se passe avant le moment où le patient ne peut faire de choix.
Impossible de parler des directives anticipées sans parler du comportement discrétionnaire des équipes soignantes (voir LA)... Il semblerait qu'il existe des consensus locaux, des endroits où on fait ça et d'autres ou on fait ceci, indépendamment du patient et de la famille.
Impossible de parler des directives anticipées sans parler des problèmes familiaux que cela entraîne et surtout si une personne de confiance a été désignée.
Impossible de parler des directives anticipées sans évoquer des expériences nombreuses qu'ont les soignants et les familles des changements d'avis de leurs proches ou de leurs patients au cours du temps.
Rien n'est gravé dans le marbre (et encore moins dans le DMP).
En réalité, les incertitudes concernant les directives anticipées, et il semble d'après l'association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD ; LA), j'élargis le sujet, que 95 % des Français interrogés (sondage IFOP de 2014) seraient favorables à une loi que propose l'ADMD (et le sondage a dû être proposé par l'ADMD), je cite, visant à légaliser l’euthanasie et le suicide assisté et à assurer un accès universel aux soins palliatifs, d'où viennent-elles ?
C'est sans doute qu'il existe des points à éclaircir. Je conçois que j'obscurcis le sujet en étendant mon propos.
Je suis incapable dire ce que je ferai quand les choses se présenteront car, n'en doutons pas, les directives anticipées n'anticipent en rien la décision que peut prendre un patient de mettre fin à ses jours pour abréger ses souffrances avant qu'il ne devienne incapable de décider. Contre l'avis du corps médical, par exemple ; contre l'avis de sa famille ; ou d'une partie de sa famille.
Pendant que j'écrivais ce billet je suis sorti prendre l'air et j'ai vu un monsieur d'une cinquantaine d'années qui accompagnait son (vieux) père manifestement dément dans les rues de Versailles : faudra-t-il que j'écrive dans mes directives anticipées qui seront intégrées à mon DMP que j'autorise "ma" personne de confiance à m'euthanasier en ce cas ne voulant ni embêter tout le monde ni me représenter en dément marchant dans les rues de Versailles ?
Voici ce que propose l'ADMP pour le point précis des directives anticipées : LA.
Je lis le document avec attention et notamment ceci :
JE DEMANDE :
qu’on n’entreprenne ni ne poursuive les actes de prévention, d’investigation ou de soins qui n’auraient pour seul effet que la prolongation artificielle de ma vie (art L.1110-5 du code de la santé publique), y compris pour les affections intercurrentes.
que l’on soulage efficacement mes souffrances même si cela a pour effet secondaire d’abréger ma vie (art L. 1110-5 du code de la santé publique).
que si je suis dans un état pathologique incurable et que je suis dans des souffrances intolérables, je puisse bénéficier d’une sédation terminale, comme l’autorise l’article L. 1110-5 du code de la santé publique.
que s’il n’existe aucun espoir de retour à une vie consciente et autonome, l’on me procure une mort rapide et douce.
qu’on n’entreprenne ni ne poursuive les actes de prévention, d’investigation ou de soins qui n’auraient pour seul effet que la prolongation artificielle de ma vie (art L.1110-5 du code de la santé publique), y compris pour les affections intercurrentes.
que l’on soulage efficacement mes souffrances même si cela a pour effet secondaire d’abréger ma vie (art L. 1110-5 du code de la santé publique).
que si je suis dans un état pathologique incurable et que je suis dans des souffrances intolérables, je puisse bénéficier d’une sédation terminale, comme l’autorise l’article L. 1110-5 du code de la santé publique.
que s’il n’existe aucun espoir de retour à une vie consciente et autonome, l’on me procure une mort rapide et douce.
Y a-t-il quelque chose de choquant ?
Faut-il une loi pour cela ?
Finalement, ce qui me terrifie vraiment, lisant ce que je viens de lire, ce serait que l'on me désignât comme personne de confiance. J'en serais paralysé. On voit où est le problème.
4 commentaires:
Je suis sur que la personne qui a attiré votre attention va être satisfaite du résultat.
J'aurai une terrible angoisse d'être la personne de confiance de quelqu'un. J'ai tellement de difficulté à me faire confiance, comment alors imaginer qu'on puisse me faire confiance.
Concernant Kafka, on peut être satisfait que Brod n'est pas écouté son ami, on accepte ainsi mieux le caviardage de la correspondance. Ce qui montre bien d'ailleurs qu'on ne peut faire confiance à personne.
Je vois une très grosse différence entre celui qui va mourir et celui qui est mort.
Il me semble que c'est la moindre des choses de respecter la volonté de celui qui va mourir, puisque par définition il n'est pas mort.
Ce qu'on fait de son corps et de sa postérité après, c'est une autre histoire, puisqu'il n'y est plus pour en souffrir.
Que, du coup, au moins pour les enterrements et les tombes, on fasse comme les vivants le veulent, je trouve en effet ça très logique, les pierres tombales et les fleurs sont là pour eux.
Bonsoir,
je vous cite: "visant à légaliser l’euthanasie et le suicide assisté et à assurer un accès universel aux soins palliatifs" c'est un dispositif qui peut être trés fangerux avec le résulat inverse que prévu. Là, les gens parlent de ceux qui VEULENT CHOISIR de leur fin d evie, mais qui dira pas qu'un jour (prochain m^me) que l'Etat ou / la Société ATTENDRA que les gens âgés ou maldes ou handicapés DOIVENT prendre de fin de vie rapide car leur SURvie est trop coûteuse à l'état ou / et la Société sans un retour sous forme de GAins pour l'ètat et / ou la Société. Cette idée ne vient pas d emoi, mais d'une femme écrivain qui a écrit un livre sur le droit de mourir, l'euthansaie et quen Hollande les gens ont un papier sur euc, de plus en plus, ou est inscruit qu'ils refusent le droite à l'euthanasie. Selon, ce livre, certains médecins traitant déciden d'eux.même de diminuer ou d'oter complètement le traitement d eleur patient agé mais bine portantt (pas invalide) et qui sohaite d evivre. Sauf sans médicamnet (je cite le sexemple du diabté, de la tension) vont mourir assez rapidment, alors qu'ils ne le l'ont ni demander, ni souhaiter.
Puis, qu'entend-t-on par acharnement therapeutique, par la mßedcine appareillage? je pense que la majorité pense à les gens dan sle coma, brancher à une machine qui respire pour eux, une autre qui les alimente. Mais, par exemple, quand est-il du rein artificiel? C#est aussi une medécien d'appareil, peut-on pour autant dire d'un acharnement médical? Ce qui est sur sans , les personnes conscernées meurent.
Aussi, la personnepeut chnager son avis en cours des années, de son expérience d evie et une fois dans un registre, une erreur de PC, et l'inverse de ce qu'elle a voulu se passe. Helàs, trop tard pour y revenir.
En Allemagne, on peut faire un papier soi-même (mais C#est atatcable) ou passer devnat notaire avec une procuration qui peut être partielle ou complète. Ma Mère l'afait, la complète comporte la calsue sur le dossire médical avec inscription d erefus d'acharnement therapeutique et qu'en cas cas d'impossiblité de s'exprimer c'est à moi d'en décider. La personne inscrite a malgré tout, la possiblité d erefuser cetet charge. Le probleme vient plutôt dum milieu médcila qui selon, l'établissment, accepte ce document ou non (etant un acte notariel!), presenté lors de chaque horpitalisation.
Je pense que le débat sur la fin de vie digne, l'euthansaie n'est pas compléte. Les gens ne discute que sur un point, sans y rechlechir d ela boite de PAndore qu'on ouvre!
Quand au soins palaitif, c'est aussi un beau mensonge. Ma mére s'y trouva et une infirmière me dit qu'eux sont là pour les Malades (für Kranke da) , mais pas pour les gens qui necessitent des soins (für Pflegebedürftige)! De n'importe quel service, j'aurais accepté cetet remarque, mais pas du paliatif! Il existe une mafai des soins où sous le couvert de soigner les gens, les entreprise (cer ce n'est plus cela) penset qu'à À leur chiffre d'Affaire au mérpis complète des malades.
Cela est mon humble avis et n'engage que moi!
Bonne soirée
Quelles absurdités on peut lire au quotidien...
Je sais que l'article n'a pas de rapport avec ce que je publie ci-dessous mais qu'il peut exister, du côté de l'ombre, une relation entre ci et ça, ne serait-ce minime soit-elle :
http://blog.gerardmaudrux.lequotidiendumedecin.fr/2016/03/16/syndicats-3-les-conflits-dinterets/
À bon entendeur
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